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a) La surpopulation agricole

Le délestage des villages : journaliers, domestiques, bordiers...

En valeur relative, la population agricole se maintient à niveau constamment élevé de la fin du XIXe à la seconde guerre mondiale. En valeur absolue, la chute est cependant brutale entre 1891, où le nombre de foyers agricoles est le plus élevé, et 1911. Entre ces deux dates ce sont 40% de travailleurs agricoles en moins et environ 18% des exploitations qui disparaissent. Entre 1911 et 1931, la population agricole diminue moins rapidement et suit la moindre décroissance du

bordiers le poids de l’accroissement de la population rurale, ce sont eux, ainsi que la main-d’oeuvre précaire des journaliers et domestiques, qui alimentent l’exode. C’est en effet la population des villages de bordiers qui diminue, ainsi que celle des agriculteurs du bourg. Si ce dernier a compté jusqu’à 20 foyers agricoles en 1886, essentiellement des petits paysans-propriétaires, il n’en compte plus que la moitié en 1921 et aucun en 1936. Petits bordiers et journaliers, dont le statut se confond dans leurs marges, sont ceux qui disparaissent en premier. C’est donc la catégorie des plus misérables qui quitte la terre.

Le phénomène migratoire et l’attrait de la Garonne...

L’intensification du travail, la domesticité, les mariages tardifs, le célibat définitif, laïc ou religieux, l’exploitation de petites borderies familiales ne suffisent pas à maintenir l’équilibre de l’accès aux terres (voir la seconde partie sur ces questions). Outre l’ouverture apportée par l’industrialisation, il reste la solution de l’émigration. Elle s’effectue tardivement dans le département de la Vendée, entre 1890 et 1910, le maximum des départs étant enregistré après 1906 (Martin, 1989b). Selon Jean Yole en 1931, 40% des Vendéens quittent la terre pour s’employer dans la fonction publique, 8,5% sont employés par l’industrie locale, 6,5% partent vers les villes et 40% vers les départements agricoles du Midi (chiffres cités par Martin, ibid.).

Ces chiffres montrent que l’émigration est adoptée en désespoir de cause : la société bocaine de la fin du XIXe siècle et du début du XXe condamne l’exode vers la ville. Le Sud-Ouest : Charentes et départements de la Garonne, exerce alors une attraction qui permet aux ruraux de Vendée, comme pour les Bretons, de perpétuer la vie paysanne et les valeurs familiales qui s’y rattachent. C’est la seule voie qui leur paraît pensable. La migration se met en place grâce à de véritables filières organisées par les notaires et les experts fonciers. Dans le contexte d’alors, l’émigration vers le Sud-Ouest prend un caractère singulier :

- elle est familiale, c’est le groupe domestique en entier qui quitte la Vendée et qui reproduit sur le lieu de destination la structure familiale de la métairie,

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- les migrants quittent une organisation sociale qu’ils recréent sur place, dans les associations sociales, amicales et religieuses, entretenant jusqu’à aujourd’hui un attachement fort à leur contrée d’origine (Martin, ibid.).

La migration vers les régions désertifiées s’intègre dans « la logique de

la paysannerie vendéenne en quête de promotion terrienne » (Martin, 1989b, p. 65). Les terres bon marché du Sud Ouest permettent aux ruraux de ne pas quitter la

campagne pour la ville, « au contraire, ils tentent de réaliser leurs rêves de grande

propriété ou de grande exploitation » (ibid., p. 36) inaccessibles en Vendée. La famille est cependant, selon Jean-Clément Martin, la véritable clé de cet exode au delà des causes économiques. L’émigration vers le Sud-Ouest ne rompt pas avec l’habitude de se déplacer pour trouver une ferme libre. Elle s’insère dans les cycles familiaux qui font qu’à chaque génération la communauté de la ferme se défait à la succession, moment crucial où les liens d’interdépendance et de proximité affective sont rompus brutalement. Il reste aux enfants qui ne succèdent pas sur l’exploitation familiale l’espoir de reconstituer une nouvelle communauté. La migration a pour cadre les stratégies terriennes qui alimentent les conflits ou une volonté d’exploiter une ferme plus grande pour maintenir ensemble plusieurs couples mariés. Elle permet ainsi de reconstituer ailleurs la communauté de la grande exploitation, et satisfait la faim de

terres chez les paysans « exclus de leur destin » (Martin, ibid., p. 35). « L’exode est

donc perçu comme un moment dans l’ensemble de l’évolution familiale, s’inscrivant dans une continuité. le départ ne rompt pas le destin collectif, mais l’affirme ; aussi dur qu’il soit, il permet le maintien d’une identité familiale et collective, l’appartenance à la paysannerie » (ibid., p. 66).

« Condamnable » dans son principe, la migration devient ainsi « acceptable » en même temps que salutaire pour la Vendée d’alors : elle permet de maintenir les grandes exploitations, elle accélère la mécanisation à partir de 1929 du fait de la relative rareté de la main-d’oeuvre et de son coût à la hausse, elle agit

comme un « électrochoc sur les notables qui s’acharnent à trouver des remèdes à

l’exode » (Martin, 1989b, p. 36) : création d’ateliers industriels, dynamisation des ruraux. L’équilibre agricole est cependant maintenu, grâce à la baisse de la mortalité infantile la région demeure excédentaire sur le plan démographique. Le Bocage reste ainsi un réservoir de main-d’oeuvre.

agriculteurs se maintiennent nombreux car les surplus n’affectent pas la population agricole en place, mais ce sont les jeunes qui s’exilent vers les villes ou qui émigrent vers des régions manquant de main-d’oeuvre.

Généralement, dans le Bocage, la population augmente tout en demeurant agricole car, parallèlement, durant la seconde moitié XIXe, les petites industries rurales et les métiers périclitent, aboutissant à une simplification de la structure sociale (Renard, 1975). Ce phénomène est cependant compensé dans le Nord Est par le maintien plus important d’une activité ouvrière et des métiers familiaux. La commune, et plus généralement le secteur Montaigu-Clisson-Cugand, semblent plutôt suivre le mouvement du Choletais sur ce plan. Sur la base d’une industrie déjà présente et diversifiée, la région de Cholet renouvelle son industrie à partir des années 1870-1880 par la volonté des notables de retenir la population rurale. La composition socioprofessionnelle de Saint-Hilaire à différentes dates (voir tableau 7) montre que l’artisanat et le travail ouvrier progressent dans la seconde moitié du XIXe, puis de nouveau après la première guerre mondiale.

Tableau 7 - Structure socioprofessionnelle de Saint-Hilaire-de-Loulay de 1851 à 1931 1851 1891 1911 1931 propriétaires 12 (1%) 12 (0.5 %) 4 4 (0,5%) pop. agricole 1119 (88,5%) 1659 (84%) 981 (82%) 823 (78%) dont domestiques 225 242 161 70 dont journaliers 182 166 75 45 artisans1 94 (7,5%) 252 (13%) 154 (13%) 183 (17.5%) autres prof.2 36 (3%) 53 (2.5%) 59 (5%) 41 (4%) total 1261 (100%) 1976 (100%) 1198 (100%) 1051 (100%)

1 dont ouvriers et commerçants

2 comprenant notamment les domestiques aux personnes, instituteurs, clergé source : listes nominatives des recensements

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b) L’apparition d’une nouvelle industrialisation

L’industrialisation de la fin du XIXe et de la première moitié du XXe siècle se met en place dans un contexte de surpopulation, de misère et d’exode rural. La renaissance industrielle s’inscrit dans une forme de continuité : celle des savoir-faire et des méthodes de travail des anciennes activités. Mais elle marque aussi une rupture : ce n’est plus la bourgeoisie des villes ou les dynasties protestantes des

bourgades de la Sèvre qui détiennent les industries, mais « l’industrialisation qui se

met en place à la fin du XIXe siècle recourt essentiellement, pour ne pas dire exclusivement au patronat local, issu des bourgs et des petites villes » (Martin, 1983, p. 40), avec l’assentiment voire le soutien des notables et du clergé local.

L’industrie reste à orientation textile, mais les produits se diversifient. Les filatures de lin disparaissent, la laine et le linge de maison se développent et, surtout, apparaît l’industrie de la chaussure et de la pantoufle (les « savates ») dans un contexte non concurrentiel. L’industrie de la chaussure démarre avec une production simple et bon marché. Le textile fournit la matière première et les tisserands, rendus disponibles par la transformation du tissage, s’adaptent bien à cette nouvelle production.

L’industrie qui naît est insérée dans le milieu rural et complémentaire de l’activité agricole. L’atelier, qui est créé par un ou plusieurs artisans associés, s’adjoint une main-d’oeuvre que l’agriculture ne peut pas absorber. La continuité avec la période précédente tient à l’abondance de la main-d’oeuvre des campagnes, son savoir-faire, son moindre coût et la flexibilité de son emploi. Le travail est surtout féminin, il s’effectue en partie à domicile et n’entrave pas l’activité agricole.

Les nouvelles industries se moulent bien dans l’organisation du travail

à domicile menacé de disparaître. Dans la chaussure, « différents travaux de piqûre,

par exemple, peuvent être livrés à des ouvrières à domicile, tandis que l’atelier assume d’autres opérations, dont le montage de la tige sur la semelle » (Sauvaget, 1966, p.

38). Pour le linge de maison, « un des caractères de cette confection est l’emploi d’un

grand nombre de femmes à domicile - plus tard il s’agira d’anciennes ouvrières des manufactures textiles, mariées ou retraitées - à des activités du type dentelle ou broderie. C’est un simple prolongement du travail à domicile dirigé par les fabricants choletais qui fournissent la matière première et collectent le produit achevé »

(1966), tout en notant la disparition de cette activité, cite cependant une étude, réalisée en 1957, sur une entreprise choletaise dont le travail à domicile était dispersé sur 18 communes, certaines se situant dans le Bas Bocage vendéen, à 10-20 km au sud de Saint-Hilaire. Il est à peu près sûr, d’après les témoignages recueillis et à travers la lecture des recensements (voir plus loin), que l’activité textile des femmes pour le compte de fabriquants est le fait des familles ouvrières, des journaliers et des petits paysans propriétaires. Dans les grandes fermes, les femmes sont trop absorbées par le travail agricole : champs et basse-cour. Les femmes font de la couture ou de la broderie pour la maisonnée, l’après-midi en hiver et le soir à la

veillée où le travail ne cesse pas54. Pour la confection du linge de maison, la matière

première est fournie aux tisserands qui réalisent les ouvrages.

En ce qui concerne l’activité textile à domicile, on ne peut pas parler pour le Bocage d’une proto-industrialisation s’appuyant sur les groupes domestiques étendus, comme l’a modélisé Hans Medick (1976) à partir de plusieurs régions européennes. A Saint-Hilaire, les groupes domestiques étendus se trouvent presque uniquement dans les grandes fermes, et la structure élargie du groupe domestique tient sa raison d’être de la nécessité d’une main-d’oeuvre nombreuse où chacun est employé pour le travail de la terre (voir chapitre V). Le travail à domicile pour le compte de négociants et de firmes textiles est le fait de petits artisans, journaliers et ouvriers pauvres, exerçant souvent plusieurs activités. La communauté familiale de la grande ferme ne doit pas son maintien à la proto-industrialisation. L’industrialisation n’a pas modifié la structure sociale, en particulier la prééminence de la grande ferme dans le système agricole (voir plus loin). Elle a permis, par contre, à toute une population rurale éclatée en ménages simples de se maintenir sur place. Il faudrait alors examiner en quoi les solidarités s’exercent entre groupes

54 Voir à ce propos dans la revue Racines (La Roche-sur-Yon, n° 73, mars 1999), l’importance de la couture réalisée à partir de la culture du lin chez les femmes du Bocage autrefois : confection des vêtements, constitution du « trousseau de jeune fille », linge des petits enfants. La transmission des savoir-faire de broderie et de couture, la transmission du linge de mère en fille, le cadre des veillées où avaient lieu les travaux de couture rattachaient directement cette activité féminine à l’intimité familiale et à l’histoire de la famille.

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domestiques, redistribuant la pauvreté dans une parenté dépassant le cadre résidence commune examinée par Medick (ibid.).

Si l’initiative est locale, sans soutiens extérieurs, l’influence des notables et du clergé local est cependant déterminante. Dans les Mauges et en Vendée, ils appuient les créations d’entreprises venant d’artisans ou d’ouvriers. Ils y voient l’occasion d’enrayer l’exode rural et de maintenir la structure sociale. Pour Jean-Clément Martin (1983), les véritables racines de l’industrialisation du nord-est vendéen sont à rechercher dans le contexte idéologique de cette époque et non dans la proto-industrialisation qui a précédé. A la fin du XIXe siècle et au début du XXe, la crise économique, la misère, la surpopulation et l’exode rural (d’autant plus brutal qu’il survient tardivement), la mise en oeuvre des principes républicains dans la politique nationale, créent les conditions d’un repli défensif sur le plan idéologique qui se concrétise par l’ancrage du mythe vendéen.

Le légitimisme qui domine chez les notables, s’il n’est pas directement suivi par la majorité de la population, est cependant conforté par la reconduction des mandats électifs et imprègne l’idéologie politique des habitants. L’identité régionale

se structure à cette époque : « les retombées sociales des guerres de Vendée isolent et

façonnent cette paysannerie qui est à elle-même sa référence. La ville devient antre de perdition ; l’usine lieu d’enfer (ce qui n’était pas dénué de fondements par ailleurs). les notables et le clergé qui diffusent ce discours entendent manifestement garantir leur ascendant sur une société restée rurale. les paysans trouvent dans ce discours l’écho de leurs craintes, ainsi que la compréhension de la spécificité de leur histoire proche, que la ville récuse. » (Martin, 1983, p. 43). L’industrialisation de la Vendée culturelle naît dans le refus du modèle qu’en présente la ville. La Vendée n’est amenée alors à ne compter que sur ses propres forces pour faire face aux défis économiques et idéologiques qui se présentent.

Avec la fin du XIXe siècle et le début du XXe, se mettent en place les éléments qui allient en Vendée – et en font depuis un caractère dominant – l’idéologie conservatrice et le progrès économique et social. Jean-Clément Martin montre le rôle particulier que la mémoire des guerres de Vendée a joué dans cette

configuration. Contrairement à d’autres régions en déclin, « La Vendée combine

essor industriel et agricole [...] La cohésion sociale et le volontarisme des notabilités ont impulsé un dynamisme dont l’enjeu et le moyen ont été la fidélité au passé vendéen, donnant naissance à ce qu’il est convenu d’appeler la « nébuleuse

Vendée ne tiendrait ici qu’à la radicalisation du souvenir, « langage commun aux notables, aux clercs et aux ruraux » et « identificateur majeur de la société » (ibid.). Cette radicalisation a assuré la permanence du souvenir et ses nouvelles mobilisations depuis.

Ainsi, l’industrialisation est ici un mal nécessaire, une façon de maintenir dans ses racines terriennes et régionales une population qui ne cessera pas de se penser comme rurale. Le contexte de l’époque favorise cette cohésion qui dépasse les intérêts divergents des groupes sociaux, unis dans la défense de leurs valeurs communes sacralisées dans la fidélité aux attitudes des ancêtres durant la contre-Révolution. L’initiative de la création d’ateliers industriels devient une action positive, parce qu’elle vient de la base et s’inscrit dans la continuité avec les attitudes des paysans de 1793.

L’ensemble de la structure socio-politique se fait porteuse de l’industrialisation. La doctrine du catholicisme social imprègne aisément l’encadrement catholique d’une région où l’Eglise est massivement représentée (Minguet, 1985). Au moment de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, entre 1870 et 1905, la contre-offensive est menée pour défendre l’ancrage catholique de la région. L’Eglise joue un rôle d’encadrement social au niveau des communes, des associations, des écoles. Elle se mobilise contre l’exode rural par la promotion des Caisses rurales et en suscitant une mentalité d’entrepreneurs chez les ruraux. L’aventure industrielle des gens de métiers est aussi favorisée dans ce cadre (Martin, 1989a). Guy Minguet (ibid.) et met en évidence le rôle joué par le catholicisme social dans l’esprit d’entreprise, rôle qui s’articule étroitement avec la structure hiérarchique de la société locale qu’elle renforce, l’organisation familiale et l’attachement au territoire. Le syndicalisme économique agricole est aussi maîtrisé par les notables dans ce sens.

Au sein de chaque paroisse, la vie collective dans tous ses aspects est encadrée par le clergé. Entre 1890 et 1930, l’espace social est balisé par l’Eglise qui incarne la résistance contre une société nationale vécue comme menaçante (Gérard, 1990). Mais l’Eglise n’incarne pas seulement le refus de la Révolution, puis celui de

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la République laïque, elle agit au sein de chaque paroisse ou « l’investissement

religieux peut apparaître comme la sublimation de contraintes socio-économiques d’une exceptionnelle intensité » (Gérard, ibid., p. 226). L’église « s’imprègne de ruralité » (ibid., p. 227) par le recrutement de prêtres ruraux et la participation aux pratiques religieuses populaires. La collectivité villageoise projette dans sa vie

religieuse « l’image rassurante et exaltante » (ibid.) de la communauté soudée.

Inséré dans une conception morale du bien commun, le travail à

l’usine participe des rituels chrétiens habituellement liés à la terre : « chaque

ouverture d’entreprise est précédée par une liturgie qui fait intervenir le clergé. Le curé félicite les uns et les autres, impose la bénédiction, appelle la bienveillance suprême pour assurer la fécondité de l’entreprise. Celle-ci reçoit les marques concrètes des personnages essentiels du catholicisme, le Christ et la Vierge. » (Minguet, 1985, p. 44).

La réussite et le caractère durable de cette industrialisation tiennent à

la cohésion sociale de groupes sociaux unis dans la défense d’intérêts communs. « Le

processus de création des entreprises est schématiquement le suivant. Un paysan, un artisan, aidé ou poussé par le curé, et éventuellement par les notables locaux, entreprend de créer un atelier qui va recevoir les enfants ou les femmes des paysans de la paroisse » (Martin, 1983, p. 44). Les entrepreneurs se forment sur le tas. Ils engagent des ouvriers, principalement des femmes, qui acceptent le travail parce qu’il n’oblige pas dans un premier temps à travailler dans un atelier et qu’il est cautionné par le clergé local. La proximité sociale des entrepreneurs et des ouvriers, le caractère familial de l’encadrement, des relations fortement personnalisées, expliquent aussi l’absence de conflits de travail qui resteront un trait caractéristique

de l’industrie vendéenne (Minguet, 1985). « L’atelier ainsi renforce la société rurale,

donne un exutoire à la population excédentaire sans qu’elle soit contrainte à l’exode, permet la coexistence des métairies agricoles et des borderies ou des villages où se mêlent ouvriers et paysans » (Martin, 1983, p. 44).

L’éducation chrétienne encourage l’initiative et l’excellence

individuelle dans la mesure où elles participent au bien commun et qu’elles restent dans un cadre admis. L’éducation familiale aménage une articulation analogue entre l’esprit de débrouillardise qui respecte les solidarités, l’ordre et la hiérarchie

sociale. « Les entrepreneurs ont su, remarquablement, s’appuyer sur ce système

communautaire qui intégrait des élites, des familles dans un espace restreint avec des interrelations fortes fondées sur la parenté, le voisinage, la poursuite de buts

Les centres de création industrielle proches de Saint-Hilaire-de-Loulay sont ceux de Cugand et Montaigu. A Cugand, à partir de la filature de laine, se crée une bonneterie. A Montaigu, l’entreprise de pantoufles « Hamon-Gaillard » est créée en 1909. Elle comptera, au maximum de ses effectifs, 115 salariés en 1954. Le « Tissage de Carheil », qui apparaît en 1908, est une création singulière. Seule manufacture de linge de maison utilisant l’énergie de la Maine, elle est une émanation directe du maire-châtelain de Boufféré. L’entreprise comptera jusqu’à 72 salariés en 1947 et disparaîtra à la fin des années 50. A Saint-Hilaire même, il n’existe aucun atelier industriel avant la guerre 14. Compte tenu de la proximité de Cugand, Montaigu et Clisson, le travail à domicile des femmes y est certainement une réalité. Les recensements anciens ne permettent pas cependant de relever précisément ce fait, compte tenu qu’il s’agit toujours d’une activité complémentaire et non déclarée comme profession.

c) L’apogée du système nobiliaire

La fin du XIXe siècle et le début du XXe marquent l’apogée de la puissance nobiliaire, qui tire parti de la forte fécondité et du maintien de la