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de l’éducation et de la santé à l’activité d’éducation

thérapeutique

Chantal Eymard1

QU’EST-CE QUE L’ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE DU PATIENT ?

Si la santé et le suivi thérapeutique des patients et des groupes sociaux ont toujours fait partie des préoccupations majeures des soignants, l’éducation thérapeutique des patients est devenue l’un des enjeux de notre société et de la santé des individus. Défi nie comme l’aide apportée aux patients, à leurs familles et/ou leur entourage pour « comprendre la maladie et les traitements, collaborer aux soins, prendre en charge leur état de santé et conserver et/ou améliorer la qualité de vie* » [1], nul doute que l’éducation thérapeutique ne

peut se réduire à l’instruction, au développement du sujet psychique ou à son formatage culturel et social. Cependant, les pratiques se réduisent encore trop souvent à de l’information, de la transmission de savoirs et de savoir-faire ne prenant que partiellement en compte les facteurs sociaux, environnementaux et personnels qui interagissent dans les problèmes de santé. Le processus d’autonomisation et d’autorisation du patient est alors secondaire à l’adoption de « bonnes pratiques » en santé.

De nombreuses disciplines ont tenté de sortir l’éducation thérapeutique de la seule logique de l’information. Toutefois les notions et concepts ne sont pas toujours explicités et référés, ce qui rend diffi cile leur appropriation par les professionnels. Nous souhaitons, à travers ce chapitre, participer à la mise en mots de l’activité d’éducation thérapeutique du patient et offrir aux lecteurs

1. Infi rmière, cadre de santé, maître de conférences habilité à diriger les recherches en sciences de l’éducation, univer- sité d’Aix-Marseille Unité mixte de recherche Apprentissage, didactique, évaluation, formation (UMR ADEF).

40 Éducation thérapeutique du patient : modèles, pratiques et évaluation

des repères pour analyser leurs pratiques et des comptes rendus d’expérience. Notons auparavant le cadre législatif de cette activité.

DE LA VOLONTÉ POLITIQUE À LA MISE EN ŒUVRE D’UNE ACTIVITÉ D’ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE

La volonté politique de faire de l’éducation thérapeutique l’une des priorités en matière de santé publique est marquée par une succession de textes offi ciels.

En ı980, le Comité des ministres réuni au Conseil de l’Europe déclare que toute personne a le droit de connaître l’information recueillie sur sa santé et recommande les programmes privilégiant la participation active des malades à leur traitement.

En mai ı998, l’OMS [2] rédige les compétences attendues des soignants dans ce domaine. Ils doivent alors être en mesure d’organiser, mettre en œuvre et évaluer des programmes et des activités d’éducation thérapeu- tique, en prenant en compte les singularités des patients (expérience, représentations), et en se centrant sur leurs apprentissages à « gérer leur maladie » dans le quotidien.

En février ı999, le Manuel d’accréditation des établissements de santé prévoit que le patient bénéfi cie « des actions d’éducation concernant sa maladie et son traitement et des actions d’éducation pour la santé adap- tées à ses besoins ».

En 2000, la Conférence nationale de santé souligne l’intérêt de déve- lopper la prévention et l’éducation, dans une approche de promotion de la santé. Le souhait de voir se renforcer l’éducation thérapeutique du patient et la diffusion des pratiques professionnelles éducatives à l’ensemble des futurs intervenants du domaine de la santé est mentionné (proposition n° 8).

La loi du 4 mars 2002 affi rme le droit de toute personne d’accéder aux informations relatives à sa situation de santé […] et d’être reconnue comme un acteur partenaire de sa santé avec les professionnels.

En avril 2007, un plan d’amélioration de la qualité de vie des patients atteints de maladies chroniques [3] énonce quatre objectifs : aider chaque patient à mieux connaître sa maladie pour mieux la gérer, élargir la pratique médicale vers la prévention, faciliter la vie quotidienne des malades, mieux connaître les conséquences de la maladie sur leur qualité de vie.

En juin 2007, un guide méthodologique présente les éléments fonda- mentaux de « structuration d’un programme d’éducation thérapeutique du patient dans le champ des maladies chroniques » [4].

En 2009, la loi portant réforme de l’Hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires est consacrée à l’éducation thérapeutique du patient. Elle est pour la première fois reconnue comme thérapeutique à part entière avec son cadre, ses fi nalités et ses modes de fi nancement dans une loi de santé publique.

Si la volonté politique est nécessaire pour changer les pratiques, elle ne suffi t pas. Force est de constater que les soignants ne sont pas devenus spontané- ment des éducateurs ! Les programmes et les activités d’éducation thérapeu- tique se construisent alors en référence à des modèles et des conceptions de l’éducation en santé qui ne sont pas toujours explicites. Aujourd’hui, aucun modèle n’est a priori exclu des pratiques. Ils sont tous actifs (rarement de manière isolée) et marquent l’activité d’éducation thérapeutique de leurs empreintes disciplinaires et épistémologiques. Un détour par ces modèles peut permettre d’en identifi er les forces et les limites, tout en sachant qu’une activité ne se réduit pas à un modèle, mais se construit dans une combinatoire qui s’inscrit souvent dans une dominante.

DES MODÈLES AUX PRATIQUES

Même si aucun savoir ne peut être considéré comme socialement neutre, l’éducation thérapeutique diffère de l’éducation pour la santé « dans la mesure où l’apprentissage du patient intéresse la maladie, le corps, la chronicité, la mort et engage des réaménagements psychologiques et identitaires » [5]. Le rapport au temps, à la vie et la mort est donc déterminant, et les apprentis- sages à construire par le patient concernent autant l’écoute de son corps dans la perception des signes et leur interprétation en lien avec son problème de santé, que la prise de décision en situation. Le professionnel de santé, soignant et éducateur, se trouve ainsi confronté au pari des « compétences du patient en situation ». Celles-ci sont liées aux apprentissages développés par le patient tout au long de sa vie, à son rapport à la temporalité (depuis l’annonce du diagnostic jusqu’à l’appropriation du problème de santé) [6] et à la confrontation avec l’évolution de sa maladie. Au-delà des conditions particulières du sujet qui doit développer des apprentissages au regard d’un problème de santé auquel il est confronté au quotidien, nous pouvons référer aux modèles plus généralistes de l’éducation et de l’apprentissage, afi n de pouvoir repérer les spécifi cités liées aux apprentissages des patients en situation d’éducation thérapeutique.

Des modèles de l’éducation et de l’apprentissage

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