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CHAPITRE 1 : ANALYSE BIBLIOGRAPHIQUE

6 LA MODELISATION DE DEPOTS CVD DE SILICIUM

6.2 A l’échelle des nucléi

Nous allons dans ce paragraphe résumer quelques résultats de modélisation de dépôts à l’échelle des nucléi par des approches de type Monte Carlo Cinétique (MCC).

Il s’agit de modèles dont l’échelle de représentation est comprise entre l’échelle atomique et celle des milieux continus. Ces modèles sont les seuls à décrire à la fois des processus assez rapides, qui ne concernent que l’échelle atomique (diffusion de surface, réactions, …), et des évolutions beaucoup plus lentes, qui touchent la micro ou le méso-échelle (formation de la microstructure), voire l’échelle macroscopique (changements de structure induisant une variation des concentrations de surface).

Les différents processus considérés pour représenter les dépôts CVD sont les suivants [CFD-

Film] [Dollet04]

:

1- Impact des molécules de gaz réactif sur la surface

2- Réflexion (a) ou adsorption physique (b) des molécules gazeuses 3- Diffusion des espèces adsorbées sur la surface

4- Réactions des adsorbats avec la surface, suivie de leur incorporation dans le film et de la désorption des produits de réaction

5- Désorption des adsorbats n'ayant pas réagi

6- Evaporation d'atomes ou groupements chimiquement liés au réseau

A chacun de ces événements est associée une probabilité et une fréquence de réalisation. Le processus le plus rapide est la diffusion des adsorbats en surface (évènement 3). A chaque intervalle de temps de simulation, on examine les possibilités d'évolution de l'ensemble du système de particules.

Dans les simulations MCC de dépôt de silicium à partir de silane, il est considéré que les espèces silane (SiH4) et silylène (SiH2) peuvent toutes contribuer au dépôt, et que l’atome

d’hydrogène H peut interagir avec la surface. Par contre, il est supposé que l’hydrogène H2 est

inerte vis-à-vis de la surface.

Initialement, la particule incidente est positionnée dans un plan source situé à une distance inférieure au libre parcours moyen de la molécule, puis dirigée aléatoirement vers la surface, avec la contrainte de se rapprocher toujours plus de cette surface. Les collisions en phase gazeuse sont négligées.

La vitesse de physisorption (événement 2) d'une molécule gazeuse est quantifiée par la théorie cinétique des gaz en supposant un coefficient de collage de la molécule correspondant à la fraction de cette molécule physisorbée.

La diffusion de surface d’une molécule adsorbée (événement 3) est définie comme la probabilité qu'un adsorbat se déplace du site courant vers les sites de surface libres, premiers, seconds ou troisièmes voisins.

La désorption (événement 5) correspond au processus inverse de la physisorption d'une molécule, et l'évaporation (événement 6) correspond à l'émission d'atomes ou de molécules à partir de la surface suite à la rupture de l'ensemble des liaisons chimiques des atomes ou molécules en question avec le solide. En pratique, seules les molécules possédant une liaison unique avec la surface ont une probabilité non négligeable de s'évaporer.

Avant de tester l'éventualité de l'évaporation d'une espèce chimisorbée (possédant une liaison unique avec la surface), un mouvement de cette espèce vers un site de plus basse énergie est d'abord envisagé. Ce mouvement, dont la fréquence est supérieure à celle de l'évaporation, est limité à l'un des sites premiers voisins non occupés qui entourent l'atome lié à l'espèce chimisorbée. Quand plusieurs sites sont disponibles, le choix s'effectue selon des critères statistiques, en évaluant l'énergie finale des espèces sur ces différents sites.

Pour ce qui est de l’incorporation des molécules adsorbées dans le film en formation (événement 4), les différents types de réactions considérées sont les suivantes :

- Si- + H  S-H (R1)

- Si-H + H  Si- + H2(g) (R2)

- Si- + SiHn  Si-SiHn pour n = 0 à 3 (R3)

- Si-H + SiHn  Si-SiHn-1 + H2(g) pour n = 1 à 4 (R4)

Les atomes d'hydrogène, qui constituent un cas particulier, peuvent réagir au point de contact en s'attachant sur une liaison pendante de la surface (réaction R1) ou bien extraire un atome H de la surface en laissant une liaison pendante et en formant de l'hydrogène moléculaire qui se désorbe (réaction R2). Les adsorbats de type SiHn (n = 0 à 4) réagissent uniquement sur des sites

réservés à des atomes de Si, soit en s'attachant sur une liaison pendante (réaction R3), soit par une réaction d'abstraction d'hydrogène (réaction R4).

Aussitôt qu'un adsorbat réagit sur un site donné, toutes les liaisons possibles entre l'atome Si incorporé et les atomes de surface premiers voisins Si sont envisagées.

6.2.2 Quelques résultats de la littérature

Cavallotti et coll [Cavallotti04] ont simulé des dépôts CVD épitaxiés de silicium sur une surface de silicium orientée (100) sans présence d’hydrogène. Ces auteurs ont obtenu un bon accord entre les résultats expérimentaux et ceux obtenus par modélisation. Dans un premier temps, ils ont remarqué que, par modélisation, les densités d’îlots étaient de 80% plus élevées que celles expérimentales. Mais ils ont remarqué qu’une grande partie des îlots simulés ne sont constitués que d’un atome de silicium. Si lors du comptage des densités obtenues par modélisation, ces atomes isolés sont négligés, alors la densité simulée est proche de celle expérimentale.

Il s’avère donc que le phénomène de diffusion de surface, à ces températures et pour ce type de dépôt, est un paramètre à prendre en compte. Sans présence d’hydrogène, il a été observé

[Cavallotti04]

qu’une augmentation de la valeur du coefficient de diffusion, via son énergie d’activation si ce dernier suit une loi de type Arrhénius, augmente la densité d’îlots.

Cette diffusion surfacique peut être la cause des différentes morphologies de surface obtenues en fonction de la température lors des dépôts CVD [Kalke01] contrairement aux dépôts PVD. Dans le cas de dépôts CVD, la mobilité des atomes à la surface à basse température (<500K) ainsi que les dissociations des sites provenant d’espèces existantes lors de dépôts CVD mais absente lors de dépôts PVD peuvent affecter la croissance du film.

Une étude de l’influence de la nature de la surface de dépôt a été menée [Cavallotti04] en considérant une surface présentant des atomes d’hydrogène et de silicium. L’adsorption du silicium et de l’hydrogène, une diffusion anisotropique des atomes de silicium et d’hydrogène et la désorption d’H2 ont été considérées. Il a été observé une apparition de « trous » dans la couche de

silicium lorsque des atomes d’hydrogène sont sur la surface de dépôt contrairement au cas où la surface est totalement recouverte d’atomes de silicium.

Cela montre que la morphologie du film de silicium déposé et sa croissance (2D ou 3D) peuvent être modifiées par la nature de la surface d’accueil mais aussi par la concentration de liaisons hydrogène sur cette surface.

Un autre paramètre pouvant influencer la croissance, et donc la morphologie des films de silicium est l’orientation de la surface d’accueil [Blanquet03]. Par simulations MCC, via le code CFD- Film, ces auteurs ont constaté, que dans le cas de dépôts sur des surfaces orientées (100) et (111) à partir de silylène et en présence d’hydrogène, le dépôt est de type 3D et 2D respectivement comme le montre la figure I.23. Ces auteurs ont supposé que ces deux types de dépôt sont dus aux encombrements stériques des atomes de silicium présent à la surface.

a) sur une surface Si (100) b) sur une surface Si (111) figure I.23 : Dépôt sur des surfaces orientées (100) et (111) [Blanquet03]

Ces mêmes auteurs ont montré que si le dépôt, sur une surface de silicium orientée (100), est élaboré à partir de silane, la croissance est de type 2D alors qu’elle est de type 3D à partir de

silylène (cf. figure I.24). Ils ont émis l’hypothèse que la croissance 3D est induite par le caractère insaturé du silylène, fortement réactif, contrairement au silane, espèce stable.

a) à partir de silane b) à partir de silylène

figure I.24 : Dépôt à partir de silane et de silylène [Blanquet03]

Différentes modélisations multi-échelles des dépôts CVD ont été développés par Dollet et coll. [Dollet00] et Masi et coll. [Masi 00].

Masi et coll. ont connecté un modèle simplifié de réacteur, supposant la phase gazeuse bien mélangée et considérant les réactions homogènes, à un modèle de structure reposant sur la théorie TSK (Terrace Step Kink). Cette étude avait pour but de progresser dans la compréhension des mécanismes de formation des dépôts lors des premiers instants. Un mécanisme simple de décomposition du silane sur des surfaces Si(100) a été retenu par ces auteurs. Les réactions de dépôt sont les suivantes :

SiH4+2σ → SiH*+H*+H2

2SiH*→ 2Si(film)+H2+2 σ

2H→ H2+2 σ

avec SiH* et H*, les espèces adsorbées et σ , les sites de surface Si(100).

Les conditions opératoires testées sont de 900 à 1500 K et de 150 à 760 mTorr. Le lien entre les deux échelles de modélisation se fait via la vitesse de dépôt, identique quelleque soit l’échelle étudiée.

Les résultats, obtenus par ce modèle, ont été confirmés par les résultats expérimentaux obtenus lors de dépôts de silicium polycristallin. Ces auteurs ont déterminé que le silicium polycristallin peut croître à très basse pression quand la taille des clusters augmente et quand la croissance épitaxiale est à la limite d’instabilité. Une des explications peut être la collision de plusieurs clusters pour former un cluster de taille critique. Ainsi, lors de dépôt LPCVD, le taille des grains est directement contrôler par la pression partielle du silane : à basse pression, les grains sont larges, à hautes pression, plus petits.

Cette méthode permet donc de corréler les paramètres de procédé (température, pression) avec les caractéristiques morphologiques des films ainsi déposés. Des analyses AFM ont pu confirmer les résultats obtenus par ces modèles qui sont toutefois très approximatif de part les cinétiques implantées.

Dollet et coll. [Dollet00] ont choisi de mettre au point, pour les dépôts LPCVD de silicium et sur la base de nombreuses données expérimentales, un modèle statistique semi-empirique, capable de calculer, pour une gamme opératoire assez large, la fraction cristallisée ainsi que la position et la taille des cristallites suivant l’épaisseur du film. Ce modèle, présenté sur la figure I.25, exige d’être associé à un modèle cinétique local de réacteur, afin de fournir en entrée les densités de flux des divers précurseurs gazeux près des surfaces en construction.

figure I.25 : Stratégie pour simuler la microstructure des dépôt [Dollet99]

Deux types de données sont à fournir à ce modèle : les conditions locales d’élaboration et les lois de vitesse du processus nucléation-croissance.

Le code CVD2, comme nous l’avons vu au paragraphe 4, a été utilisé pour déterminer les conditions locales d’élaboration.

Les processus élémentaires pris en compte sont précisés sur la figure I.26. Ils sont au nombre de deux :

1. les processus hétérogènes à l’interface gaz-solide : la formation des germes cristallins puis leur croissance,

2. les processus homogènes en phase solide : la formation et croissance de cristallites dans la matrice amorphe ou lors d’un recuit.

Les cristaux formés dans les deux cas sont reconnaissables par leurs formes. Les cristaux formés à l’interface sont de formes irrégulières tandis que les autres ont une forme elliptique. Le modèle ne considère que des cristaux cubiques avec une résolution de 5 nm.

Des lois semi-empiriques ont permis de quantifier ces divers phénomènes.

figure I.26 : Evénements considérés dans le modèle de prédiction de la structure [Dollet99] Flux d’espèces vers la surface

Expressions empiriques des vitesses de nucléation-croissance Analyse bibliographique Analyses expérimentales Scénario de formation de la structure des films

Modélisation statistique de nucléation croissance Conditions opératoires locales Modèle cinétique du réacteur Structure des dépôts de silicium Fraction cristallisée Paramètres opératoires d’entrée Distribution spatiale des cristallites 1. nucléation de surface (aléatoire) 5. croissance des cristallites

dans la m atrice am orphe

4. nucléation de volum e (aléatoire) 2. croissance cristalline 3. croissance à l’état am orphe l = 400 nm Epaisseur de dépôt = f(t) substrat L = 400 nm

Il a été montré que ce modèle permet de prédire relativement bien l’état cristallin final des dépôts de silicium pour la gamme opératoire considérée. De légers écarts peuvent cependant être observés lorsque la vitesse locale de dépôt est très voisine de la croissance cristalline.

Pour un film ayant des zones amorphes très réduites, le code prévoit une structure totalement cristallisée mais il faut aussi savoir qu’expérimentalement, ces films ne sont pas reproductibles et il existe des incertitudes quant aux dimensions de ces zones amorphes. En réduisant la température de 3 à 4 K, les résultats obtenus sont satisfaisants (or une différence de quelques Kelvin dans une enceinte réactionnelle est totalement envisageable) [Dollet99].