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LES ETUDES QUALITATIVES DE LA RECHERCHE Introduction du chapitre

II. La méthodologie de la phase qualitative

1. Les trois méthodes de collectes de données de la phase qualitative

1.2 Le journal de visite

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de sa visite. Le journal de visite est conçu spécialement pour chaque site visité, avec des rubriques et questions ouvertes permettant à nos visiteurs de décrire tous les temps forts de leur expérience et de leur visite du magasin en 3D. Il est rempli par chaque participant à l’issu de la visite.

Il permet de libérer le vécu intérieur de chaque utilisateur et offre l’occasion de rencontrer sa propre interprétation des faits et des éléments les plus marquants. Ils constituent une base pour savoir ce qu’ils ont compris de l’expérience (Özçağlar-Toulouse, 2009) et les significations qu’ils leur ont données (Thompson, 1997).

Les journaux de visites ont été remplis à chaud et directement après la visite qui devrait durer au moins 30 minutes du magasin en 3D. Il y a donc peu de filtre. Cette méthode de collecte via un journal de visite s’inspire des méthodes de récits de vie très utilisée en psychologie et en sociologie (Bertaux, 1997).On parle de récit de vie dès lors qu’un sujet raconte à une autre personne, chercheur ou pas, son expérience vécue (Bertaux, 1997). Belk et al. (1988) souligne qu’elle permet d’approcher le réel du consommateur. Elle nous a semblé particulièrement adéquate pour restituer l’expérience vécue par les consommateurs dans les magasins en 3D.

Cette méthode s’avère particulièrement complémentaire par rapport à la seule observation, car elle permet d’aller au-delà de la partie visible des comportements des utilisateurs. Les thématiques abordées dans le journal de visite permettent de libérer le vécu intérieur.

Nous avons préféré le dispositif « observation du comportement de visite + journal de visite » à la méthode des protocoles, qui consiste à faire verbaliser au visiteur tout ce qu’il pense au moment même où il le pense (Praset al., 2009). L’inconvénient majeur de la méthode des protocoles est qu’elle encourage une rationalisation du comportement, au détriment du ressenti. Or nous cherchions à capter le vécu de l’expérience, et la sensation, l’émotion est peu compatible avec la rationalisation des pensées. C’est pourquoi nous avons écarté cette méthode.

1.3 L’entretien

L’entretien est mené avec les visiteurs mais « à froid », en décalage temporel avec la visite et la tenue du journal de bord. Il permet de recueillir le souvenir de l’expérience (Flacandji, 2015). L’entretien permet d’obtenir une réponse immédiate et manifeste aux questions posées. Lorsqu’il permet au répondant une liberté de parole, il recueille les représentations mentales des répondants et donne accès à leur imaginaire. Il fournit la manière dont les interviewés comprennent leurs expériences et leurs pratiques. Il livre les propos tenus par les consommateurs, met en évidence les

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raisonnements, les règles et mécanismes de choix et fait part de leurs sentiments et de leurs émotions (Andréani et Conchon, 2002).

a. Le type d’entretien

Deux grands types d’entretiens dominent la recherche en comportement du consommateur : l’entretien ouvert et en profondeur et l’entretien semi-directif (Andréani et Conchon 2002). Largement utilisé en marketing comme un procédé de recherche scientifique (Evrardet al., 2009), l’entretien a recours à la communication verbale pour recueillir des informations en relation avec le but ou la problématique étudiée (Grawitz, 2001). Il existe trois grands principes de conduite d’un entretien en profondeur : la non directivité pure, la semi-directivité et l’investigation papier-crayon (Giannelloni et Vernette, 2012).

Dans le cadre de notre recherche, nous avons fait appel à l’entretien semi-directif car il présente à la fois une certaine ouverture et souplesse quant aux thèmes approchés (possibilité de poser des questions n’existant dans le guide) et l’ordre pour les aborder chez le chercheur et chez l’enquêté. Au même temps, il cadre les sujets recherchés par l’enquêteur grâce à un guide d’entretien préétabli (Denzin et Lincoln, 2005; Evrard et al., 2009). L’interviewé est à l’aise, il parvient à parler ouvertement, dans le langage qu’il souhaite et l’ordre qui lui satisfait.

b. Le guide d’entretien

Le guide d’entretien (annexe 3) est un outil essentiel puisqu’il nous permet l’accès à une production verbale riche et complexe (Bardin, 2003).Il a été constitué de thèmes à enrichir durant l’entrevue. Il englobe l’ensemble de questions qui introduiront puis développeront les questionnements de la recherche. Les questions du guide ont été formulées à partir des croisements qui ont surgi du cadre conceptuel de la problématique et des recueils de l’observation et des journaux de visite.

Les guides d’entretien semi-directifs devraient approfondir les journaux de visite, ils ont repris les grands thèmes du journal de visite, en approfondissant l’expérience vécue par l’internaute dans le site en 3D et les facteurs qui l’enrichissent. Ces thèmes ont pour but d’identifier les facteurs du site auxquels les internautes étaient sensibles lors de leurs navigations dans le site en 3D, l’impact de ces facteurs sur l’expérience vécue et les différentes réactions qu’ils ont suscité chez les internautes.

Pour ce faire, nous avons élaboré nos guides d’entretien en quatre phases (Giannelloni et Vernette, 2012) : une première phase d’introduction qui met à l’aise le répondant et l’amène souplement à ses

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sujets favoris ; une deuxième phase de centrage du sujet qui aborde les thèmes importants de l’investigation. Plus à l’aise et plus en confiance le répondant fait émerger des thèmes qui auraient pu être censurés par le répondant, si l’on s’en était tenu à une situation habituelle (Giannelloni et Vernette, 2012). La troisième phase a pour rôle d’approfondir l’entrevue afin de toucher le cœur du sujet et être à l’écoute des réponses aux questions centrales de la recherche. La phase de conclusion clôture l’entrevue, durant cette phase l’enquêté peut rebondir sur le point qui l’a plus marqué dans l’expérience ou une recommandation d’un ajout/une suppression ou adaptation qui lui semble importante pour une meilleure expérience dans le magasin en 3D.

c. Le choix des sites de collecte utilisé

Pour que le consommateur puisse fournir des informations riches sur le vécu de l’expérience, il lui faut être confronté à une expérience riche et nouvelle. Nous avons donc choisi de le faire naviguer dans un site et de recueillir des impressions. Encore fallait-il trouver un site support de l’expérience adapté à nos objectifs. Le choix des sites marchands utilisés comme stimuli dans cette phase exploratoire a été guidé par le souhait de sélectionner les sites les mieux à même de nous aider à répondre à notre problématique de compréhension de l’expérience vécue par le consommateur/utilisateur. Nos critères de choix ont été guidés par certains éléments issus de la littérature et également par la qualité technique observée par notre propre expérience au niveau des différents sites. Nous avons été particulièrement attentifs :

 Aux sites permettant d’accéder aux magasins en 3D avec des produits.

 Aux outils de la réalité virtuelle assurant une bonne navigation en espaces tridimensionnels.  A la réactivité du site par rapport aux requêtes des visiteurs en avatars.

 Aux sites enrichis de divers outils de communication et de navigation

Devant le nombre de nos exigences, aucun site ne pouvait remplir, à lui seul tous ces critères. Nous avons choisi de travailler avec trois sites différents ayant les caractéristiques quelque peu différentes. Cette triangulation des lieux (annexe 1) et des outils renforce la validité de l’étude et permet d’isoler les effets liés aux caractéristiques très spécifiques de chacun et de pouvoir également choisir le site le plus adéquat pour réaliser la partie empirique. Nous avons retenu au final trois sites correspondant à nos critères à savoir :

 D’abord, le site en 3D aushopping avec un espace commercial de magasins en 3D et des espaces de jardins et de gastronomie. C’est un site français avec des marques locales et internationales.

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Le site est mis à la disposition de notre laboratoire de recherche dans le cadre d’un contrat de coopération.

 Le deuxième site un site turc, Yogurtistan, qui offre un accès attrayant à un mall situé au bord d’une belle plage, avec accès à un ensemble d’enseignes locales et internationales, toutes conçues en 3D. Le choix est très large et le site est équipé d’outils modernes de navigation et d’accès aux produits et aux endroits. Les avatars sont customisables et peuvent communiquer entre eux.

 Le troisième site est un site français, 3D villes, qui offre l’accès à des villes en 3D avec des espaces en 3D, des villes françaises mais aussi européennes ou mondiales. Dans chaque ville, le site reprend les places connues de la ville (les grandes places, les monuments, les quartiers, les gares) et bien entendu les espaces commerciaux des centres villes. Les avatars ne peuvent pas accéder aux magasins en 3D, qui se présentaient sous forme de vitrines et dont l’accès renvoie au site en 2 D de l’enseigne et/ou de la marque.

Comme le dernier site n’offrait pas la possibilité à nos participants d’entrer en magasins et d’accéder aux produits, nous n’avons gardé que les deux premiers sites offrant les meilleurs outils d’accès au magasin en 3D. Un site enrichis en technologies 3D mais avec des accès à des magasins uniquement en 2D ne respecte pas nos critères et notre objectif de la collecte des données de la phase qualitative.

d. Protocole des collectes de la phase qualitative

La collecte de l’information s’est déroulée en trois étapes. La première phase de collecte est une phase d’observation de consommateurs dans leur manipulation du site. Cette première phase nous a permis d’obtenir un premier corpus de données, sous forme de prise de notes divers (journal de bord). L’analyse de ce premier corpus permettra d’identifier les caractéristiques clés des sites et des magasins en 3D, de repérer les moments forts de la visite et les éléments clés de l’expérience vécue par l’utilisateur. Cette première analyse a permis d’enrichir le journal de visite et le guide d’entretien utilisés par les deux autres phases de collecte.

Durant la deuxième phase de collecte, nous avons demandé à des participants d’effectuer une visite de l’un des sites sélectionnés, en respectant un certain nombre de consignes précises. Les visites ont été effectuées par les internautes depuis des endroits divers mais tous calmes. Ils doivent rester connectés au moins pendant 30 minutes sur le site, à faire les visites et le tour du centre et des magasins. Ils étaient alors invités à remplir à chaud leurs journaux de visite puis nous devions

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convenir avec eux de se rencontrer à une date ultérieure pour l’entretien. Avant chaque entretien, chaque journal de visite (annexe 2) nous a servi de base pour identifier d’autres points relevés par nos visiteurs et qui peuvent enrichir les collectes.

Nous avons également continué de faire notre observation des internautes parallèlement avec nos enquêtés, afin d’enrichir les premières collectes par de nouveaux aspects à évoquer lors des entrevues. Nous avons atteint la saturation des collectes de l’observation avant celle des entretiens semi directifs. Nous avons alors arrêté les collectes de l’observation avant la phase entrevue avec les enquêtés.

e. Description de l’échantillon des répondants (entretiens individuels et des journaux de visite)

Pour la phase observation, nous avons réalisé au total l’équivalent de 60 heures, elles concernaient les sites de collectes leurs magasins, leurs outils, les accès ainsi que les visiteurs qui viennent rendre visite aux sites, sans faire la différence entre ceux que nous allons interroger et les autres internautes qui venaient simplement fréquenter les sites en 3D. Pour les besoins de nos entretiens semi-directifs, nous avons fait appel à un échantillon de convenance, constitué sur base du volontariat ; il s’est révélé constitué de profils variés mais relativement jeunes.

Nous avons retenu un groupe de 16 répondants, entre 20 et 40 ans, avec une moyenne d’âge de 32 ans, appartenant à des catégories socioprofessionnelles variées (étudiants, profession libérale, jeunes diplômés sans emplois, jeunes parents) avec une parité hommes/femmes, une diversité dans la familiarité à l’utilisation d’internet et la pratique des achats en ligne. L’idée est de pouvoir collecter un contenu riche et détaillé (Evrard et al., 2009).

Les caractéristiques de notre échantillon (annexes 4) y apparaissent notamment les profils sociodémographiques, la familiarité avec internet et les achats sur internet. Le tableau spécifie les heures passées chaque jour sur internet. Il précise par ailleurs la durée de chaque visite du site de la recherche qualitative. 80% des visiteurs ont passé plus de 50 mn dans les sites, certains ont dépassé les 180 mn et ont refait la visite. Le nombre des personnes interrogées a été déterminé en fonction de la saturation sémantique, c'est-à-dire, lorsque le discours d’un participant supplémentaire n’enrichit plus les données recueillies (Mucchielli, 1991).

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Sur les 16 participants, seuls 13 ont participé à la phase d’entretien. Les trois autres participants ont rencontré de nombreux problèmes techniques, qui ne leur ont pas permis de respecter l’ensemble du protocole de collecte. Nous avons donc décidé de ne pas les inclure dans le corpus de l’analyse. L’échantillon final porte donc finalement sur 13 participants, pour lesquels nous disposons du protocole de collecte complet