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L’information est issue de la transformation de la structuration d’une donnée. Cette transformation doit être conventionnelle et intelligible pour prendre part à un processus dynamique de diffusion et/ou d’échange pour être communiquée (Boulc’h 2005). Pour que l’information devienne un savoir, il faut que des structures conceptuelles lui donnent du sens. De plus, l’information est systématiquement emplie d’intentions préalablement déterminées qui en suppriment sa neutralité. L’information n’a pas de caractère figé : le contexte et le temps dans lequel elle est mise en jeu peuvent modifier sa valeur ou son interprétation.

Ces différents aspects de la dimension informative seront présentés au travers de trois modèles reflétant depuis la seconde moitié du XXe siècle l’évolution de ce concept.

Le modèle de Shannon

D’après Willett, le modèle de Shannon, ingénieur en charge de l’étude des problèmes de rendement des lignes télégraphiques fut publié en 1948. Le transfert de l’information, est défini par Shannon comme un processus linéaire, unidirectionnel, qui se compose de cinq étapes comme il l’est présenté dans la figure 1-13. Une source d’information est portée à la connaissance d’un émetteur qui émet cette information par un canal de transmission vers un récepteur qui doit porter ce message à destination. Une source de bruit peut affecter le canal de transmission ce qui peut nuire à la fidélité de la réception et de la retranscription de l’information envoyée (Willett, 1992).

Ainsi, c’est un modèle de transmission de l’information dans lequel on retrouve une volonté de faire circuler, à travers un système de transmission, un message aussi peu altéré que possible : Les problèmes techniques de télécommunication, c’est-à-dire des problèmes liés à la capacité de transmission des messages dans un canal doivent être résolus dans le cadre de ce modèle : le choix des messages émis par un individu vers un récepteur (et le codage qui en découle) affecte l’exactitude de l’information générée.

Figure 1-13 : Modèle du traitement de l’information de Shannon. D’après Willett, 1992.

Ce modèle permet de mettre en évidence les problèmes techniques que pose la fidélité de la transmission, d’un émetteur à un récepteur, de différents types de signaux. Il modélise par là pour la première fois l’acte d’information avec la mise en évidence des éléments constitutifs. Cependant, ce modèle montre un certain nombre de limites car il ne tient pas compte de la rétroaction que peut engendrer la communication d’une information. Il ne tient pas compte non plus du cas où il y a plusieurs récepteurs. Enfin ce modèle ne tient pas compte de la dimension sémantique du message.

Le modèle de Schroder, Driver et Streufert

D’après Willett, ce modèle a été établi dans le domaine de la psychologie humaine. Les chercheurs voulaient mettre en évidence le fait que les humains utilisent des structures mentales pour s’adapter à leur environnement et qu’à partir d’un même pool d’information, un être humain utilise différentes règles conceptuelles pour étayer sa pensée et prendre des décisions, établir des relations ou adapter ses réactions (Willett, 1992).

Selon Schroder, Driver et Steufert, le traitement de l’information est composé de deux propriétés interdépendantes : les dimensions du traitement et les règles d’intégration. Le traitement de l’information (jugement, comportement, réaction un stimulus) peut être le fruit de plusieurs dimensions deperception. Si l’on prend l’exemple d’une couleur elle peut être définie par une clarté et une intensité. On peut caractériser une couleur en utilisant une seule ou les deux caractéristiques qui correspondent aux dimensions du traitement. Les règles d’intégration sont, quant à elles, définies comme par exemple la manière dont un individu reçoit, mémorise ou transforme l’information. Les croyances, les hypothèses, les attitudes, les concepts et les besoins sont des règles qui permettent de structurer l’information (Schroder, Driver et Steufert 1967, cité par Willett 1992).

Pour ces chercheurs, le traitement de l’information est lié à l’interdépendance des règles mobilisables par un individu et le sens donné aux différentes dimensions d’un stimulus reçu : le traitement s’effectue en combinant les dimensions par certaines règles permettant ainsi l’adaptation ou l’attribution d’un sens à une information. L’intégration de ces deux paramètres se fait selon quatre niveaux de complexité (figure 1-14) allant du plus simple (structure de pensée rigide) à la plus complexe (structure de pensée inventive).

Figure 1-14 Niveau d’intégration du traitement de l’information en fonction d’un stimulus à trois dimensions de traitement. D’après Willett, 1992.

Ce modèle, de par sa structure dépasse l’hypothèse de l’addition simple des stimuli sélectionnés par l’être humain en expliquant la complexité conceptuelle de la pensée. Il met également en évidence le fait que le traitement de l’information n’est pas lié uniquement à son contenu mais aussi à sa structure. Il met également en évidence le fait que l’information peut être traitée différemment selon les personnes et que la manière de penser d’une personne est un élément important dans la perception qu’il aura d’un stimulus, ceci étant déterminé par sa structure mentale.

Cependant, ce modèle comprend un certain nombre de limites (Willett, 1992), notamment le fait d’avoir été réalisé en conditions expérimentales : les situations réelles ne peuvent être reproduites. Il est également mentionné que l’étude entre les attitudes des cobayes et le contenu des stimuli est faiblement étudié et qu’une métrologie appropriée entre dimensions et règles était difficile à mettre en place, notamment pour le niveau d’intégration le plus fort.

La théorie du traitement de l’information : le modèle de Gagné

La théorie du traitement de l’information émane, selon Willett du besoin qu’éprouvent les êtres humains à traduire d’une manière mécanique leur comportement. Dans ce but, les chercheurs ont essayé de

traduire d’une manière mécaniste (i.e. le modèle de Shannon) et séquentielle le traitement de l’information. Cette approche a, par la suite, été abordée par la voie cognitive (i.e. Schroder, Driver et Streufert) afin de reproduire les mécanismes cognitifs humains du traitement de l’information. Le but de ces recherches est de pouvoir reproduire le mode de traitement cognitif dans des machines ou des ordinateurs comme par exemple l’intelligence artificielle qui a pour but de créer et optimiser des systèmes de traitement de l’information artificiels et efficaces (Willett, 1992).

La théorie du traitement de l’information propose des modèles qui s’accordent tous sur un point : le cheminement mental du traitement se repose sur une séquence de transformation des données et des informations par différents états du système cognitif. Le long de sa transformation, l’information est sous différentes formes au sein du système cognitif.

Selon Gagné, le système cognitif n’a pas la capacité de fonctionner seul, il doit être en lien avec l’environnement extérieur pour capter et émettre des informations. En plus de cela, le système cognitif doit avoir un système de traitement de l’information reçue qui se traduit par le modèle présenté dans la figure 1-15 (Gagné, 1987).

Figure 1-15 : Modèle cognitif du traitement de l’information. D’après Gagné, 1987.

Dans ce modèle, chaque boite au sein du système représente un état du traitement des informations. Pour le résumer, on peut dire que des récepteurs captent des informations émanant de l’environnement. Ces récepteurs proposent une traduction non altérée au sein du registre des informations sensorielles. A ce stade l’information n’est pas identifiée et aucun sens ne lui est donné : c’est un point d’entrée dans le système nerveux.

Une fois entré dans le système nerveux, le stimulus est traité par la mémoire à court terme. Cette entrée se traduit par une première attribution de significations au stimulus. Il est traité rapidement car la mémoire à court terme ne peut emmagasiner qu’un nombre limité d’informations.

En fonction des besoins d’émission d’information, soit le message est stocké dans la mémoire à long terme (où l’information va changer d’état pour pouvoir être stockée à long terme), soit le message va être renvoyé directement au générateur de réponse s’il existe un besoin de renvoyer ce message à l’environnement extérieur. La mémoire à long terme, peut être remobilisée vers la mémoire à court terme si des traitements de l’information doivent être couplés à des informations récemment captées par le système. Dans une autre configuration, la mémoire à long terme peut être directement remobilisée vers le générateur de réponse si le besoin de restitution de l’information ne fait pas appel à des évènements immédiats.

Le générateur de réponses, quant à lui, capte les éléments de la mémoire à long terme ou de la mémoire à court terme et réunit toutes les informations nécessaires afin d’organiser la réponse selon deux dimensions : la forme (le choix de l’effecteur) et la performance (le choix de la séquence et du rythme du signal renvoyé).

L’information est enfin renvoyée vers l’environnement par différents effecteurs, préalablement choisis de manière volontaire ou non. A l’échelle humaine, les effecteurs représentent l’ensemble des muscles et des glandes qui permettent d’organiser la réponse.

La mémoire à long terme, le générateur de réponses et les effecteurs sont sous le contrôle de deux paramètres : les attentes et le contrôle exécutif. Les attentes sont le but que se fixe un individu. Celui-ci va influencer la manière de l’atteindre et donc potentiellement la mémoire à long terme et le générateur de réponses. Le contrôle exécutif se traduit par des stratégies cognitives, préalablement déterminées par les attentes et qui influencent la restitution du message par une adaptation du générateur de réponses et des effecteurs afin d’atteindre le but recherché.

Conclusion

Par l’étude de plusieurs modèles de la transmission et du traitement de l’information, nous avons pu voir que la notion d’information concerne différents champs scientifiques comme par exemple celui des télécommunications à la psychologie sociale en passant par les sciences cognitives ou la biologie. Bien que les approches soient différentes, la transmission de données emplies de sens est un dénominateur commun pour les différentes approches de l’acquisition, du traitement et de la transmission d’informations.

Il ne faut également pas perdre de vue la finalité du processus informationnel. Si l’acquisition, le traitement et la diffusion de l’information -pour les modèles étudiés- se fait au niveau de l’individu, le but de l’émission de l’information est bien de toucher l’autre (individu ou groupe) en mettant en action un processus communicationnel. Nous allons étudier ces processus dans le paragraphe suivant.