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3.3. D ISPOSITIF EXPÉRIMENTAL

4.2.1.1. L’expression de prises de positions exprimées

Il est à souligner d‟abord, que l‟élaboration d‟une opinion en classe, est un objet d‟enseignement cité par les curriculums scolaires algériens en vigueur et suivant les degrés de scolarisation. L‟expression d‟opinion est vue comme une prise de position de l‟apprenant sur la thématique proposée et qui se façonne à travers une dimension argumentative. Elle est abordée, ici, par une « entrée

communicative centrée sur les genres de textes sociaux publics » (De Pietro &

Gagnon 2013 :157) : l‟activité de débat. Ainsi, cette expression est fondamen- talement un dialogue dans la mesure où toute intervention initiative sollicite une réaction de l‟interlocuteur.

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169 Il y a affaire à une alternance de phases monologales où les débatteurs présentent à tour de rôle leur position et des phases d‟échanges où vont apparaitre les marques d‟accord/désaccord, de reformulation et de coénonciation.

Dans ce qui suit, nous comptons le marquage explicite des prises de positions exprimées des apprenants dans les deux débats. Toutefois, la formulation d‟opinion est un phénomène vaste qui n‟est pas entièrement saisissable sur la base de critères formels précis (Mullan, 2010 ; Hutchby & Wooffitt, 2008 ; Psathas, 1995). D‟ailleurs, à notre connaissance, aucune étude ne propose de définition strictement interactionnelle de l‟expression d‟opinion. C‟est pourquoi le recensement s‟est basé sur une définition fondée sur des critères sémantiques et interactionnels, établie par cette étude.

 Les prises de positions exprimées dans le premier débat

L‟observation des données du p r e m i e r débat révèle la fréquence et la prééminence d‟une particularité linguistique formelle des réponses par les apprenants dans les séquences d‟échanges d‟opinion : le verbe « je pense ». Ce verbe devient, dans ce débat, une ressource récurrente que les apprenants exploitent à diverses interventions pour répondre aux sollicitations de l‟enseignant. Le tableau suivant présente les opinions exprimées par les apprenants participant au débat initial :

Opinions dans le débat 1

TP12 : A11 : je pense que les étudiants quittent leur pays la première cause pour

faire une carrière, et le but principale manque de formation j‗ai un autre but peut-être c‗est pour faire un nouveau cercle d‗amis

TP14 : A7 : personnellement, je crois chaque étudiant quittait son pays vers un autre il

a son but 1er réussir, 2ème avoir un diplôme et revenir à sa patrie et travailler

TP19 : A16: mais je pense que en Algérie il y cette capacité il n y a pas de chance. TP21 : A8 : je pense que c‗est leur volonté qui leur pousse à quitter le pays...

TP24 : A14 : Selon, mon point de vue, partir à l‗étranger permet aux étudiants

d‗avoir des responsabilités et vivre une aventure et une expérience et avoir un diplôme qui valorise leur CV.

TP31 : A13 : D‗après les points de vue de ma camarade, je trouve que la seule raison qui

poussent les étudiants de quitter leur pays c‗est (le manque de formation et les outils /

TP87 : A18 M. Amine : il ne faut pas se mentir pour se dire ce qui émigrent c‗est pour

avoir un signe de richesse on n‗y va surtout pour avoir un gagne-pain. Personnellement je pense que beaucoup le font s‗ils vont dans d‗autres pays c‗est pour apprendre pour si on peut dire copier et s‗inspirer des autres....

TP89 A22 : personnellement je pense que aller à l‗universitaire étrangère pour

chercher des savoirs c‗est bien mais avoir ces outils qu‗on cherche chez soi c‗est mieux, donc c‗est à l‗Etat et aux algériens de valoriser l‗université algérienne

(08) opinions exprimées peuvent-être repérées. Même si l‟objectif premier, dans ce débat, soit d‟échanger, de négocier des points de vue, ce n‟est qu‟au 12ème tour qu‟apparait le premier point de vue explicité par une structure d‟opinion « je pense que » de l‟apprenante A11. Cette dernière donne son point de vue à la demande de l‟enseignant. Elle étale sa vision quant aux causes de l‟émigration sans étayer son idée et donc, sa participation n‟est pas très dynamique.

Ensuite, la plupart des apprenants ne se positionnent pas par rapport à l‟opinion proposée par un camarade, c‟est l‟enseignant qui intervient pour faire avancer le débat et laisse réagir les apprenants. Ce comportement peut être qualifié de manque « d‟attente d‗un enchaînement réactif » (Kerbrat-Orecchioni, 1990 : 203).

Voilà des exemples qui ont suscité des réactions suite à l‟évaluation de l‟enseignant :

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TP19 : mais je pense que en Algérie il y cette capacité il n y a pas de

chance.//

E : manque de chance pour pouvoir se former de manière pertinente.

TP20 : A8 : je pense que c‗est leur volonté qui leur pousse à quitter le pays// E : ah ! C‗est la volonté.///c‗est la volonté de réussir et de développer leur

pays et développer eux-mêmes, qui leur poussent à changer de pays pour ramasser plus d‗informations et revenir développer.

Les deux apprenants réagissent et le débat progresse suite à l‟intervention de l‟enseignant. A8 adhère à l‟opinion de A19 implicitement : « c‗est leur

volonté » pour dire « il n y a pas de chance » en Algérie.

En somme, généralement, les réponses des apprenants interviennent de manière adjacente à la sollicitation de l‟enseignant. L‟expression d‟opinion est majoritairement formulée individuellement par les apprenants. Le verbe d‟opinion « je pense » s‟observe comme un mot routinier pour se positionner dans l‟activité interactive du débat et utilisé au début de tour comme ressource pour prendre un engagement : une sorte d‟uniformisation de phrase.

Il semblerait, aussi, que les apprenants évitent l‟expression manifeste de leurs opinions : une tendance à répondre de manière minimale et succincte.

L‟écoute des données du corpus laisse entendre que les réponses sont généralement suivies d‟une relance de l‟enseignant qui rend manifeste le caractère insuffisant de la réponse de l‟apprenant.

 Les prises de positions exprimées dans le deuxième débat

Dans le deuxième débat, 41 opinions explicitées sont relevées et qui ont suscité des réactions. Chacun des participants tente de proposer un point de vue nouveau ou développe une opinion déjà entamée.

Opinions dans le débat 2

TP6 : A14 : à mon avis, le diplôme algérien n‗est pas reconnu universellement, si un

jeune diplômé algérien passe un entretien de recrutement son diplôme obtenu en Algérie n‗est pas valide et donc il lui faudra un équivalent qui nécessite d‗autres formations plus approfondies

TP35 : A20 : A mon avis je suis avec les étudiants qui quittent leur pays vers l‗occident

parce que l‗enseignement en France et supérieur et de grande qualité avec un frai d‗inscription réduit.

TP 41 : A22 : je pense et je crois que les études ce n’est pas le manque de formation scientifique ce n‗est pas la seule cause comme vous l‗avez dit la dernière fois (

s‗adressant à l‗enseignant) l‗image que renvoie les immigrés de leur vie là -bas c‗est une image de succès c‗est une image de qualité de sa vie, donc, je pense que les algériens et l‗étudiant algérien perçoit cette image cette aventure, comme l‗aventure et le droit chemin pour gagner sa vie pour aller vers le succès et pour être perçu comme

TP 49 : A15 : d‗après mes connaissances je crois que les étudiants quittent leur

pays pour chercher du travail en Europe à cause de l‗impossibilité de trouver un travail dans son pays, j‗ai reçu que cette année 2016 décembre 2016 plus d‗un million de chômeurs en Algérie c.v.d. il y a pas de travail.

TP51 : A5 Amira : oui pour ma part, je pense que partir à l‗étranger l‗avis de

beaucoup des étudiants pour cherche une formation professionnelle un travail entre parenthèse l’eldorado mais n‗oubliez pas que l‗Algérie est un grand pays nous donnes des grands médecins des ingénieurs des grands professeurs donc pas forcément aller à l » étranger pour chercher un travail

TP63 : A14 : je pense que les étudiants partent à l‗étranger pour construire quelque

chose de très brillant ... et aussi ils sont accueillis à bras ouverts car leur formation n‗a couté aucune dépense pour le pays d‗accueil par contre en Algérie il y a un manque de formation

TP64 : A8 : Mr je pense que si on a de la volonté on peut se former et avoir des

connaissances même si on est en Algérie cela dépend de la volonté mais cela Mr ici il y certains familles qui n‗accepte pas que leur fille quittent le pays pour se former par peur que sa fille... ils n‗acceptent pas que sa fille va pour se former. juste parce que c‗est une fille elle peut se perde elle peut ne pas retrouver /// surtout hors du pays peut être ils acceptent qu‗elle quitte la ville peut-être mais pas son pays. elle réussira comme même, si elle a de la volonté elle réussira la ou elle est.

-TP70 : A6 : Eh ben pour moi personnellement je pense que si j‗aille à l‗Europe pour étudier (correction je vais/ aller) d‗abord pour obtenir un diplôme professionnel et aussi des qualifications respectées à l‗international ; aussi j‗aurai bien l‗aventure de découvrir l‗autre pays pourquoi pas (très bien) et aussi pourquoi pas se situer là -bas -//

TP : 79A1 : M. Je pense la majorité des algériens quitte l‗Algérie parce que il y a

plusieurs rêves, par exemple fréquenter de belles voitures, fréquenter des belles femmes et l‗outil pour gagner tout ça c‗est étudier à l‗étranger ou l‗émigration.

173 Nous avons relevé que, dès l‟ouverture du débat, l‟apprenante A9 affiche clairement sa position dans le deuxième tour de parole.

TP 2 : A9 : d’après moi je suis avec l’émigration des étudiants euh, car

c‗est une bonne idée euh, euh, c’est une bonne idée, euh, première chose, pour approfondir leur formation et même avoir un diplôme universellement

TP3- E : un diplôme reconnu universellement, oui ; TP4- A9 : et même d‗avoir une carrière professionnelle

TP 5- A3 : je suis d‗accord avec le numéro n°9, qui dit que les étudiants

quittent l‗Algérie car, il y a un manque de formation je veux lui dire que la formation ne permet pas d‗avoir une insertion professionnelle et ne permet pas de produire.

Elle prend soin de qualifier l‟émigration de « bonne idée » dans la mesure où ce phénomène permet d‟approfondir la formation et avoir un diplôme universellement reconnu. Cet exemple illustre aussi la dynamique de l‟expression d‟opinion, lorsque l‟un des locuteurs apporte un point de vue ou une opinion, il demande, implicitement ou explicitement, à ses partenaires de se positionner par rapport à ce qui vient d‟être proposé.

L‟opinion explicité d‟A9, « d’après moi je suis... », faite suite à la question principale posée par l‟enseignant est soutenue par l‟apprenant A3: « je suis

d‗accord avec le numéro n°9 » et apporte des informations nouvelles : « la formation ne permet pas d‗avoir une insertion professionnelle et ne permet pas de produire ».

Ainsi, nous avons identifié que l‟expression de l‟opinion est beaucoup plus importante dans le 2ème débat (41 opinions contre 08 dans le 1er débat). Puis, ces extraits rendent, également compte que le second débat présente des formulations d‟expression d‟opinion largement plus développées sur le plan du contenu de la part des apprenants. A22 développe son opinion sur un long tour de parole. Son développement est ratifié par un autre élève, ainsi que par l‟enseignant. Ainsi, des configurations où l‟expression d‟opinion est construite de manière collaborative sont observées : plusieurs apprenants réagissent à la

sollicitation de l‟enseignant et co-construisent localement leurs opinions de manière dynamique. Les sollicitations ont permis de voir une évolution de l‟activité d‟échange qui s‟oriente vers une forme d‟autonomie des apprenants quant à la gestion de leur participation et à leurs prises de parole au sein du groupe.

4.2.1.2. L’étayage et la justification de prises de positions par les