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R ÉPUBLIQUE DEVIENT UN RÉGIME PARLEMENTAIRE

10. L A MÉTHODE DE RECHERCHE

Je me suis intéressé, avant de commencer mon étude, à une littérature spécialisée constituée de travaux en droit constitutionnel et en science politique sur la cohabitation, ils m’ont servi à mieux concevoir la notion de cohabitation et à avoir un regard critique sur les positionnements des responsables politiques. J’ai ensuite réalisé le corpus de ma thèse en me référant majoritairement aux déclarations des responsables politiques sur la cohabitation, elles m’ont servi à démontrer la cohérence ou l’incohérence de leurs doctrines institutionnelles sur la notion de cohabitation. J’ai choisi, afin de retranscrire leurs déclarations, de me tourner vers le format audiovisuel, ma démarche empirique a ainsi constitué en un travail de recherche sur le passage des responsables politiques dans les émissions télévisées, je me suis ainsi documenté à travers les archives de l’Institut National de l’Audiovisuel de la Bibliothèque Nationale de France et sur de nombreux documents vidéos sur internet. J’ai visionné l’ensemble des prestations télévisuelles des responsables politiques des différents partis de gouvernements de la France qui ont eu, à un moment ou un autre, à se situer sur le problème de la cohabitation au cours des années 1958-2017, la liste est exhaustive est concerne les principaux responsables politiques socialistes (François Mitterrand, Michel Rocard, Lionel Jospin, Laurent Fabius …), les principaux responsables politiques communistes (Georges Marchais ...), les principaux responsables gaullistes (Charles de Gaulle, Georges Pompidou, Jacques Chirac, Edouard Balladur …) et les principaux responsables politiques centristes et libéraux (Valéry Giscard d’Estaing, Raymond Barre, François Bayrou …).

Je me suis principalement intéressé aux émissions de débat des années 1960, 1970, 1980 et 1990 comme Face à Face, A Armes égales, L’événement, Cartes sur table,

Sept sur sept, l’Heure de vérité ou encore La marche du siècle. J’ai aussi visionné de

nombreux journaux télévisés et interventions politiques diffusées à la télévision sans oublier les émissions consacrées aux différentes campagnes présidentielles et législatives. La majorité de ces émissions télévisées étaient diffusées sur les chaînes

hertziennes pour la période allant de 1962 à 2002 mais je me suis également intéressé à certaines émissions du câble et du satellite pour la période allant de 2002 à 2017. J’ai choisi cette documentation sur les sources télévisuelles parce qu’elles me paraissaient le meilleur moyen de sélectionner les moments importants et significatifs de l’argumentation des responsables politiques sur mon thème de recherche : le positionnement des hommes politiques vis à vis de la notion de cohabitation.

Je pense en outre que ces émissions constituent des moments importants de l’histoire de la télévision, elles ont été abondamment commentées et ont servit de référence à la presse audiovisuelle et écrite. Les hommes et femmes politiques se préparent minutieusement avant d’être invités de ces émissions et leurs échanges avec les journalistes donne souvent lieu à de véritables moments d’argumentation. Ces émissions sont ainsi la meilleure manière de se donner une idée de leurs discours. Ces émissions télévisées sont aussi intéressantes au niveau de la recherche de la vérité derrière les discours souvent convenus des hommes politiques puisqu’ils constituent de véritables échanges politiques entre l’invité et le journaliste. Céline Grégoire dans l’ouvrage L’image candidate à l’élection présidentielle de 1995 nous donne ainsi son commentaire sur la spécificité de ces entretiens télévisés : « l’étude d’entretiens nous amènera à tenir compte du fait que l’image des candidats sont construites en interaction avec des journalistes (à ce titre, on parlera plus de « mouvements argumentatifs » que d’arguments isolés, le discours des candidats s’enchaînant avec celui des questionneurs). L’invité n’est pas complètement libre de construire son discours. Sa parole est en partie contrainte par celle des journalistes ». Elle pense que les hommes politiques sont amenés à atteindre et convaincre un tiers absent, l’opinion publique : « l’entretien politique médiatisé se distingue des dialogues quotidiens par le fait qu’elle est diffusée pour un tiers absent certes, mais qui n’en est pas moins présent dans l’esprit des participants. L’opinion publique est à la fois une fin, la cible à atteindre, mais aussi un moyen grâce auquel il acquiert la légitimité de sa place dans l’espace public. Elle a le pouvoir de sanction … dans ce genre de discours politique, la dimension du « qui je suis pour toi, qui tu es pour moi », importe parfois plus que le discours à transmettre. Non pas que l’information

apportée soit de moindre intérêt, mais dans la mesure où le politique a des perspectives d’avenir, sa mise en mots doit contribuer à servir ses ambitions, à savoir donner une image de soi favorable auprès des électeurs potentiels. Aussi peut-on dire que la dimension symbolique de l’interaction, « garder la face », est certainement l’enjeu majeur de ce type d’émission. Cette tâche est d’autant plus compliquée qu’elle s’inscrit dans un cadre interactif prédéfini. Journalistes et invité ont des rôles respectifs, pour les premiers, il s’agit de poser les « question que se posent les Français » et pour le second de délivrer un point de vue en répondant à ces questions. La relation est de fait inégale dans la mesure où les premiers ont un rôle « dominant » et le second « dominé ». Rapport qui n’est à priori pas favorable au politique ». 38

Ces émissions télévisées sont donc pertinentes et intéressantes au niveau de la recherche de la conviction chez les hommes politiques, ils sont souvent contredits par les journalistes et sont ainsi amenés à donner la meilleure image d’eux mêmes.

38 Céline Grégoire, « L’argumentation de Edouard Balladur » in L’image candidate à l’élection

Première partie : les doctrines institutionnelles des