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La formation des agents

Dans le document Sécurité privée et Libertés (Page 134-138)

Titre II : La préservation des libertés par la professionnalisation de la sécurité privée

B. La formation des agents

Latour, l’absence de cohérence dans les offres de formation accessibles à la VAE fait orienter des individus disposant d’un niveau inférieur ou équivalent au BAC pro vers la licence (BAC+3) alors que la logique voudrait qu’ils passent d’abord l’étape du BAC+2521.

B. La formation des agents

Selon le Ministre de l’Intérieur lors des Assises de la sécurité privée devant les professionnels de la sécurité privée, « la professionnalisation et la formation [...] constituent un objectif cardinal. Sans formation, pas de fiabilité, pas de confiance entre les

forces de sécurité publique et les agents de sécurité privée »522.

Aujourd’hui, l’agent doit nécessairement, pour exercer une activité de sécurité

privée, avoir suivi une formation (1). L’évolution des programmes de formations ces dernières années a permis d’améliorer les pratiques (2). 1. Un passage incontournable pour l’exercice de l’activité Il existe deux possibilités d’obtenir son aptitude professionnelle. D’une part, le certificat professionnel déposé auprès du RNCP ou le CQP élaboré par la branche professionnelle. Le décret 2005-1122 du 6 septembre 2005 dans son article 13 permet aux fonctionnaires de la police nationale et de la gendarmerie523, ainsi qu’aux militaires524 d’accéder directement à ces métiers. Cette disposition a fait l’objet d’un aménagement, récemment pour permettre aux agents de police municipale d’intégrer le secteur525. L’article L.612-22 du Code de la sécurité intérieure dispose que « L'accès à une formation en vue d'acquérir l'aptitude professionnelle est soumis à la délivrance d'une autorisation 521 Latour (X.), Panorama des formations (http://usp-securite.org/panorama-des-formations/). 522 Discours du Ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve le 8 décembre 2014. http://www.interieur.gouv.fr/Le-Ministre/Bernard-Cazeneuve/Interventions-du-Ministre/Assises-de-la- Securite-privee. 523 Ayant la qualité d’officier de police judiciaire, d’agent de police judiciaire, agent de police judiciaire adjoint et adjoint à la sécurité. 524 Ayant la qualité d’officier et de sous-officier. 525 Article R612-41 du Code de la sécurité intérieure.

préalable ». Cette autorisation est indispensable à l’agent pour intégrer une formation. La personne morale ou physique ayant conclu un contrat avec l’agent ou le dirigeant doit dès l’attribution d’une autorisation préalable lui assurer sans délai une formation. L’objectif étant de lui permettre d’acquérir une aptitude professionnelle nécessaire à l’exercice de la fonction d’agent de sécurité privée 526. Cette autorisation est

subordonnée au respect des conditions fixées au 1°, 2° et 3° du l’article 612-20 du Code de la sécurité intérieure. Le contrôle de moralité s’opère lors de l’autorisation préalable. L’administration, si elle estime que les conditions liées à la moralité ne sont pas remplies, peut refuser cette autorisation indispensable pour intégrer le secteur527.

Par ailleurs, le président de l’Alliance nationale des activités privées de sécurité, Claude Tarlet, indiquait que l’attestation provisoire « ouvre une brèche dans laquelle ne manqueront pas de s'engouffrer des professionnels peu scrupuleux, pour pratiquer une rotation perpétuelle de main d'œuvre pendant cette période dérogatoire post embauche sans jamais former ni faire passer l'aptitude ‘‘préalable’’ à des salariés qui ne seront de ce fait que de passage »528. Cette remarque faisait suite à la loi de prévention de la

délinquance du 5 mars 2007 qui instaurait un système d’attestation provisoire. Ce mécanisme devait permettre aux agents de travailler tout en se formant. Il a surtout été mis en place pour pallier les lenteurs de l’administration qui ne souhaitait pas freiner l’embauche d’agents. Cette situation pouvait générer une instabilité juridique dans les contrats formés entre les agents et leur employeur. Le législateur a remédié à ce risque grâce à l’article L.612-21 du Code de la sécurité intérieure qui prévoit la rupture de plein droit du contrat lorsque l’agent cesse de remplir les conditions posées aux 1° à 3° de l’article L.612-20 du même code. Pour autant cette disposition ne suffit pas à protéger l’employeur. Ce dernier a le devoir de vérifier les faits de ses agents529.

D’autres penchent comme l’ancien directeur de l’Institut national des hautes études de sécurité et de justice pour « un système de formation cohérent, adapté à la réalité complexe du secteur, et s’attachant à éclairer tout à la fois les enjeux techniques et 526 Article L.612-23 du Code de la sécurité intérieure. 527 CA Riom, 6 déc. 2011, Stéphane P. c. Sarl JABI et Sarl SEBD, n°11/00459. 528 Tarlet (C.) et Moreau (P.), « Contribution à l’étude de la loi relative à la prévention de la délinquance : la professionnalisation et la moralisation des entreprises de sécurité privée », JCP A, 2007, 2137. 529 CA Aix-en-Provence, 11 avr. 2013, n°11/13357.

juridiques »530. Cette formule, si elle reste générale, montre le chemin qu’il reste à

parcourir malgré de nombreux efforts de la profession.

2. Une évolution notable de la professionnalisation

Le secteur de la sécurité privée, sous l’impulsion des professionnels et de l’administration, a fait de la professionnalisation du secteur un axe prioritaire malgré l’effondrement des marges réalisées par les entreprises de sécurité privée. Cette stratégie vise à faire émerger une image plus professionnelle du secteur pour revaloriser dans un second temps les prestations de sécurité. La dynamique s’est traduite par un doublement des heures du certificat de qualification professionnelle. Le CQP est ainsi passé de 70 à 140 heures, le 1er janvier 2013531.

Parallèlement, des passerelles ont été construites avec d’autres secteurs, notamment public, pour alimenter les besoins des entreprises. En effet, la sécurité publique constitue un vivier important de recrutement pour la sécurité privée. Une réponse du ministère de l’Intérieur à un parlementaire illustre cette passerelle entre sécurité publique et sécurité privée532. Ainsi, les adjoints de sécurité de la police nationale

peuvent intégrer la sécurité privée au travers d’un titre certifié de niveau V inscrit au registre national des certifications professionnelles533. Cette formation doit attester que

les agents publics disposent de compétences et d’une expérience acquise au cours de leur contrat. Ce dispositif est-il de nature à préserver les libertés ? Un adjoint de sécurité de la police nationale ou un gendarme adjoint volontaire, s’il a bien assimilé le basculement de son activité vers le secteur privé, serait une excellente recrue. De plus, cette coproduction de sécurité serait facilitée par ces agents ayant auparavant évolué dans le secteur public. 530 Ventre (A.-M.) et Delbecque (E.), « Les enjeux de la formation », in : Sécurité privée, enjeu public, op. cit., pp.157-158. 531 Arrêté du 10 juillet 2012 relatif à l'aptitude professionnelle des dirigeants et des salariés des entreprises exerçant des activités de surveillance et de gardiennage, de transport de fonds et de protection physique des personnes et de vidéoprotection. 532 Rép. min. à la QE n° 42892 du 13 mai 2014. 533 http://www.rncp.cncp.gouv.fr/grand-public/visualisationFiche?format=fr&fiche=13300

Cette dynamique connaît des exceptions. En effet, lorsque le législateur autorise des exceptions notamment dans le système de mesures dérogatoires qui permet à des agents de justifier auprès de leur employeur d’une expérience professionnelle dans l’activité de surveillance, de gardiennage et transports de fonds ou de protection physique des personnes, il crée une insécurité juridique. Cette analyse prend une dimension particulière lorsqu’une Cour d’appel, considère qu’il n’est nul besoin de prouver cette expérience dans une société de sécurité privée alors qu’elle motive son arrêt sur des textes relatifs à la sécurité privée. Dans ce dossier, une salariée, initialement stratifieuse, a subi un accident de travail qui a débouché sur son reclassement vers un poste d’agent de gardiennage dans un service interne, sans aucune formation. La société de sécurité privée a présenté la salariée à un test pour l’obtention du CQP APS afin de régulariser sa situation. La candidate a échoué à l’examen devant lui permettre d’obtenir le CQP. Elle a par la suite refusé de passer les tests de rattrapage ce qui a débouché sur son licenciement par la société de sécurité privée. La Cour a, probablement, voulu protéger ce travailleur en exonérant la société à l’origine de cette situation et en condamnant la société de sécurité privée qui souhaitait professionnaliser ses équipes à la suite de la reprise du marché534.

Pour conclure, les professionnels du secteur semblent animés de bonnes intentions en matière de professionnalisation. Ils trouvent au sein des administrations des interlocuteurs ouverts mais dont les réactions sont tardives, comme en témoigne la publication du décret 2005-1122 du 6 septembre 2005 relatif à l'aptitude professionnelle des dirigeants et des salariés des entreprises exerçant des activités privées de sécurité. Cependant, la position de certaines juridictions freine cette volonté de professionnalisation du secteur. § 2. La formation à l’épreuve de la coproduction de sécurité

Le chantier de la formation professionnelle de la sécurité privée est lancé, mais les critiques se concentrent déjà sur les centres de formation accusés de ne pas être à la

hauteur des enjeux (A). Cette remise en cause est à mettre en parallèle des formations des forces de sécurité publique (B).

A. Des centres de formations souvent mis en cause

Pour délivrer un certificat de qualification professionnelle, qu’il soit d’agent de prévention sécurité, d’agent de sûreté aéroportuaire ou d’agent de sécurité cynophile, le centre de formation doit impérativement solliciter l’agrément de la branche prévention sécurité535. Le rapport des trois inspections dresse, sur la base d’entretiens avec les

professionnels du secteur, un bilan négatif de la formation. Les fonctionnaires évoquent des modalités de contrôle de la qualité des formations insatisfaisantes (1) et une fiabilité, lors des contrôles de connaissances, régulièrement mise en cause (2). Ce constat est nuancé par les différentes initiatives comme celle du principal syndicat des entreprises de formation. 1. La transmission des connaissances sans contrôle Parmi les principales critiques à l’égard des centres de formations figurent les modalités de transmission des connaissances. Le rapport des trois inspections pointe des carences importantes malgré des actions d’amélioration. En effet, le syndicat des centres de formation, UNAFOS, a mandaté un organisme indépendant certificateur afin de contrôler les centres de formation professionnelle pour les activités privées de sécurité et de sûreté536. Par ailleurs, les branches s’efforcent, quant à elles, de mieux contrôler les

demandeurs en refusant les dossiers litigieux537. Ces initiatives ne sont pas de nature à

faire taire les revendications, toujours plus nombreuses, y compris au sein des entreprises de sécurité privée538.La question de la formation est centrale pour la

préservation des libertés. Un agent de prévention et de sécurité mal formé peut générer un risque pour les populations. Un formateur fait-il la différence entre l’inspection visuelle d’un sac et sa fouille ? Dans le même ordre d’idée, la rétention d’un individu par 535 La demande doit être adressée à la commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation professionnelle qui est un organisme paritaire dans lequel siègent les représentants les syndicats de salariés et représentant des employeurs. 536 Avis et communication du Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie. 537 Sanson (G.), Le Brethon (B.), Hesse (C.), La formation aux métiers de la sécurité privée, rapport au Ministre de l’Intérieur, juillet 2012, p. 44 538 Tarlet (C.), « Failure is not an option », Sécurité privée, 2014, n°28, p.5.

Dans le document Sécurité privée et Libertés (Page 134-138)