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L'ASSURANCE DES ACCIDENTS DE MOTOCYCLETTE

d' ASSURANCE-ACCIDENTS

II. L'ASSURANCE DES ACCIDENTS DE MOTOCYCLETTE

Une autre modification récente de la législation est celle qui intéresse l'assurance des accidents de motocyclette. A cet égard, la revision de la LAMA est liée à l'adoption de la loi fédérale sur la circulation routière, du 19 décembre 1958 (LCR) 3.

1 Lorsqu'il n'existe pas de droit au salaire (cas des volontaires), l'assu-rance cesse 30 jours après la fin du travail (cf. MAURER, p. 58).

2 Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Rapport annuel et comptes, 1959, p. 7.

3 RL 1959, p. 705. (Suite.de la 11ole à la page suivante)

ASSURANCE-ACCIDENTS 53 Jusqu'il y a peu de temps, les accidents non professionnels de motocyclette n'étaient pas assurés auprès de la Caisse nationale, étant considérés, en vertu d'une décision du Conseil d'administration de la Caisse datant de 1942, comme des dangers extraordinaires au sens de l'art. 67 LAMA. Exception était faite seulement, depuis 1950, pour les accidents dus à l'emploi d'un cycle à moteur auxiliaire.

Le Tribunal fédéral des assurances avait cependant relevé que l'exclusion des accidents de motocyclette était choquante, lorsqu'il s'agissait d'accidents se produisant sur le chemin du travail, accidents qui, à l'étranger, sont généralement considérés comme des accidents professionnels 1, et il avait recommandé que cette situation fût modifiée 2En effet, nombre de travailleurs n'ont pas d'autres moyens de locomotion pour se rendre à leur travail, et le fait que les accidents se produisant au cours de ce trajet n'étaient pas couverts créait une situation peu satisfaisante.

La solution de ce problème a été recherchée dans l'institution d'une assurance couvrant tous les motocyclistes, combinée avec un aménagement de la LAMA. La loi sur la circulation routière, dans son art. 78, revisé déjà le 19 juin 1959 3, institue en effet l'assurance obligatoire des motocyclistes contre les accidents dont ils peuvent être victimes en usant de leur véhicule. Le Conseil fédéral a été chargé d'édicter les prescriptions de détail. Aux termes de l'ordonnance du Conseil fédéral du 20 novembre 1959 sur la

res-(Suite de la 11ote J de la page précédente) Bibliographie ;

M. RENGGLI, « Zum Ausschluss des Motorradrisikos von der obliga-torischen Unfallversicherung », in Revue suisse de jurisprudence 1959, pp. 33-35.

F. BAUMANN, «Die obligatorische Unfallversicherung und der Ausschluss des Motorradfahrerrisikos », in Revue misse de ji~risprudence

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pp. 65-76.

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1 Voir, par exemple, en France, l'art. 415 du Code de la sécurité sociale.

'Arrêt Meyer, du 3 novembre 1955 (ATFA 1955, pp. 256-257).

• RL 1959, p. 889.

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ponsabilité civile et l'assurance en matière de circulation routière (ORA) 1 , l'assurance-accidents que doit contracter chaque déten-teur de motocyclette est liée à l'assurance de la responsabilité civile (art. 59); elle doit donc être conclue auprès d'une compagnie d'assurance soumise à la surveillance fédérale.

Il convient de constater d'ailleurs qu'à cet égard, l'ordonnance dépasse le cadre tracé par la loi. Tandis que celle-ci prévoit l'obliga-tion pour les motocyclistes de s'assurer eux-mêmes contre les acci-dents, l'ordonnance les oblige à contracter une assurance collective, couvrant tout conducteur et tout passager du motocycle (art. 55 et 56). Aux termes de ses dispositions, doivent être couverts tous les accidents dont conducteur et passagers sont victimes par suite de l'emploi du motocycle ou lorsqu'ils montent sur le véhicule ou en descendent.

L'assureur ne peut réduire ses prestations en dessous du mini-mum obligatoire, notamment en raison d'une faute grave, à l'égard de la victime, si la faute n'est pas le fait de la victime; il a un droit de recours contre le preneur, cc dans une mesure équitable», lorsque ce dernier a provoqué l'accident intentionnellement ou par faute grave (art. 58).

En cas d'accident causé intentionnellement par la victime ou l'ayant droit, la solution est identique à celle qui résulte de l'art. 14, al. 1, de la loi sur le contrat d'assurance (LCA) : l'assureur n'est pas lié. Mais s'il n'y a que faute grave, sans intention, l'ordonnance adopte un principe différent de celui que contient l'art. 14, al. 2, LCA: l'indemnité peut être réduite, mais (comme c'est le cas dans l'hypothèse d'un recours contre le preneur) elle le sera « dans une mesitre équitable », et non pas cc dans la mesure répondant au degré de la faute» (art. 14, al. 2, LCA) 2Cela signifie que le juge saisi du litige devra rendre son jugement non pas seulement en appréciant le degré de la faute, mais bien en appréciant toutes les circonstances du cas en application de l'art. 4 CCS. Notamment si la victime est décédée dans l'accident et que l'indemnité soit réclamée par un survivant, le juge pourra tenir compte de la situation personnelle

1 RL 1959, p. 1321.

2 Il est rappelé que dans Il/- LAMA (art. 98, al. 3), la réduction en cas de faute s'effectue aussi« dans une mesure répondant au degré de la faute ».

ASSURANCE-ACCIDENTS 55 de ce survivant et réduire l'indemnité dans une mesure moindre que celle qui répondrait au degré de la faute.

Il importe de souligner aussi qu'en dehors de l'intention ou de la faute grave dans la survenance de l'accident, l'assureur ne peut réduire ses prestations ou exercer un recours à l'égard du preneur que dans trois cas déterminés : l'aggravation du risque assuré, l'inobservation des dispositions relatives aux déclarations obliga-toires en cas de sinistre, le fait d'entraver la guérison; et dans ces trois cas, la réduction ou le recours ne peuvent intervenir qu'en cas de faute de l'intéressé. En dehors de ces cas limitativement énumérés par l'art. 58 de l'ordonnance, l'asstfreur ne peut faire valoir, tant à l'égard du preneur que de la victime ou de l'ayant droit, en ce qui concerne les prestations minimums obligatoires, aucune des exceptions découlant du contrat d'assurance ou de la loi sur le contrat d'assurance. Au surplus, les conditions générales d'assurance admises par les différentes compagnies ne limitent pas l'application de cette disposition aux prestations minimums impo-sées par l'ordonnance, mais l'étendent au contraire à l'ensemble des prestations prévues par le contrat.

En conséquence, toutes les autres exceptions découlant de la loi ou du contrat ne peuvent être invoquées par l'assureur ni à l'encontre de la victime ou de l'ayant droit, ni à l'encontre du preneur. C'est ainsi que l'assureur ne pourra pas faire valoir l'excep-tion de réticence (art. 6 LCA), de non-paiement de la prime (art. 20 LCA), d'aggravation essentielle du risque sans faute du preneur ou de l'ayant droit (art. 28 et 30 LCA). Dans tous ces cas, l'assureur sera tenu de payer les prestations prévues par la police. L'obligation de l'assureur de fournir ces prestations est donc, dans la nouvelle assurance-accidents des motocyclistes, beaucoup plus étendue qu'elle ne l'est dans l'assurance-responsabilité civile résultant du même contrat, où, conformément à l'art. 65 LCR, l'assureur qui ne peut opposer des exceptions au lésé peut exercer un recours contre le preneur ou l'assuré dans toute la mesure où il aurait été autorisé à réduire ses prestations d'après le contrat ou la LCA.

Certes, l'assureur qui constate une réticence, une aggravation du risque ou une inexécution des obligations contractuelles du preneur peut résilier ou suspendre le contrat. Toutefois, cette

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résiliation ou suspension n'aura pas effet rétroactif; elle ne prend effet qu'avec le retrait du permis de circulation et des plaques, au plus tard 60 jours après la notification de l'assureur à l'autorité de police; c'est à partir de ce moment que la suspension ou la cessation de l'assurance ont effet à l'égard des lésés dans l'assurance de la responsabilité civil.e (art. 68 LCR); or, aux termes de l'art. 59 ORA, cc les deux assurances sont mises sur le même pied» et ne peuvent être indépendantes l'une de l'autre en ce qui concerne leur suspension ou leur cessation. L'assureur n'ayant aucune exception résultant du contrat ou de la LCA, il est tenu de fournir ses presta-tions sans qu'il puisse exercer un droit de recours pour d'autres causes que celles qui ont été spécifiquement énumérées 1.

Lorsque la victime possède en même temps une créance de dommages-intérêts contre le détenteur du motocycle (ce cas se présentera notamment lorsque le passager du motocycle est victime d'un accident), la question se pose de savoir si ce passager peut cumuler ses prétentions résultant de l'assurance-accidents con-tractée par le détenteur et ses prétentions de dommages-intérêts.

La doctrine admet que, d'une façon générale, la victime d'un accident qui est indemnisée en vertu d'un contrat d'assurance-accidents dont les primes ont été payées par la personne civilement responsable du dommage doit imputer sur les dommages-intérêts qu'elle peut réclamer audit responsable l'indemnité de l'assurance-accidents 2

Cette règle a été expressément reprise par l'art. 62, al. 3, LCR, qui prévoit cette imputation dans le cas d'un accident de la circu-lation lorsque le détenteur a payé les primes d'une assurance privée sur la base de laquelle le lésé a reçu des prestations, à moins toutefois que le contrat d'assurance n'en dispose autrement. Mais elle n'est pas applicable en principe aux accidents couverts par l'assurance-accidents des motocyclistes; en effet, l'art. 57, al. 6, ORA précise que le contrat d'assurance peut prévo!r la déduction.

On doit en conclure a contrario que s'il ne la prévoit pas, cette

1 Cf. PFISTER, p. 293.

2 ÛFTINGER, Schweizerisches Haftpflichtrecht,

ze

édit., I, pp. 355-356;

ROELLI-J AEGER, Kommentar zum Schweizerischen Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag III, ad art. 87-88, rem. 40.

ASSURANCE-ACCIDENTS 57 déduction n'intervient pas 1. En fait, les conditions générales d'assurance prévoient que les prestations servies du chef de l'assurance-accidents sont imputées sur les prétentions en dom-mages-intérêts des passagers contre le détenteur ou le conducteur du véhicule.

L'ordonnance du Conseil fédéral fixe, dans son art. 57, al. 1 à 5, le minimum des prestations assurées, sur lesquelles nous n'avons pas le loisir de nous étendre. Relevons seulement qu'il s'agit d'indemnités en capital en cas de mort et d'invalidité, de rembour-sement de frais de guérison et d'une indemnité journalière pour incapacité temporaire de travail. L'indemnité au décès est versée aux proches spécifiés par l'ordonnance, sans que le preneur puisse désigner un tiers comme bénéficiaire dans la mesure où cette désigna-tion aurait pour effet de diminuer les prestations minimums revenant aux dits proches.

On peut constater en résumé que la nouvelle réglementation de la circulation routière a, à la suite d'autres dispositions de même nature 2, institué un système de couverture des risques en vue de poursuivre un but de sécurité sociale, bien que ce système soit organisé avec le concours de compagnies privées d'assurance.

Ainsi que le lui a permis la loi sur la circulation routière, qui, dans son art. 78, lui a confié le soin de réglementer l'assurance-accidents des motocyclistes, le Conseil fédéral a établi à cet effet une régle-mentation dérogeant soit à la loi sur le contrat d'assurance, soit même à d'autres dispositions de la loi sur la circulation routière.

Simultanément avec l'introduction de l'assurance-accidents des motocyclistes prévue par la loi sur la circulation routière, la situation des motocyclistes assurés auprès de la Caisse nationale a été modifiée comme suit:

1° Les motocyclistes assurés auprès de la Caisse nationale sont libérés de l'obligation de s'assurer contre les accidents professionnels auprès d'une compagnie privée. En revanche, ils sont tenus de s'assurer auprès d'une telle compagnie contre les accidents non professionnels (art. 78 LCR, modifié par la loi du 19 juin 1959).

1 Cf. WYNIGER, p. 75.

•Voir notamment infra, III.

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2° La Caisse nationale ne peut plus exclure de l'assurance comme constituant un danger extraordinaire au sens de l'art. 67, al. 2, LAMA les« accidents de trajet» dont sont victimes les moto-cyclistes, soit les accidents de motocyclette se produisant lorsque l'assuré se rend à son travail ou en revient (art. 67, al. 3, LAMA, complété le 19 juin 1959). On aurait pu, comme l'ont fait nombre de pays étrangers, inclure les accidents de trajet dans la catégorie des accidents professionnels. On ne l'a cependant pas fait; ces acèi-dents demeurent ainsi, au sens de la LAMA, des accidents non professionnels.

3° L'assuré victime d'un tel accident bénéficie donc des presta-tions de la Caisse nationale. Mais cette dernière aura un recours jusqu'à concurrence de ses prestations contre la compagnie d'assu-rance auprès de laquelle l'assurance-accidents instituée en vertu de la loi sur la circulation routière a été conclue (art. 100, al. 2, LAMA, selon la loi du 19 juin 1959).

4° A la suite de la nouvelle classification des véhicules à deux roues résultant de la loi sur la circulation routière 1, le Conseil d'administration de la Caisse nationale a inclus sans restriction dans l'assurance des accidents non professionnels les motocycles légers à la condition que le conducteur ne transporte pas de passager 2 Mais cette décision a été prise en liaison avec l'adoption d'une nouvelle loi, du 17 mars 1961 3, modifiant une fois de plus l'art. 100 LAMA.

La disposition revisée prévoit la subrogation de la Caisse nationale, jusqu'à concurrence de ses prestations, aux droits des assurés et de leurs survivants résultant de l'assurance-accidents des motocyclistes prévue par la LCR, chaque fois que ladite Caisse nationale couvre des accidents de motocyclette non professionnels, c'est-à-dire que cette subrogation a lieu aussi, pour les motocycles légers, pour les accidents se produisant en dehors du chemin du travail.

1 Art. 25 LCR et 37 ORA.

e Caisse nationale, loc. C'it., 1960, p. 7.

3 RL 1961, p. 481.

ASSURANCE-ACCIDENTS 59 Cette règle constitue cependant une mesure assez curieuse, puisque les détenteurs de motocycles légers étant assurés d'une façon totale par la Caisse nationale, celle-ci aura lors de chaque accident non professionnel un recours contre la compagnie d'assu-rance auprès de laquelle son assuré avait contracté une assurance-accidents. Et, dit le message du Conseil fédéral, «le possesseur d'un motocycle léger, tant qu'il est assuré auprès de la Caisse nationale et emploie exclusivement lui-même son véhicule, ne recevra aucune prestation de l'assurance contractée en vertu de la loi sur la circu-lation routière; en effet, les prestations de cette assurance seront versées à la Caisse nationale en raison de la subrogation» 1. Ce motocycliste doit donc, en fait, s'assurer exclusivement dans l'intérêt de la Caisse nationale; l'assurance aura une utilité pratique pour la victime seulement dans le cas où le détenteur aura prêté son véhicule à un tiers, qui est victime d'un accident et qui n'est pas de son côté assuré auprès de la Caisse nationale, ou lorsqu'il a un passager. Le Conseil fédéral explique la raison de cette subrogation en relevant que l'assuré doit la considérer comme une contrepartie du fait qu'il bénéficie sans prime spéciale des prestations de la Caisse nationale pour les accidents non professionnels dus à l'emploi du motocycle léger.

Cependant, il convient, croyons-nous, d'interpréter cette dispo-sition dans ce sens que la Caisse nationale ne peut être subrogée pour chaque partie du dommage à concurrence de ses prestations que dans la mesure où, pour ce poste du dommage, le préjudice doit être réparé tant en vertu de la LAMA que du contrat d'ass1:1-rance; il serait anormal, par exemple, que le motocycliste étant assuré pour les frais d'hospitalisation dans une clinique privée, la Caisse nationale refuse de prendre à sa charge ces frais d'hospitali-sati?n, mais réclame néanmoins le versement à son profit de l'indemnité correspondante versée par la compagnie d'assurance.

Il est vrai que, notamment dans son arrêt Berra et consorts c.

Cirlini 2, le Tribunal fédéral est revenu, en présence du cumul de créances contre la Caisse nationale et contre une compagnie

d'assu-1 FF 1960 II, p. 1427.

2 Arrêt du 23 septembre 1959 (ATF 85 II 257 et suiv.).

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rance de la responsabilité civile, sur la règle dite de la « coïncidence des dommages». Mais la situation est différente ici, puisqu'une prime spéciale a été payée pour la couverture du dommage assuré auprès de la compagnie privée.

La loi ne tranche pas, d'autre part, le cas où le motocycliste est assuré au-delà du minimum résultant de l'ordonnance du 20 novembre 1959. La Caisse nationale pourra-t-elle être subrogée dans la totalité des droits de ce motocycliste qui, par mesure de prudence, a contracté une assurance supérieure à ce minimum et a donc payé des surprimes à cet effet ? La logique commande une réponse négative; le surplus assuré doit être assimilé à une assu-rance complémentaire, dans les limites où une telle assurance est autorisée en vertu de l'art. 74, al. 3, LAMA; c'est-à-dire que pendant la période d'incapacité de travail temporaire, pendant laquelle l'assuré reçoit l'indemnité de chômage, le total des prestations de la Caisse nationale et des autres assurances ne doit pas excéder la perte de gain, à défaut de quoi la Caisse nationale peut réduire ses prestations.

III. L'ASSURANCE-ACCIDENTS DES TRA V AILLEURS