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L’analyse de contenu : l’analyse thématique

Chapitre 4. De la construction théorique … à la mise en action

2. Présentation des financeurs

3.5 L’analyse de contenu : l’analyse thématique

L’entretien est une source d’informations riche. Il apporte des réponses aux hypothèses de recherche. Toutefois, il exige un travail important de retranscription et d’interprétation. Le passage de l’oral à l’écrit entraine le risque de perdre ce qui fait « la spécificité et la richesse de la parole [...] tout le subtil dégradé des émotions qui passent à travers la voix » c’est pourquoi il est nécessaire d’effectuer une « retranscription intégrale pour les entretiens sur lesquels on a décidé de travailler de manière intensive ; c'est la condition nécessaire pour percevoir et analyser la « dynamique » de l'entretien » (Beaud, op.cit., 250).

Sans perdre de vue que le « travail d'analyse et d'interprétation d'un entretien approfondi commence bien avant l'enregistrement proprement dit de la cassette » (Beaud, op.cit., 238), il

219 Cette partie comprenait des informations « objectives » sur la structure et les usagers (création de la structure, objectifs, nombre de bénévoles, de professionnels, d’usagers, etc.) auxquelles nous avons eu accès par le biais de rapports d’activités, d’assemblées générales.

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nous a semblé nécessaire de tenir compte du contexte, de l’environnement, des conditions de réalisation de l’enquête afin de pouvoir s’engager dans une analyse complète.

Pour appréhender le travail interprétatif des entretiens, nous nous sommes appuyée sur une méthode d’analyse de contenu et plus spécifiquement celle de l’analyse thématique. Il existe, de façon schématique, deux grandes catégories d’analyse des entretiens : l’analyse de données statistiques et l’analyse de contenu. Engagée dans une démarche qualitative, notre choix s’est logiquement tourné vers l’analyse de contenu qui est utilisée pour étudier un système social complexe. « Le recours à l’analyse de contenu, pour tirer parti d’un matériel dit « qualitatif » est indispensable : entretiens d’enquête, de recrutement, de psychothérapie ... donnant lieu à un matériel verbal riche et complexe » (Bardin, 1977, 93)220.

Avoir recours à ce type d’analyse participe en outre à l’exercice de distanciation et permet de lutter contre le savoir subjectif, ces (fausses) évidences parfois enfouies en nous. Elle se caractérise comme « un ensemble d’instruments méthodologiques de plus en plus raffinés et en constante amélioration s’appliquant à des « discours » (contenus et contenants) extrêmement diversifiés » (Bardin, op.cit., 13).

L’analyse de contenu se compose de plusieurs types d’analyses. L’analyse sémantique et structurale du récit s’attache à la structure du discours. Elle privilégie le sens latent, implicite du langage. L’analyse thématique, opérant dans le champ logico-sémantique, s’intéresse au sens manifeste du discours.

Nous avons, pour notre part, choisi d’utiliser l’analyse thématique car elle permet d’analyser : - des logiques de fonctionnement d’organisations,

- des logiques d’actions, de stratégies, - des situations problématiques, - des changements organisationnels.

Notre travail de recherche se prête à ce type d’approche. En effet, nous cherchons à appréhender la structuration de l’espace du « socio-sport » rennais, à savoir les logiques d’actions des différents acteurs.trices, les enjeux de luttes entre ceux-ci ainsi que les stratégies mises en place dans ce cadre concurrentiel.

220 Bardin, L. (1977). L’analyse de contenu. Vendôme, Presses Universitaires de France, Le Psychologue.

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Nous avons eu recours à l’analyse thématique de type « horizontal » (Bardin, op.cit., 95) qui consiste à analyser « la répétition fréquentielle des thèmes, tous entretiens confondus » (Bardin, op.cit., 95). Celle-ci permet de repérer les thèmes récurrents et qui sont abordés de manière identique ou différente. Ce travail permet de faire émerger des similitudes ou, au contraire, des différences.

Pour cela, il est nécessaire de commencer par une pré-analyse, une « lecture flottante » (Bardin, op.cit., 126) de tous les entretiens afin d’avoir une vision globale et d’entamer le travail de déconstruction du corpus de textes.

L’étape suivante consiste à effectuer un « découpage du texte en unités comparables » (Bardin, op.cit., 131) afin de faire émerger des thèmes et sous-thèmes. Le choix de ce ces thèmes et sous-thèmes s’effectue en fonction de nos hypothèses de recherche, d’où « la nécessité de préciser des hypothèses, de replacer la technique dans un cadre théorique » (Bardin, op.cit., 134).

Par ce travail thématique, nous avons pu construire une grille d’analyse qui nous a permis de prendre de la distance par rapport à nos intuitions et interprétations de départ. Nous avons alors repéré des « noyaux de sens » (Bardin, op.cit., 137), autrement dit, des éléments de discours significatifs insérables dans la grille d’analyse. S’en est suivi une analyse transversale comparant, à la fois, les variations à l’intérieur d’un thème ou sous-thème et les variations en fonction des acteurs et actrices.

Ce chapitre rend compte du travail méthodologique indispensable à la réalisation d’un travail de recherche. Il met l’accent sur la nécessité de croiser les outils méthodologiques pour une meilleure approche de l’objet de recherche.

Conclusion de la partie 1

Tenter de comprendre l’évolution du « socio-sport » ne peut se faire sans prendre en compte les changements sociétaux. Son émergence est le fruit d’un contexte social « agité » et de décisions politiques prises dans l’urgence. En effet, le début des années 1980 est marqué par une crise économique et sociale qui accentue les inégalités dans les territoires les plus en difficultés. Ces derniers font l’objet d’une politique spécifique appelée « politique de la ville » qui rompt avec la volonté d’intégrer ces quartiers de grands ensembles et les transforment en

« quartiers prioritaires ». Considérés initialement comme un progrès et un accès à de

« meilleures conditions de vie », ils sont de plus en plus perçus comme des quartiers de

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« relégation ». Ceci est également renforcé par les émeutes urbaines de l’été 1981. Les quartiers et leurs habitant.e.s sont alors considérés comme violents, désœuvrés et « à la marge ».

De ce fait, durant cette période, le paysage sportif connaît des « évolutions » : les pratiques sportives se diversifient, « l’individualisme sportif » s’accentue, l’environnement institutionnel ainsi que le phénomène sportif se complexifient.

À partir de croyances collectives perpétuées autour de ses prétendues vertus éducatives et socialisatrices, le « socio-sport » prend donc racine dans un contexte urbain instable au point d’être représenté et utilisé comme un « remède miracle ». C’est ainsi qu’à chaque fois qu’une situation de « crise » dans les quartiers apparaît, est jugée trop importante voire trop visible, qu’on injecte des moyens.

Sur le plan local, c’est à la fois en écho au contexte national et par l’impulsion et le volontarisme de la politique municipale qu’une dynamique est née autour de ces pratiques permettant au « socio-sport » d’être progressivement introduit et reconnu. La convention socio-sportive liant la Ville de Rennes au Cercle Paul Bert ayant constitué le sujet de notre mémoire de Master 2, nous avons été amenée à conduire une étude sur les enjeux découlant de cette convention. De cette étude, c’est principalement la question de la définition du

« socio-sport » et de son appropriation par différents acteurs, actrices qui s’est dégagée. Les résultats ont toutefois permis d’identifier des besoins auprès des publics dans le développement des pratiques socio-sportives.

Le contexte et l’évolution du « socio-sport » étant posés, c’est maintenant le paysage local socio-sportif que nous allons analyser. Quelles structures se revendiquent du « socio-sport » ? Les visions et définitions se rejoignent-elles ou se distendent-elles ? La mise en œuvre du

« sport » est-elle concurrentielle ou complémentaire ? Existe-t-il un maillage socio-sportif ? Quels sont les usages du « socio-sport » sur le territoire rennais ?

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