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L’évaluation des performances

Chapitre III : Le SCEQE dans le Paquet Climat Energie et l’interaction avec les

1.3 L’évaluation des performances

Dans les Etats membres, les programmes de promotion existent déjà depuis plus de dix ans. La performance des politiques peut être estimée par leurs impacts sur une gamme des paramètres, i.e., la capacité installée, la réduction de coût et de prix, l’apprentissage technologique, les effets industriels tels que la capacité nationale de production et les effets d’emploi associés, et l’acceptabilité public (Sawin, 2006). Cependant, les deux indicateurs fondamentaux fréquemment cités comme mesure de la réussite sont l’impact sur la croissance du marché c’est à dire l’efficacité de la politique, et les coûts associés, c'est-à-dire son efficience (International Energy Agency, 2008). L’examen des

indicateurs quantitatifs fournit un outil approprié pour évaluer les deux critères. En considérant l’énergie éolienne comme une référence pour analyser l’efficacité et l’efficience des instruments de promotion, cette analyse montre principalement que les tarifs d’achat s’avèrent actuellement plus efficaces et plus efficients que les systèmes de quotas d’EOR. Ces résultats peuvent être dus aux risques plus importants de l’investissement évoqués dans les sections précédentes, mais également à l’immaturité relative des systèmes de quotas.

1.3.1 La stimulation des capacités

L’efficacité fait référence à la capacité du système de promotion à fournir de l’électricité verte. Le projet européen OPTRES et l’Agence Internationale d’Energie interprètent l’efficacité comme étant le ratio de changement de production normalisée d’électricité (ou le potentiel accompli) pendant une période donnée et le potentiel supplémentaire réalisable jusqu’en 2020 pour une technologie donnée (OPTRES, 2007 ; International Energy Agency, 2008) :

i n i i n i n i n i n i n i n

G

POT

G

G

ADDPOT

G

G

E

1 2020 1 1

=

=

i n

E

est l’indicateur d’efficacité pour la technologie i d’EOR dans l’année n ;

i n

G

la production d’électricité par la technologie i d’EOR dans l’année n ;

i n

ADDPOT

est le potentiel supplémentaire de production permis par la technologie i de l’EOR dans l’année n jusqu’en 2020 ;

i

POT

2020est le potentiel total de production permis par la technologie i de l’EOR jusqu’en 2020.

Cette définition de l’efficacité indique le développement de l’électricité d’origine renouvelable par rapport aux potentiels disponibles dans un pays pour chaque technologie. L’approche reste raisonnable puisque les objectifs de l’EOR fixés dans la Directive des énergies renouvelables (2001/77/EC) sont basés principalement sur les potentiels réalisables dans chaque Etat-membre. L’analyse se complique cependant par le fait que des changements importants dans la politique de promotion se sont produits dans certains pays depuis dix ans. Ces changements devraient être pris en compte pour l’analyse de l’efficacité des instruments. Par exemple, jusqu’en 2003 en Suède les énergies renouvelables ont été promues principalement par des incitations financières, alors que depuis cette date un système de quota fonctionne également. En 2002, le Royaume-Uni a changé les enchères concurrentielles en un système de quota comme instrument de promotion, alors que la politique des tarifs d’achat mise en œuvre aux Pays-Bas modifiait le système antérieur des quotas. Ainsi, en 2002, la Belgique a choisi la politique des quotas à la place des tarifs d’achat, alors que la France et l’Irlande sont passées de la politique des enchères aux tarifs d’achat comme politique principale de promotion, depuis 2001 et 2006 respectivement. Bien évidemment, ces changements de politique ont pu causer des instabilités dans les augmentations des capacités d’EOR. En revanche, la politique de promotion de l’EOR a été relativement stable dans des pays comme l’Autriche, le Danemark, la Finlande, l’Allemagne, la Grèce, le Luxembourg, le Portugal et l’Espagne.

Le Graphique 26 montre l’indicateur d’efficacité annuelle moyenne pour l’électricité produite à partir de l’éolien terrestre pour les années 1998-2005 dans les pays européens. Nous remarquons que les pays où l’efficacité est la plus élevée – le Danemark, l’Allemagne et l’Espagne – ont appliqué une politique relativement stable de tarifs d’achat durant toute la période d’analyse. Ces trois pays représentent également 80 % du marché européen en 2005 et sept des dix premiers constructeurs mondiaux (Menanteau, 2007). On estime souvent que la réussite de la promotion des énergies renouvelables dans ces pays est due aux tarifs d’achat élevés (Finon et Menanteau, 2003). Cependant, plusieurs études montrent que ces tarifs ne semblent pas excessifs (au moins pour l’année 2005 ils excèdent ou couvrent légèrement le niveau moyen du coût de production) et que d’autres facteurs contribuent à l’augmentation des capacités éoliennes (International Energy Agency, 2008 ; OPTRES, 2007). L’explication se trouve également dans les paramètres institutionnels, en particulier dans la nature des incitations, la capacité de limiter le risque-prix ainsi que les coûts de transaction concernant la définition et la mise en place d’un projet. La nature plus incitative des tarifs d’achat provient du fait qu’ils sont plus prévisibles et limitent les coûts de transaction (Haas, 2001 ; Dinica, 2006). Une sécurité d’investissement plus élevée accompagnée de peu de barrières administratives et réglementaires a aussi favorisé la croissance soutenue de l’énergie éolienne dans ces pays. En revanche, en France les tarifs d’achat sont suffisamment élevés, mais le cadre administratif n’a pas été propice au développement des énergies éoliennes et son indicateur d’efficacité reste très bas. Cela peut également expliquer les progrès relativement modestes dans les nouveaux pays membres.

Graphique 26 : L’indicateur d’efficacité pour l’électricité d’éolien terrestre sur la période de

1998-20051

Source : adapté à partir d’OPTRES, 2007

1.3.2 L’efficience économique

Pour évaluer l’efficience économique des différents instruments, il est nécessaire de s’assurer que les coûts et niveaux de soutien peuvent être comparés de façon cohérente selon les pays. En particulier, la durée de promotion doit être harmonisée : par exemple, la durée des certificats verts en Italie n’est que de huit ans alors qu’en Allemagne les tarifs d’achat sont garantis pour les vingt prochaines années. D’habitude, le niveau de soutien est normalisé à une durée commune de quinze ans en utilisant le taux d’actualisation de 6,6 % (OPTRES, 2007, International Energy Agency, 2008). Ensuite, les rentes périodiques d’un investissement renouvelable peuvent être déterminées afin de comparer les soutiens actuels sur la durée de vie de la politique, du point de vue des investisseurs. La rente périodique calcule le rendement spécifique moyen actualisé sur chaque kWh produit en prenant en compte les revenus et les dépenses sur la durée de vie d’une technologie :

=

+

+

=

n t t t t n

i

Dépenses

venus

i

i

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1

(1 )

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*

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où A est le profit actualisé, i le taux d’actualisation, t l’année et n la durée de vie.

La limite principale de cette approche se situe dans l’estimation de l’évolution future des prix des certificats verts dans les systèmes de quotas d’EOR. A ce jour, la connaissance du développement de ces marchés dans le temps ne concerne que le stade initial. Nous faisons donc l’hypothèse que les prix des certificats verts restent constants aux niveaux de 2004. Cependant, cette hypothèse fait que

1

Les analyses pour le secteur de la biomasse ne sont pas aussi évidentes que pour l’énergie éolienne (European Commission, 2005, OPTRES, 2007). Les coûts de production de la biomasse font apparaître des grands écarts. Ces écarts sont causés par : les sources différents (résidu de forêt, taillis à courte rotation, pailles, déchet animal, etc.), les procédés de conversion différents (co-combustion, gazéification, etc.) et les tailles différentes (les tailles des unités de biomasse peuvent varier par le facteur de deux cents). Des analyses beaucoup plus précises sont donc nécessaires basés sur les matières premières et les technologies différentes. Néanmoins, les analyses montrent que les deux instruments : tarifs d’achat et systèmes de quotas d’EOR, produisent des bons résultats. Dans le secteur biomasse forestier, l’avantage d’un instrument sur l’autre n’est pas évident. La complexité de secteur et les variations régionales signifient que les autres facteurs jouent des rôles importants. En général, les incitations à l'aménagement des forêts devraient aider à mobiliser plus la biomasse de forêt non utilisée pour tous les utilisateurs.

les rentes périodiques espérées peuvent être amplifiées dans les pays où le prix du certificat a été relativement élevé en 2004 (e.g. la Belgique).

Le Graphique 27 reproduit les niveaux d’indicateur d’efficacité montrés dans le Graphique 26 par rapport au niveau annualisé de la rémunération de chaque pays en 2004. En général on peut affirmer que les systèmes de tarifs d’achat ont été efficaces avec un profit relativement bas pour les producteurs. Par exemple, l’Espagne a atteint les taux de croissance les plus élevés selon l’indicateur d’efficacité avec un niveau adéquat de profit. Le profit espéré dans ce pays est plus important que dans les autres pays appliquant les tarifs d’achat, en raison d’un niveau élevé de soutien, mais surtout en raison des coûts de production plus bas, dus aux bonnes conditions d’exploitation des ressources et aux coûts d’investissement plus faibles. L’efficacité des instruments de promotion est comparable en Irlande et en Allemagne, même si le niveau de soutien nécessaire est moins important en Irlande, grâce aux meilleures ressources en vent de ce pays.

En revanche, dans les pays appliquant le système de quotas d’EOR les taux de croissance s’avèrent bas, avec des profits actualisés très élevés. Il faut tout de même remarquer que les systèmes de quotas sont largement moins matures que la politique des tarifs d’achat. De plus, ce résultat peut être discuté en raison de l’extrapolation des prix des certificats verts, mais il fournit cependant une hypothèse potentielle selon laquelle les systèmes de quotas peuvent conduire à des profits assez élevés pour les producteurs comme résultat des risques élevés d’investissements. Les rentes importantes perçues dans les systèmes de quotas d’EOR contredisent également les spéculations théoriques quant à l’affaiblissement des incitations d’innovation dans les systèmes de quota en raison de rentes moins importantes que pour les tarifs d’achat (cf. section 1.2.2).

Graphique 27 : L’efficience de soutien pour l’éolien terrestre : l’indicateur d’efficacité par rapport aux profits espérés pour l’année 2004

Source : adapté à partir d’OPTRES, 2007

Butler et Neuhoff (2008) parviennent aux mêmes conclusions lorsqu’ils comparent les systèmes de promotion de l’EOR au Royaume-Uni (systèmes d’enchères et depuis 2002 système de quotas) et en Allemagne (système des tarifs d’achat). Les auteurs montrent que malgré les atouts théoriques des systèmes de quotas d’EOR en termes de minimisation de coût, dans la pratique le système de tarifs

d’achat en Allemagne a entraîné des prix moins élevés par unité d’électricité éolienne délivrée, mais aussi plus de déploiement. En particulier, les auteurs trouvent qu’il y a une concurrence plus importante parmi les producteurs et constructeurs des turbines sous le système de tarifs d’achat en Allemagne que sous le système de l’EOR au Royaume-Uni. Et comme cela correspond aux étapes de la chaîne de valeur qui contribuent le plus au coût total, la concurrence accrue a dû avoir un impact plus fort sur le prix final.

En résumé, lorsque l’on compare les instruments de promotion, certains facteurs doivent être soulignés. L’efficacité des instruments dépend largement de la maturité et de la crédibilité des systèmes. Un horizon stable de planification est important pour créer de bonnes incitations et diminuer le coût social. Ainsi, les obstacles administratifs peuvent influencer et même entraver le fonctionnement d’instruments puissants en théorie. En général, l’efficience économique et l’efficacité varient selon les pays européens. Les systèmes de quotas d’EOR révèlent un écart important entre le coût de production et le niveau de soutien. Les raisons de ces niveaux élevés résident dans les risques plus importants pour l’investissement sur un marché qui est encore dans sa phase transitoire. La question se pose surtout pour le développement des prix du certificat vert à moyen et long terme. Actuellement, les systèmes les plus efficaces sont les systèmes de tarifs d’achat en Allemagne, en Espagne et au Danemark. Les tarifs d’achat s’avèrent également efficaces avec un profit des producteurs relativement bas, ce qui n’est pas le cas actuellement pour les systèmes de quotas d’EOR. Mais encore une fois, la nouveauté de ces instruments doit être rappelée. Une fois ces marchés arrivés à maturité et les risques de l’investissement réduits (avec une introduction des prix-plancher garantis ou le banking et borrowing), le système de quotas d’EOR peut s’avérer plus efficace et plus efficient.

Après avoir examiné les différents instruments de soutient pour les énergies renouvelables, nous analysons dans la section suivante les interactions qu’ils entretiennent avec le principal outil de réduction des émissions de GES en Europe : le SCEQE.