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I. L’ALLERGIE ALIMENTAIRE

I.3. Les allergènes alimentaires

I.3.4. L’allergie à la noisette

I.3.4.1. Prévalence et caractéristiques cliniques

I.3.4.1.a. Prévalence

Peu d’études portent sur la prévalence de l’allergie à la noisette. Sa prévalence est souvent exprimée pour le « groupe des noix » ou le « groupe des fruits à coque » avec la noix, la noix de cajou, la noix du brésil, l’amande, la pistache ou le pignon de pin. Chez les enfants, le « groupe des noix » représente 6,3% des observations d’allergies alimentaires (au 6ème rang), tandis que les fruits à coque représentent 16% des observations chez les adultes (au 4ème rang) (données du CICBAA) [22]. En France, malgré son rang important, l’allergie à la noisette touche seulement 2,7% des enfants allergiques [32]. Aux Etats-Unis, 0,4% de la population générale serait atteinte, cette prévalence étant stable sur 5 ans [24].

La noisette est un allergène qui peut être « vrai » ou « incomplet ». Un allergène est dit vrai quand il est à la fois capable de sensibiliser un individu et de déclencher la réaction allergique. Un allergène est dit incomplet, ou secondaire, quand il est capable de déclencher une réaction allergique chez des individus déjà sensibilisés mais pas de sensibiliser

l’organisme de novo. Une grande partie des cas d’allergie à la noisette résulte d’une réaction croisée avec un allergène majeur du pollen de bouleau, Bet v 1, qui est l’allergène sensibilisant. L’allergie alimentaire à la noisette est alors déclenchée uniquement chez les patients présentant une pollinose au bouleau. La prévalence de l’allergie à la noisette est plus forte chez ces individus, atteignant 6% [137]. Des tests cutanés démontrent une sensibilisation à la noisette chez 18% de la population adulte allemande. La sensibilisation à la noisette est alors souvent associée à d’autres allergies alimentaires (céleri dans 66% des cas ou arachide dans 51% des cas) ou à la pollinose au bouleau (94% des cas) [217]. Mais la noisette peut également être à l’origine de « vraies » réactions allergiques, sensibilisant l’individu atopique par voie digestive. Nous verrons que les allergènes impliqués dans les allergies vraies et secondaires sont différents.

I.3.4.1.b. Tableau clinique

Les réactions secondaires chez les patients sensibilisés au pollen de bouleau induisent le plus souvent des symptômes légers localisés au niveau de la bouche (le syndrome oral d’allergie) [218]. Chez les patients ayant une allergie à la noisette sans allergie au pollen concomitante, les symptômes tendent à être plus sévères et souvent systémiques (urticaire, angio-œdème, anaphylaxie, anaphylaxie induite par l’effort) [219;220]. Les réactions allergiques à la noisette sont globalement plus sévères que celles observées pour les fruits, mais moins que pour l’arachide [142].

I.3.4.2. Les allergènes de la noisette

La noisette est le fruit du noisetier (Corylus avellana), plante de la famille des Bétulacées. De nombreux allergènes recensés par l’IUIS ont été mis en évidence dans la noisette (tableau 5).

Tableau 5 : Principales protéines allergènes de la noisette.

Noms Familles MM (Kda)

Cor a 1 PR-10 (homologue de Bet v 1) 17 Cor a 2 Profiline 14 Cor a 8 LTP 9 Cor a 9 globuline 11S 40 Cor a 10

protéine chaperon (BiP)

(luminal binding protein) 70 Cor a 11 globuline 7S 48 Cor a 12 oléosine 17 kDa 17 Cor a 13 oléosine 14-16kDa 14-16

Nous retrouvons, là encore, une variété d’allergènes issus de nombreuses familles de protéines et ayant des caractéristiques physicochimiques différentes. En 1992, Hirschwehr et coll. ont identifiés 2 allergènes de la noisette : Cor a 1, une protéine homologue de Bet v 1 de 17 kDa et Cor a 2, une profiline de 14 kDa chez des patients ayant une allergie au pollen de noisetier [218]. En 2002, Beyer et coll. ont identifié un nouvel allergène : une globuline 11S de 40 kDa appelée Cor a 9, qui est reconnue par 86% des 14 sérums de patients américains ayant des réactions systémiques sévères [221]. En 2004, Schocker et coll. ont aussi caractérisé un allergène chez des patients ayant une allergie à la noisette non liée à une sensibilisation au pollen de bouleau. Cet allergène est une LTP de 9 kDa (Cor a 8), reconnue par 62 à 77% des IgE selon la méthode utilisée [220]. Cette même année, Lauer et coll. ont identifié un nouvel allergène mineur : Cor a 11, une globuline 7S de 48 kDa. Pour cette protéine, 47% d’une population de patients suisses et allemands allergiques à la noisette avaient des IgE spécifiques de cette protéine [222]. Plus récemment, un statut d’allergène mineur a été attribué à Cor a 10, une protéine chaperon (BiP) [223] et Cor a 12 et Cor a 13, des oléosines [224].

Les profils de sensibilisation aux allergènes de noisette varient selon l’existence ou non d’une sensibilisation par le pollen de bouleau. L’exposition au pollen de bouleau variant entre les différentes régions d’Europe, l’origine géographique détermine le profil de sensibilisation des patients. Dans une étude portant sur une population de 65 patients suisses et allemands allergiques à la noisette, la prévalence de la réaction IgE était de 98% pour la protéine recombinante Cor a 1 (rCor a 1.04), 15% pour rCor a 2 et de moins de 47% pour Cor a 11. Aucune réaction n’était observée pour rCor a 8 [222]. Un profil de réactivité semblable à rCor a 1.04, Cor a 2 et Cor a 8 est observé chez 17 patients d’Europe du Nord allergiques à la noisette [225]. Par contre, en Europe du Sud, l’implication des allergènes est inversée. Dans une étude réalisée sur 26 sujets espagnols allergiques à la noisette sans allergie au pollen de

bouleau, dont 10 sujets avaient présenté un choc anaphylactique, la prévalence de réactions IgE à Cor a 8 était de 62 à 77% selon la méthode de détection utilisée. Seul un patient montrait une réaction IgE à rCor a 1.04 et aucun à Cor a 2. Les auteurs soulignent ainsi l’importance de Cor a 8 pour la majorité des patients espagnols présentant une allergie alimentaire vraie à la noisette et qui est associé à des réactions allergiques sévères [220]. D’autres études corroborent ces observations [219;226].