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IV Synthèse de [Zn 2 -Al-Cl] par décomposition enzymatique de l’urée

La précipitation des HDL étant possible par décomposition de l’urée, il nous est apparu original et source de résultats nouveaux de pouvoir utiliser la voie enzymatique pour la décomposition de l’urée. L’objectif de cette étude est donc d’élaborer des Hydroxydes Doubles Lamellaires par un procédé de type biominéralisation en utilisant l’uréase, protéine active pour l’hydrolyse de l’urée. Des modifications importantes de morphologie sont à attendre pour les matériaux HDL ainsi préparés. Ce travail explore pour la première fois un procédé de biosynthèse des phases HDL. La comparaison avec la précipitation par hydrolyse thermique de l’urée est intéressante car les conditions de chimie douce sont très différentes en terme de température dans les deux cas. Au-delà de l’intérêt purement « synthèse de matériaux à morphologie contrôlée », la démonstration qu’une biomolécule peut maintenir son activité au cours de la formation d’une phase HDL ou de l’interaction avec cette phase

HDL ouvre des perspectives très intéressantes pour l’élaboration de matériaux bio-inorganiques selon un procédé « one-pot ».

IV.1 Synthèse

Nous nous sommes intéressés, dans un premier temps, à l’action de différents paramètres sur la formation de [Zn2-Al]. L’effet de la concentration en urée ou en uréase, le temps de réaction et l’activité enzymatique ont été examinés.

Le protocole utilisé est le suivant :

20 ml d’une solution de chlorures de zinc et d’aluminium dans un rapport Zn2+/Al3+ = 2 et de concentration totale en cations métalliques 0,1 M sont ajoutés dans une solution d’urée telle que les rapports [urée]/[sels] soient égaux à 3,3, 10,0 et 20,0. Puis pour activer l’hydrolyse de l’urée, une quantité variable d’uréase (5, 10 et 20 mg) a été mise dans le milieu réactionnel. La solution est agitée entre 2 à 12 jours sous atmosphère inerte. Le précipité obtenu est alors centrifugé, lavé deux fois dans de l’eau décarbonatée puis séché à température ambiante. Les activités enzymatiques des jack bean uréases utilisées sont : 54,2 et 22,8 unité/mg.

IV.2 Etude des paramètres influençant la synthèse

IV.2.1 Effet de la concentration d’uréase

Les produits obtenus ont été réalisés avec des quantités différentes d’uréase à 54,2 unité/mg (5, 10 et 20 mg). Les conditions expérimentales sont les suivantes : [urée]/[sels]=3,3 et 2 jours de synthèse.

Lors de la décomposition de l’urée par l’uréase (Figure 19), l’évolution du pH est beaucoup plus rapide que pour l’hydrolyse thermique de l’urée. Aucune étape de précipitation n’est mise en évidence sur le profil de pH. Les courbes obtenues s’apparentent plus au cas de l’hydrolyse thermique de l’urée à 100°C ou avec un excès d’urée. Le doublement de la quantité d’uréase à un effet modéré sur la vitesse d’hydrolyse. Le pH final atteint des valeurs comprises entre 6 et 7, similaires aux valeurs obtenues pour l’hydrolyse thermique (6,80 à 192h).

0 5 10 15 20 25 30 35 4,0 4,5 5,0 5,5 6,0 6,5 20 mg d'uréase 10 mg d'uréase pH temps (heures)

Figure 19 : Evolution du pH d’une solution aqueuse d’urée en fonction de la quantité d’uréase

Dans le cas de la bio-précipitation des phases HDL, les diffractogrammes X montrent pour les faibles taux d’uréase (5 et 10 mg) la co-existence de deux phases mal cristallisées, boehmite et HDL (Figure 22) alors que pour 20 mg d’uréase uniquement la phase boehmite est obtenue. En effet, dans ces conditions de pH, la formation de l’hydroxyde d’aluminium est encouragée. La distance interlamellaire de la phase HDL précipitée (7,5 Å) indique la formation d’une phase carbonatée.

Figure 20 : i) Diffractogrammes X et ii) Spectres infrarouge des phases préparées avec a) 5 mg, b) 10 mg et c) 20 mg d’uréase

Pour confirmer la présence de la phase [Zn-Al-CO3], les matériaux ont été analysés par spectroscopie infrarouge. La Figure 20 ii) c) révèle les bandes de vibrations du réseau HDL attribuées aux liaisons M-O (841 à 647 cm-1) et O-M-O (427 cm-1). L’augmentation de la

bande à 427 cm suggère que la formation du feuillet HDL est favorisée par l’augmentation de la quantité d’uréase. Curieusement, le diffractogramme de cet échantillon ne révèle pas la présence d’une phase HDL. Cependant on observe vers 60° en 2θ, la présence d’une raie souvent identifiée par les phases HDL comme la réflexion (110). Par ailleurs, la bande à 1360 cm-1 caractéristique de la vibration υ3 des carbonates informe sur la nature de l’anion intercalé. Une bande intense à une fréquence située vers 950 cm-1 est attribuée à la phase d’hydroxyde d’aluminium. Ces résultats corroborent la diffraction des rayons X dans laquelle, la précipitation de deux phases mal cristallisées est observée. En améliorant la précipitation de l’HDL, la phase riche en aluminium s’estompe et l’intercalation de carbonates entre les feuillets HDL est incitée. Il faut noter, toutefois, l’adsorption de l’uréase par la matrice. Les bandes30 observées à 1652 et 1543 cm-1 correspondant aux modes d’étirement et de déformation de C=O (amide I) et N-H (amide II), respectivement ont pu être identifiées. La présence de l’enzyme dans le matériau sera discutée à la fin de ce chapitre. La concentration d’enzyme ne semble pas être un paramètre prépondérant. Il est possible que les conditions expérimentales ne soient pas optimales.

IV.2.2 Effet du temps

Dans ce travail, les conditions expérimentales sont similaires à celles de l’étude précédente. Différentes phases ont été comparées à 2, 6 et 12 jours de réaction par précipitation avec 20 mg d’uréase.

Les diffractogrammes des rayons X identifient la présence d’une phase [Zn-Al-CO3] dès 6 jours de précipitation (Figure 21). En favorisant le mûrissement, la cristallinité du matériau est améliorée. Mais la précipitation d’hydroxyde d’aluminium amorphe est aussi mise en évidence au début de la synthèse et s’atténue en fonction du temps. Avec une distance inter-reticulaire d110 identique (d110 = 1,528 Å), les phases obtenues au bout de 6 jours et 12 jours présentent le même rapport molaire Zn2+/Al3+. La phase HDL précipite entre 2 et 6 jours, au-delà la disparition de la phase amorphe boehmite indique qu’on a atteint l’étape de mûrissement du matériau.

Figure 21 : i) Diffractogrammes X et ii) Spectres infrarouge des phases préparées pour un mûrissement de a) 2, b) 6 et c) 12 jourset d) [Zn2-Al-CO3] coprécipitée

La spectroscopie infrarouge confirme ces observations (Figure 21). L’augmentation de l’intensité de la bande de vibrations O-M-O à 427 cm-1 et l’affinement des raies entre 500 et 800 cm-1 confirment la formation d’une phase hydroxyde double lamellaire de plus en plus structurée. La bande de vibration des (CO32-) s’intensifie indiquant que la phase se carbonate progressivement avec le temps. Il est à noter que l’uréase est toujours piégée dans la matrice inorganique.

La transformation de la phase amorphe d’hydroxyde d’aluminium en phase HDL [Zn-Al] est beaucoup plus lente que dans le procédé d’hydrolyse thermique, malgré les conditions de pH favorables. La température de la solution apparaît être un facteur clé dans cette réaction.

IV.2.3 Effet de la concentration d’urée

L’effet de la concentration d’urée a été évalué dans les conditions suivantes : 10 mg d’uréase et un temps réactionnel de 2 jours. Différentes phases ont été comparées lors de la préparation d’hydroxydes doubles lamellaires en utilisant un rapport [urée]/ [sels] = 3,3, 10 et 20.

Quelle que soit la concentration d’urée mise en solution, les courbes de pH en fonction du temps sont pratiquement superposables (Figure 22). On montre ici l’importance de l’effet tampon du milieu qui atteint rapidement un plateau de [H+], quelle que soit l’évolution des concentrations des autres espèces.

0 5 10 15 20 25 30 35 4,0 4,5 5,0 5,5 6,0 6,5 7,0 [urée]/[sels] = 3,3 [urée]/[sels] = 10 pH temps (heures)

Figure 22 : Evolution du pH en fonction de la concentration d’urée

Les diffractogrammes des rayons X confirment la précipitation de l’hydroxyde double lamellaire (Figure 23.a). La cristallinité du matériau est fortement influencée par la quantité de base ajoutée. L’augmentation de la quantité d’urée en solution conduit à une libération accrue d’ions OH-, agents de précipitation de l’HDL. Il est donc évident que l’uréase répond à ces changements de concentrations. L’enzyme reste active durant le procédé de précipitation. L’étape de croissance cristalline intervient plus rapidement aussi. La présence d’impureté amorphe de type boehmite est cependant toujours identifiée.

Figure 23 : a) Diffractogrammes X et b) Spectres infrarouge des phases préparées à 2 jours de réaction pour des rapports [urée]/[sels] égales à a) 3,3 , b) 10 et c) 20 et spectre infrarouge d’une phase

a position de la raie (110) n’est pas modifiée par ces changements de concentration d’urée,

es spectres infrarouge sont caractéristiques des hydroxydes doubles lamellaires (Figure 23.

algré un diffractogramme de rayons X qui révèle la présence plus soutenue de la phase

omme précédemment, la présence de l’enzyme immobilisée sur le matériau est confirmée.

IV.2.4 Effet de l’activité enzymatique

Les hydroxydes doubles lamellaires ont été préparés dans les conditions suivantes :

’activité enzymatique de l’uréase est un paramètre qui modifie fortement le profil de pH au L

le rapport molaire Zn2+/Al3+ est fixé dès le début de la réaction, comme nous l’avons déjà montré dans l’étude précédente.

L

b). L’affinement des raies suggère une amélioration de la cristallinité provoquée par une organisation plus développée du matériau. La raie caractéristique des carbonates à 1360 cm-1 augmente avec l’ajout de l’urée comme attendu.

M

HDL ([urée]/[sels]= 20), la bande à 950 cm-1 observée sur le spectre infrarouge est très intense. En outre la bande à 427 cm-1 caractéristique de la vibration M-O est absente. Il est possible que dans ces conditions d’excès d’urée, la phase majoritaire soit de l’hydroxyde d’aluminium.

C

[urée]/[sels] = 20, 10 mg d’urée et 2 jours de synthèse. Les uréases utilisées ont des activités enzymatiques différentes : 22,8 unité/mg (U22,8) et 54,2 unité/mg (U54,2).

L

cours de la réaction (Figure 24). Pour une activité de 54,2 unité/mg (soit une décomposition de 54,2 µmole d’urée/ min/mg d’uréase), le pH final de précipitation est atteint après 3 heures de synthèse, alors que pour une activité deux fois moins grande, l’hydrolyse de l’urée est ralentie entraînant l’obtention du pH final plus tardivement. Dans ce cas, l’étape de précipitation initiale est clairement observée. La cinétique de précipitation est fortement ralentie.

Figure 24 : Evolution du pH en fonction de l’activité enzymatique de l’uréase

En absence d’ions métalliques en solution, le pH du système Uréase/Urée atteint une valeur de 11. Pour un système contenant des ions Zn(II), le pH de fin de réaction n’excède pas 6,5. L’effet inhibiteur du cation Zn2+ sur l’activité de l’uréase pourrait expliquer ces limitations de pH.

Pour confirmer la diminution de l’activité enzymatique, nous avons suivi la vitesse de relargage des ions NH4+ grâce à une électrode spécifique. La Figure 25 montre une forte diminution de l’hydrolyse de l’urée en présence d’ions métalliques, caractérisée par une perte de 72 % de l’activité enzymatique.

Les analyses chimiques ont été réalisées sur ces deux matériaux. Le Tableau 7 répertorie les compositions en fraction molaire. Nous pouvons constater que les rapports Zn/Al sont très loin du rapport théorique de 2. Cependant, le rapport est amélioré avec une activité enzymatique plus élevée suggérant que la phase HDL est plus importante. D’après les résultats, si on considère la formation d’une phase HDL de composition [Zn2-Al-Cl], on obtient un rapport HDL/Al(OH)3 égal à 3/7.

Tableau 7 : Analyses chimiques des phases synthétisées

Activité en unité

C/N CO32- /Al

Zn/Al (théo) Zn/Al Cl/Al

22,8 2 0,23 0,041 négligeable 2,2

54,2 2 0,59 négligeable 0,13 6,6

L’analyse du rapport C/N pour les deux phases, préparées respectivement par U22,8 et U50,4

montre que dans le premier cas sa valeur se rapproche plutôt de la valeur théorique correspondant à la molécule d’urée alors que pour la dernière phase il s’explique par l’immobilisation d’uréase dans la matrice. En effet pour l’uréase, le taux C/N est de 5,24.

Les diffractogrammes des rayons X montrent que la cristallinité des phases HDL préparées est affectée par l’activité enzymatique de l’uréase (Figure 26).

Figure 26: a) Diffractogrammes des rayons X et b) Spectroscopie infrarouge des HDL obtenus avec des activités enzymatiques différentes a) 22,8 et b) 54,2 unité/mg

Pour une activité de 22,8 unité/mg, malgré un pH de 5,8 pour lequel la phase HDL précipite dans les conditions d’hydrolyse à 90°C, ici la phase amorphe boehmite est largement majoritaire. La présence de l’uréase en solution, seul paramètre différent, empêche la

précipitation des cations Zn à ces concentrations en ions OH. Les ions Zn peuvent être mobilisés à la surface de l’enzyme près des sites de complexation des carboxylates des résidus aspartates, glutamates ou bien des groupements amines de surface (arginine, lysine, histidine, asparagine, glutamine, sérine et thréonine). En outre, les métaux lourds ont tendance à se complexer avec la cystéine, acide aminé acteur de l’activité enzymatique.

Pour la phase préparée avec une activité d’uréase de 54,2 unité/mg, le spectre infrarouge et la diffraction des rayons X confirment la formation d’une phase [Zn-Al-CO3] (Figure 26).

IV.3 Etude morphologique

Les clichés de microscopie électronique ont été réalisés sur les phases préparées en 2 et 12 jours avec un rapport [urée]/[sels] = 3,3 et les phases préparées avec des activités différentes d’uréase avec un rapport [urée]/[sels] = 10 (Figure 27).

Figure 27 : Clichés MEB de la phase préparée a) en deux jours et b) en douze jours pour un rapport [urée]/[sels] = 3,3 et avec une activité de c) 22,8 et d) 50,4 pour un rapport [urée]/[sels] = 10

Contrairement aux phases préparées par hydrolyse thermique, on n’observe pas précisément les particules individuelles. Après deux jours de synthèse ou pour l’utilisation d’uréase de faible activité (U22,8), il ne s’est formé que des agrégats. Cependant en 12 jours, il apparaît à certains endroits des particules. Cette observation est plus nette pour la phase préparée avec un excès d’urée et une meilleure activité d’enzyme. L’amélioration de la cristallinité et de la formation d’HDL entraîne l’identification de particules.

Une étude par microscopie électronique à transmission couplée à la diffraction électronique et à l’EDX sur cette dernière phase a révélé la présence de particules HDL cristallisées pour un rapport Zn/Al proche de 2 (Figure 28). Cependant, il apparaît aussi la présence de phases riches en aluminium avec des rapports Zn/Al compris entre 0,3 et 1 (Figure 29). Ces résultats corroborent les études structurales (diffraction des rayons X et infrarouge) effectuées préalablement sur ce matériau.

.

Figure 28 : Images et caractérisation sur une phase préférentiellement HDL

Figure 29 : Images et caractérisation sur une phase préférentiellement hydroxyde d’aluminium

La présence d’uréase entraîne une modification structurale. Dans les conditions de travail, l’uréase est chargée négativement (p.i.e = 5,6) et peut donc par réaction d’échange anionique venir s’adsorber à la surface de l’argile. Ce phénomène peut entraîner la formation d’agrégats hybrides HDL/uréase et par conséquent empêcher la croissance du matériau. Cette diminution de l’activité enzymatique ne favorise pas la décomposition de l’urée nécessaire cette fois-ci au

IV.4 Discussion

On observe, de manière similaire à la précipitation de la phase HDL [Zn2-Al-Cl] par

t une activité élevée,

ant soin de ne pas perdre

- nter les concentrations en urée.

our résumer, la formation d’hydroxydes doubles lamellaire est plus complexe puisqu’elle