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7. Analyse des perceptions des gains en capital humain de la part des travailleurs

7.1. Les catégories d’expériences selon le degré de construction des capacités

7.1.4. L’expérience entrepreneuriale établie

La dernière catégorie rassemble les travailleurs saisonniers qui ont des bases solides pour la réalisation d’un projet de nature économique. Celui-ci peut être déjà en cours, sur le point de débuter ou en préparation. Encore ici, une différenciation est faite entre les travailleurs cultivant leurs propres terres agricoles et ceux qui ne le font pas. Au total, ce groupe représente cinq des participants de l’étude. Les séjours varient entre un et 10 et la moyenne totale est de 8,2 séjours, ce qui en fait la moyenne la plus élevée de tous les groupes.

Le tableau 8 fait référence aux deux travailleurs ne pratiquant pas l’agriculture à leur propre compte et ayant une activité commerciale établie. Les travailleurs de ce sous-groupe ont réalisé respectivement sept et 10 séjours, ce qui nous permet d’obtenir une moyenne de 8,5 séjours. De plus, tous deux sont d’accord avec le fait que les connaissances acquises lors de leurs séjours hors-Mexique ont des possibilités d’application de retour dans la communauté. Ici, les travailleurs veulent arrêter de venir au Canada, ce qui marque une séparation avec les catégories précédentes. État d’origine Séjours au Canada - PTAS Acquisition de connaissances et application Possession de terre Poursuite de projets Intérêt à demeurer dans le PTAS

Mexico 10 séjours Oui, pourraient être applicables

Non Serre Cesser PTAS, 4-5 ans max. Hidalgo 7 séjours Oui, s’appliquent Non mentionné Vente de matériaux

de construction

Cesser PTAS, 3 ans max.

Tableau 8: Répartition des deux travailleurs vivant une expérience entrepreneuriale établie sans agriculture. Source: Données d’enquête (2012).

Le tableau 9 correspond aux trois travailleurs pratiquant l’agriculture et ayant une activité commerciale établie. Les travailleurs de ce sous-groupe ont tous réalisé huit séjours. Pour ce qui est de l’application des connaissances de retour dans la communauté, deux travailleurs croient qu’il y a des possibilités contre un seul qui pense le contraire. Comme l’autre sous-groupe, les travailleurs ayant un projet en voie de se réaliser planifient leur «retraite» du programme dans les années à venir.

État d’origine Séjours au Canada - PTAS Acquisition de connaissances et application Possession de terre Poursuite de projets Intérêt à demeurer dans le PTAS

Morelos 8 séjours Oui, ne peuvent s’appliquer Oui Culture de l’arachide, d’amarante et de sorgho et transformation des produits Cesser PTAS, bientôt

Mexico 8 séjours Oui, quelques-unes s’appliquent

Oui Culture du maïs

et papeterie

Cesser PTAS, 2-4 ans max. Oaxaca 8 séjours Oui, s’appliquent Oui Culture de maïs

et courgettes et

réseau de clients

Cesser PTAS, 2 ans max.

Tableau 9: Répartition des trois travailleurs vivant une expérience entrepreneuriale établie avec agriculture. Source: Données d’enquête (2012).

Les variables présentées dans ces quatre catégories ont certes été présentées dans le chapitre antérieur, mais il est intéressant ici de les voir en relation entre elles. Avant d’analyser les tableaux, il est important de préciser que l’indication « non mentionné» est considérée comme une réponse en soi. En effet, plusieurs travailleurs n’étaient pas en mesure de répondre à la question lors des entrevues et ce malgré l’exploration de celle-ci. Les raisons pourraient être qu’ils n’avaient pas réfléchi à la question, qu’ils ne pouvaient exprimer leur pensée ou qu’ils ressentaient de la gêne.

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le cadre du PTAS. En dehors de la catégorie « L’expérience d’appoint » qui est moins représentative vu le faible nombre de participants la composant, on note un rapport entre le nombre de séjours au Canada et les activités réalisées de retour dans la communauté. Ce dernier est léger s’il l’on se fie aux figures mettant en relation le nombre de séjours avec la pratique de l’agriculture et la volonté d’entreprendre mais il est bien significatif puisque la catégorisation des expériences abonde en ce sens. En effet, la moyenne de séjours passe de 4,2 à 5,2 séjours entre la première et la troisième catégorie puis à 8,2 séjours pour la quatrième catégorie, sans compter les 8,0 séjours de la deuxième catégorie, ce qui permet de penser que plus un travailleur séjourne au Canada dans le cadre du PTAS, plus il aura plus de chance d’avoir des idées de projets.

Un autre élément remarquable est le fait que l’opinion sur l’acquisition des connaissances et leur application de retour dans la communauté, une forme de développement de capital humain, tend à être de plus en plus positive auprès d’un plus grand nombre de personnes au fur et à mesure que des séjours sont réalisés dans le cadre du PTAS et qu’évolue la situation économique du travailleur. À cet effet, seulement 22,2 pourcent des neuf travailleurs de la première catégorie croient qu’il y a des possibilités d’application de retour dans la communauté avec les connaissances acquises au Canada. Il est possible de constater que ce pourcentage augmente à 33,3 pourcent chez les trois travailleurs de la deuxième catégorie, puis à 61,5 pourcent chez les 13 travailleurs dans la troisième catégorie pour enfin atteindre 80,0 pourcent chez les cinq travailleurs dans la dernière catégorie. Autrement dit, il semble y avoir une conscience majeure des possibilités l’environnement immédiat chez les migrants habitués à travailler à l’étranger.

Il est intéressant de constater un éveil de l’esprit entrepreneurial parmi la majorité des travailleurs interviewés. Bien sûr, certains travailleurs ont déjà réalisé de nombreux séjours et ne voient pas de possibilités dans le futur. Ils ne sont pas pour autant majoritaires. Mais rappelons simplement que la troisième catégorie, « L’expérience entrepreneuriale souhaitée » regroupe 13 des 30 participants de

l’étude. Bien sûr, certains ont déjà plusieurs projets en tête alors qu’ils en sont à leur premier séjour tandis que d’autres ébauchent leurs plans petit à petit.

Finalement, il est remarquable de voir comment le nombre de travailleurs désirant cesser le PTAS augmente au fur et à mesure que les années passent et que des projets se mettent en place. En effet, aucun travailleur des deux premières catégories n’envisage clairement de rester de façon permanente au Mexique tandis que les travailleurs vivant une expérience entrepreneuriale réalisable comptent arrêter la venue au Canada.

Si l’on se fie à la définition du capital de Bebbington (1999) le présentant comme les ressources servant à développer des moyens d’existence basés sur des actifs, il est possible de faire quelques parallèles avec la situation des travailleurs. Les ressources sont ici les connaissances acquises et le capital humain, les moyens d’existence sont associables aux revenus que représente le PTAS puisqu’ils correspondent à la majeure partie du salaire annuel des travailleurs et enfin les actifs font référence aux activités concrètes, soit l’agriculture ou un projet commercial, mis en place grâce aux remesas et représentant les projets à long terme. Il est intéressant de constater que les travailleurs ayant réalisé plusieurs séjours semblent avoir acquis une expérience leur permettant de se croire en mesure de se lancer dans des projets agricoles ou économiques, ce qui rejoint la réflexion de Becker (2009) sur l’importance d’investir dans la formation professionnelle pour gagner en capital. C’est qu’ils ont nécessairement développé des capacités en lien avec le travail réalisé au sein du PTAS et qu’ils cherchent à les mettre en pratique de retour dans leur communauté pour acquérir une certaine indépendance économique.