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La citoyeNNeté ethNiqUe

Dans le document Un modèle latino-américain ? (Page 121-130)

À partir de ces quelques remarques, nous pouvons analyser le premier type de citoyenneté, celle qui met l’accent exclusivement sur le caractère d’appartenance ethnique. Elle répond à la position la plus radicale de l’émergence ethnique. Deux éléments s’unissent dans cette affirmation.

– D’une part, dans le cas mapuche, le sentiment historique de « mauvais trai-tement », de « discrimination » à son degré le plus élevé est très fort. Le discours

« indigéniste » souligne ces trois éléments.

Arauco tiene una pena (Arauco a de la peine) Que no la puedo callar (Que je ne peux faire cesser) Son injusticias de siglo (Ces injustices ont des siècles) Que no se pueden borrar (Qu’on ne peut effacer)

Violeta Parra, la célèbre chanteuse chilienne, fait sienne une image d’injus-tice qui s’est généralisée dans la génération de l’indigénisme dénonciateur. Pablo Neruda contribue tant dans le Canto General que dans de nombreux poèmes à cette « rhétorique du mauvais traitement ».

L’idée de la « dette historique » surgit dans le discours mapuche. La société chilienne occidentale a une dette envers la société mapuche qui ne peut être annu-lée, affirme-t-on. Il y a des années, dans un débat confus et complexe entre les autorités gouvernementales et un important groupe de jeunes étudiants mapuches qui avaient « pris » les dépendances de l’intendance de la ville de Temuco, il s’agissait de savoir si les bourses d’État étaient un présent du Gouvernement ou le paiement de la dette historique. Cette définition revêtait une telle importance que les étudiants boursiers souhaitaient que l’autorité précise avec clarté l’origine morale et discursive de ces ressources. Le fait qu’il s’agisse du règlement partiel de cette dette historique les libérait de tout remerciement ou relation de réciprocité.

Le passage d’une conscience de « mauvais traitement » historique à une conscience de non-appartenance à la citoyenneté commune d’une nation – qui les avait envahis, leur avait ôté leur liberté, les avait réduits dans des réserves et maintenus dans des conditions de misère depuis plus d’un siècle – est relativement facile. En particulier chez les jeunes les plus instruits.

Commémorations et mémoires subalternes : citoyenneté et émergence indigène au Chili – La seconde source de non-adhésion à la citoyenneté chilienne et son affirma-tion purement ethnique s’appuie sur une conscience indigène latino-américaine en pleine croissance. Le concept de « nation » (« nationalités indigènes ») a été utilisé très récemment dans le langage de « l’émergence ethnique ». C’est peut-être en Équateur que le concept surgit au début des années quatre-vingt-dix (Confé-dération des nationalités indigènes d’Équateur ou CONAIE). L’affirmation traduit davantage une volonté « ethnonationaliste » que le fruit d’une réflexion acadé-mique de ce concept politique complexe, plus d’une fois flou, et moderne. Il ne fait aucun doute que le recours au concept moderne de « nation » charrie avec lui la revendication territoriale, linguistique et culturelle.

En 2005, un groupe de jeunes intellectuels mapuches a commencé à concré-tiser ce qui allait s’appeler le Wallmapuwen, un parti politique mapuche dont le nom pourrait se traduire par « les compatriotes du pays mapuche ». Sa définition a été et continue à être celle d’un « parti nationaliste mapuche », et, comme tel, ils ont créé des alliances avec Ezquerra republicana de Catalunya o Cataluña et avec des organisations basques, présentes récemment dans les activités de refondation (2011).

Comme dans tout nationalisme, il y a des éléments qui viennent de l’Histoire et d’autres de l’imagination, de « l’invention de la nationalité », selon les termes de Benedict Anderson 8. La proposition de « pays mapuche » est intéressante car c’est une voie qui a été largement utilisée au xixe siècle. Les militaires du Chili et d’Argentine ont eu recours fréquemment au concept de « pays des Araucans » 9,

« pays des Ranqueles » 10. Cette dénomination ne comportait aucune référence au droit international, mais elle déterminait avec clarté la partie du territoire argen-tin et chilien qui était aux mains des indigènes. Dans le langage de l’émergence mapuche, ce concept a été traduit en Wall Mapu, qui serait la terre ou le territoire mapuche, ou simplement le « pays mapuche ». Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un élément ancien réinterprété à la lumière des notions modernes de la politique.

Le parti politique nationaliste mapuche n’a pas pu être inscrit sur les registres électoraux chiliens en raison d’un manque de signatures ou d’un doute sur ces dernières. Plusieurs tentatives furent menées. Il faut souligner ici une contradic-tion. Au Chili, les partis politiques, comme dans de nombreux pays, recueillent un

8 Anderson, Benedict, 2002, Comunidades imaginadas, Mexico, Fondo de Cultura Económic, 2a edición corregida.

9 Zeballos, Estinaslao, 1960, Viaje al país de los araucanos, Buenos Aires, Hachette, 3a edición.

L’auteur commence son texte ainsi : « Divers voyages à travers des régions hautement intéressantes de la République argentine, d’où je suis rentré en 1878 vivement impressionné… » Ensuite il compare ce voyage avec le « Viaje a la región del trigo ». Pour Zeballos, ces deux voyages passent par l’intérieur de la République argentine, mais dans le cas « araucan » il l’appelle « pays », pour signaler peut-être l’occupation permanente de ce territoire par les Mapuches.

10 Le dictionnaire de langue espagnole de la Real Academia définit « país » comme « nation, région, province ou territoire ». « Paisano » a aussi l’acception de « paysan qui vit et travaille dans la campagne ». Il en est de même en catalan et en français.

faible niveau d’approbation et il existe des préjugés, notamment chez les jeunes.

Nous pourrions penser que les tentatives frustrées pour organiser un parti politique nationaliste sont davantage dues à ce stéréotype négatif qu’aux conceptions qu’il sous-tend.

Les principaux positionnements de Wallmapuen aspirent à une démocratisa-tion et à une décentralisadémocratisa-tion de l’État Chilien, avec l’objectif à court et moyen termes de renforcer les gouvernements locaux – tant régionaux que munici-paux – pour parvenir à long terme à atteindre des statuts d’autonomie prin-cipalement pour la ixe région (l’Araucanie), territoire auquel seront annexées des communes des régions frontalières de la viiie, la xive et la xe régions, qui concentrent une importante population mapuche. De plus, ils déterminent la nécessité de la reconnaissance par l’État du Chili de son caractère plurinatio-nal, multilingue et multiculturel. Parmi leurs propositions pour le territoire, ils envisagent la création d’une politique linguistique qui déclare le mapudungun comme langue de leur territoire, ainsi que l’utilisation du drapeau créé par le Conseil de toutes les terres, comme emblème représentatif de leur peuple, et aussi son utilisation comme drapeau de la patrie sur les locaux publics de la ixe région. Actuellement, le parti nationaliste Wallmapuwen est à nouveau dans un processus de collecte de signatures, en espérant cette fois pouvoir obtenir la légalisation définitive de leur parti 11.

Dans le cas mapuche, l’adhésion à une citoyenneté ethnique se manifeste presque exclusivement dans le discours des jeunes « Je suis mapuche, je ne suis pas chilien ». Chaque fois que j’ai entendu cette affirmation, et c’est arrivé souvent, la personne qui le disait, homme ou femme jeune, faisait un acte rituel empreint de dramaturgie, comme blessé(e) par l’histoire. Il s’agit d’une sorte d’« apostasie » à la nationalité chilienne. Le fait de ne pas être chilien ou de le déclarer est une conscience du mauvais traitement auxquels les Chiliens et leur État ont soumis les Mapuches au cours de l’Histoire. C’est davantage la sensation et l’interprétation qu’une cause de la décolonisation.

Les espaces privilégiés pour le développement de cette nouvelle conscience ethnique sont les foyers étudiants. Dans la présentation du blog de l’un des foyers de la ville de Temuco on peut lire :

Les foyers sont beaucoup plus que des auberges, les foyers universitaires mapuches sont non seulement aujourd’hui des lieux où les étudiants peuvent manger et dormir. Mais ils se sont aussi transformés en véritables écoles de formation culturelle et politique pour des centaines de frères originaires des communautés 12.

11 Caniguan Natalia, 2011, « Informe sobre el nacionalismo mapuche », www.centrodedocu-mentacion.wordpress.com (consulté le 15/01/2011).

12 Gervain, Maud, 2010, Los estudiantes mapuche de educación superior residentes en hogares y la movilización para la construcción de una política pública de hogares estudiantiles indígenas, Tesis de Maestría, Sciences Politiques, Université de Rennes, p. 69.

Commémorations et mémoires subalternes : citoyenneté et émergence indigène au Chili Il existe cependant un « discours postcolonial » présent chez les intellectuels mapuches. On conçoit ce qui est mapuche comme une entité « proto-nationale », on parle avec une force volontariste de « nation mapuche », déterminant ainsi qu’il s’agirait d’une entité collective dotée d’une personnalité propre et avec des droits collectifs propres équivalents à ceux de la nation chilienne ou argentine. Ce discours ou texte narratif est encore plus clair parmi les jeunes Mapuches qui ont été emprisonnés, et qui se perçoivent eux-mêmes au sein d’une longue lutte de libération et d’indépendance. Il ne fait aucun doute que dans ce cas le discours dispose d’un soutien moral aussi important que celui d’une bonne partie des luttes anticoloniales.

Le recours à l’ethnicité est alors absolu. On assiste à un processus de recons-truction et de réinvention de l’ethnicité en fonction d’une proposition anticolo-niale. L’Histoire se reconstruit et les faits sont articulés en fonction de cet objectif 13.

iDeNtitéS et citoyeNNetéS FLexibLeS

Vingt ans après le début de l’émergence indigène en Amérique latine, et treize ans après l’émergence mapuche dans le sud du Chili et en Argentine, il convient de se demander dans quelle mesure la voie de la citoyenneté exclusive ou eth-nique est parvenue à être dominante ou non. Comme nous l’avons mentionné, notre impression, validée par le travail de terrain, est qu’il ne s’agit pas du discours dominant, même si son importance comme contre-discours de décolonisation a une incidence ou une influence sur l’ensemble des autres discours.

Les identités flexibles ou la citoyenneté flexible, double citoyenneté 14, occu-pent sans conteste un espace plus large. Il s’agit d’adhésions multiples et qui se superposent, mais qui s’utilisent aussi selon les opportunités. Arrêtons-nous plus précisément sur ce point.

Le projet que nous réalisons s’appelle « Commémorations et mémoires subal-ternes » et a pour objectif de comprendre la question de la nation, des mémoires et des appartenances à l’occasion des commémorations du bicentenaire de la répu-blique du Chili. Notre principal intérêt réside dans la compréhension des relations entre « être chilien » et « être mapuche ».

Pour ce faire, il nous est apparu essentiel d’être présents lors des festivités patriotiques chiliennes dans la zone mapuche. Puerto Saavedra est un petit village et une commune presque exclusivement indigène. Et on nous avait dit que pour le jour des éphémérides nationales tout le village défilait. Et il en fut ainsi. Le défilé a débuté avec les autorités, les pompiers, un chœur militaire qui entonnait des

13 Voir Marimán, Pablo et al., 2007, Escucha Winka, Santiago, Lom Ediciones.

14 Ce concept a été consacré par le professeur mexicain Guillermo de la Peña, participant au séminaire au cours duquel cet article fut exposé.

marches prussiennes à tout va et les écoliers bien rangés et bien peignés défilant en hommage aux héros de la patrie. Une colonne était annoncée comme « celle des Mapuches ou Araucans », et ils défilaient comme tels. Notre attention a été attirée par le fait que même s’ils étaient tous indigènes, seul un groupe représentait les indigènes, les autres se mêlant aux pompiers, aux écoliers, aux fonctionnaires, aux citoyens ordinaires. L’inscription comme Mapuche était une spécialité parmi d’autres professions, postes, attributs identitaires.

Natalia Caniguan et l’équipe de recherche avec laquelle nous travaillons et qui a son siège à Puerto Saavedra ont commencé à se rendre dans les fêtes locales le 18 septembre, jour de l’Indépendance nationale du Chili, et ils se sont trouvés en présence de nombreux indigènes vêtus de huasos. Le « Huaso » au Chili est par antonomase la figure du paysan créole ou métis, mais totalement non indi-gène. C’est un individu à cheval, avec une couverture et des éperons, de grandes bottes d’équitation et un chapeau d’origine espagnole cordouane. La veste courte du costume est aussi cordouane, très courte et bien ajustée. Les entretiens montrent un discours très flexible et une fierté de la double appartenance. Personne ne nie son caractère indigène mapuche, mais ils signalent célébrer avec fierté les fêtes patriotiques de tous les Chiliens. Les anthropologues qui mènent les entretiens les ont appelés ironiquement les « Huasoches », une combinaison du mot « huaso » en castillan et de « che », « gens » en mapuche.

La double « citoyenneté », ou ce que l’on pourrait appeler les « identités flexibles », a deux aspects intéressants. D’une part, elle traduit une réalité effective qu’est la double appartenance, d’autre part une expérience quotidienne de vie.

Les Mapuches veulent ou ne veulent pas vivre immergés dans la société chilienne, dans ses relations économiques, de consommation, dans les systèmes institution-nels. Mais en réalité ils écoutent la radio et la télévision, ils pleurent et rient devant les séries télévisées, et en plus ils le font en castillan.

J’ai demandé à Don Juan Paine dans un programme de télévision : « Vous dites que vous êtes mapuche et non chilien, et que se passe-t-il quand la sélection du Chili marque un but en coupe du monde ? » Il avait fait un grand discours sur la non-appartenance à la nationalité chilienne et qu’il ne s’agissait que d’un hasard de l’histoire. Fâché à cause de ma question il répondit : « Ah non, me dit-il face caméra. Cette question est incorrecte. Bien sûr que je me lève de mon siège, que je crie et que je saute pour fêter l’événement comme tous les Chiliens ». « Sans commentaire », lui répondis-je.

Pendant ces journées footballistiques du Mondial en Afrique du Sud en 2010, la télévision a montré de nombreuses familles mapuches dans leurs rucas de paille (l’habitat traditionnel mapuche), assises depuis longtemps devant la télévision, préparant un asado, buvant du maté et criant comme tout le reste du pays dans une euphorie de nationalité sportive partagée. Les concurrences sportives sont aujourd’hui dans le monde globalisé les frontières des États nationaux.

Commémorations et mémoires subalternes : citoyenneté et émergence indigène au Chili Le recours à la nationalité chilienne est aussi le fruit de la nécessité légitime d’intégration de la population indigène. L’intégration est l’antidote à la ségrégation, à la marginalisation, à la stigmatisation et à la discrimination ethnique. Personne ne souhaite s’affirmer dans la négation pure de la discrimination. Ceux qui le font sont des « jeunes sacrifiés », qui à travers la reconnaissance de leur « identité pres-tigieuse » peuvent transformer la discrimination en une conception de sauvegarde, de propositions transformatrices, en réalité de dignité et de reconnaissance.

Il existe aussi des instrumentalisations de l’ethnicité. Utilisation légitime, bien entendu, mais remplie de réinventions qui possèdent un caractère évidemment pragmatique voire directement économico-commercial. Le succès grandissant de l’ethno tourisme chez les Mapuches est peut-être une expression privilégiée de ce phénomène. Dans de nombreuses communautés, notamment celles qui sont situées en bordure de lacs, des projets touristiques ont démarré avec succès. Des cabanes ont été construites en forme de rucas : toits de paille, un feu au milieu et les conditions minimales de confort moderne comme l’eau courante et quelque-fois la lumière électrique. En général, il y a un restaurant de plats « mapuches » ou présentés comme tels 15. Ainsi, dans de nombreuses communautés, on ouvre son quotidien aux ethnotouristes, on réalise des cérémonies, on partage la culture

« représentée » 16.

La citoyeNNeté NatioNaLe et L’aNcêtre iNDigèNe

La troisième manière que nous voyons d’assumer la citoyenneté, après celle de la « citoyenneté ethnique » et celle de la « double citoyenneté », est celle qui appar-tient aux individus qui se sentent appartenir à un pays, à une nation, et ne se posent pas de question. Au contraire, comme dans de nombreux pays latino- américains, un discours à caractère constitutif émerge qui établit que « nous les indigènes sommes les premiers Xhiliens ». Ce fut le discours du xixe et du xxe siècles de la part des militaires, des élites patriotiques et des groupes nationalistes 17.

15 Il est très difficile de déterminer ce qu’aurait pu être la « nourriture mapuche » précoloniale et préréductionnelle. L’influence de l’élevage européen, dont celui des moutons et des agneaux, l’un des principaux composants, est manifeste. Le blé et ses dérivés aussi. Le piment rouge et en particulier sa combinaison avec du sel et fumé au feu, le merkén, est peut-être le goût ethnique le plus particulier et qui s’est répandu dans la gastronomie chilienne et internationale.

16 Ce que l’anthropologie nord-américaine appelle « culture de performance ».

17 Il n’est pas anodin que les groupuscules du national-socialisme qui ont émergé au Chili aient toujours eu une affection particulière pour les Araucans ou Mapuches. Le discours nationaliste de Nicolás Palacios dans son livre Raza Chilena, un classique du début du xxe siècle, traitait cet aspect constitutif. Le général Indalecio Téllez publie dans les années quarante « Une race mili-taire », montrant que le courage et la force milimili-taire des Chiliens provenaient des Araucans et de leur longue lutte contre l’Espagne. Après la Seconde Guerre mondiale, les groupes racistes ont été pro-Mapuche. L’actuel leader du parti nazi chilien déclare avec fierté être marié avec une femme mapuche. Voir les textes cités sur : www.memoriachilena.cl (consulté le 28/09/2011).

Le cas de l’actuel directeur de la Corporación Nacional de Desarrollo Indígena (Corporation nationale de développement indigène), Carlos Painepán, est un bon exemple de ce syndrome national ethnique 18. L’ethnicité comme ancêtre, comme fierté du passé et comme acte constitutif de la nationalité partagée.

Painepán est né d’une seconde génération de Mapuches à Santiago, il a reçu une instruction à la ville et a réussi avec une quincaillerie dans la commune de Puente Alto, au sud de la capitale. Il préside l’association des micro-entrepreneurs ou petits entrepreneurs mapuches de Santiago et pour cette raison on l’appelle le lonko, le chef, la tête ou le caudillo en langue mapuche. Il y a des années, il a ima-giné que dans la parade militaire des 19 septembre, le jour des Gloires militaires au Chili, un groupe de Mapuches, habillés selon le style traditionnel stéréotypé, défi-lerait jouant de leurs cultrunes (tambours de cérémonie) et trutrucas (trompettes en roseau) et rendraient hommage au président de la République et au commandant en chef des forces armées du Chili, poste occupé à cette époque par le général Pinochet. Bien que les jeunes Mapuches eussent critiqué ce « défilé araucan », ils ne sont pas peu nombreux – parmi ceux avec qui nous nous sommes entretenus – à considérer comme un honneur que les Mapuches aient la possibilité de s’exprimer et d’être présents dans ce moment stellaire, pour danser leurs danses et rendre hommage aux autorités de la patrie.

Le discours de modernisation indigène, des micro-entreprises, de l’innova-tion, de l’accès à la modernité, combinée avec celui d’une « citoyenneté pleine », (« nous sommes plus chiliens que les propres Chiliens », dit-on, car nous sommes d’ici, nous sommes les habitants originaires, les premiers Chiliens, etc.) est un discours d’une haute complexité, qui s’oppose à celui des jeunes ethnicistes et qui érode même leurs bases discursives. Quel jeune ayant un accès aux études supérieures ne souhaite pas accéder aux bénéfices de la modernité ? Bien entendu

Le discours de modernisation indigène, des micro-entreprises, de l’innova-tion, de l’accès à la modernité, combinée avec celui d’une « citoyenneté pleine », (« nous sommes plus chiliens que les propres Chiliens », dit-on, car nous sommes d’ici, nous sommes les habitants originaires, les premiers Chiliens, etc.) est un discours d’une haute complexité, qui s’oppose à celui des jeunes ethnicistes et qui érode même leurs bases discursives. Quel jeune ayant un accès aux études supérieures ne souhaite pas accéder aux bénéfices de la modernité ? Bien entendu

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