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Jean-Pierre FOURRÉ (Député, S.) s'est exprimé en ces termes :

1 . ÉVOLUTION DANS L'EX-UNION SOVIÉTIQUE

M. Jean-Pierre FOURRÉ (Député, S.) s'est exprimé en ces termes :

« Ce débat d'actualité sur la situation dans l'ex-U.R.S.S. vient

à point nommé pour permettre à notre Assemblée de faire le point

d'une évolution tout à fait décisive pour l'avenir de notre continent.

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-Les événements se sont, en effet, précipités depuis notre session de

septembre et nous nous trouvons devant une situation, sinon tout

à fait clarifiée, du moins relativement simplifiée.

« L'apparition sur la scène internationale de la Communauté des États indépendants règle-t-elle les problèmes constitutionnels et politiques liés à l'effondrement de l'empire soviétique ?

« Il est sans doute trop tôt pour répondre à cette question,

tant apparaît grand le poids de la Russie et particulièrement vif

le désir d'indépendance de l' Ukraine, en particulier sur le plan

militaire .

« Cet événement majeur qui bouleverse la carte de l' Europe doit nous conduire à engager une réflexion d'ensemble sur la

politique que doit adopter le Conseil de l' Europe dans ce contexte

entièrement nouveau.

« La vocation du Conseil de l' Europe est, en effet, de rassembler

les peuples de l'Europe autour de valeurs communes : démocratie

pluraliste, droit de l'homme, État de droit. Il est indispensable de

se doter des moyens nécessaires pour atteindre ces objectifs.

« Dans l'immédiat, nous devons tout mettre en œuvre pour

aider l'ex-U.R.S.S., d'une part, à surmonter la crise économique

aggravée par l'hiver et, pour cela, soutenir tous les efforts entrepris

lors de la Conférence de Washington en vue d'accroître l'aide

alimentaire ; d'autre part, à mettre en place les mécanismes d'une économie de marché destinée à permettre aux républiques de

rejoindre progressivement les nations de l'Europe occidentale.

« Chacun voit que l'un des problèmes les plus importants

concerne l'avenir des relations entre les nouveaux États et la Communauté européenne. La C.E.E. apparaît comme un pôle de

prospérité ardemment convoité. Mais peut-on raisonnablement envisager une adhésion proche à la Communauté des pays de l'Est européens compte tenu de leur situation économique actuelle ?

« De plus en plus de pays d'Europe centrale et orientale

tendent à se différencier en affirmant une personnalité propre. La fin d'un univers monolithique accentue le besoin d'ancrage aux

institutions et organisations de l'Ouest. En réalité, jamais le projet de confédération lancé par la Président Mitterrant le 31 décembre

1990 n'a été plus actuel.

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« Comment imaginer, en effet, qu'une Europe à deux vitesses puisse être longtemps viable, qu'une grande partie du continent soit maintenue à l'écart des grandes orientations politiques et économiques et sociales que définit le Conseil de l'Europe depuis

plus de quarante ans.

« Loin d'être une solution de remplacement à l'adhésion à la C.E.E., comme le craignent certains dirigeants des pays de l'Est, la Confédération devrait, au contraire, se présenter comme une projection vers l'avenir, comme un dépassement indispensable

intéressant non seulement les pays d'Europe centrale et orientale,

mais également la C.E.E.

« La Confédération aurait l'immense mérite d'ancrer définiti­

vement les nouvelles démocraties de l'Est dans un ensemble européen

couvrant la quasi-totalité du vieux continent . La Confédération

doit être considérée comme un projet d'avenir et non comme un

projet transitoire, comme une antichambre de la C.E.E.

« C'est pourquoi, nous réclamons la tenue prochaine d'une

conférence des chefs d'État et de Gouvernement des pays membres

du Conseil de l' Europe qui jetterait les bases de la Confédération

européenne dont l'Assemblée du Conseil de l'Europe – qui regroupe

l'ensemble des États démocratiques d'Europe, de l'Est comme de

l'Ouest – serait l'institution parlementaire. »

M. Jean VALLEIX (Député, R.P.R.) est intervenu à son tour

en ces termes : « Je vais enchaîner sur une remarque préalable qui situait la position originale des pays de l'ex-U.R.S.S. dans le concert d'évolution accélérée qui a caractérisé ces deux ou trois

dernières années.

« Ces pays n'ont littéralement pas de mémoire humaine, pas d'expériences différentes. Trois générations d'hommes et de femmes,

même davantage auront vécu sous l'emprise du marxisme-léninisme.

Par conséquent, ils n'ont ni mémoire pratique de la démocratie,

ni mémoire ni pratique d'économie de marché, ni conception

moderne de l'économie, toutes choses qui nous donnent une position encore plus tranchée par rapport aux pays de l'est de l'Europe et

de l'Europe centrale.

« Ce constat dressé, au nom de la commission des questions économiques que je préside, il est bien difficile en cinq minutes

d'aller très loin dans l'analyse.

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-« Il faut d'abord rappeler que l'économie est entrée dans le

concept des pays de l'Est, dans la mentalité de nos concitoyens – si je puis les appeler ainsi – comme un adjuvant nécessaire à

la marche démocratique. Il n'est pas de vraie démocratie sans un

certain type d'économie qui libère du centralisme démocratique. Il

existe un lien étroit entre les deux .

« Je voudrais ensuite formuler une série de remarques dont certaines sont un • u paradoxales d'ailleurs.

« Je veux d'abord souligner combien il est brutal et insupportable

que des pratiques comme la liberté des prix, instrument nécessaire

à la mise en œuvre de l'économie de marché, s'appliquent durement,

impitoyablement aux populations de ces pays de l'Est, notamment

à celles de l'ex-U.R.S.S. , avec des conséquences redoutables :

allongement des files d'attente, difficultés de vie pour les retraités, décuplement des prix entre le début et la fin du mois. Nous devons

donc redouter que la misère s'amplifie.

« Doit-on en passer par là ? Pourrait-on l'éviter ? Cela paraît difficile compte tenu d'autres expériences, pourtant plus douces,

vécues depuis deux ou trois ans. Il faut donc qu'il en soit ainsi, mais on peut s'interroger sur l'origine de ce phénomène. Il tient

sans doute au décalage entre la liberté des prix, qui fonctionne d'elle-même, et l'augmentation de la production qui ne suit pas du

tout, mais pas du tout, au même rythme. Parfois, au contraire, le

phénomène est complètement inversé.

« Cette situation nous préoccupe douloureusement. Dès le mois

de mai 1990, nous avions, avec le F.M.I., avec la Banque mondiale,

lors de travaux à Budapest, non pas annoncé du chômage et des vicissitudes, mais laissé entendre que l'expérience nouvelle se ferait dans l'effort et, souvent, dans l'épreuve. Nous n'avons pas fardé

la vérité ; nous ne pouvons que ne pas nous accommoder de cette

dureté.

« Le deuxième fait difficile à admettre est la brutalité dans l'évolution des structures, en raison de la brutalité des ruptures :

on passe des coopératives des kolkhozes à des structures qui se veulent privatisées et autres. Il est tellement facile de démolir et tellement plus difficile de construire ! Alors que ce fossé s'élargit,

les nouvelles procédures mises en place ne fonctionnent pas.

t

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-« On relève également des ruptures géographiques. Les moteurs

n'arrivent plus pour la fabrication des tracteurs en Ukraine parce que des frontières se sont établies entre les différents pays,

aujourd'hui indépendants, qui constituaient l' U.R.S.S. De même,

pour la production du pétrole en Sibérie, on ne trouve plus de

pièces ; on ne peut plus s'approvisionner au-delà des frontières.

Rien ne fonctionne plus.

« Je veux à cet égard reprendre les observations formulées tant par M. Twinski que par M. Güner sur le rôle nouveau de la

Turquie. En effet, au moment où l'apparition de nouvelles frontières risque de provoquer de dangereuses ruptures, des échanges nouveaux vont vraisemblablement s'établir entre les pays islamiques de l'ex-U. R.S.S. et la Turquie. Quelle forme économique prendront-ils ?

L'interrogation demeure.

« Il a été rappelé que la Turquie est sans doute l'unique pays

au monde à avoir une expérience démocratique en pays profondément islamique. C'est la raison pour laquelle ce pays a un rôle considérable

à jouer maintenant.

« Quant à notre Conseil de l' Europe, comme cela a été souligné à Budapest récemment, comme cela sera sans doute répété dans

un an environ lors de la nouvelle réunion organisée à Vienne, ainsi que, sans doute prochainement, dans le secteur de la Baltique, à Stockholm et à Tallin, il se doit d'engager des actions de développement et de formation des hommes.

« On ne saurait ignorer qu'il faut engager des moyens financiers.

L'on peut d'ailleurs regretter que ni le Sommet de Maastricht ni

la dernière réunion du G7 ne les aient apportés.

« Nous devons continuer à nous battre et je citerai moins le

général De Gaulle, avec son Europe de l'Atlantique à l'Oural, que Churchill disant que dans les seules batailles que l'on puisse perdre

il n'y a de certitudes que celles qu'on n'engage pas.

« Le point de vue économique accompagne la nécessaire évolution économique et politique de ces pays. »

Enfin M. Jacques BAUMEL (Député, R.P.R.) est également

intervenu dans ce débat, dans les termes suivants :

« Dans le très intéressant débat qui se déroule devant nous, je voudrais modestement apporter trois observations précises.

l

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-« En premier lieu, pendant quarante ans, le monde entier a

tremblé devant la surpuissance soviétique. Aujourd'hui, l' Europe et

le monde tremblent devant son impuissance, devant l'affaiblissement du pouvoir central et l'éventualité de quelques tentatives de dissémination nucléaire. Le fait que, perdus à travers les immensités de ces républiques, des dizaines de milliers d'ogives nucléaires sont

peut-être à la disposition de quelques initiatives nouvelles, est une préoccupation importante. Il est donc urgent – d'ailleurs on s'en préoccupe – de mieux contrôler les sites nucléaires, de rassembler

le nucléaire tactique le plus dangereux, sur des lieux précis , d'obtenir

la dénucléarisation des républiques, car certaines en sont d'accord , comme l'ont indiqué nos collègues de Bélarus et d' Ukraine.

« Un problème demeure, celui de la fuite des cerveaux, de dizaines de milliers d'ingénieurs et d'experts qui, libérés de leurs

fonctions, peuvent être tentés par de fructueux contrats proposés

par d'autres pays .

« En deuxième lieu, nous parlons beaucoup des républiques européennes héritières de l' U.R.S.S. Nous devrions nous préoccuper aussi de ces républiques islamiques turcophones qui constituent l'Asie centrale. Je ne sais en effet si chacun se rend compte que, dans une vingtaine d'années, existera là une nouvelle nébuleuse géopolitique et stratégique de quelque 140 millions d'hommes, avec

une économie très délabrée. Elle aura donc naturellement la

tentation de s'éloigner de l' Europe, même de Moscou, et de se

tourner résolument vers l'Asie et vers des voisins qui s'appellent

le Pakistan, l'Afghanistan, et bien entendu l'Iran, lequel accomplit actuellement des efforts considérables, notamment auprès du

Kazakstan .

« La question est d'importance. Le Conseil de l'Europe devrait inviter des représentants de ces républiques à siéger parmi nous, sinon en qualité d'invités spéciaux, du moins comme observateurs.

Il faudrait également envoyer certains de nos membres dans le

cadre de missions de contacts et d'informations, et faire le maximum

pour garder les contacts avec eux, tant il est difficile d'imaginer

qu'ils puissent participer réellement à la C.S.C.E.

« En effet, où s'arrêteront les frontières de la C.S.C.E. ? La

Russie, l'Ukraine, peut-être la Georgie, sont concernées, mais au-delà c'est tout de même l'Asie et cela n'a plus rien à voir avec

l' Europe. Pourtant il faut s'en préoccuper très sérieusement.

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-« En troisième lieu, apparaît le danger de la montée du

populisme, plus exactement du popularisme, à la fois en Europe

de l'Ouest et en Europe de l' Est .

« Il est extraordinaire, du point de vue historique, qu'au

moment où tant de dirigeants, de cadres, d'opinions publiques, s'émancipent d'un régime totalitaire et aspirent à la démocratie,

nous donnions, nous Européens de l'Ouest, une si mauvaise image de la démocratie occidentale. Il y a là, matière à réflexion.

« Si nous voulons ne pas décevoir ces nouveaux croisés de la liberté, si nous voulons apporter une aide à ces démocraties encore fragiles, nous devons faire appel non seulement à elles, mais également à nous-mêmes et essayer d'améliorer notre système démocratique, de lutter contre l'abstentionnisme croissant et le désintérêt de nos opinions pour les principes de la démocratie, de donner le meilleur exemple et la meilleure image.

« Or la vocation du Conseil de l' Europe, défenseur naturel de

la démocratie et des droits de l' Homme, est notamment d'inciter

nos propres pays à consentir cet effort , non seulement en direction de l' Europe de l' Est , mais aussi tout simplement , en direction de l' Europe à laquelle nous croyons.»

J. – 36' ( 1989) ET 37' ( 1990) RAPPORTS ANNUELS

DE LA CONFÉRENCE EUROPÉENNE DES MINISTRES DE TRANSPORTS (C.E.M.T.)

INTERVENTIONS DE M. ROLAND BEIX

ET DE M. JEAN VALLEIX (6 février 1992)

La discussion s'est engagée sur la base des Rapports 6539 et 6551 , M. Roland BEIX (Député, S.) interrogeant ainsi le Président du C.E.M.T., à propos des transports terrestres :

« Au fil de votre exposé, nous avons senti combien les difficultés d'amélioration et de réalisation de certains modes de transports

sont grandes, le problème clé étant celui du financement des

nouveaux réseaux, et de l'amélioration des réseaux et structures

existants.

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-« Ainsi , la Communauté européenne consacre huit milliards de

francs au problème du transport, et un seul État membre, la

France, a consacré 90 milliards de francs . La question est désormais posée des capacités, des compétences, de l'efficacité, le recours à la formule d' une Agence ne s'impose-t-il pas ?»

Le Ministre, président du C.E.M.T. lui a alors répondu que la Conférence ne dispose pas des moyens correspondants . C'est au Conseil des ministres des Transports des Communautés qu'il incombe de décider de la répartition des crédits et des investissements à faire en matière d'infrastructure. Beaucoup de ces investissements ont d'ailleurs été réalisés dans plusieurs régions au cours des

derniers mois.

M. Roland BEIX ( Député, S.) a alors repris la parole pour

présenter deux ébauches de propositions : « La première est relative

à la nécessaire complémentarité dans les transports terrestres – le rapport y fait d'ailleurs remarquablement allusion – notamment

en matière de « ferroutage », c'est-à-dire de mise sur des wagons de chemins de fer des camions qui abîment nos routes, qui coûtent

cher, qui sont dangereux , etc. 11 s'agit d' un développement très important qui permettrait d'améliorer les transports en Europe sur

des voies déjà existantes.

« Il est aussi question de transports « combinés ». Or, je ne comprends pas très bien ce que cela signifie. Cela me semble

relever actuellement du roman d'anticipation, ce qui peut être

regrettable. Le « ferroutage » surtout me paraît indispensable.

« Ma deuxième observation concerne le gros problème relatif

au financement des infrastructures et du matériel roulant , lequel est extrêmement coûteux . Nous ne savons pas comment financer

ce type de matériel et les budgets nationaux, souvent dix fois plus élevés que ceux de la Communauté, n'y suffisent pas. Il va falloir

être inventif en la matière.

« Je n'irai certes pas, par un brutal immobilisme mental, jusqu'à plaider en faveur des bienfaits de la privatisation sans limites. Je crois néanmoins qu'il sera indispensable d'associer, à un moment ou à un autre, du capital privé et des financements publics.

Je fais une concession importante, mais elle est déjà mise en

pratique.

« Enfin, et M. le ministre l'a rappelé, la C.E.M.T. a une compétence limitée en matière de transport .

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-« Nous avons réussi beaucoup de choses en Europe grâce à l'Agence spatiale. Ce prototype d'organisation de gestion que serait une agence, alimentée par des budgets nationaux, n'est-il pas un moyen de répondre à des questions de financement que nous ne

sommes pas à même de régler pour l'instant ? Le débat sera

peut-être tranché dans quelques années.