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L’importance de la communication scientifique

Pénétrer le monde scientifique ou dans le monde de l’innovation est complexe. Il faut identifier la personne capable de représenter une thèse, puis, quand on se rend dans un laboratoire pour l’interroger, pouvoir résumer son travail en vingt secondes, dans le cas de la télévision ou de la radio, d’une conversation passionnante qui aura duré deux heures. La télévision est un média de masse, et

elle contraint inévitablement à faire court : pour reprendre un propos adressé un jour à l’un de vos rapporteurs, dans journaliste, il y a « jour ».

C’est ce que nous constatons à l’Office : en voulant traiter de sujets sur le long terme, nous nous privons d’un certain nombre de médias, même ceux qui sont les plus proches du Parlement, qui ne considèrent pas qu’il soit possible de suivre un sujet sérieux sur une année entière.

La presse est un média plus élitiste, qui touche moins de personnes, et qui pourrait permettre un traitement plus approfondi des sujets et des controverses.

Toutefois, dans la presse à grand tirage, confrontée à des problèmes financiers et des réductions d’effectifs, les journalistes scientifiques ont presque disparu au profit de journalistes multicasquettes pouvant écrire sur tous les sujets, de la transgénèse à la finance haute fréquence (ordres passés à la milliseconde), des problèmes de main d’œuvre dans le BTP à la critique d’un nouvel opéra musical.

1. La formation et le statut des journalistes

Pour les étudiants en journalisme, le seul enjeu scientifique est la vulgarisation. Dès qu’un débat devient complexe, les gens zappent, ce qui impose au journaliste de faire un travail considérable pour présenter les problèmes scientifiques ou technologiques.

Pour le producteur comme pour le téléspectateur de la société de masse, la science est rébarbative, c’est un sujet difficile qui ne cadre pas bien avec le très élégant concept de « temps de cerveau disponible ».

Les sujets scientifiques sont aussi complexes pour le journaliste, qui doit assimiler d’épais dossiers. Dans une rédaction, un seul journaliste est généralement chargé de toute la rubrique « Sciences » ou « Nouvelles technologies ». Elle recouvre des domaines extrêmement pointus, dont il ne peut connaître tous les aspects, alors même que, du jour au lendemain, il doit être capable de résumer en moins de trois minutes une information très précise.

Le plus simple est de transmettre une information qui concerne directement les citoyens, comme tout ce qui relève d’Internet ou de l’informatique. L’auditeur auquel on annonce une nouvelle application iPhone tend immédiatement l’oreille. L’intéresser aux nanotechnologies demande plus d’effort.

M. Frédéric Dupuis nous a expliqué en audition publique que dans l’émission Capital, Emmanuel Chain racontait des histoires à travers des personnages, ce qui supposait non seulement de trouver des gens susceptibles d’incarner un problème, mais aussi de faire comprendre aux téléspectateurs que leur histoire les concernait. C’est un exercice très difficile dans le domaine scientifique, mais c’est une méthode qui permet de garder l’attention du public.

Si, quand on donne un calcul mathématique à résoudre à un élève de troisième, on ne lui explique pas à quoi cela pourra lui servir plus tard, et qu’on ne lui cite pas quelques exemples, il risque de trouver la matière aride. Le rejet est tentant. C’est pour cela que ceux qui défendent une thèse éloignée de la science et qui fait écho aux peurs de chacun communiquent toujours très facilement.

Quoi de plus facile que de filmer un faucheur volontaire en train de saccager des plans d’OGM ou de tenir des propos enflammés qui donneront lieu à des réactions et seront repris par l’AFP ?

2. Les médias : diffusion des peurs ou informations sur les risques ?

Nombre d’émissions de vulgarisation scientifique, généralement destinées aux jeunes, fonctionnent très bien pourvu que la science soit mise en scène, c’est-à-dire présentée de manière simple et agréable.

Trop souvent, les relations entre les médias et la technologie se soldent par un gâchis. Quand un journaliste, faute d’envie ou de temps, renonce à lire 300 pages d’un dossier compliqué, l’information ne circule pas. Autre écueil : chaque fois qu’il est donné de la science une image austère, sinon ésotérique, le fossé se creuse entre ceux qui la connaissent et les autres.

Désormais, les sujets d’investigation connaissent une suite sur Internet, sur les blogs, forums et réseaux sociaux, ce qui crée une vie de l’information. C’est particulièrement vrai pour les grands formats, qui présentent beaucoup d’histoires.

Leur diffusion donne lieu à quantité de réactions, notamment sur Twitter, tandis qu’en amont, les journalistes ont annoncé leur sujet sur Facebook et que les sociétés de production ou les chaînes ont projeté des images en avant-première sur Dailymotion.

Les réactions, qui montent en puissance sur les tweets et les blogs, ne sont pas canalisées. Le débat échappe au journaliste, qui n’est plus en mesure de faire des mises au point. L’information est livrée à tout le monde, et tout le monde s’improvise journaliste.

C’est un des problèmes de l’hypercommunication : tout se vaut, sans pouvoir distinguer le meilleur du pire.

Le rôle de la télévision, si étrange que cela paraisse, est non d’informer, mais de sensibiliser le public à l’information, à charge pour lui, s’il s’y intéresse, de lire les journaux, d’acheter des livres, de rencontrer des gens ou d’assister aux débats.

III. LES RÉPONSES AUX PEURS EXPRIMÉES PAR LA SOCIÉTÉ Dans la partie précédente, nous avons étudié le cas de figure où le risque est connu, et il était possible de statuer sur le décalage entre la peur, perception de ce risque par la population, et le risque objectivement mesuré. Dans ce cas, la réponse est la prévention.

Mais si le risque est indéterminé, on est, comme le dit Edgar Morin, dans le domaine « du risque du risque ». Ainsi, est-il possible de prendre des décisions ? Sur quels éléments se baser ? Peut-on faire des calculs subjectifs pour un risque pris collectivement ?

Comment se place le principe de précaution dans ce cadre ?

A. L’INNOVATION AU TRAVERS DU PRISME « PRINCIPE DE PRÉCAUTION »

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