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Justifications

Dans le document Les technologies persuasives adaptatives (Page 78-81)

5.2.1 Justification théorique

Les théories et modèles du comportement étudiés dans le chapitre 2.3 montrent que les facteurs d’influence du comportement sont nombreux. Par exemple, avec la théorie du comportement planifié [2], l’adoption d’un comportement n’est pas le simple fait de l’attitude de l’individu vis-à-vis de ce comportement. Les normes sociales, les ressources, les habiletés, et les opportunités ont aussi un rôle déterminant dans le choix du com-portement. L’attitude elle-même est influencée par les croyances quant aux conséquences du comportement. De plus, l’influence de chacune de ces variables est pondérée par l’im-portance qu’y accorde l’individu. On parle alors de normes subjectives pour les normes sociales, et de perception de contrôle dans le cas des ressources, opportunités et habiletés

nécessaires à la pratique du comportement. De la même manière, les autres théories expo-sées dans le chapitre 2.3 identifient des facteurs d’influence du comportement et explicitent leur rôle et leur fonctionnement. La théorie du conditionnement de Pavlov [66] met en avant les stimuli de l’environnement. La théorie socio-cognitive [11] souligne le rôle de la motivation, du sentiment d’auto-efficacité, des objectifs que se fixe l’individu, mais aussi de l’auto-évaluation du comportement. Et ainsi de suite ... Les raisons qui justifient la non-adoption d’un comportement peuvent donc être variées. Par exemple, tout le monde ne pratique pas l’équitation, mais, parmi ces personnes, les raisons avancées pour justifier cette absence peuvent varier. Si certains n’ont aucune affinité avec cette activité, d’autres n’ont pas les ressources financières et matérielles pour le faire, ou craignent le regard de leurs proches. Ces justifications peuvent de plus se cumuler. Pour les persuader de pra-tiquer ce sport, les arguments et les méthodes à employer doivent varier en fonction des situations pour agir sur le ou les "verrous" à l’adoption du comportement. Il est nécessaire d’adapter la stratégie persuasive.

5.2.2 Justification éthique

Le chapitre dédié à l’éthique des technologies persuasives (chapitre 3.3) apporte aussi des arguments en faveur d’une adaptation de la persuasion. Pour commencer, ce cha-pitre montre que l’éthique des technologies persuasives se juge avant tout en fonction des conséquences de l’usage de ces technologies sur les utilisateurs ou sur des tiers. Cepen-dant, pour une même technologie, les conséquences peuvent varier d’une situation à une autre. Par exemple, si les applications d’incitation à la pratique du sport sont générale-ment bénéfiques à leurs utilisateurs, qu’en est-il dans le cas d’une personne souffrant de malformations cardiaques ou d’une autre pathologie à risque ? Plus concrètement, nous présentons dans le chapitre 8 un ensemble d’applications d’aide à la régulation du temps d’utilisation des smartphones. Un certain nombre d’entre elles proposent à l’utilisateur de se fixer des règles pour interdire l’accès au téléphone ou à certaines applications pendant des périodes déterminées de la journée. Mais dans une situation d’urgence, où l’accès au téléphone est nécessaire, ces règles peuvent avoir des conséquences néfastes, voire graves. L’adaptation du système à ces personnes (malformations cardiaques) ou ces situations (urgences) pourrait permettre de garantir l’innocuité de l’usage de ces systèmes.

Dans ce même chapitre, on présente le travail de Smids [138] sur la distinction entre persuasion, coercition et tromperie. Ce dernier montre que les frontières entre ces trois notions sont parfois difficiles à établir. Il indique notamment que la distinction entre coer-cition et persuasion dépendra de la sensibilité à l’exercice d’une force, le seuil d’acceptation d’un désagrément, et la perception d’une conséquence implicite de l’utilisateur dans une situation donnée. Ces trois critères sont cependant variables d’une personne à une autre, et pour une même personne, ils peuvent évoluer en fonction de la situation (humeur,

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tigue, ...). Un système persuasif a donc intérêt à adapter sa stratégie persuasive pour ne jamais basculer du coté coercitif.

5.2.3 Justification par l’interaction

En conclusion du chapitre sur l’éthique (chapitre 3.3), nous nous sommes fixés comme contrainte la limitation de l’étude à la persuasion autogène (l’utilisateur choisit délibé-rément d’utiliser le système après avoir été informé de sa finalité). De plus, une autre règle éthique que l’on a choisi d’appliquer stipule que "l’utilisateur doit avoir le choix de suspendre, temporairement ou définitivement, le système persuasif, à tout moment". Il est donc primordial pour un tel système de répondre aux besoins de l’utilisateur et viser sa satisfaction, afin de s’assurer d’être acquis et utilisé. En cela, les systèmes persuasifs rejoignent la préoccupation de tout système interactif. Le chapitre sur l’adaptation (cha-pitre 4) nous a montré que l’un des deux objectifs, des deux vertus de l’adaptation des systèmes interactifs est le renfort de la satisfaction de l’utilisateur (l’autre étant l’opti-misation du temps et du coût de développement). Les systèmes persuasifs, en tant que membre de la famille des systèmes interactifs, bénéficient de l’adaptation par le renfort de l’utilisation qui en est faite, et ainsi des opportunités de persuader.

5.2.4 Justifications dans l’état de l’art

L’intérêt de l’adaptation pour les technologies persuasives a déjà été mis en avant par certains acteurs de la recherche en persuasion technologique, comme nous avons pu le souligner dans le chapitre 3.2. Par exemple, pour Harjumaa et Oinas-Kukkonen, "La conceptualisation de la manière d’implémenter les principes persuasifs est une tâche dif-ficile, car des environnements différents offrent des possibilités différentes mais aussi des limitations différentes en terme de persuasion. Par exemple les principes de persuasion mettant en œuvre la simulation sont plus adaptés à un environnement "poste de travail" qu’à un environnement mobile" [71]. Il dédit d’ailleurs une des trois étapes de sa méthode de conception, le PSD [119], à l’étude du contexte du système persuasif à concevoir. On a aussi vu dans le chapitre 3.2 que la principale caractéristique et préoccupation du do-maine de la persuasion ambiante est la prise en compte du contexte en vue d’optimiser l’efficacité persuasive. Enfin Kaptein [83] montre que les individus présentent une sensi-bilité distincte à chacun des six principes d’influence sociale de Cialdini [30], et que ces sensibilités évoluent d’un individu à l’autre. Il montre en particulier que l’utilisation d’un principe d’influence social auquel l’utilisateur n’est pas sensible ne permet pas d’influen-cer, mais surtout, risque de provoquer l’effet inverse en créant une réaction de rejet de la part de l’utilisateur de la technologie persuasive. On étudiera plus en détail son travail dans le chapitre 7.

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