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L’évolution hydraulique du stockage et de son environnement

des phénomènes transitoires d’ampleur globalement limitée

1.2 L’évolution hydraulique du stockage et de son environnement

Composante majeure de l’évolution phénoménologique, l’évolution hydraulique du stockage et de son environnement a des conséquences importantes sur les évolutions chimique et mécanique, donc sur la dégradation des colis de déchets et, in fine, sur le relâchement des radionucléides par les colis. Avec l’évo-lution chimique, elle détermine la mobilité des radionucléides relâchés et leur transfert vers la biosphère. Ainsi plus particulièrement :

-l’initiation des processus chimiques (dégradation des bétons par exemple) nécessite la présence d’eau et leur poursuite dans le temps et l’espace dépend fortement des flux d’eau et/ou des quantités de solutés susceptibles d’être transportés par ces flux ou de se déplacer par diffusion,

-le comportement mécanique des composants du stockage et des argilites du Callovo-Oxfordien dépend aussi de la présence d’eau. Cette dépendance peut être directe, par exemple pour les argilites (en particulier la zone endommagée par le creusement et l’exploitation), les bouchons d’alvéole et les scellements dont la plasticité et le comportement à la rupture résultent de leur état de saturation. Elle peut être indirecte, via les processus chimiques comme la corrosion qui modifie la résistance mécanique des composants en acier,

-le relâchement des radionucléides résulte surtout de la dégradation chimique et mécanique des colis sous l’effet de l’eau (corrosion des conteneurs métalliques, attaque des conteneurs en béton, altération de la matrice de verre). Après le relâchement des radionucléides, leur transfert vers la biosphère dépend en partie de l’écoulement de l’eau et des conditions de transport des solutés dans le stockage, puis dans le Callovo-Oxfordien et les formations encaissantes.

Avant la réalisation du stockage, les formations géologiques sont à l’équilibre hydraulique :

-dans le Callovo-Oxfordien, de très faibles écoulements d’eau s’organisent verticalement entre les formations carbonatées du Dogger et de l’Oxfordien, sous la différence de charges hydrauliques entre ces deux

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Le comportement et la sûreté à long terme du stockage et de son environnement

tions. Compte tenu de la faible perméabilité du Callovo-Oxfordien (5.10-13 à 5.10-14m/s en moyenne), ces écoulements d’eau sont très faibles (quelques centièmes de millilitre par an et par m2) de même que leur vitesse (quelques centimètres environ par 100 000 ans). Dans ce contexte, le transport des solutés dans le Callovo-Oxfordien s’effectue majoritairement par diffusion ;

-dans l’Oxfordien carbonaté et le Dogger, les écoulements d’eau sont horizontaux. Compte tenu des perméa-bilités de certains niveaux de ces formations (10-9m/s à 10-8m/s en moyenne), le transport des solutés s'y effectue essentiellement par convection.

Le stockage perturbe cet état hydraulique initial. Les puits drainent les eaux des formations supérieures durant l’exploitation. La présence du stockage provoque aussi une désaturation des argilites autour des ouvrages souterrains ventilés durant la phase d’exploitation ainsi qu’après fermeture pendant la phase de production d’hydrogène liée à la corrosion des éléments métalliques du stockage (conteneurs de déchets, composants d’alvéoles…).Les perturbations hydrauliques induites par le stockage restent limitées au stockage lui-même et au Callovo-Oxfordien du fait de sa faible perméabilité. Elles disparaissent au-delà de 100 000 ans environ et un nouvel état d’équilibre hydraulique s’instaure alors dans le stockage et le Callovo-Oxfordien.

Au-delà de quelques centaines de milliers d’années et jusqu’au million d’années, les effets des cycles clima-tiques sont susceptibles d’engendrer des modifications de la morphologie des terrains de surface. Au cours de cette période, les évolutions géodynamiques et leurs conséquences en surface sont les principaux facteurs influant sur l’environnement géologique, en particulier sur les formations encaissantes sus-jacentes.

1.2.1 Une perturbation hydraulique locale dans les encaissants supérieurs liée à l’exploitation du stockage (échelle de temps séculaire)

Etanches au passage du Tithonien, les puits d’accès du stockage n’ont pas d’impact hydraulique sur cette formation. Les écoulements d’eau dans les autres formations encaissantes, Kimméridgien marneux et Oxfordien carbonaté, sont suffisamment faibles pour ne pas nécessiter une étanchéité des puits à leur passage. La présence des puits provoque une décharge hydraulique dans ces formations et une éventuelle désaturation : dans le Kimméridgien marneux, la décharge hydraulique est limitée et l’extension de la zone désaturée ne dépasse pas quelques dizaines de mètres radialement par rapport à l’axe des puits ; elle est plus importante dans l’Oxfordien et la zone désaturée s'étend sur plusieurs centaines de mètres.

Après la fermeture du stockage, le scellement des puits dans le Callovo-Oxfordien et les débits d’eau dans ces formations permettent un retour à l’équilibre hydraulique : en quelques centaines d’années dans l’Oxfordien carbonaté, en plusieurs milliers d’années dans le Kimméridgien marneux en raison de sa plus faible perméa-bilité.

La perturbation hydraulique engendrée par les puits sur les encaissants sus-jacents est donc un phénomène local réversible qui a disparu avant l’arrivée des radionucléides dans les encaissants sus-jacents (celle-ci n’est pas susceptible d’intervenir avant quelques centaines de milliers d’années).

1.2.2 Les perturbations hydrauliques dues au stockage dans la formation du Callovo-Oxfordien

1.2.2.1 Pendant l’exploitation : la désaturation du Callovo-Oxfordien au pourtour des ouvrages ventilés limite très fortement les processus chimiques et le fluage des argilites

La ventilation des galeries, puits d’accès et alvéoles de déchets B pendant l’exploitation provoque à leur pourtour une désaturation des argilites qui se combine à la décharge hydraulique progressant dans les argilites. Dans les galeries et puits d’accès, la désaturation affecte en quelques années toute l’infrastructure en béton et la zone endommagée créée par le creusement. Elle se propage ensuite très lentement jusqu'aux argilites saines durant la période séculaire à pluriséculaire d’exploitation.

Autour des alvéoles B, la désaturation progresse de manière similaire. Comme les composants ouvragés en béton des alvéoles, les colis de stockage sont fortement désaturés.

A l’inverse, l’absence de ventilation des alvéoles C et CU ainsi que leur obturation (capot d’étanchéité durant la phase d’exploitation) empêchent la désaturation des argilites à leur pourtour.

La période d’exploitation peut être considérée comme une période « sèche » pour les ouvrages ventilés. Les processus chimiques sont alors (très) limités, notamment la dégradation chimique des bétons d’infrastructure et des colis de stockage B. Sur le plan mécanique, l’état non saturé de tout ou partie de la zone endommagée tend à ralentir ou à arrêter le fluage des argilites, limitant ainsi la mise en charge mécanique du soutènement des infrastructures de stockage.

1.2.2.2 Après la fermeture : le transfert de l’hydrogène de corrosion et la resaturation du stockage en entier sur plusieurs dizaines de milliers d’années à une centaine de milliers d’années

Lorsque la fermeture des ouvrages est décidée, leur resaturation par les eaux des argilites s’initie, ainsi que celle des argilites éventuellement désaturées par la ventilation pendant l’exploitation. Compte tenu de la faible perméabilité des argilites, c’est un processus lent. Il s’accompagne de la production d’hydrogène résultant de la corrosion des composants métalliques (et dans une moindre mesure, de la radiolyse de l’eau ou de matières organiques) qui retarde le retour à la saturation complète.

Compte tenu des très faibles vitesses de corrosion (quelques microns/an8), la principale phase de production d’hydrogène dure quelques milliers d’années (de l’ordre de 5 000 ans) dans les alvéoles de stockage C et CU et quelques centaines d’années (de l’ordre de 500 ans) dans les alvéoles B. Sur la base de travaux expéri-mentaux sur échantillons et en forage ayant permis d’apprécier les propriétés de transfert de l’hydrogène dans les argilites, des modélisations ont été réalisées pour apprécier le devenir de l’hydrogène.

L’hydrogène se dissout jusqu’à saturer l’eau en champ proche. L’excédent s’exprime alors sous forme gazeuse et migre par écoulement biphasique au travers de la zone endommagée jusque dans les galeries et dans les argilites saines, après que la pression de gaz a suffisamment augmenté pour permettre l’entrée du gaz dans la roche. Dans le cas des alvéoles CU contenant une plus grande quantité d’acier, la production de gaz est plus rapide que son évacuation par écoulement biphasique ; la pression de gaz dans l’alvéole augmente jusqu’à atteindre le seuil d’ouverture de la porosité (microfissuration) de l’argilite ou des composants ouvragés en argile gonflante (bouchons d’alvéoles ou scellements). L’ouverture de microfissures permet au gaz de s’écouler hors de l’alvéole, ce qui limite l’augmentation de pression. On a constaté sur échantillons et lors d’un essai en forage que les microfissures se referment après passage du gaz sans altérer les propriétés hydrauliques de la roche (la perméabilité à l’eau de l’argilite reste inchangée).

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Dans tous les cas de figure (alvéoles B, C et CU), la pression de gaz dans les alvéoles demeure inférieure à la pression de fracturation de la roche (12 MPa) : elle est au maximum de 7 MPa dans les alvéoles B, 6 à 7 MPa dans les alvéoles C et 9 MPa dans les alvéoles CU. A mesure de son évacuation dans le milieu géologique et les galeries du stockage, le gaz voit sa pression décroître dans les alvéoles jusqu’à ne plus lui permettre de migrer sous forme biphasique et a fortiori par microfissuration ; il s’évacue alors lentement par diffusion sous forme dissoute.

Le transfert de l’hydrogène dans le Callovo-Oxfordien n’entraîne pas de désaturation significative de la roche (la saturation des argilites est supérieure à 97 % en champ proche et à 99 % en champ lointain). Pendant la phase de production d’hydrogène, la pression de gaz dans les alvéoles induit une augmentation de la pression de l’eau interstitielle des argilites en champ proche qui engendre localement (quelques mètres autour des alvéoles) des gradients hydrauliques. Ceux-ci cessent avec la diminution de la pression et l’évacuation progressive du gaz. Leur extension limitée et la très faible perméabilité de l’argilite font que le transport dominant des solutés demeure toutefois diffusif à l’échelle de la couche du Callovo-Oxfordien.

Après quelques milliers d’années, les flux d’hydrogène diminuent progressivement et la resaturation se poursuit lentement. A l’échelle de plusieurs dizaines de milliers d’années, le stockage n’est pas totalement resaturé, ce qui limite fortement les processus chimiques de dégradation des composants du stockage (béton, argile) qui nécessitent la présence d’eau. La resaturation progressive du stockage en grand s’achève à l’échelle de 100 000 à 200 000 ans après sa fermeture.

1.2.2.3 Après resaturation totale du stockage : un nouvel état d’équilibre hydraulique

Après resaturation totale du stockage, un équilibre hydraulique se met en place dans le stockage et le Callovo-Oxfordien environnant :

-latéralement, au-delà de quelques centaines de mètres du stockage, le Callovo-Oxfordien retourne à son état hydraulique initial,

-verticalement, le stockage draine une faible part des écoulements au travers du Callovo-Oxfordien : un écoulement d’eau s’organise le long des ouvrages du stockage et des puits (quelques dizaines à centaines de litres par an), très insuffisant pour entraîner des solutés par convection. La diffusion est le mécanisme de transport dominant des solutés (en particulier des radionucléides) et tout se passe comme à l’état initial avant réalisation du stockage.

C’est dans ce contexte hydraulique que s’effectuent les évolutions chimique et mécanique du stockage et, in fine, le relâchement et le transfert des radionucléides dans le Callovo-Oxfordien.

1.2.3 L’évolution des écoulements et du transport à l’échelle de plusieurs centaines de milliers d’années est liée à l’évolution géodynamique

Les évolutions géodynamiques se traduisent par l'érosion progressive des terrains en surface due en particulier aux changements climatiques : leurs effets hydrauliques concernent donc les formations géologiques sus-jacentes au Callovo-Oxfordien, en particulier l’Oxfordien carbonaté où les écoulements sont modifiés.

Les études sur les changements climatiques futurs dans l’hémisphère nord montrent une succession de cycles glaciaires tous les 100 000 ans environ durant le prochain million d’années. Selon la prise en compte ou non d’un effet anthropique (des activités de l’homme), la date d’occurrence du prochain maximum glaciaire varie entre 100 000 ans et 600 000 ans. Durant les maxima glaciaires, les glaciers ne s’installent pas aux latitudes du site étudié et le pergélisol n’atteint pas le Callovo-Oxfordien.

Représentation schématique de l’évolution des écoulements dans l’Oxfordien carbonaté de l’actuel à un million d’années Sur le prochain million d’années, les cycles glaciaires et le soulèvement des terrains entraînent une érosion de plusieurs dizaines à une centaine de mètres selon la topographie. Cela se traduit, à partir de 300 000 à 500 000 ans, par l’enfoncement des vallées jusqu’à l’Oxfordien et par l’abaissement du niveau des plateaux.

A l’est et au sud du secteur, ces modifications topographiques font reculer vers l’ouest et le nord-ouest les zones d’affleurement correspondant aux aires de recharge des formations et abaissent les charges hydrau-liques dans les encaissants, notamment l’Oxfordien carbonaté. Ce n’est donc qu’à l’échelle de 300 000 ans à 500 000 ans que les évolutions géodynamiques modifient progressivement les directions d’écoulement dans les formations encaissantes sus-jacentes et, de manière moins marquée, dans le Dogger sous-jacent. En particulier dans l’Oxfordien, la direction d’écoulement régionale nord-ouest initiale s’estompe et de nouvelles directions locales apparaissent avec de nouveaux exutoires locaux au niveau des vallées qui se creusent.

Cependant,les vitesses d’écoulement dans les formations carbonatées du Dogger et de l’Oxfordien restent similaires à celles observées actuellement sur la zone de transposition.

Compte tenu de sa profondeur, la couche du Callovo-Oxfordien n’est pas directement affectée par l’érosion.

L’écoulement de l’eau reste similaire à l’actuel (globalement vertical ascendant sur la zone de transposition) mais avec un gradient de charge plus important (compris entre 0,1 et 0,4 m/m) sans modifier cependant le transport des solutés qui reste de type diffusif dominant.

Laboratoire de recherche

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1.3 L’évolution chimique du stockage

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