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De l’éclipse de la programmation urbaine au tournant amorcé dans les années

CHAPITRE I. De l’autonomisation de l’activité de programmation à la structuration d’un groupe

3. La structuration de l’activité de programmation en France

3.2. De l’éclipse de la programmation urbaine au tournant amorcé dans les années

Alors que le champ de l'architecture est marque dans les anne es 1980-1990 par la loi sur la Maï trise d'Ouvrage Publique et par l'engouement des maires pour les concours d'e quipements, emble mes du nouveau pouvoir municipal (Biau 1992), le champ de l’ame nagement l'est par l’ave nement de la de marche de « projet urbain ». Malgre le flou qui entoure cette notion, elle annonce un « retournement du paradigme central de l’urbanisme » (Lacaze 1995, 14). Pre sente de s son origine comme une « réponse critique et constructive à la crise » des approches technocratiques (Ingallina 2010, 86), le « projet urbain » s'affirme en France en exprimant une forme de « méfiance à l’égard d’une programmation trop systématique [et] abstraite » (Roncayolo 1996). Cette dernie re est alors empreinte d’une « connotation négative » car associe e a la planification centralise e et technocratique d'apre s-guerre (Hayot et Sauvage 2000).

Alors qu’elle est très présente dans le vocabulaire de l’aménagement entre les années 1950 et 1970, la notion de "programmation urbaine" s’efface. Dans un contexte de crise économique qui fait peser des incertitudes sur la concrétisation des opérations d'urbanisme, les maîtres d’ouvrage concentrent leur attention sur un ensemble d'études ayant surtout pour vocation d'identifier et de limiter les risques encourus. Cette tendance se trouve accentuée par l’approche taylorienne qui caractérise le procès de l’aménagement en France (Blanchard 2018). Si le document "programme" subsiste, il est souvent assimilé à un cahier des charges de prescriptions quantitatives, techniques et réglementaires adressées à un concepteur afin d’assurer la faisabilité technique et économique d'une opération. La programmation urbaine comme démarche permettant d’assurer la continuité

« entre projet politique et projet urbain » (Meunier et Buffat 2014) telle qu’elle a pu exister lors de

la création de certaines Villes Nouvelles se dissout ou se disperse dans une multiplication d’études sectorielles ou thématiques (d’impact, de faisabilité, de définition…). Jodelle Zetlaoui-Léger (2007) explique qu’au milieu des années 2000, rares sont les professionnels de l'urbanisme qui

98 ont des missions qui associent la réalisation d'études préalables, l’élaboration d'un diagnostic et la détermination de scénarios programmatiques. Ceux qui développent ce type de démarches en faisant valoir des compétences en sciences sociales se sentent particulièrement marginalisés par rapport aux architectes-urbanistes qui focalisent alors toute l'attention des maîtres d’ouvrage :

« Dans les appels d'offre, on n'avait quasiment aucune chance comme bureau d'études urbaines par rapport aux architectes qui proposaient tout de suite de la 3D, y compris pour des études de définition. Ça alléchait les élus. Ils préféraient aussi prendre des grands noms qu'ils connaissaient, Panerai, Devillers, Grumbach, Fortier, Castro... Les architectes-urbanistes monopolisaient les contrats d'études en urbanisme, même lorsqu'il s'agissait en réalité de faire de la programmation. Les élus ne faisaient plus la distinction entre la programmation et la maîtrise d'œuvre »101.

L’architecte-urbaniste devient une figure d'incarnation du « projet urbain ». Il est conside re comme un acteur providentiel en mesure de donner un sens a des ope rations parfois « fourre-

tout » (Bourdin 2001, 155). De signe comme maï tre d'œuvre "coordonnateur" sur la base du plan

d'ame nagement qu'il a propose , sa notorie te devient pour les maï tres d'ouvrage un facteur d'attractivite et de se curisation du projet. Elle constitue pour eux un atout majeur dans les ne gociations qu'ils auront a mener avec les diffe rents investisseurs, mais aussi avec les architectes d'ope rations particulie res, pour maintenir une harmonie ge ne rale du projet (Chadoin 2000). Les professionnels de la programmation qui tentent a cette pe riode de de velopper une activite dans le champ de l'urbain ont alors parfois le sentiment d'une de responsabilisation des maï tres d'ouvrage vers ces maï tres d'œuvre urbains. « Une fois le coordonnateur de projet désigné, on a le sentiment

que le maître d'ouvrage perd le fil programmatique… Il a tendance à s'effacer derrière l'architecte- urbaniste alors qu'il devrait continuer à préciser ses intentions en termes de projet de ville » explique

l'un d'entre eux interviewe lors de l'enque te de 2005.

Exception faite de quelques ope rations emble matiques, la programmation dans ces projets urbains semble surtout se focaliser sur la recherche d'e quilibres financiers, produisant in fine, pour certains observateurs critiques, un « urbanisme générique »102 de ZAC. L'ame nagement des

espaces publics apparaï t comme la principale source d'inventivite dont s'emparent les architectes- urbanistes promoteurs du "projet urbain a la française" (Philippe Panerai, David Mangin, Bruno

101 Entretien n° 8 : Programmiste, architecte de formation, directrice d'un bureau d'études urbaines à la

retraite depuis 2014, membre du bureau SYPAA, décembre 2014.

102 Notion rendue populaire par Rem Koolhaas. Dans son essai Generic City, l’architecte ironise sur

99 Fortier...)103. Cette situation refle te e galement la faible implication des habitants dans ces

ope rations d'ame nagement, alors que le « projet urbain » e tait associe a son origine a une de marche collective qui par essence devait e tre participative (Tomas 1995), « moins détachée des

hommes, plus proches des conduites et aspirations » (Roncayolo 1996). Les quelques recherches qui

interrogent la place des citoyens dans les ope rations mene es des anne es 1980 au milieu des anne es 2000, que ce soit dans le cadre d'un urbanisme de ZAC ou des programmes de renouvellement urbain, soulignent leur caracte re peu participatif (Allen et Bonetti 2013; Donzelot 2004, Dimeglio, Zetlaoui,-Le ger, 2001).

3.2.1. La recherche d’une ingénierie plus "concourante"

Le recours a partir de la fin des anne es 1990 a de nouvelles proce dures comme les "marche s de de finition simultane s", qui cherchent a rompre avec la se quentialite entre programmation et conception, semblent subordonner de plus en plus la re flexion programmatique au parti d'ame nagement envisage par le maï tre d'œuvre, et exclure l'habitant des processus de projet. Cette proce dure est pre sente e en 2002 par Jacques Cabanieu, Secre taire Ge ne ral de la MIQCP, comme la seule qui « permet de confier la maîtrise d’œuvre d’un projet à celui qui aura participé à

la définition et à l’élaboration de la programmation de celui-ci »104. Elle permet en effet a un maï tre

d'ouvrage de confier a trois ou quatre e quipes de maï trise d'œuvre un marche d'e tude de de finition pour que celles-ci l'aident a pre ciser un programme tout en proposant tre s to t quelques pistes de formalisation. Sur cette base, le maï tre d'ouvrage proce de a un "recadrage" de sa demande. Il e labore un programme qui devient le support d'une nouvelle phase de travail dite "ferme e" lors de laquelle chaque e quipe doit travailler a des propositions de conception, cette fois sans e changer entre elles. La maï trise d'ouvrage confie un marche dit "subse quent" a l'e quipe dont elle aura retenu la solution. Ainsi, la proce dure vise a assurer une certaine continuite de la re flexion entre programmation et conception. Elle autorise le maï tre d'ouvrage a travailler avec la me me e quipe de maï trise d'œuvre dans la dure e pluto t que d'organiser des consultations

103 « Le projet urbain à la française, ce que j’appelle l’urbanisme de composition, correspond au mode de

transformation urbaine devenu le plus courant en France. Il procède en articulant, par le plan des tracés viaires, le territoire à transformer et le programme prescrit ; les autres espaces publics (parcs, squares, jardins…) et leurs équipements associés sont distribués sur les îlots résultants et un règlement urbain (alignements, hauteurs, gabarits…) garantit la réalisation de l’ensemble... Il illustre une panne idéologique dans la manière de concevoir la ville ». Production urbaine à la française : urbanisme générique", interview

de Françoise Fromonot, Revue K des étudiants de l'ENSA Paris-la Villette, mars 2014.

104 Jacques Cabanieu, Introduction de la journée d’études du 14/06/2002, « Marchés de définition

100 successives. Elle est base e sur un e change ouvert entre ces diffe rents acteurs de s l'amont du projet, la ou le concours classique impose l'anonymat.

Cette procédure opère également un bouleversement dans le positionnement des praticiens tel que prévu par la loi MOP. Le professionnel de la programmation, habituellement placé aux côtés du maître d’ouvrage, se retrouve intégré à une équipe de maîtrise d’œuvre dont le concepteur est généralement le mandataire105. Cette situation met certains d'entre eux relativement mal à l'aise,

car « ils ont le sentiment de devenir la caution de maîtres d'œuvre leur demandant de justifier a

posteriori par un « programme-alibi », un parti d'aménagement basé sur des considérations principalement intuitives et formelles » (Zetlaoui-Léger 2015a). Le succès que connait cette

procédure à partir de la fin des années 90 traduit la difficulté dans le domaine de l'urbanisme à appliquer les principes de la loi MOP, à savoir de finaliser un programme sans engager une réflexion en termes de conception. Elle vise à mettre en place une ingénierie plus « concourante » (Encadré 5), afin de réfléchir simultanément aux activités à développer et à une organisation spatiale exprimant tout le potentiel qualitatif d'un site.

Encadré 5 Le modèle de l’ingénierie concourante

Le modèle de l’ingénierie concourante suit une logique « systémique », en privilégiant une perspective globale plutôt qu’une décomposition en sous-systèmes. Il s’oppose ainsi à une organisation séquentielle telle que présentée par la loi MOP, en privilégiant une organisation collective et intégrée. Ce modèle est issu des sciences de la gestion ; il a été formalisé par Christophe Midler (1994) à partir de l’observation du projet Twingo mené par l’entreprise Renault. Nadia Arab (2002) explique que l’un des objectifs recherchés par ce modèle est ainsi

« d’anticiper au maximum les questions qui, traditionnellement, ne sont abordées qu’en fin de parcours, afin d’éviter les remises en cause tardives » (p. 40). Pour ce faire, « la concourance est incarnée par des dispositifs divers à tous les niveaux [qui] impliquent les différents métiers concernés dans les étapes successives du développement » (p. 69). Ainsi, l’intégration des différents points de

vue « dès les séquences amont de la conception doit en effet permettre de décrire de la manière la

plus complète possible le système sociotechnique qui fait l’objet de la conception, afin d’obtenir une définition complète des enjeux et des contraintes, puis d’optimiser les compromis et les arbitrages »

(Blanchard 2018, 447).

La MIQCP, qui en fait la promotion, a en fait transposé dans le champ de la production de l'espace une procédure habituellement utilisée dans le monde de l'industrie pour des projets complexes ou visant des innovations. Or, tout en se réjouissant de l'intérêt que lui portent les acteurs de l'aménagement et de la construction, elle constate dans les années 2000 ce qu'elle considère être des dérives dans son utilisation. Elle estime qu’en cherchant à « trouver des maîtres d’œuvre 105 En effet, « la différence de reconnaissance sociale qui s’attache aux architectes et aux programmateurs [ou programmistes fait que] ce seront presque toujours les architectes qui seront les mandataires des équipes de définition », Jacques Allégret, Éditorial de la lettre IPAA de mars 1998, p 2.

101

providentiels qui leur apporteront des solutions sans avoir à préciser leurs objectifs et les questions en jeu, [les maîtres d’ouvrage] risquent bien des déconvenues » (MIQCP 2004, 86).

Dans le cadre d'une journée d’études consacrée à cette procédure en 2002106, la MIQCP insiste sur

la nécessité pour les commanditaires de solliciter les équipes de maîtrise d'œuvre sur la base d'un préprogramme (MIQCP 2004). S'amorce alors une deuxième phase de développement des marchés de définition simultanés où la programmation et les professionnels qui la prennent en charge vont prendre un rôle plus important :

« L’obligation faite par le marché de définition aux maîtres d’ouvrage d’établir une programmation explicite a marqué le retour des programmistes au premier plan des démarches de projet urbain » (DIV et DGUHC 2002, 48).

De manière plus générale, on assiste au début des années 2000 aux prémices d’un regain d’intérêt pour une programmation urbaine plus processuelle, moins normative, moins limitée à des considérations quantitatives et techniques, davantage en lien avec la conception. Cette évolution va aussi s'accompagner de questionnements sur la place des habitants dans la conduite des projets urbains, liée à des nouvelles injonctions réglementaires en ce sens (cf. infra). Or, si les marchés d'études de définition simultanés étaient plébiscités pour les échanges qu'ils favorisaient tout au long de l'élaboration d'un projet entre le maître d'ouvrage et les équipes de maîtrise d'œuvre, ils semblaient rendre difficile aux yeux des uns et des autres, la mise en place de démarches participatives, surtout durant la phase de production individuelle des équipes qui redoutaient une fuite d’idées entre concurrents (Dimeglio et Zetlaoui-Léger 2001). Ce même argument va être aussi mobilisé dans la procédure du dialogue compétitif qui succède en quelque sorte à celle des marchés de définitions simultanés à partir de 2009107.

106 La MIQCP avait déjà consacré deux publications à cette procédure en 1997 et 2001, en plus d’une étude

menée avec l’IPAA sur les contextes et modalités d’application effectives de cette procédure.

107 La procédure des marchés de définition simultanés n'est plus autorisée à partir de cette date, à la

demande de l'Union Européenne du fait qu'elle permettait d'attribuer un ou des marchés subséquents au(x) lauréat(s) des premiers marchés décernés sans remise en concurrence. Dans l’arrêté du 10 décembre 2009, la Cour de Justice de l'Union Européenne explique : « dans la mesure où ces dispositions prévoient une

procédure de marché de définition qui permet à un pouvoir adjudicateur d'attribuer un marché d'exécution à l'un des titulaires des marchés de définition initiaux avec mise en concurrence limitée à ces titulaires, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2 et 28 de la directive 2004/18/CE ». Comme le souligne l’ancien sénateur du Maine-et-Loire, Daniel Raoul, pour l’Union

Européenne, « c'est le fait de limiter le marché d'exécution ultérieur aux seuls titulaires du marché d'études

antérieur qui est condamné ; le principe de faire conduire plusieurs études simultanées sur le même objet en vue d'approfondir le programme urbain en concertation étroite avec le maître d'ouvrage n'est en aucun cas dénoncé ». La procédure de "dialogue compétitif" que la MIQCP va alors encourager est également basée sur

le principe d'échanges entre la maîtrise d'ouvrage et plusieurs équipes qui travaillent sur la programmation et sur l’élaboration de premiers scénarios de conception. Mais à la différence des marchés de définition, lors de la première phase, les équipes ne se rencontrent pas, et surtout elles ne sont pas au départ titulaire d'un marché. Elles reçoivent une "indemnité" pour participer à un échange avec la maîtrise d’ouvrage. Le premier marché sera celui décerné au lauréat désigné, à la fin des différentes étapes d'échanges.

102 La MIQCP estime ainsi en 2011 dans un guide consacré à cette procédure que « la concertation

citoyenne indispensable, et qui doit avoir toute sa place dans la démarche de programmation amont, ne pourra porter sur le travail fourni dans le cadre du dialogue compétitif »108. Or sur le plan

réglementaire rien ne l’empêche109 (Leonet 2018).

3.2.2.

Le tournant annoncé par la loi Solidarité et Renouvellement Urbain et le

Grenelle de l'Environnement

La que te d’une inge nierie plus concourante se trouve accentue e au cours des anne es 2000 par la monte e en puissance des enjeux de mocratiques et de durabilite . Cette pe riode est marque e par la promulgation de la loi relative a la Solidarite et au Renouvellement Urbains (SRU) qui renforce et e tend l'obligation de "concertation" selon des principes qui vont se de cliner dans le Code de l’urbanisme a travers notamment son article L300-2 (Mone diaire 2011). Jusqu'alors, « la concertation » s'apparentait a une consultation sur des documents d'urbanisme de ja en grande partie finalise s et qui n’avaient pas force ment fait l’objet au pre alable d’une re flexion urbanistique prospective. Il s'agit d’apre s cet article d'associer dore navant « pendant toute la durée de

l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées..., avant toute élaboration révision du Schéma de Cohérence Territoriale (Scot) ou du Plan Local d'Urbanisme (PLU); toute création d'une zone d'aménagement concerté ; toute opération d'aménagement réalisée par la commune ou pour son compte ».

Ces injonctions à la concertation soulignent également que la loi SRU impose dorénavant la définition d'un projet urbain en amont de la réalisation d'un document d'urbanisme, comme le PLU le SCoT) Ce projet doit se structurer en deux étapes amont essentielles : la réalisation d’un diagnostic et l’élaboration d’un Projet d'Aménagement et de Développement Durable (PADD)110.

La loi SRU contribue ainsi avec d'autres textes réglementaires majeurs fortement liés aux enjeux

108 MIQCP, De nouvelles règles pour la passation des marchés publics en matière de construction publique et de projets urbains, Médiations n° 23, octobre 2011, p 8.

109 Jennifer Leonet cite à ce propos l’exemple du projet d'ÉcoQuartier Danube à Strasbourg : « Des habitants déjà largement impliqués lors de la phase de préprogrammation urbaine ont en effet siégé aux côtés des élus et des techniciens dans l'instance qui a conduit le dialogue avec chacune des équipes de concepteurs. Lors du lancement du dialogue compétitif, une charte avait été signée par les différents participants qui s’étaient ainsi engagés à ne pas diffuser publiquement la teneur des débats. Dans cette opération, les habitants ont à la fois contribué à la définition du préprogramme de consultation de l'aménageur et de l'architecte-urbaniste, au dialogue compétitif pour retenir un maître d'œuvre urbain ainsi qu’à la phase de conception qui a suivi, contribuant à la fabrication du Cahier des Prescriptions Architecturales, Urbaines, Environnementales et Paysagères destiné à mettre en concurrence les promoteurs » (2018, 248).

110 Voir les articles L. 122-1 et L. 123-1 de LOI 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au

103 du développement durable adoptés à la charnière des années 1990 et 2000, à relancer le marché du conseil et des études en urbanisme111 (Richard Linossier 2012).

Les composantes du PADD, telles que décrites dans les guides proposés par les administrations centrales pour accompagner les collectivités, font référence, de manière d'abord implicite puis plus explicite, à un travail de programmation112. Le PADD porte une « logique stratégique et

opérationnelle et s’applique immanquablement à toutes les opérations d’aménagement » (MIQCP

2015, 25). En 2010, la loi Grenelle II promeut une des composantes des PADD : les Orientations d'Aménagement et de Programmation (OAP)113, document opposable « à finalité opérationnelle »

(Zitouni et Dubois 2017, 2) qui invite les collectivités à décliner leurs intentions sur des « sites

focus ». Quelques années plus tard, c’est la loi ALUR et son décret d’application relatif au PLU114

qui confortent ce principe en expliquant que les OAP peuvent être des outils pour :

« Favoriser la mixité fonctionnelle […] ; comporter un échéancier prévisionnel de l'ouverture à l'urbanisation des zones à urbaniser et de la réalisation des équipements correspondants ; prendre la forme des schémas d'aménagement et préciser les principales caractéristiques des voies et espaces publics […] ».

Ce dispositif connait un grand succès, comme l’explique Elise Carpentier, Professeure de Droit public et membre du Groupe de Recherches et d'Études du Droit de l'Immobilier, de l'Aménagement, de l'Urbanisme et de la Construction :

« Les Orientations d’Aménagement et de Programmation (OAP) font partie des stars du droit de l’urbanisme contemporain. Tout Plan Local d’Urbanisme (PLU) qui aujourd’hui ne contient pas au moins une OAP a vite fait d’être considéré comme totalement "has been" » (Carpentier 2017, 5).

111 Si la loi SRU semble jouer un rôle central à ce titre, elle n’est pas la seule. D’autres textes portent

également ces intentions dans le champ de la planification territoriale : la loi Chevènement sur l’intercommunalité (1999) et Voynet sur l’aménagement et le développement durable du territoire (2000).

112 Voir notamment le guide publié par le Certu, Le projet d'Aménagement et de Développement Durable du PLU, DGUHC/Certu, Référence 24, 2002.

113 L'origine des OAP remonte à la loi SRU. Cette dernière faisait apparaître les orientations d’aménagement

comme une composante facultative du PADD. La loi Grenelle II qui fait référence à la notion de programmation rend ce document opposable. Pour une vision plus globale voir l’intervention d’Elise Carpentier (2017), intitulée « Biographie des orientations d'aménagement et de programmation (et