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L’apocalyptique coranique amplifiée dans la Tradition musulmane

Chapitre III : La conception du paradis dans les sources principales de l’islam 91

1.5. L’apocalyptique coranique amplifiée dans la Tradition musulmane

Des hadîths et des récits populaires amplifient les événements apocalyptiques de la fin du temps cités dans le Coran et ajoutent d’autres détails supplémentaires. Les hadîths sont rédigés en un style littéraire d’une valeur variable. Certains sont reconnus authentiques, d’autres sont moins crédibles. Pour la plupart, l’origine remonte à un Compagnon du Prophète. Leur inspiration provient partiellement des sermonnaires qui eux-mêmes ont puisé leurs idées auprès des vieux conteurs et pleureurs. Leur but essentiel tend à frapper

1 JOMIER, J., Dieu et l’homme dans le Coran, p. 127.

2 O’SHAUGHNESSY, T-J., Eschatological themes in the Qur’ãn, p. VI.

3 ANDRAE, T., Les origines de l’Islam et le Christianisme, p. 67-199.

l’imagination populaire par des détails concrets1. Quant aux récits populaires, ce sont des histoires racontées qui se basent sur les hadîths mais en les dépassant largement dans certains détails et même en les exagérant. Par l’annonce des évènements eschatologiques et l’insistance sur la peur de l’après-vie, les auteurs visent une formation concernant l’éducation et le comportement moral du peuple pour bien mener sa vie. Les premiers récits apparaissent à partir du IXe siècle, mais il n’existe pas de copies complètes avant le XVIe siècle. Certains se concentrent sur l’état de l’âme depuis sa création jusqu’au tombeau. D’autres traitent la résurrection ou bien les éléments de la vie future. Il y a aussi des textes consacrés au paradis et à l’enfer2. À travers son étude, David Cook montre que la plupart des événements apocalyptiques tire son origine dans des faits historiques en lien avec cinq saintes villes centrales du christianisme : Jérusalem, Alexandrie, Antioche, Constantinople et Rome. Par ailleurs, il souligne que certaines traditions affirment que la fin des temps ne vient pas avant la fin du règne de douze rois venant du Quraysh dont le dernier est ‘Umar Ibn Abd al-‘Aziz (717-720). Ces douze rois correspondent aux douze Imams chez les chiites3 .

Les hadîths et les récits populaires dans lesquels sont cités les signes précurseurs distinguent trois groupes : les signes mineurs ‘alâmât sughrâ et les signes majeurs

al-‘alâmât al-kubrâ suivis des signes annonciateurs de la fin du temps4. On peut diviser les signes mineurs appelés aussi les petits signes ou encore les signes avant-coureurs de l’Heure en deux catégories. La première catégorie contient les signes ayant déjà été réalisés et qui continuent à se réaliser d’un temps à l’autre. Ces signes résonnent comme un appel à la vigilance tels que la fente de la lune, le feu du Hijâz, l’enfantement par l’esclave de sa maîtresse, les conquêtes et les guerres, les discordes et les calamités, l’apparition des imposteurs, l’infidélité, l’adultère, l’idolâtrie, les juifs tués par les musulmans, l’abondance de l’argent, le mal répandu sur toute la terre5.

La deuxième catégorie comporte des signes en voie de réalisation et qui n’ont pas encore eu lieu tel le retour de la verdure et des fleuves en Arabie, l’immensité des premiers 1 GARDET, L., « Djanna », Encyclopédie de l’Islam, Nouvelle éd. établie avec le concours des principaux

orientalistes par B. Lewis, Ch. Pellat et J. Schacht t. II, Paris, E. J. Brill : G. P. Maisonneuve & Larose, S. A., 1977, p. 459.

2 RUSTOMJI, N., The garden and the fire, heaven and hell in Islamic culture, p. 98-100.

3 COOK, D., Studies in Muslim apocalyptic, p. 35-36.

4 KIN‘ÂN, M, Ashrât sâ‘a wa umûr âkhira, résumé de l’histoire d’Ibn Kathîr, Beyrouth, Mu’assasat al-Ma‘ârif, 2000, p. 36-46; RUSTOMJI, N., The garden and the fire, heaven and hell in Islamic culture, p. 106.

croissants lunaires, les bêtes féroces, l’Euphrate qui laisse apparaître une montagne d’or, le rejet par la terre de ses trésors cachés, le retranchement des musulmans à Médine, la détention du pouvoir par al-Jahjah (un homme de la tribu de Qahtân), la calamité de la prospérité et la discorde noire. Puis vient le temps des grands signes lesquels annoncent l’arrivée imminente de l’Heure selon un ordre qui diffère d’un hadîth à l’autre. L’islam, tout comme le christianisme, annonce la venue de l’antéchrist, le Dajjâl, et lui donne une place importante dans son eschatologie contrairement à la tradition juive qui reste muette à son propos. Son nom veut dire quelqu’un qui déçoit et il est utilisé pour désigner une variété de groupes en islam. Mais Dajjâl de la fin des temps est Dajjâl par excellence, différent de tous les autres car il ne prétend pas seulement être le prophète mais il va jusqu’à prendre la place de Dieu d’où la gravité de son péché1.

En s’appuyant sur la sourate XXVII, al-Naml (les fourmis), qui dit : « Lorsque la parole tombera sur eux, nous ferons pour eux sortir de terre une bête et celle-ci proclamera que les hommes ne croyaient pas fermement à nos signes » (Cor. XXVII, 82), la tradition fait de l’apparition de cette bête un signe de la fin des temps. Les hadîths la décrivent sous la forme d’un serpent monstrueux rôdant autour de la Mekke2. D’autres lui donnent le nom

al-dâbba et font de son corps un ensemble d’animaux associés3. Andrae Tor souligne que « l’exégèse traditionnelle raconte que l’animal d’Allah fait une marque sur le front des croyants et des incroyants avec la verge de Moïse et le sceau de Salomon pour les distinguer parfaitement » 4. D’autres traditions précisent que la marque des croyants est de couleur blanche et celle de l’incroyant de couleur noire. Cette bête apparaît plusieurs fois et en différents lieux, elle identifie surtout les hypocrites5. Cette bête peut être mise en équivalence avec la présentation du signe de la bête, l’être diabolique de l’Apocalypse de Jean, devenu dans le Coran un envoyé de Dieu.

En additionnant l’héritage judéo-chrétien et des traditions iraniennes, l’islam a connu des poussées millénaristes avec l’attente d’une sorte de messie, le Mahdi instaurateur sur terre d’un royaume de paix précédant le jugement dernier6. Le Coran ne parle point du Mahdi. Il semble pourtant que Muhammad l’ait annoncé, sans que l’on puisse préciser 1 COOK, D., Studies in Muslim apocalyptic, p. 93-94.

2 DE LAUBIER, P., Quand l’histoire a un sens, p. 63-65.

3 COOK, D., Studies in Muslim apocalyptic, p. 121.

4 ANDRAE, T., Les origines de l’Islam et le Christianisme, p. 71.

5 COOK, D., Studies in Muslim apocalyptic, p. 121.

l’idée qu’il s’en faisait. Des hadîths authentiques le confirment. Ils ont même donné ses traits physiques : « un homme au front large ou dégarni, pourvu d’un nez aquilin »1. Pour les sunnites, le Mahdi est un homme pieux rénovateur de la religion qui établit la justice et l’équité selon le Coran et la Sunna. Pour les chiites, il est le dernier des douze imams et un des descendants d’El-Hussein. David Cook souligne qu’on peut comprendre son nom de deux manières, active et passive. Dans le sens actif il est le guide et au passif il est celui qui est guidé, mais il préfère le sens actif2. James Darmesteter, en reprenant l’idée d’Ibn Khaldoun cité dans al-Muqaddima, explique que le sens littéral du mot Mahdi signifie « celui qui est dirigé ». De ce fait, Mahdi n’est qu’une épithète qui peut s’appliquer à tout prophète et même à toute créature ; mais employé comme nom propre il désigne le « bien dirigé » entre tous, le Mahdi par excellence, c’est-à-dire le prophète qui doit mettre fin au drame du monde3. Après la venue du Mahdi se situe l’arrivée de l’antéchrist et à la même époque Jésus le fils de Marie descend et aide Mahdi à tuer l’antéchrist4. Selon le Coran, Jésus est considéré comme le signe de cette Heure telle que le laisse supposer la sourate XLIII, al-Zukhruf (l’ornement) : « Jésus est, en vérité, l’annonce de l’Heure. N’en doutez pas et suivez-moi. Voilà un chemin droit ! » (XLIII, 61)5. De ce fait, Il assiste le Mahdi dans la célébration d’un office suprême et Il a le Mahdi comme imâm. Alors vont retentir les fanfares de la résurrection et Dieu vient juger les vivants et les morts6. Mais toutefois il ne s’agit pas ici d’une affirmation catégorique. Anas ibn Mâlik relate dans le hadîth 121 que le Mahdi n’est autre que Jésus, fils de Marie venant lors de la Parousie. Certains

hadîths vont jusqu’à dire que Jésus va tuer les cochons, inviter les gens à se convertir à

l’islam et celui qui n’accepte pas va être tué. De même il fait périr l’antéchrist à la porte de la Palestine ainsi que le peuple de Yâjûj et les Mâjûj. Alors la paix revient sur la terre renouvelée, Jésus va vivre pendant quarante ans et à sa mort les musulmans vont prier sur lui7. Il reste encore parmi ces signes la démolition de la Ka‘ba, le lever du soleil qui s’effectue à l’Occident et une grande fumée qui remplit la terre. Puis trois engloutissements qui vont se passer l’un en Orient, le deuxième en Occident et le dernier dans la Péninsule 1 AL-ACHQAR, Omar, La Petite Résurrection, p. 136.

2 COOK, D., Studies in Muslim apocalyptic, p. 138.

3 MASSON, D., Le Coran et la révélation judéo-chrétienne. Études comparées, p. 702-706.

4 AL-ACHQAR, Omar, La Petite Résurrection, p. 236-246.

5 COOK, D., Studies in Muslim apocalyptic, p. 139.

6 MASSON, D., Le Coran et la révélation judéo-chrétienne. Études comparées, p. 702-706.

7 KIN‘ÂN, M, Ashrât al-sâ‘a wa umûr al-âkhira, p. 65 ; RUSTOMJI, N., The garden and the fire, heaven and

Arabique. Enfin le grand feu au Yémen va obliger les gens à fuir vers la ville de Koufa en Irak1.

En troisième lieu, ce sont les signes annonciateurs de la fin des temps. Les commentateurs tels Ibn Kathîr, Tabarî, Muslim et Bukhârî considèrent la prise de la terre, le pliage du ciel, l’obscurcissement du soleil et l’éparpillement des étoiles parmi les signes cosmiques qui annoncent la fin du temps. Tous insistent sur la royauté suprême de Dieu2. Contrairement aux textes coraniques qui ne mentionnent pas le nom de celui qui va souffler dans la trompe, les hadîths chargent l’ange Isrâfîl de ce rôle. Certains pensent qu’il va souffler deux fois comme l’indique le Coran et d’autres estiment qu’il va y avoir trois souffles : le souffle de la frayeur, le souffle du foudroiement précédé d’une pluie et le souffle de la résurrection3. Cela va se tenir le vendredi4 et les avis sur le premier ressuscité sont partagés. Selon Omar Al-Achqar, le Prophète Muhammad est le premier dont la tombe va s’ouvrir5 ; par contre Muhammad ibn Khidr rapporte que c’est Moïse parce que lui seul n’a pas connu la mort6.

Le jour du rassemblement, les serviteurs se réunissent ; selon certains ils sont nus, assoiffés et couverts de sueur7, pieds nus et non circoncis. Selon d’autres, ils portent le linceul dans lequel ils ont été enterrés. Ceux qui vont au paradis sont habillés de vêtements nobles et ceux qui vont en enfer sont couverts de goudron8. Les gens sont classés en trois groupes : les mécréants, les désobéissants et les croyants9 pour être jugés. Une exception est faite pour soixante-dix mille justes qui vont directement au paradis sans connaître le jugement10. D’après certains hadîths, en ce jour-là, chaque homme est appelé par son prénom suivi du nom de son père ; si ses actes sont bons, il reçoit dans sa main droite un livre blanc à l’écriture blanche ; par contre si ses actes sont mauvais, il reçoit dans sa main

1 AL-ACHQAR, Omar, La petite Résurrection, p. 249.

2 KIN‘ÂN, M, Ashrât al-sâ‘a wa umûr al-âkhira, p. 99-102 ; AL-ACHQAR, Omar, La Grande Résurrection, p. 108-127 ; AL-MISRÎ, M., Rihlâ ilâ al-dâr al-âkhira, Le Caire, Maktabat al-Safâ’, 2005, p. 365-374.

3 MUHAMMAD IBN KHIDR, Ahâdîth hayât al-barzakh fi al-kutub al-tis‘a, Beyrouth, Dâr Ibn Hazm, 2004, p. 341-357 ; AL-ACHQAR, Omar, La Grande Résurrection, p. 31-38 ; AL-IMÂM AL-QURTUBÎ,

al-Tadhkira fî ahwâl al-mawtâ wa-ûmur al-âkhira, Le Caire, Dâr al-hadîth, 2011, p. 150-157 ; AL-MISRÎ, M., Rihlâ ilâ al-dâr al âkhira, p. 338-341.

4 KIN‘ÂN, M, Ashrât al-sâ‘a wa umûr al-âkhira, p. 85.

5 AL-ACHQAR, Omar, La Grande Résurrection, p. 54.

6 MUHAMMAD IBN KHIDR, Ahâdîth hayât al-barzakh fi al-kutub al-tis‘a, p. 351.

7 MACDONALD, J., « Islamic Eschatology VI-Paradise », p. 340.

8 AL-ACHQAR, Omar, La Grande Résurrection, p. 61.

9 Ibid., p. 131.

gauche un livre noir1. Ce jour va être suivi par la pesée qui évalue les œuvres en vue de la rétribution. Les hadîths affirment que la pesée des actes ou des livres dans lesquels sont enregistrés les actes ou de la personne elle-même2 s’effectue sur une balance tenue par l’ange Gabriel3. Certains estiment l’existence d’une seule balance ; d’autres indiquent la présence de plusieurs balances attribuées à chaque acte4.

‘Abd al-Rahîm Ahmad Ibn Qâdî donne une description détaillée de la balance et de son contenu. Il rapporte qu’Ibn ‘Abbâs a dit « qu’au jour de la résurrection, une balance sera installée sur un grand pilier dont la hauteur égalera la distance entre l’est et l’ouest. Elle comportera deux plateaux de même dimension, celui de droite contenant les bonnes actions et celui de gauche les mauvaises actions. On amènera la personne à juger munie de soixante-dix-sept registres dans lesquels seront inscrites ses œuvres. On pèsera ses fautes et ses bonnes actions. Si celles-ci sont plus lourdes que ses péchés, cette personne recevra une attestation qui lui accordera le pardon et elle entrera au paradis, dans le cas contraire elle ira en enfer »5. Al-Shâfi‘î augmente le nombre de registres, il en compte quatre-vingt dix-neuf contenant les fautes commises. Au moment de la pesée, on met sur un plateau de la balance ces registres et de l’autre côté on place la personne elle-même. Si le poids de la personne est plus lourd, elle entre au paradis, sinon elle rejoint l’enfer6. Ce même nombre est attesté par Al-Achqar7. Al-Imâm al-Qurtubî accorde à la balance le symbole de la justice et du jugement. Il précise que la foi de la personne est pesée avec ses actes et sert à ce moment à racheter les actes mauvais et à donner la chance au pécheur, après s’être purifié, d’échapper à l’enfer8.

La tradition islamique admet que les croyants et les incroyants doivent traverser un pont étroit, « le pont du Sirât », qui signifie « voie ». Il devient par appropriation le nom propre du pont eschatologique. Ce pont conduit au paradis par-dessus l’abîme de l’enfer9. Le mot

Sir t n’est pas un mot arabe, mais il provient de la langue persane. Il est employé pour

parler du pont qui conduit soit au lieu du châtiment, soit au lieu béni. La première mention 1 AL-IMÂM AL-QURTUBÎ, al-Tadhkira fî ahwâl al-mawtâ wa-ûmur al-âkhira, p. 222-223.

2 KIN‘ÂN, M, Ashrât al-sâ‘a wa umûr al-âkhira, p. 129.

3 AL-IMÂM AL-QURTUBÎ, al-Tadhkira fî ahwâl al-mawtâ wa-ûmur al-âkhira, p. 278.

4 AL-ACHQAR, Omar, La Grande Résurrection, p. 283-294.

5 AL-QÂDÎ, A.R., Daqâ’iq al-akhbâr fi dhikr al-janna wa al-nâr, Le Caire, Imprimerie Nasr, 1984, p. 39.

6 AL-SHÂFI‘Î, D., ‘Ahwâl yawm al-qiyâma, Damas, Syrie, Dâr al-Yamâma, 2008, p. 126.

7 AL-ACHQAR, Omar, La Grande Résurrection, p. 287.

8 AL-IMÂM AL-QURTUBÎ, al-Tadhkira fî ahwâl al-mawtâ wa-ûmur al-âkhira, p. 275.

de la traversée d’un pont après la mort se trouve dans les textes de Ménok-é Khrat et les textes du Vendidat de la religion de Zarathoustra ou Zoroastre. Ce pont appelé le pont de l’Épreuve est franchi par tous les défunts. Il est décrit comme un large chemin pour les justes mais pour les injustes il devient étroit comme une lame d’épée. Sa traversée permet aux justes d’entrer dans la communauté des dieux et aux pécheurs de rester éternellement dans l’abîme nommé la maison du mensonge1. Per Heidi Toëlle dit qu’il semble y avoir des voies d’accès au paradis et à l’enfer. La première est appelée sirât al-jahîm ou tarîq

djahannam « le chemin du feu ardent de la géhenne » ou le chemin de la fournaise (Cor.

XXXVII, 23). Quant à la deuxième, on la nomme (al)-sirât (al)-mustaqîm, « le chemin droit ». Par ailleurs, il n’existe pas de référence dans le Coran concernant ce pont à franchir par les ressuscités. Donc il s’agit plutôt d’une conception plus tardive, inspirée par le mazdéisme et adoptée par certains hadîths2. Al-Shâfi‘î et Al-Achqar à partir des hadîths le décrivent d’une manière minutieuse. Ce pont est plus mince qu’un cheveu, plus tranchant que le sabre. Il possède des pointes aiguës et est recouvert de plantes piquantes qui ne font aucun mal au croyant mais blessent l’impie. Pour le franchir, il faut trois mille ans : mille pour monter, mille pour traverser, mille pour descendre3.

‘Abd al-Rahim Ahmad Ibn Qâdî relate que « le Prophète a dit que Dieu a créé au-dessus de l’enfer un pont appelé sir t. Il comporte sept arcades dont chacune nécessite trois mille ans de marche : mille ans pour la montée, autant pour la traversée et pour la descente. Ces arcades sont plus ténues qu’un cheveu, plus tranchantes qu’un glaive et plus obscures que la nuit. Chaque arcade possède sept pointes comparables à des lances effilées. Dans le parcours des sept arcades, la personne est jugée pour sa foi, sa prière, son aumône, son jeûne, son pèlerinage, ses rites et sa bonté envers ses parents. Si elle achève cet itinéraire sans être coupable, elle parvient au seuil du paradis »4 où elle boit dans la Vasque5 contenant une boisson qui a le goût de tous les fruits réunis. Al-Imâm al-Qurtubî confirme les sept étapes sur lesquelles la personne est jugée en franchissant le pont mais la septième est plus large car elle ne concerne pas seulement la bonté envers les parents, elle s’étend à

1 ZLATOHLAVEK, M., « Les représentations préchrétiennes », Le jugement dernier, p. 19-21.

2 TOËLLE, H., Les quatre éléments dans le « Coran » : l’Au-delà, p. 21.

3 AL-SHÂFI‘Î, D., ‘Ahwâl yawm al-qiyâma, p. 213 ; AL-ACHQAR, Omar, La Grande Résurrection, p. 314-327.

4 AL-QÂDÎ, A.R., Daqâ’iq al-akhbâr fi dhikr al-janna wa al-nâr, p. 40.

5 Les had!ths la présentent comme un bassin ou un réservoir qui se trouve soit avant, soit de préférence après le Pont. Elle déborde d’un liquide délicieux dont s’abreuvent les croyants avant leur entrée en paradis.

chaque être humain1. Après tous ces signes apocalyptiques la personne est orientée vers les régions de l’au-delà ; à présent la question est de savoir comment le Coran et la Tradition islamique les représentent.

II. Images du paradis et de l’enfer dans le Coran et dans