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III. RESULTATS ET DISCUSSION

III.2. Applications du modèle cellulaire

III.2.1. Etude des allergènes du lait

III.2.1.1. Confirmation de la fonctionnalité des allergènes purifiés

En premier lieu, le test cellulaire permet de confirmer la fonctionnalité d’allergènes purifiés d’aliments, c’est-à-dire leur capacité à ponter des IgE spécifiques et à induire la dégranulation des cellules RBL SX-38.

Dans le cadre du programme européen EuroPrevall, une banque d’allergènes purifiés a été constituée. Cette banque d’allergènes doit permettre le développement de nouveaux outils d’analyse permettant un diagnostic plus sûr et plus rapide des allergies alimentaires IgE dépendantes. Ces outils comprennent de nouveaux formats de tests de liaison aux IgE tels que « les puces à protéines » ainsi que des tests cellulaires. Dans ce cadre, le laboratoire a purifié différents allergènes du lait de vache et de chèvre (α-lac, βLG et caséines de vache, caséines de chèvre). Après confirmation de leur pureté et immunoréactivité par dosage ELISA et par tests de liaisons aux IgE de patients allergiques au lait, la fonctionnalité de ces protéines a été

confirmée à l’aide de notre test de dégranulation mastocytaire. Dans cette optique, des sérums de patients allergiques au lait provenant du Dr E. Paty ont été caractérisés.

Cette première application du modèle ayant été réalisée avant que sa mise au point ne soit finalisée, les sérums ont été utilisés sans traitement préalable pour la sensibilisation des cellules RBL SX-38 (c’est-à-dire sans immunopurification des IgE). Les IgE totales et spécifiques des différentes protéines purifiées du lait de vache et de chèvre ont été quantifiées en EAST afin de sélectionner les sérums d’intérêt pour notre étude, c’est-à-dire des sérums ayant des concentrations d’IgE spécifiques suffisantes. Des sérums de patients allergiques à l’arachide et non sensibilisés au lait ont été inclus en tant que témoins négatifs. Les résultats de ces dosages sont présentés tableau 11.

Tableau 11 : Caractéristiques sérologiques des sérums.

IgE spécifiques (UI/mL) Sérums IgE totales (UI/mL) anti-βLG bovine anti-α-lac bovine anti-caséines bovines anti-caséines caprines BCB28 510 5 3 33 130 BCB29 1770 5 6 6 17 BCB69 1550 9 31 180 200 BCB77 480 3 - 15 26 BCB83 2000 12 6 85 nd 263 2600 - - - - 470 7520 - - - -

Les sérums BCB28, BCB29, BCB69, BCB77 et BCB83 proviennent de patients allergiques aux laits de vache et de chèvre. Les sérums n°263 et 470 proviennent de patients allergiques à

l’arachide. (- : inférieur à la limite de détection (0,1 UI/mL), nd : non déterminé). Les sérums de patients allergiques à l’arachide (n° 263 et 470) ne démontrent pas la présence d’IgE spécifiques des protéines de lait. A l’inverse, les sérums de patients allergiques au lait de vache ont des IgE spécifiques dirigées contre au moins trois des quatre protéines ou fractions protéiques (caséines entières) du lait testées. Quatre patients sur les 5 possèdent des IgE contre toutes les protéines testées. On peut noter néanmoins une concentration en IgE spécifiques des caséines bovines et caprines plus importantes que les concentrations en IgE spécifiques de la βLG ou de l’α-lac. Les concentrations en IgE sont parfois près de 10 à 20 fois supérieures contre les caséines entières que contre les protéines du lactosérum (BCB28 et BCB83). La réponse IgE aux caséines bovines et caprines montre des concentrations semblables avec toutefois une réponse supérieure pour la caséine caprine. Pour réaliser l’étude de la fonctionnalité des allergènes, nous avons choisi d’utiliser les sérums n°

263 et 470 (sérums de patients allergiques à l’arachide) afin de réaliser les témoins de spécificité de dégranulation et les sérums n° BCB28, BCB69 et BCB83 afin de vérifier la fonctionnalité de ces allergènes purifiés du lait de vache et de chèvre.

Aucune dégranulation spécifique n’a été observée avec les sérums de patients allergiques à l’arachide (non montré). La figure 27 représente les dégranulations obtenues avec les cellules sensibilisées par le sérum BCB69, puis activées avec les gammes de concentrations des différentes protéines du lait.

Figure 27 : Libération de β-hexosaminidase de cellules RBL SX-38 sensibilisées avec le sérum BCB69 et activées par les allergènes purifiés du lait : α-lactalbumine,

β-lactoglobuline et caséines bovines et caprines.

Les quatre protéines induisent une dégranulation significative des cellules. Cependant, des différences sont observées entre les protéines. Pour la βLG et l’α-lac, la dégranulation est maximale pour une dose de 1 µg/mL, et atteint respectivement 27 et 24 % de la dégranulation de référence (induite par l’anti-IgE LE27). Pour les caséines de vache et de chèvre, la dégranulation est maximale pour des doses plus faibles (1 et 10 ng/mL respectivement) et les pourcentages de dégranulation obtenus sont plus élevés (64 et 52 % de la dégranulation de référence respectivement). Afin de comparer les résultats obtenus pour les 3 sérums de patients allergiques au lait testés, les courbes de dégranulation ont été modélisées et les maxima de dégranulation (MaxD) et EC50, c’est-à-dire la concentration pour obtenir 50% du MaxD, ont été calculés. Les résultats sont rapportés tableau 12.

Tableau 12 : Dégranulation basale, dégranulation nette de référence obtenues selon les sérums, maximum de dégranulation (MaxD) et EC50 calculés pour les différents sérums

et les différents allergènes purifiés du lait de vache et de chèvre.

dégranulations spécifiques

βLG α-lac caséines bovines caséines caprines Sérums dégranu- lation basale (% du total) dégranu- lation nette de référence (% du total) MaxD (% réf) EC50 (ng/mL) MaxD (% réf) EC50 (ng/mL) MaxD (% réf) EC50 (ng/mL) MaxD (% réf) EC50 (ng/mL) BcB28 7 27 0 0 36 1,1 68 0,7 BcB69 7 28 27 160 24 90 64 0,3 52 0,4 BcB83 5 48 13 590 18 2700 34 0,3 9 2,5 263 5 52 0 0 0 0 470 4 65 0 0 0 0

Les dégranulations basales (cellules sensibilisées par les sérums et activées par le tampon d’activation seul) se sont révélées être assez élevées. De plus, les dégranulations nettes de référence ne sont pas homogènes, ce qui laisse supposer que des facteurs interférants sont présents dans les sérums, gênant la liaison des IgE à leur récepteur et/ou l’activation des cellules. Cependant, les dégranulations spécifiques étant exprimées par rapport à cette dégranulation de référence, les différences d’intensités de dégranulation obtenues sont nivelées. Ces résultats sont conformes à ceux que nous observons lors de l’utilisation de sérums non traités.

Les MaxD obtenus avec les caséines bovines et caprines sont plus élevées que les MaxD obtenues avec la βLG et l’α-lac bovines. Les dégranulations induites par l’α-lac et la βLG ne sont d’ailleurs même pas significatives pour le sérum BCB28. Les MaxD semblent être corrélés aux taux d’IgE spécifiques vs IgE totales dans les sérums pour le sérum BCB69. Pour le sérum n° BCB83, cette relation n’est pas vérifiée. En effet pour ce dernier sérum, malgré les pourcentages d’IgE spécifiques vs totales de la βLG et de l’α-lac inférieurs à 1%, les MaxD atteignent respectivement 13 et 18% de la dégranulation de référence.

La comparaison des EC50 confirme ces différences, bien que les faibles intensités de dégranulation observées avec les sérums non purifiés rendent parfois difficiles les estimations et les comparaisons des EC50. Néanmoins, les EC50 obtenues pour la βLG et l’α-lac bovines (entre 90 et 2700 ng/mL) se sont avérées beaucoup plus élevées que pour les caséines bovines

et caprines (entre 0,3 et 2,5 ng/mL). Les caséines semblent donc avoir un plus fort potentiel de dégranulation dans ce test cellulaire et avec les sérums testés.

Cette première étude a donc permis de confirmer la fonctionnalité des protéines et fractions protéiques purifiées du lait de vache et de chèvre, ces protéines étant effectivement capables d’induire in vitro des dégranulations spécifiques. Ces résultats ont été inclus dans une publication décrivant la méthode de purification et de caractérisation des allergènes du lait de vache et de chèvre [353] (Annexe I). Cependant, l’analyse des résultats de dégranulations pour les 3 sérums de patients allergiques au lait a généré des interrogations sur le lien entre le pourcentage des IgE spécifiques vs IgE totales et la dégranulation, ainsi que sur le potentiel de dégranulation de ces différents allergènes du lait de vache et de chèvre.

III.2.1.2. Comparaison du potentiel de dégranulation des allergènes purifiés