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L ES HOMMES DE LA « REVOLUTION »

Dans le document Le maïs et le Béarn de 1945 à 1960 (Page 62-67)

LE LANCEMENT DES HYBRIDES

A- L ES HOMMES DE LA « REVOLUTION »

La réunion à la mairie de Pau est importante car elle rassemble, outre les dirigeants de l’AGPM, des représentants du ministère de l’Agriculture, de l’ONIC, de la recherche agronomique et de l’interprofession des semences. C’est une concertation informelle mais capitale, car des engagements précis vont être pris.

La conclusion du congrès à laquelle tout le monde adhère est que l’avenir de la culture du maïs en France est désormais lié à l’utilisation des semences hybrides. Ceci étant posé, deux solutions sont possibles : on achète

chaque année ces semences aux américains ou on les produit en France. Dans cette seconde optique, il faut assurer l’organisation de la production1.

Le professeur Alabouvette interroge très directement Louis Bidau et Jacques Etchebarne, qui représentent l’AGPM, afin de savoir vers quelle solution ils souhaitent s’orienter. L’AGPM a-t-elle la volonté et la capacité suffisantes pour prendre en charge l’organisation de la production ? Louis Bidau répond par l’affirmative2.

Les participants à la réunion ont fixé ensemble les objectifs et, parmi eux, se trouvent ceux qui vont être les acteurs locaux principaux de la « révolution du maïs hybride ». Ils ont en commun une foi en leur mission qui va les conduire à un engagement personnel total. La longévité à leurs postes respectifs et leur bonne entente seront les gages de la réussite.

A-1 Louis Bidau

Parmi eux, Louis Bidau occupe une place prééminente. Fils d’un domestique agricole devenu un petit propriétaire, il a fait ses premiers pas dans le syndicalisme dans les années trente aux côtés de Samuel de Lestapis, leader paysan incontesté à l’époque dans le département des Basses-Pyrénées. Louis Bidau a pris sa succession en décembre 1943 en assumant la présidence de la corporation paysanne, structure imposée par le régime de Vichy. Dès la Libération, il a pris la tête de la nouvelle organisation syndicale départementale, dans les circonstances détaillées dans la première partie du présent mémoire.

Il se hisse en quelques années aux commandes de nombreuses autres organisations syndicales et professionnelles locales. Il devient également membre de plusieurs instances nationales. En 1945, il accède à la présidence de la Fédération des syndicats agricoles du Béarn et du Pays basque (FSABPB). Fin 1949, il est porté à la présidence de l’Association Générale des Producteurs de Maïs (AGPM) suite au décès d’Hubert de Baillenx.

Dès 1946, il intègre le bureau national de la Fédération des syndicats d’exploitants agricoles, au sein duquel il occupe la fonction de secrétaire général adjoint.

1 Myotte Karine, La passion du maïs-Une histoire de l’AGPM, Paris, Cliomédi@, 1999, pp 18-19 2

Brierre Annette et Chaintrier Jean-Paul, Béarn Puissance Quatre, Pau, L Édition, 1989, p57 - AGPM Informations, supplément au n° 140, AGPM, 1984, 2p

Aux termes d’un arrêté ministériel du 19 avril 1946, il intègre le conseil de l’office agricole départemental3. Lors de la première réunion du conseil d’administration de l’union départementale de la CGA, tenue le 28 octobre 1946, il est élu à la présidence4.

Louis Bidau est également nommé au conseil supérieur de l’Agriculture en juin 1946, en qualité de représentant de la profession agricole. Il est affecté à la section n° 1 : organisation de l’exploitation, et à la section n° 9 : cultures sarclées. Il siège dans cette instance aux côtés d’un autre Béarnais nommé dans le même temps : Jacques Bernis- Bergeret, domicilié à Arudy5.

En 1951, Louis Bidau accède à la présidence de la coopérative de blé du bassin de l’Adour (CBBA), qui devient la coopérative agricole céréalière du bassin de l’Adour le 21 janvier 1952. La même année, il devient président de la chambre d’Agriculture des Basses-Pyrénées. Celle-ci sera l’une des premières en France à créer un service technique et économique et à impulser la mise en place d’un centre de gestion. Pour bien d’autres réalisations, la chambre d’Agriculture des Basses- Pyrénées, sous la présidence de Louis Bidau, précédera les orientations de la chambre nationale6.

Il sera également conseiller économique et social, présent dans les instances de l’ONIC, et dans celles de la mutualité agricole, au niveau local et national. Il devient membre de la commission consultative des assurances sociales agricoles à la fin de l’année 1950. Il assume aussi le mandat de maire de sa ville de Gan, de 1947 à 1977.

Il est membre du conseil d’administration du quotidien palois L’Éclair des Pyrénées depuis la création de ce journal à la Libération. Il assure aussi la direction du journal agricole départemental Le Sillon.

A-2 Jacques Etchebarne

Jacques Etchebarne est ingénieur agricole, diplômé de l’école nationale d’Agriculture de Montpellier. Il est originaire d’un petit village de la Soule, province du Pays basque contigüe au Béarn. Il a été recruté dans les organisations agricoles par Samuel de Lestapis pendant l’Occupation, le 2 novembre 1942, et il a fait connaissance

3 Le Sillon 15 juin 1946 4 Le Sillon 15 novembre 1946 5

Le Sillon 1er juillet 1946

immédiatement avec Louis Bidau. Les deux hommes ont partagé le même bureau7.

Après s’être occupé des questions viticoles et de production laitière durant quelques années, Jacques Etchebarne se consacre exclusivement au maïs et devient salarié de l’AGPM après la réactivation de celle-ci en 19478. Il sera étroitement associé à toutes les étapes de la révolution hybride, depuis les premier essais dans les Basses-Pyrénées jusqu’à l’expansion des cultures dans toute la France. Lorsqu’il cessera ses activités en 1978, l’AGPM comptera en France cent huit salariés.

Il sera le collaborateur principal et l’homme de confiance de Louis Bidau pendant trente ans, au sein de l’AGPM et de l’organisation nationale des producteurs de semences9.

Jacques Etchebarne voue une grande considération à Louis Bidau, chez lequel il a apprécié le courage, la capacité de travail et les talents oratoires. Il dit que la plus grande chance de sa vie a été de trouver Louis Bidau sur son chemin dès le premier jour de sa carrière10.

A-3 Louis Saint-Martin

Louis Saint-Martin, directeur des services agricoles du département des Basses-Pyrénées, est en poste depuis quelques mois au moment du congrès international. Il a pris la suite d’André Douence, décédé subitement le 28 septembre 1948, à l’âge de quarante-huit ans.

Louis Saint-Martin est ingénieur agronome. Originaire du département voisin du Gers, il a exercé les fonctions de professeur d’agriculture dans l’Aveyron, avant d’être nommé directeur des services agricoles du Gard, devenant à cette occasion le plus jeune directeur de France à ce poste. Il arrive à Pau précédé d’une flatteuse réputation. Au

7 Lors de notre entretien avec Jacques Etchebarne en octobre 2013, celui-ci, alors âgé de 96 ans, se

souvient parfaitement de cette date du 2 novembre 1942, comme de celle du 4 octobre 1984, jour de sa dernière visite à Louis Bidau avant que celui-ci ne décède quelques instants plus tard. Il se souvient bien de ses débuts professionnels, lorsqu’il prenait l’autobus très tôt le lundi matin à son village, pour venir travailler à Pau. Il évoque précisément les premiers essais d’hybrides et la mission maïs aux USA.

8 AGPM Informations, supplément au n° 140, Pau, AGPM, 1984, 2p 9

Agromaïs, Pau, septembre 1984, n°30, p15

début de l’année 1949, il visite les associations agricoles qui ne manquent pas de relever son caractère volontaire et déterminé11.

Il prononce un discours remarqué à l’occasion de l’assemblée générale de la fédération syndicale départementale, le 14 mars 1949, devant laquelle il fait part de sa volonté de collaborer étroitement avec les structures professionnelles12.

Il affiche ses priorités qui seront le développement de la culture du maïs et l’amélioration de l’élevage par l’insémination artificielle. Il compte s’investir pleinement et, à son entrée en fonction, il prévient sa hiérarchie, quelque peu interloquée, qu’il est là pour trente ans.

Fils d’un fermier gersois, issu d’une famille de neuf enfants, il avait découvert les Basses-Pyrénées à l’occasion des voyages annuels organisés par ses parents à Lourdes et à Biarritz. C’est dans le cadre verdoyant de la plaine de Nay, au pied des Pyrénées, qu’il avait imaginé, étant enfant, de vivre un jour13.

A-4 Luc Alabouvette

Le professeur Luc Alabouvette est lui aussi présent à la mairie de Pau. Il est rattaché à l’institut de recherches agronomiques de Montpellier, spécialisé dans l’étude des productions végétales. Dès les années trente, il a été chargé de suivre les travaux réalisés à la station de génétique de Saint-Martin-de-Hinx, gérée à l’époque par les chambres d’Agriculture des Basses-Pyrénées et des Landes. Il a noué, au fil de ses fréquents voyages, des liens étroits avec les techniciens de la station et les professionnels du maïs. Il participe à bon nombre d’assemblées générales et de manifestations locales. Il est apprécié par les syndicalistes pour sa compétence, sa proximité et sa foi en l’avenir du maïs.

Le professeur de Montpellier s’est rendu fréquemment en Amérique du Nord et s’est progressivement intéressé à la culture du maïs hybride. Il a étudié sur place tout le cycle de la production, du conditionnement et de la commercialisation de la céréale. Il se trouve ainsi en position de sachant et d’initiateur pour le passage au maïs hybride.

11 Le Sillon 1er février 1949 12

Le Sillon 1er avril 1949

Dans le document Le maïs et le Béarn de 1945 à 1960 (Page 62-67)