• Aucun résultat trouvé

Section III. Les interventions étatiques dans le champ de la PME et de l’Entrepreneuriat au Maroc l’Entrepreneuriat au Maroc

B. L’écosystème industriel : concept et mesures d’appuis

Le Plan d’Accélération Industrielle 2014-2020 a introduit une approche nouvelle fondée sur la mise en place d’écosystèmes industriels. Il s’agit d’un chantier phare de la stratégie industrielle qui vise à réduire la fragmentation sectorielle en favorisant l’établissement de partenariats stratégiques ciblés et mutuellement bénéfiques entre leaders industriels et TPME. Il s’agit plus concrètement de fédérer des groupes d’entreprises autour de « locomotives » porteuses de projets d’écosystèmes. Ces locomotives peuvent être des leaders industriels nationaux, des groupements professionnels ou encore des investisseurs étrangers. Les alliances d’entreprises qui se tissent ainsi et forment des « communautés de destin stratégique382 » organisées, gagnent en performance et en réactivité et contribuent à renforcer la compétitivité de filières dans leur intégralité.

Collaboration d’un genre nouveau, les écosystèmes tendent aussi à faire de l’industrie un pourvoyeur d’emploi majeur, notamment pour les jeunes, et à l’inscrire dans un cercle vertueux de progrès383.

Le déploiement du chantier des écosystèmes s’opère à une cadence appréciable. L’approche a bénéficié d’emblée de l’adhésion des opérateurs nationaux qui sont immédiatement rentrés dans la logique des écosystèmes.

382 Concept développé dans le cadre des écosystèmes d’affaire par James Moore (1993), Predators and prey : new ecology of competition. Harvard Business Review, May‐June: pp. 75‐86.

117

Le travail de structuration des filières mené en partenariat avec les professions, a permis d’identifier celles pour lesquels il est opportun de mettre en place des écosystèmes384.

Des objectifs précis sont fixés aux entreprises des écosystèmes, dans le cadre de contrats de performance conclus entre les porteurs de projets d’écosystèmes et l’Etat, en terme, notamment, de création d’emplois, de valeur ajoutée et de capacités d’exportation. En contrepartie, l’Etat s’engage à apporter des soutiens appropriés et spécifiques à chaque activité en termes, notamment, de mobilisation de foncier, de formation des ressources ou encore d’apports de financements.

Dans le cadre du PAI, « Maroc PME 385» s’est vue confiée un rôle visant à accompagner le changement d’échelle et à faciliter l’émergence de nouveaux modèles d’affaires dans une logique de développement des écosystèmes industriels. Sa stratégie est basée sur 3 notions clefs : entrepreneuriat-croissance-compétitivité.

L’intensité d’intervention de cette agence diffère au niveau des régions, couvrant en grande partie des régions plus attractives en termes d’investissement. Le bilan d’accompagnement de 2014-2016 montre une dominance da la région Casablanca-Settat 62%, la région de Rabat, de Tanger et de Marrakech 9-11%, la région Fès-Meknès 7-8% et enfin, les régions du sud 0,5-3%.

Le tissu entrepreneurial marocain se compose de 3,5 millions d’auto-entrepreneurs potentiels, plus de 2 millions de TPE (0 < CA <= 10 MDH), 35 000 PME (10 < CA <= 200 MDH) et 800 grandes entreprises (200 MDH < CA). L’agence cible actuellement une proposition de valeur et une approche d’intervention différenciée au sein des écosystèmes contractualisés :

− L’émergence d’une nouvelle génération de PME à fort impact,

− Renforcement des écosystèmes et des relations grandes entreprises-TPME,

− Promotion de l’entrepreneuriat et intégration de l’informel.

Afin d’atteindre cet objectif, l’agence propose une offre de valeur aux TPME favorisant une croissance pérenne à travers une approche d’accompagnement intégrée, reliant trois axes d’intervention :

384 Ce travail a abouti au lancement de 7 écosystèmes dans l'automobile, 6 dans le textile, 5 dans l'aéronautique, 1 dans la filière "Poids lourd et carrosserie industrielle", 6 dans la construction, 3 dans les industries mécaniques et métallurgiques, 2 dans les industries chimiques, 3 dans le cuir, 5 dans l’offshoring, 2 dans l’industrie pharmaceutique, 7 dans l’agroalimentaire et un écosystème OCP.

118 − Appui à l’investissement : Investissement de croissance et technologique.

− Appui technique : Conseil et expertise et projet de créativité/ Co-développement

− Accès aux services d’appui : Inscription en ligne Plateforme de transfert des compétences.

L’assistance technique se focalise sur sept chantiers386 pour créer une véritable dynamique de développement grâce à un projet d’entreprise pertinent. En ce qui concerne l’appui financier, l’agence387 a déployé une prime à l’investissement pour les TPME. La contribution (IMTIAZ) pour les PME est plafonnée à 10 MDH, l’apport en fonds propre du bénéficiaire est de 20%. Pour les TPE la contribution (ISTITMAR) est plafonnée à 2 MDH, l’apport en fonds propre du bénéficiaire est de 10% minimum.

Ceci étant, le PAI, réduit la notion d’écosystème industriel contractualisé à une concentration géographique d’entreprises et d’institutions et cela n’est pas sans soulever des questions quant au degré de proximité de cette conception par rapport à celle de l’écosystème entrepreneurial. Quel est le rôle de l’entrepreneur, celui de l’Etat et des autres acteurs d’un territoire ?

Quel est l’apport pour le développement et la croissance des PME ?

Comment ces écosystèmes permettent-ils de soutenir une dynamique de croissance régionale ?

Ces écosystèmes favorisent- ils le développement d’une identité entrepreneuriale régionale axée sur la croissance des PME ? Autant de questions qui nous interpellent.

La notion d’écosystème entrepreneurial est utilisée au Maroc depuis 2014. On rencontre cette notion dans les brochures (Maroc PME…), dans des journaux et associations. Nous chercherons dans le cadre de ce travail à évaluer le concept et son contenu au regard de la théorie et de l’approche éco systémique.

386 i) Vision stratégique et gouvernance ; ii) Performance opérationnelle ; iii) Développement des marchés ; iv) Management de l’innovation ; v) Accès au capital ; vi) Développement numérique et vii) Accompagnement du dirigent.

387 L’Agence « Maroc PME » a lancé l’appel à projets de l’édition 2018 des programmes ISTITMAR- CROISSANCE et IMTIAZ-CROISSANCE. L’objectif est de sélectionner et de soutenir les entreprises à fort potentiel de croissance, ayant un chiffre d’affaires inférieur à 200 MDH, et disposant d’un projet d’investissement créateur de valeur ajoutée et d’emplois. Cette nouvelle édition s’inscrit dans la continuité de l’initiative « ISTITMAR- CROISSANCE et IMTIAZ-CROISSANCE» lancée par Maroc PME. Pour plus de précision, voir, www.marocpme.ma

119

Conclusion

Au terme de cette revue de la littérature, nous relevons d’abord que l’écosystème entrepreneurial est constitué par un réseau d'intervenants individuels et institutionnels coordonnés ou non travaillant au développement d’un environnement d’affaires interactif, de manière à favoriser l'entrepreneuriat, l'innovation et la croissance des PME, tout en réduisant les obstacles à tels impératifs.

L'écosystème entrepreneurial se compose de quatre catégories d’éléments : (i) la culture, (ii) le capital humain, (iii) les systèmes de soutien entrepreneuriaux, et (iv) le dynamisme (ou les jeunes entreprises qui croissent). Ces éléments constituent des conditions cruciales pour toute initiative de développement d’une économie entrepreneuriale. Dans les écosystèmes dynamiques, les PME ont de meilleures possibilités d’accéder aux ressources tangibles et intangibles nécessaires à leur croissance et de mieux gérer ses conséquences, par rapport aux entreprises créées en dehors de cet environnement. Ceux-ci dépendent largement de la volonté et l’ambition de croissance des entrepreneurs.

L'approche éco systémique entrepreneuriale évoque intuitivement le rôle important des acteurs publics et privés des économies régionales. Cette approche englobe les résultats de décennies de recherche sur l'entreprenariat (SNE), l’innovation (SNI) et le développement régional. Cependant, elle fournit un cadre d’étude intéressant pour l'entrepreneuriat et la croissance PME, et comprend également les jeunes entreprises.

La contribution majeure est la place privilégiée accordée aux entrepreneurs et des modèles positifs pour construire l'ESE, enrichi par les autres acteurs territoriaux. L’intervention politique vient après sous l’influence des entrepreneurs et évolue en fonction de leurs exigences. Bien que les relations de causalité dans les ESE et leurs effets sur l'entrepreneuriat, la création de valeur et la croissance des PME n’aient pas encore été suffisamment étudiées, l'approche offre des éléments précieux pour une meilleure compréhension de la performance des économies régionales. L'approche met l'accent sur les interdépendances dans le contexte de l'entrepreneuriat et fournit une analyse ascendante de la performance des économies régionales. Ainsi, la politique régionale ne vise pas à maximiser un certain indicateur de l'entrepreneuriat, mais à créer un contexte, un système dans lequel l’activité entrepreneuriale productive (naissante ou existante) peut prospérer et croitre.

120

Une culture de croissance est d’abord une culture de la confiance qui permet la diminution des coûts de transaction et participe au transfert de connaissances. Un programme visant à stimuler la croissance des entreprises est inscrit au sein d’une politique holistique, incluant des politiques entrepreneuriales axées sur la croissance, des politiques industrielles et de PME. Afin d’améliorer la coordination et la coopération entre les acteurs et institutions qui œuvrent à la croissance des entreprises.

Nous avons également cherché à étudier les politiques de promotion des PME au Maroc, l’innovation et l’amélioration de l’environnement des affaires. L’analyse de la stratégie des écosystèmes et les mesures d’appui et d’accompagnement de l’agence « Maroc PME » nous ont montré l’absence d’une déclinaison de la stratégie d’accélération industrielle à l’échelle de toutes les régions, ainsi, que la dominance des régions les plus attractives en termes d’investissement. Cette dominance peut être due aux priorités des décideurs politiques. Cette analyse nous a permis de soulever des questions quant au degré de proximité des écosystèmes industriels par rapport aux écosystèmes entrepreneuriaux.

Les écosystèmes contractuels introduits et présentés par « Maroc PME », s’apparentent- ils à des écosystèmes entrepreneuriaux ?

Quelle sont leurs spécificités par rapport aux référentiels théoriques disponibles sur les écosystèmes entrepreneuriaux ?

Dans cette perspective, il est important de souligner l’importance des régions dans l’élaboration d’une stratégie éco systémique. En effet, la dimension territoriale est déterminante pour les échanges entre les hommes et pour la circulation des idées, la région peut constituer le lieu favorable pour la création d’une chaîne de solidarité naturelle entre les entreprises, les institutions publiques, les universités, les banques et les services (etc.).

En conséquence, elle peut devenir un milieu favorable à la croissance des PME en termes des ressources, d’encouragement à l’entrepreneuriat et qui est façonné par des initiatives des pouvoirs publics.

L’approche éco systémique entrepreneuriale permet de comprendre les conditions de développement d’une économie entrepreneuriale régionale, cadre pertinent pour l’analyse de la question de la croissance des PME.

121

Chapitre III- La posture méthodologique de la recherche

Le processus de recherche scientifique a pour finalité d’explorer un concept, le décrire ou l’expliquer, résoudre un problème, appliquer une méthode ou expérimenter une nouvelle solution ou une nouvelle théorie.

Ce processus peut être regroupé en trois phases388 :

Figure 4 : Le processus méthodologique de la recherche.

Nous présenterons dans un premier temps la formulation de l’objet de la recherche et l’intérêt de l’objet de recherche, l’énoncé des questions et des objectifs de la recherche et présentations des hypothèses utilisées dans un modèle conceptuel et le champ d’application de la recherche.

388 Roger Assie Guy et Raoul Kouassi Roland, « Cours d’initiation à la méthodologie de recherche » (Ecole pratique de la chambre de commerce et d’industrie, s. d.).

122

Le deuxième axe de ce chapitre concerne la posture épistémologique de la recherche « section 1 » nous présenterons les caractéristiques du réalisme critique, (paragraphe 2). Ensuite, les considérations ontologiques et épistémologiques pour la croissance des entreprises. Enfin nous expliquerons comment se justifie la fiabilité, la validité interne et externe de la recherche dans ce paradigme épistémologique (paragraphe3).

Le chapitre se termine par une discussion des méthodes et des instruments utilisés pour collecter les données et enfin, la constitution de l’échantillon.