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K  , tous gagnent plus qu'au coup de concurrence : les offreurs

reproduisent de manière décentralisée l'équilibre de monopole. Néanmoins, dans cette situation chaque offreur a intérêt à jouer :

p

m

−,Q

opt

avec

Q

opt la quantité telle que

p

m

−=C ' Q

opt

,

c'est-à-dire la quantité

maximisant le profit pour ce prix. Dans ce cas, l'offreur qui joue ce coup obtient un profit plus fort que le profit de cartel, mais les autres offreurs, qui jouent le cartel, subissent des invendus sur tout ou partie de leur production et ils subissent des pertes. Ceci signifie que tous les offreurs ont intérêt à dévier du coup de cartel, mais si tous le font, le profit collectif est moindre que ce qu'il aurait été en restant au point de cartel. Le cartel représente l'engagement d'un coût. L'offreur qui joue un tel coup s'expose à être "trahi" et à subir des pertes. Le cartel est pourtant le point qui dégage le plus fort profit collectif. On retrouve un schéma ayant la forme d'un jeu de bien public, soit un jeu de dilemme du prisonnier à N joueurs : le fait de jouer le coup de cartel est une forme de coopération et le fait de jouer à un prix en dessous du prix de cartel avec des quantités provoquant des invendus chez les autres est un coup agressif. Le maintien du coup de cartel est une problématique qui a déjà reçu un traitement en économie [Tirole 88]. L’analyse traditionnelle, en supposant des individus égoïstes et rationnels, soutient que, dès lors que le nombre d’offreurs sur le marché est élevé, il converge vers l’équilibre concurrentiel : les vendeurs, du fait de leur nombre, s’y considèrent comme simples preneurs de prix et proposent, au prix du marché, une quantité qui maximise leurs revenus (règle d’égalisation du coût marginal au prix).

Dans ce cas, la convergence se fait naturellement vers l'équilibre concurrentiel qui est également un équilibre de Nash. En retenant des hypothèses différentes, l'équilibre concurrentiel n'est plus nécessairement un équilibre de Nash. C'est notamment le cas sur un marché à production anticipée et à prix affichés. Sur un marché à prix affichés, les offreurs choisissent leur prix de manière décentralisée. Sur un marché à production anticipée, la production est déterminée avant la phase d'échange : lors de la phase d'échange, il peut donc y avoir une partie de la demande qui n'est pas satisfaite puisque les offreurs sous-produisent par rapport à la demande ou il peut y avoir des situations où les offreurs se trouvent rationnés, c'est à dire qu'ils n'écoulent pas l'ensemble des quantités qu'ils ont produit dans la phase précédente. [Alger 79] a montré que dans le cas de marchés à production anticipés et à prix affichés, il n'y a pas d'équilibre de Nash et notamment, la situation de concurrence n'est pas un équilibre de Nash. Dans ce cas, il n'y a pas de résultat sur la forme de la convergence. L'absence d'équilibre est susceptible de conduire à une situation d'oscillation entre l'équilibre de cartel et l'équilibre concurrentiel. En effet, à partir de l'équilibre concurrentiel, les individus ont intérêt à jouer l'équilibre de cartel qui leur donne un profit supérieur. A partir du point de cartel chaque offreur va tenter d'exploiter le jeu des autres en proposant un prix inférieur au prix de cartel et en augmentant les quantités mises en vente. Tous les offreurs adoptent ce comportement qui les engage dans une guerre des prix inefficace. Au bout de quelques périodes, la diminution des prix ramène les offreurs à l'équilibre concurrentiel et un nouveau cycle commence. Les travaux présentés dans ce chapitre étudient les formes de convergence observées sur un marché à prix affichés et production anticipée pour lequel les comportements des offreurs sont sélectionnés ou éliminés par un mécanisme évolutionnaire à l'instar de la démarche de la théorie des jeux évolutionnaires.

On propose dans la suite une démarche évolutionnaire en introduisant différents comportements présentant des niveaux et des formes de rationalités variés en étudiant l'évolution de la coopération en fonction de l'évolution de ces comportements et en caractérisant les formes de convergence qui apparaissent sur les marchés. Les comportements vont être spécifiés comme des comportements d'offre sur le marché d'un bien non stockable et à production anticipée. Chaque offreur du marché adopte l'un ou l'autre des comportements.

Il détermine un prix de vente et une quantité à mettre en vente à ce prix. Suit une phase d'interaction des offreurs et des demandeurs sur le marché. Chaque offreur constate ensuite ses invendus et ses profits. En fonction de l'expérience qu'il retire de l'interaction de marché, il régule son offre pour la prochaine vente. On peut ainsi distinguer des périodes du jeu de marché. Une période est une phase de détermination de leurs offres par les offreurs, suivie d'une phase d'interaction sur le marché. Chaque comportement détermine une offre (prix, quantité) à chaque période en utilisant éventuellement l'information des périodes passées. Sur le marché, les offreurs diffèrent du point de vue de leurs comportements, soit de leur mode de détermination du prix et des quantités, mais ils sont soumis aux mêmes conditions de production : la

fonction de production est la même pour tous.

B.

Taxonomie, comportements et équilibres

Cette partie décrit plus précisément le fonctionnement des marchés et les comportements retenus. Ceux-ci sont réunis au sein de 4 catégories présentées dans ce qui suit : les coopératifs, les stratégiques, les preneurs de prix et les imitateurs. Pour chacun des comportements, on illustre son fonctionnement en montrant l'évolution des prix moyens et de la coopération sur un marché avec K=10 comportements de ce type et pour M=100 périodes en partant de l'équilibre concurrentiel. Certains comportements convergent collectivement vers une situation stable qui peut être la situation concurrentielle, la situation de cartel ou une autre situation. D'autres conduisent à des évolutions cycliques, dont des situations de cycle d'Edgeworth. D'autres enfin conduisent à des évolutions du prix moyen qui s'apparentent à des marches aléatoires. Parmi ces derniers comportements, on compte notamment les comportements d'imitation : ce sont des comportements qui ne prennent sens qu'en présence de comportements reposant sur les fondamentaux du marché et qu'il est possible de copier. Lorsque de tels comportements sont seuls sur un marché, ils se copient les uns les autres. D'autres taxonomies que celle présentée ici seraient possibles sur les mêmes comportements. Notamment les comportements pourraient être classés en fonction de leur niveau de rationalité : certains se contentent d'imiter les stratégies qui génèrent du profit, d'autres connaissent les points caractéristiques du marché (équilibre concurrentiel, équilibre de cartel) et jouent selon ces points, d'autres encore font des calculs pour évaluer la meilleure réponse à l'état du marché de la période précédente etc. La taxonomie présentée ci-dessous classe les comportements sur la similarité de leurs modes de fonctionnement et des issues qu'ils produisent. Les comportements coopératifs jouent sur la courbe de demande et permettent l'émergence de la coopération. Les stratégiques cherchent la meilleure réponse à l'état du marché et sont susceptibles de faire apparaître des évolutions cycliques. Enfin, les preneurs de prix jouent toujours en choisissant une quantité égalisant le prix au coût marginal et font tendre le marché vers l'issue concurrentielle.

Un marché évolue sur M=100 périodes, cette valeur a été retenue parce qu'elle permet la convergence des marchés pour les comportements retenus. Chaque période de marché est divisée en trois sous-étapes :

● Détermination d'une offre (prix,quantité) pour chaque offreur.

● Bruitage des offres . Pour introduire une certaine diversité, la détermination des offres est légèrement bruitée : une fois que le prix et la quantité ont été choisis par chaque offreur, on les modifie en tirant un bruit blanc normal

N 0, 

prix

sur les prix et un bruit similaire

N 0, 

quantite

sur les quantités. Pour éviter

des écarts trop importants, on contraint le bruit dans

[−2× ;2×].

Soit x le bruit tiré, le prix est modifié par un facteur multiplicatif

1x  ,

les quantités sont modifiées de la même manière. Par défaut, les bruits sur les prix et les quantités sont pris à

p

=0.02 et 

Q

=0.02.

● Interaction sur le marché : on considère les agents par ordre croissant de prix, le premier offreur

p

1,

Q

1

écoule

Min D p

1

, Q

1

,

la demande restante est

p p

1

D

1

p=D  p−Min D  p

1

, Q

1

.

Pour le second offreur de plus faible prix, son offre

p

2,

Q

2

détermine la quantité qu'il écoule :

Min D

1

p

2

, Q

2

.

De même, l'offre du troisième

offreur de plus faible prix est déterminée sur la demande restante etc.

Pour caractériser les évolutions sur les marchés, on spécifie deux indices. Un indice de coordination et un indice de coopération. L'indice de coordination est calculé sur une période et sert à savoir s'il y a ou non excédent d'offre sur le marché. Si on note par

p

i

, Q

i

l'offre déterminée par l'offreur

i ,

l'indice de coordination est

calculé de la sorte, pour une période de marché :

i=1 K

Q

i

D p

i

−1

On peut donner des valeurs de référence pour cet indice. Si chaque offreur

i

joue une quantité à

Q

i

=

D  p

i

K

,

alors

i=1 K

Q

i

D p

i

=1

et l'indice de coordination est à 0 dans ce cas. Lorsque chaque offreur joue le

K

ème de la demande totale pour le prix qu'il affiche, il assure que les autres offreurs pourraient jouer le même coup sans être rationné. La valeur nulle signifie que tous les agents écoulent leurs quantités et qu'il n'y a pas de demandeur non servi. Une valeur positive indique une situation d'excès d'offre et une valeur négative une situation d'excès de la demande.

Même dans le cas où l'indice de coordination est proche de 0, il peut ne pas y avoir coopération. Par exemple, pour le cas de l'équilibre concurrentiel, le niveau de coordination est 0 puisque les quantités offertes sont égales aux quantités demandées. Cependant, le niveau de profit est différent de ce qu'il serait dans le cas d'une situation où tous joueraient le coup de cartel. On détermine un nouvel indice, l'indice de coopération qui est calculé sur une période :

profit cumule total − profit total de concurrence