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3.3 Cadre méthodologique pour la définition de l’outil d’aide à la décision

3.3.3 L’analyse temporelle des divers produits agricoles

La méthodologie de ce travail repose sur des données secondaires ce qui engendre une hypothèse supplémentaire : « les résultats obtenus ne tiennent pas compte des possibles biais obtenus lors de la récolte et du traitement des données ». Nous tenterons d’éliminer ou de diminuer les biais introduits par ces données secondaires et garder une vision critique en analysant les données sur des séries longues en particulier lors du lissage et de l’imputation7

des données. Les données secondaires utilisées proviennent du Ministère du Développement Agricole et Elevage (MDAE) et par manque de données au ministère, de la FAO. Elles sont majoritairement définies sur des séries longues d’environ 61 ans. A l’issue d’une première étude nationale (Annexe 2), il s’agit donc d’analyser dans le temps et l’espace les 32 produits suivants : les céréales (mil, sorgho, riz, maïs, blé, fonio), les légumineuses (niébé, arachide, voandzou) ; les tubercules (pomme de terre, patate douce, manioc) ; les produits maraichers (sésame, oignon, tomate, poivron, piment, chou), les fruits (pastèques et melon), l’arboriculture fruitière (mangue, dattier), les produits de rente (coton, sucre, tabac), l’élevage (bovin, ovin, caprin, camelin, asin, aviaire), et la pisciculture (Tableau 3). Dans les années 1980, les nombreuses famines et crises alimentaires ont orienté le besoin de données statistiques agricoles permettant de répondre aux besoins d’estimation des bilans céréaliers et d’évaluer les volumes d’aides alimentaires à distribuer et prévoir (Andres L.et Lebailly Ph., 2013a ; Egg J. et Gabas J-J., 1997), tandis que d’autres ont été collectées plus récemment comme l’enquête sur les productions horticoles de la direction générale des statistiques agricoles reprenant les produits liés au maraichage et à l’arboriculture fruitière. Les périodes étudiées seront donc variables, 1953 à 2014 pour les céréales comme le mil alors que des produits comme la pastèque ne pourront être analysés que sur une période allant de 2000 à 2014. Enfin, celles présentes dans les différents documents et bases de données récoltés sont exprimées selon différents niveaux administratifs ; nationaux pour la plupart alors que pour le niveau régional et départemental, celles-ci sont plus variables et disparates. Une des hypothèses pour l’établissement de l’outil d’aide à la décision repose sur la disposition des données au niveau départemental et régional. Elles sont plus ajustables aux systèmes de production ruraux. Toutefois, par manque de données et au vu du nombre de variables, certaines séries n’ont pas pu être établies en fonction d’un niveau désagrégé. Comme ce travail se veut homogène, nous avons opté pour établir les séries d’un point de vue national et démontrer dans la discussion l’importance de la répartition des données par système de production rural pour certains produits (Tableau 3).

Tableau 3 : Tableau récapitulatif des produits analysés

Groupes Production Variables Période de la

série de données

Echelle Source

Céréales Mil, sorgho, fonio, riz,

blé et maïs Superficie et production 1953-2014 Départementale Régional, Départementale MDAE Légumineuse Niébé&arachide& voandzou 1953- 2014&1956- 2014&1963- 2014 MDAE

Oléagineuse Sésame 1961-2014 Régionale et

nationale MDAE et FAO Produits maraîchers Oignons, Tomates, poivron, choux, piment,

gombo

1961-2014 Nationale et

régionale

MDAE et FAO

Tubercules Manioc, patate douce,

pomme de terre

1956-2014 Départementale,

régionale, nationale

MDAE et FAO

Fruits Pastèques, melon 2000-2014 Nationale FAO

Autres légumes et fruits Mangue&dattier 2000- 2014&1961- 2014 Nationale FAO Produits de rente

Coton, canne à sucre, tabac Superficie et production 1956- 2014&1961- 2014&1959- 2014 Départementale, régionale MDAE et FAO

Viandes Bovin, caprin, ovin,

camelin, asin Tête de bétail 1969-2014 Départementale, regional, MDAE

Poissons Poisson Production

(tonne)

1969-2014 Nationale FAO

Enfin, pour certaines séries comme la production de maïs, un segment est manquant. Par contre, pour la série sur la production de piment trois segments sont manquants : 1967-1969 ; 1982-1989 ; 2014. Certaines années manquantes ont dû faire l’objet d’un lissage afin d’obtenir des séries continues, un préalable à l’analyse des séries chronologiques. Une fois les données récoltées au sein des ministères et des archives, il faut encore établir des modèles d’estimation des données manquantes. Au total, 5 séries sont complètes : le mil, le sorgho, le riz, le niébé et le blé. Dès les années 1950, les trois plus importantes cultures des systèmes agricoles pluviaux (mil, sorgho, niébé) ont été estimées et répertoriées par la direction du développement agricole. Il est à noter que la série du blé est aussi disponible entre 1953 et 2014. L’objectif du ministère du développement agricole était de collecter des informations sur les superficies et les rendements afin d’estimer les productions. En effet, l’estimation des productions permettait d’établir les bilans céréaliers. Ceux-ci donnaient une tendance des déficits à compenser par les importations alimentaires et l’aide alimentaire ou des excédents. Afin d’éviter l’intégration excessive de biais liés à l’estimation, nous ne pratiquons pas d’imputation8

sur ces séries mais les analysons uniquement du point de vue des tendances. Nous appliquons à la majorité des autres séries la méthode des interpolations linéaires. Son utilisation permet de ne pas affecter la série et de garder les données secondaires brutes récoltées. Ces séries présentent très peu de données manquantes ; Si c’est le cas, elles se situent souvent au début d’une série, soit durant les dix premières années analysées.

8

Le terme imputation signifie en statistique le fait qu’une valeur manquante prenne la valeur de remplacement et d’estimation calculé selon un procédé simple ou multiple

Cependant, afin de rester cohérent dans la démarche, l’ensemble des séries est analysé à partir de 1953. Il a un double objectif : décrire l’évolution de la tendance et les possibles saisonnalités d’une série de plus d’un demi-siècle ; identifier si l’indépendance est un évènement qui marque les séries analysées étant donné les politiques différentes entre la colonisation et la première politique agricole liée au boom de l’Uranium. Enfin, les données manquantes pour quatre séries ont été définies par la méthode de régression par les sous- ensembles. Les données ne pouvant être négatives ont induit l’utilisation des deux méthodes. En effet, certaines séries traitées par interpolation ou régression des sous-ensembles présentaient des superficies et productions négatives. Nous avons donc éliminé ces données (égal à zéro) et une nouvelle fois estimé à l’aide de l’interpolation les données manquantes (négatives) (Tableau 4).

Tableau 4 : Données manquantes et méthodes d’imputation de celles-ci pour l’agriculture et la pêche

No. Produit Superficie Production Méthode

1 Mil Complète Aucune

2 Sorgho Complète Aucune

3 Riz Complète Aucune

4 Maïs 1981 Interpolation

5 Fonio 1953-1960 Interpolation

6 Blé Complète Aucune

7 Niébé Complète Aucune

8 Voandzou 1953-1962 ; 1967-1969 ; 1982-1994 Interpolation 9 Arachide 1953-1955 Interpolation 10 Sésame 1953-1969 1953-1960 ; 2005-2009 Sous-ensemble 11 Oignon 1953-1958 ; 2013-2014 1953-1958 ; 2014 Interpolation 12 Tomate 1953-1960 ; 2014 Interpolation 13 Poivron 1953-1960 ; 2014 Interpolation 14 Chou 1953-1989 ; 2014 Aucune 15 Piment 1953-1958 ; 1967-1969 ; 1982-1989 ; 2014 Sous-ensemble 16 Manioc 1953-1955 1953-1955 Interpolation

17 Patate douce 1953-1958 1953-1960 Interpolation

18 Pomme de terre 1953-1958 ; 1962-1976 1953-1976 Sous-ensemble

19 Pastèques 1953-1999 ; 2014 1953-1999 ; 2014 Aucune 20 Melon 1953-1994 ; 2014 1953-1994 ; 2014 Aucune 21 Mangue 1953-1999 ; 2014 1953-1999 ; 2014 Aucune 22 Datte 1953-1960 ; 2014 1953-1960 Interpolation 23 Coton 1953-1955 ; 1967-1969 ; 1990 ; 2002-2009 1953-1955 ; 2014 Sous-ensemble

24 Canne à sucre 1953-1958 1953-1960 Interpolation

25 Tabac 1953-1958 ; 2014 1953-1958 ; 2014 Interpolation

26 Poisson - 2014 Interpolation

En ce qui concerne l’élevage, les données sont très complètes et n’ont nécessité qu’une imputation des données par l’interpolation linéaire. En effet, les données manquantes portent sur les 7 premières années et ont fait l’objet d’une estimation avec le macro SMOOTH de Minitab (Tableau 5).

Tableau 5 : Données manquantes et méthodes d’imputation de celles-ci pour l’élevage Elevage Nombre de tête Méthode

Bovin 1953-1959 Interpolation Ovin 1953-1959 Interpolation Caprin 1953-1959 Interpolation Camelin 1953-1958 Interpolation Equin 1953-1958 ; 1963 ; 1967 Interpolation Asin 1953-1958 ; 1963 ; 1967 Interpolation

Cette analyse tendancielle identifie les crises affectant les superficies emblavées et les rendements. L’analyse qualitative et les itinéraires techniques théoriquement mis en place et ceux effectivement appliqués permettront aux acteurs du développement de définir les actions à mener pour assurer une pleine réussite. Nous avons défini que l’outil d’analyse par les systèmes de production est une démarche itérative et adaptative qui doit évoluer tout au long de sa mise en place. En outre, l’outil est aussi conçu pour permettre à l’ensemble des acteurs d’obtenir des informations en fonction de leurs spécificités comme la mise en place d’un projet de développement de la filière poivron dans le système de production agro-pastoral de la Komadougou. Cet exemple démontre que les acteurs de ce programme vont surtout s’intéresser aux parties concernant le poivron et le système de production agro-pastoral de la Komadougou. Enfin, une des grandes critiques et autocritiques de ce travail est le manque de modélisation robuste. Toutefois, les données provenant de zones géographiques à faible revenu et faiblement développées ne sont pas toujours utilisables et doivent être interprétées avec précaution. De nombreux experts s’accordent donc sur le fait que l’utilisation de ces données doit uniquement être axée sur l’analyse de la tendance et non la conception d’un modèle engendrant de nombreuses hypothèses et reformulation statistique (Dury et al., 2010). L’outil de développement se veut le plus abordable possible afin de vulgariser les potentialités et les systèmes de production dans lesquelles celles-ci peuvent se valoriser et s’écouler le plus facilement. En outre, les tests statistiques et la modélisation risqueraient d’engendrer une interprétation erronée des données, comme le montre l’estimation des rendements par les systèmes de production ruraux. Ils risquent de ne pas orienter efficacement l’articulation et la structuration du ciblage et la mise en place des actions en matière d’aide d’urgence et de développement.

L’ensemble de ces séries chronologiques sera analysé par la méthode de décomposition pour la tendance et l’établissement d’un modèle ARMA de Box et Jenkins. L’objectif est d’identifier les principales caractéristiques des séries telles que « l’analyse de la tendance générale, de la composante saisonnière et de quelques indications relatives à l’étude des résidus » (Palm R. et Brostaux Y., 2009). Toutefois, le présent travail s’applique surtout à identifier les tendances globales des productions par rapport aux séries chronologiques et non la saisonnalité interannuelle. Nous abordons l’étude des séries chronologiques pour décrire leurs évolutions dans le temps et non pour prédire celles-ci mais plutôt réaliser un travail de prospective articulant et structurant l’ensemble des ciblages à l’insécurité alimentaire. La méthode utilisée, paramétrique basée sur le modèle de Box et Jenkins. Desbois D. (2005) indique que « les modèles ARIMA établis par Box et Jenkins ont été introduits pour reconstituer le comportement de processus soumis à des chocs aléatoires. Il comporte trois types de processus temporel : les processus autorégressifs (AR-AutoRegressive), les processus intégrés (I-Integrated), et les moyennes mobiles (MA-Moving Average) » (Debois D., 2005 ; p 2-3). Etant donné la volonté du présent travail de faire ressortir les potentialités pour 32

produits, nous simplifierons au maximum l’établissement de l’analyse des séries chronologiques.

L’étude des variables de chaque thématique sera effectuée par une analyse des séries chronologiques. L’étude des séries chronologiques reconnaitra les tendances (Tt), la

saisonnalité (St) et les résidus (

ɛ

t). Les composantes de tendance peuvent être définies comme

étant l’évolution à long terme d’une série de données. Elle se base uniquement sur le lien qui existe entre les valeurs observées et leur rang dans la série chronologique (Jacques J., 2006 ; Lagnoux A., 2011). « Les composantes saisonnières (saisonnalité) (St) correspond à un phénomène qui se répète à intervalles de temps réguliers (périodiques). En général, c’est un phénomène saisonnier d’où le terme de variations saisonnières ». (Lagnoux A., 2011, p 8). Enfin, une série chronologique présente des fluctuations irrégulières qui sont considérées comme bruit ou résidu (

ɛ

t). La fonction des séries chronologiques (fobs) étudiées est illustrée

par ces trois composantes sous forme de plusieurs combinaisons, généralement trois (Jacques J., 2006 ; Palm R., 2008 ; Lagnoux A., 2011) :

 Modèle additif → Fobs= Tt + St +

ɛ

t

 Modèle multiplicatif → Fobs= Tt * St *

ɛ

t

 Modèle mixte → Fobs = Xt * Tt +

ɛ

t

Comme le souligne Palm R, (2008), le choix des trois modélisations déterministes « dépend de la nature de la série et n’est pas évident a priori » (Palm R., 2008, p 2). Les propriétés de l’amplitude de la saisonnalité caractérisent les modèles. Le modèle additif présente une amplitude de la composante saisonnière (St) constante. La composante

s’additionne à la tendance. Tandis que celle du modèle multiplicatif varie sur la période étudiée de manière proportionnelle à la tendance (Xt). Toutefois, pour déterminer le type de

modèle additif et multiplicatif, il existe des méthodes graphiques et analytiques. La méthode graphique du profil illustrée par les séries chronologiques des indices moyens montre que les droites ne sont pas parallèles et laissent supposer que le modèle est multiplicatif (Palm R., 2008 ; Lagnoux A., 2011). La seconde méthode graphique de la bande repose sur la mise en place de droite reliant respectivement par les minimas et par les maximas des indices moyens des systèmes de production. Nous n’illustrerons pas les droites passant par les minimas et maximas des trois systèmes de production mais l’analyse de celles-ci indique que les droites ne sont pas parallèles soulignant l’identification d’un modèle multiplicatif. Enfin, une troisième méthode analytique calculant les moyennes et les écarts-types « puis la droite des moindres carrés (σ=a ẍ+ b) si a est nul, c’est un modèle additif, sinon c’est le modèle multiplicatif » (Lagnoux A., 2011, p 18).

Le présent outil d’aide à la décision caractérise les spécificités de chaque produit et combine ceux-ci en fonction des systèmes de production ruraux. Les coefficients utilisés pour répartir les données tenteront de donner une répartition des données nationales par systèmes de production ruraux. Toutefois, l’analyse des séries chronologiques ne sera évaluée que pour les données nationales. En effet, la répartition en fonction d’une proportion même adaptée aux potentielles zones « réelles » reproduira les tendances et les potentielles saisonnalités de l’analyse des séries nationales étant donné que les coefficients sont des rapports entre la superficie des systèmes de production ruraux et la superficie totale du Niger. Etant donné le nombre important de produits à analyser, nous les avons regroupés en plusieurs classes (céréales pluviales, produit de rente et d’exportation, etc.). Ce regroupement pourrait introduire un biais basé sur la spécificité des produits. Ce biais peut être limité en basant le choix de la présence ou l’absence d’un produit grâce à la littérature et surtout un groupe d’experts connaissant parfaitement les différents systèmes de production ruraux et les

principales productions. En outre, certains produits faiblement cultivés dans certains systèmes de production ruraux ne seront pas pris en compte afin de faire ressortir les principales productions à développer auprès de la population. L’objectif de l’analyse chronologique est double, faire ressortir les productivités importantes en lien avec une vision de développement historique (série longue) et les productions même mineures mais avec un haut potentiel de développement permettant un accroissement de la disponibilité et de l’accessibilité alimentaire des ménages.

4 L’ANALYSE SPATIALE A TRAVERS LES SYSTEMES DE PRODUCTION

RURAUX