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4.3.1 Définition

L’entretien semi-directif est une méthode d’enquête qualitative qui permet de « vérifier des hypothèses et d’illustrer des théories en apportant un réservoir d’opinions et d’anecdotes » [52, p. 12]. Elle vise à recueillir des témoignages détaillés et individualisés pour comprendre non seulement les pratiques des personnes enquêtées, mais également les mécanismes de leur opinion, les raisons de leurs pratiques et leur façon d’appréhender l’environnement.

Dans ce sens, l’analyse du discours est essentiel, tant sur le fond (l’argumentation) que sur la forme (le vocabulaire employé), car il est révélateur de la mentalité de la personne interrogée [59]. L’entretien permet ainsi d’entrer dans le champ des représentations sociales. À travers la formalisation et la collecte de données, l’enquêteur constitue un corpus homogène rendant possible une étude comparative des entretiens [52, p. 12]. Cette méthode a été utilisée pour l’analyse du public du CRD, réel et potentiel.

4.3.2 Mise en œuvre

La mise en œuvre de la méthode qualitative se déroule en quatre étapes : l’échantillonnage des personnes à interviewer, la rédaction du guide d’entretien, le déroulement des entretiens et l’analyse des données recueillies.

4.3.2.1 Échantillonnage

L’échantillonnage repose sur le principe selon lequel « les différentes variables attachées à une unité qui se situe dans la moyenne d’une population pour un certain nombre de variables importantes est également peu différente de la moyenne de cette population en ce qui concerne les autres variables » [52, p. 13]. Ainsi, l’échantillonnage permet d’obtenir des résultats valables pour l’ensemble de la population, même si l’échantillon n’est pas représentatif en termes statistiques. L’objectif est de s’assurer de la variété des personnes interrogés de telle sorte qu’aucune situation importante ne soit omise lors du choix des interviewés.

Dans notre cas d’étude, l’échantillonnage a été fait à partir d’une répartition du public en catégories. Ce type d’échantillonnage, s’inspirant de la méthode des quotas, présente l’avantage de pouvoir remplacer une personne qui ne souhaite pas participer à l’entretien par une autre personne appartenant à la même catégorie [55, p. 15]. Les catégories ont été définies sur la base des caractéristiques socioprofessionnelles – équipes administratives des formations de travail ; conseillers ; attachés de groupe – combinées avec l’utilisation ou la non-utilisation du CRD. Puisque les équipes administratives sont actuellement les principaux destinataires de l’offre du CRD, le choix a été fait de tous les interroger : leur catégorie est donc surreprésentée. La catégorie des conseillers est en revanche sous-représentée, car il a été difficile d’obtenir des entretiens. Le chef du Cabinet du Président a été également interrogé, en tant qu’utilisateur important des services du CRD. Une vingtaine d’entretiens a été réalisé (voir les tableaux ci-dessous).

Catégorie Usagers Non-usagers Total

Administrateurs, administrateurs adjoints et secrétaires des formations de travail

Catégorie Usagers Non-usagers Total

Administrateurs, administrateurs adjoints et secrétaires des formations de travail

Tableau 5. Reconstitution du groupe des personnes à interviewer

4.3.2.2 Guide d’entretien

Le guide d’entretien est un document de travail qui sert à structurer l’entretien mais ne dirige pas le discours. C’est un système organisé de thèmes, qui doivent être connus par l’interviewer sans avoir à les consulter ni à les formuler sous la forme de questions [52, p.

13]. Les sujets ne sont pas nécessairement traités dans l’ordre ni suivant la formulation prévue, l’objectif étant de permettre à l’interviewé de former un discours le plus libre possible tout en répondant aux questions de la recherche. Pour cela faire, l’enquêteur doit veiller à planifier des stratégies d’écoute et d’intervention : des relances, qui servent à solliciter la personne interviewé à approfondir tel ou tel autre sujet traité d’une manière trop rapide, superficielle ou peu claire ; et des reformulations, qui montrent à l’interlocuteur qu’il est écouté et l’aident à s’exprimer [52, p. 13]. L’entretien semi-directif est donc différent d’un questionnaire, car les réponses ne sont jamais proposées, et d’un entretien non directif, où l’interviewé peut développer librement son discours, sans aucun cadre préétabli.

Nous avons structuré le guide d’entretien en trois parties (voir l’annexe 4) :

 Les caractéristiques sociologiques. La personne interviewée se présente professionnellement, explique son activité et son mode de fonctionnement.

 Les caractéristiques informationnelles. La personne parle des informations produites et utilisées dans le cadre de son travail, et des circonstances de leurs usages.

 Les caractéristiques comportementales. La personne explique ses pratiques documentaires ses relations avec le CRD, sa connaissance des produits et services documentaires et enfin ses attentes en matière de documentation.

4.3.2.3 Déroulement

Les entretiens se déroulent généralement en face à face. Les entretiens téléphoniques sont une alternative intéressante, d’autant que cette méthode est rapide et peu coûteuse [54, p 195]. Des entretiens collectifs peuvent également être organisés : ils réunissent une dizaine de personnes et sont animés par des modérateurs chargés de faire réagir les gens et de relancer le débat. Ils présentent l’avantage de pouvoir interroger facilement un nombre important d’usagers, mais ne permettent pas de recueillir des informations très précises [54, p 194]. Avec l’essor du web, les entretiens collectifs en ligne, tels les chats ou les focus-group se sont développés, mais nécessitent davantage des animateurs compétents [54, p.

196].

Pendant le déroulement de l’entretien, l’interviewer a le choix entre la prise de notes ou l’enregistrement. La deuxième méthode est toutefois à préférer, car elle permet de restituer intégralement l’entretien, avec ses hésitations, ses silences, ses répétitions et ses fautes...

[52, p. 13]. Libéré de la prise de notes, l’enquêteur peut se consacrer à l’écoute active de la

personne interviewée, ne craint pas s’installer des silences et aura ultérieurement le temps de constater ce qui n’est pas dit [55].

La durée de l’entretien peut être variable, mais, pour obtenir un entretien significatif, une durée moyenne d’une heure est nécessaire. Stéphane Wahnich souligne que pendant les vingt premières minutes, les personnes interrogées ne vont pas dire ce qu’elles pensent mais ce qu’il est acceptable de dire dans ce qu’elles pensent. C’est pourquoi toute interrogation qualitative trop courte empêche les personnes interrogées d’entrer en confiance et de se révéler réellement et complètement [59].

Dans le cas de notre étude, les entretiens se sont déroulés en face à face, à l’exception d’un entretien téléphonique. Pour les formations de travail, le choix a été laissé à l’administrateur d’être interviewé tout seul ou avec les autres membres de son équipe ; certains entretiens ont été donc conduites avec deux voir trois personnes. Dans la plupart des cas les entretiens se sont déroulés dans le bureau de la personne interrogée. Ceci n’est toutefois pas le lieu idéal, car la personne est susceptible d’être dérangée par le téléphone pendant l’entretien.

Une permission d’enregistrement a été demandée aux personnes interviewées (voir l’annexe 5) et la plupart des entretiens a donc été enregistrée.

4.3.2.4 Analyse

Cinq types d’analyses de discours peuvent être proposés [52, p. 14] :

 L’analyse thématique découpe ce qui d’un entretien à l’autre se réfère au même thème, afin de dégager la structure, les processus et les thématiques propres à chacun des sous-groupes qui composent la population. Le découpage en thèmes est fait à l’aide d’une grille d’analyse construite sur la base d’une première lecture de quelques entretiens ainsi que sur les hypothèses posées initialement. Les extraits d’entretiens se rapportant au même thème sont regroupés et traités transversalement.

 L’analyse structurale vise à identifier les éléments structurels communs ou différents au sein des discours des interviewés pour déterminer des groupes distincts dans la population étudiée.

 L’analyse par entretien traite chaque entretien comme un cas spécifique avec sa dynamique propre. Elle est utilisée généralement en complément de l’analyse thématique.

 L’analyse propositionnelle du discours vise à reconstituer les représentations des interviewés en privilégiant les relations que le discours établit entre les objets.

 L’analyse des relations par opposition vise à comprendre les relations entre les représentations des interviewés et la réalité.

Dans le contexte de notre étude, en considération du nombre relativement limité des entretiens, nous avons d’abord procédé à l’écoute et à la retranscription complète des entretiens. Ensuite nous avons conduit une analyse de type thématique, en s’appuyant sur une grille d’analyse construite au préalable.

4.3.3 Difficultés et limites

L’enquête qualitative par entretien semi-directif présente deux limites. D’une part, la généralisation à une population entière des observations portant sur un nombre limité d’individus comporte un risque de non-représentativité. D’autre part, le succès et la réussite de l’enquête reposent sur les aptitudes des personnes qui conduisent les enquêtes [59].

Adopter une aptitude non directive est complexe, car il faut se centrer sur l’interviewé et ne rien laisser paraître de ses propres associations d’idées, pensées et sentiments [52, p. 19].

La conduite des entretiens, nouvelle pour nous, a nécessité d’une phase de rodage.

Nous allons maintenant présenter les résultats de notre analyse, que nous avons structuré en trois parties : l’analyse des moyens et de l’activité du centre, l’analyse de l’environnement et l’analyse du public.

5 Les résultats de l’analyse