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V Extension des synthèses à d’autres systèmes HDL [M II -M III ]

V.2 Hydrolyse enzymatique

La précipitation d’une phase [Zn2-Al-CO3] par décomposition enzymatique de l’urée a été mise en évidence et présentée dans le paragraphe IV. Cette méthode de synthèse a été développée pour la formation de diverses matrices telles que [Mg2-Al], [Co2-Al], [Ni2-Al], [Cu2-Cr], [Zn2-Cr]. D’après les études réalisées précédemment, un des facteurs décisifs pour synthétiser les phases HDL les plus pures est la concentration d’urée. Le protocole que nous allons utiliser est le suivant : 10 mg d’uréase, rapport [urée]/[sels] = 20 et deux jours de synthèse. L’activité enzymatique de la jack bean uréase est d’environ 22,8 unité/mg d’enzyme.

V.2.1 Effet des cations

Dans cette étude, le pH final de fin de réaction a été mesuré et récapitulé dans le Tableau 11.

Tableau 11 : pH final pour les différentes matrices étudiées

Matrices Urée [Mg2Al] [Co2Al] [Ni2Al] [Zn2Al] [Cu2Cr] [Zn2Cr]

pH final 11 9,8 9,7 9,7 6,5 9,8 9,6

Pour les différents systèmes étudiés, les valeurs du pH final de réaction se rapprochent de celle de l’uréase à 11, à l’exception du système [Zn2Al], dont le pH n’excède pas la faible valeur de 6,5.

La présence de métaux lourds dans des solutions d’uréase entraîne l’inhibition de l’enzyme par fixation avec la cystéine. Cependant, la désactivation dépend de la nature des cations divalents.

L’avancement de la réaction de précipitation du système [Mg-Al] a été suivi en enregistrant l’évolution du pH du milieu réactionnel au cours du temps (Figure 33.1). Parallèlement, l’activité enzymatique de l’uréase a été mesurée à partir de la variation de la concentration des ions ammoniums à l’aide d’une électrode sélective aux ions NH4+ (Figure 33.2). De ce fait, il est possible de corréler l’évolution du pH avec la décomposition de l’urée. Pour évaluer l’effet des espèces présentes en solution (ions et phases précipitées) sur l’activité de l’uréase, les mêmes expériences ont été réalisées sur une solution aqueuse contenant uniquement le système urée/uréase.

Figure 33 : Evolution 1) du pH et 2) du relargage de NH4+ en fonction du temps lors de la décomposition d’urée dans une solution a) pure, b) contenant des sels de magnésium et d’aluminium

et c) contenant des sels de zinc et d’aluminium

Dans une solution d’uréase sans ajout de sels métalliques, la décomposition de l’urée est rapide et le pH atteint son maximum (pH=11) en trois heures. En présence d’ions métalliques, l’évolution du pH est légèrement atténuée en présence de Mg2+ et Al3+, voire même très lente en présence d’ions Zn2+. L’effet tampon des phases précipitées (pH=8,5 pour une phase [Mg2Al] et pH=7,5 pour une phase [Zn2Al]) ne peut pas à lui seul expliquer ces différences car ce comportement se retrouve sur les courbes de relargage des ions NH4+. D’après ces courbes, l’activité de l’uréase est évaluée à 40 % et de 28% de l’enzyme libre durant la formation de [Mg-Al-Cl] et [Zn-Al-Cl], respectivement. En présence de magnésium, l’hydrolyse de l’urée est juste ralentie puisque après 24 heures de synthèse, la concentration en NH4+ s’approche de la concentration obtenue par décomposition avec l’uréase seule (15 heures). La diminution du pH peut être liée à la précipitation d’hydroxydes qui tamponne le milieu. Par contre, un plateau est atteint au bout de 15 heures en présence d’ions Zn2+ suggérant que l’hydrolyse est stoppée. L’inhibition de l’activité enzymatique est entraînée par la présence de cations métalliques Zn2+. Mais, les concentrations en [NH4+] peuvent être faiblement sous estimées à cause de la possible adsorption de NH3 à la surface des particules d’argile.

Pour estimer l’influence des cations M sur l’activité enzymatique de l’uréase, nous avons étudié l’évolution du pH dans une solution aqueuse uréase/urée en présence des cations Mg2+, Zn2+, Ni2+, Co2+ ou Al3+. Les valeurs du pH de fin de réaction sont comparées : Zn2+ (6,5) < Ni2+ (7,4) <Co2+ (8,4) < Al3+≈ Cr3+ ≈ Mg2+ (9,4) et mettent en évidence la diminution de l’effet inhibiteur de Zn2+ jusqu’à Mg2+.

Les analyses chimiques ont été effectuées sur ces différentes matrices. Le Tableau 12 ci-dessous récapitule les fractions molaires. Le rapport MII/MIII se rapproche du rapport théorique lorsque l’inhibition est diminuée, indiquant que les cations divalents ont pratiquement tous réagi. Cependant, la somme des anions comparée à la quantité d’aluminium reste très faible.

Tableau 12 : Analyses chimiques des phases préparées (fraction molaire)

Echantillon [Mg-Al] [Co-Al] [N i-Al] [Zn-Al]

MII/MIIIthéor. 2 2 2 2 MII/MIIIExp. 1,77 1,11 1,67 0,23 Cl-/Al3+ 0,012 - 0,0016 0,041 CO32-/Al3+ 0,051 0,16 0,024 - (Cl-+2CO32-)/Al3+ 0,11 0,32 0,048 0,041 V.2.2 Etude structurale

Les diffractogrammes des rayons X révèlent la précipitation d’hydroxydes doubles lamellaires suivant ce mode de synthèse, quelle que soit la matrice étudiée, excepté dans le cas de [Zn-Cr] (Figure 34).

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Figure 34 : Diffractogrammes X des phases a) [Mg-Al], b[Co-Al], c) [Ni-Al], d) [Zn-AL] et e) [Cu-Cr]

Les paramètres de réseau, affinés suivant le modèle rhomboédrique, sont récapitulés dans le Tableau 13. La distance interlamellaire observée suggère la présence de carbonates dans la galerie. Cependant, les composés obtenus montrent une pauvre cristallinité, plus particulièrement pour la phase [Zn-Al] et [Cu-Cr]. Dans les conditions de pH inférieures à 6, la formation de phases de type hydroxyde d’aluminium est préférentiellement obtenue. Par contre, à pH=9,8, l’impureté observée sur le matériau préparé en présence de nickel correspond à l’espèce (NH4)Al(OH)x(CO3)y. Cette phase apparaît lors de la précipitation d’une solution contenant seulement de l’aluminium dans les mêmes conditions de synthèse.

Tableau 13 : Paramètres de réseau affinés pour les différentes matrices

matrice Paramètres de réseau

a (Å) c (Å) d (Å) [Mg2Al] 3.027(7) 22.73(5) 7.57 [Co2Al] 3.056(3) 22.63(3) 7.54 [Ni2Al] 3.021(1) 22.911(8) 7.64 [Zn2Al] 3.055(2) 22.51(2) 7.50 [Cu2Cr] 3.066(5) 22.67(4) 7.56

La précipitation d’HDL dépend de la nature des espèces en solution. Plus le caractère inhibiteur est prononcé, plus la cristallinité et la pureté des produits sont amoindries. Lors de la fixation des cations à la cystéine, l’activité diminue mais aussi la concentration des métaux lourds en solution. Les cations divalents ne peuvent réagir avec les OH- libérés.

V.2.3 Comportement de l’enzyme

D’après la littérature, l’immobilisation d’enzyme sur les hydroxydes doubles lamellaires est possible. Nous avons donc analysé le surnageant pour déterminer la concentration d’uréase non retenue par la matrice par dosage spectroscopique UV-visible à la longueur d’onde d’adsorption de l’uréase (275 nm).

D’après les résultats, 90 % de l’enzyme est adsorbée sur la phase [Zn-Al] alors que 56% est retenue sur [Mg-Al]. Cette forte affinité de l’enzyme pour la phase [Zn-Al] corrobore la diminution d’activité lors de la précipitation.

Des tests d’activité sur l’uréase immobilisée ont été réalisés sur le matériau fraîchement préparé. L’activité diminue fortement puisque comparée à l’enzyme libre, l’uréase immobilisée sur [Mg-Al] et [Zn-Al] révèle une perte de 92 et 90 %, respectivement.

La dénaturation de l’enzyme peut être provoquée par les cations en solution, tels que MII, MIII, NH4+, l’immobilisation dans la matrice HDL et le temps de précipitation.

V.2.4 Etude morphologique

Les macromolécules comme les enzymes interviennent sur l’édification des matériaux inorganiques. L’uréase vient s’adsorber à la surface des hydroxydes doubles lamellaires et bloque la croissance des particules.

La Figure 35 montre les clichés de microscopie électronique à balayage et à transmission réalisés sur les phases préparées. Contrairement aux phases préparées par hydrolyse thermique, la voie enzymatique révèle une précipitation de petites particules de taille inférieure à 200 nm.

Dans le cas des phases les mieux cristallisées telles que [Mg-Al] et [Co-Al], la microscopie électronique à balayage montre une texture plus homogène avec des particules ondulées et collées les unes sur les autres. Par contre, dans le cas de [Ni-Al] et [Zn-Al] cristallisé (Figure 27), deux types de régions sont identifiées : une région montrant des particules individuelles plus rigides et une région plus fondue où aucune particule ne semble se détacher. Pour une phase [Zn-Al] peu formée, seul l’aspect fondu est identifié. Ces modifications structurales dépendent évidemment de la matrice synthétisée et de son degré de cristallinité mais aussi de l’affinité de l’uréase avec celle-ci.

VI Comportement thermique des phases HDL [M -M ] préparées