1. Joseph Bataille (1716-1793)
1.4 Investissement au sein de la Corporation
Tout en poursuivant son travail rue de la Montagne Sainte-Geneviève, Joseph Bataille
s'investit au sein de la corporation, il est nommé garde apothicaire de 1768 à 1770.
18La
communauté des apothicaires est responsable de tout ce qui touche à la vie professionnelle de ses
membres, de la préparation et la présentation de la maîtrise, ainsi que de la répartition des impôts.
17
Le Grand dispensaire médicinal contenant cinq livres des institutions pharmaceutiques. Jean De Renou. Lyon : Pierre Rigaud, 1624, p. 609.
30
Elle est centrée essentiellement sur deux organes : l'assemblée des maîtres et les gardes ou jurés.
1.4.1 L'assemblée des maîtres
Elle est formée par l'ensemble des apothicaires ayant obtenu la maîtrise. Elle est convoquée
par les jurés ou le doyen, souvent par le biais du secrétaire, rôle pourvu par le dernier maître reçu.
Les séances ont lieu à dates fixes, annuellement ou mensuellement. La présence est obligatoire pour
tous, sous peine d'amende, sauf excuse légitime. La présidence revient au doyen, au plus ancien juré
ou au lieutenant du premier médecin du roi. Un registre des délibérations et des résolutions votées
est tenu.
L'assemblée décide des dépenses et des recettes : sommes à payer au trésor royal, à régler
pour les frais de procès, à verser aux confrères malades ou aux veuves, droits à la charge des
candidats à la maîtrise, etc. Elle peut aussi fixer, en accord avec les autorités et les médecins, le prix
des médicaments. Elle examine également la gestion des jurés et particulièrement l'emploi qu'ils ont
fait de l'argent de la communauté et elle se prononce sur les questions d'infractions aux statuts, de
sanctions à appliquer, etc.
191.4.2 Les Gardes ou Jurés
Ils constituent le pouvoir exécutif de la communauté alors que l'assemblée représente le
pouvoir législatif. Pour accéder à cette fonction, il faut appartenir à la communauté et donc être
catholique. Il faut être un homme d'honneur et faire preuve d'expérience et de morale. Il est
quelquefois précisé que deux proches parents ne peuvent être jurés en même temps.
Les gardes peuvent être désignés par les autorités (par la faculté de médecine par exemple)
mais plus généralement, ils sont élus par l'assemblée de la communauté. Ils prêtent serment de bien
observer les statuts et de les faire respecter en prenant leurs fonctions.
Sauf appel devant l'assemblée, les apothicaires sont tenus d'obéir aux décisions des gardes,
qui doivent agir d'un commun accord. Les gardes ont, entre autres, pour mission de conseiller les
apothicaires dans leurs fonctions. Ils sont également chargés de conserver les archives et registres
31
au bureau de la communauté, de veiller au bon respect des statuts et ordonnances par les maîtres. Ils
vérifient, en effectuant des visites et des inspections, que nul n'empiète sur leurs privilèges. Ils
interviennent aussi dans les examens pour l'obtention de la maîtrise et ils aident les maîtres malades.
Enfin, ils prennent en charge la situation financière laissée par leurs prédécesseurs et ils sont
personnellement responsables des fonds qui leur sont confiés. Ils en rendent compte à l'assemblée
des maîtres qui leur rembourse les frais engagés pour le compte et dans l’intérêt de la
communauté.
20En 1769, Joseph Bataille est nommé garde en charge des comptes des bourses particulières
de la compagnie.
21Il tient alors très rigoureusement le registre des comptes. La lecture de l’un de
ces registres donne une idée plus précise des activités de la corporation à cette époque.
Illustration 10 : Compte que rend Sieur Joseph Bataille.
BIU Santé Pharmacie. Registre 79 : Archives de l’École de Pharmacie. Comptes
financiers 1751- an VII.
20 Ibid., pp. 47 - 49.
32
On y peut lire :
« Les recettes sont divisées en sept chapitres :
à cause du droit de visite : 960 livres.
Cette somme correspond aux 12 livres payées à la communauté par les apothicaires et les veuves
d'apothicaires tenant boutique, ainsi que pour les immatricules
22:
- 66 apothicaires tenant boutique (66 x 12 = 792 livres) ;
- 12 veuves d'apothicaires (12 x 12 = 144 livres) ;
- 2 immatricules (2 x 12 = 24 livres).
à cause du droit de Poids et Mesures : 0 livre ;
à cause du Droit Royal : 0 livre ;
à cause des Marchands reçus sans qualité : 0 livre ;
à cause des réceptions des Marchands Apoticaires [sic] : 0 livre ;
à cause des frais de visite : 150 livres. »
23Les jurés se rendent chez les apothicaires afin de contrôler le bon respect des pratiques telles
que la bonne qualité des médicaments vendus. Ces visites sont le plus souvent inopinées, une ou
plusieurs fois par an et le détenteur de mauvaises drogues encourt une amende ou même une
suspension d'exercice. Ces inspections sont payantes, à la charge de l'apothicaire visité, mais les
frais sont limités par les statuts.
24Les dépenses sont réparties en neuf chapitres qui, dans les registres de la compagnie sont
présentées comme suit:
« à cause des sommes dues en avances (dettes) : 24 839 livres 10 sols et 7 deniers.
Somme due à Monsieur Baltazard Julliot, ancien Garde, Marchand Apoticaire Épicier et receveur de
la Bourse particulière des Maîtres Apoticaires en 1768.
à cause des droits attribués à la Bourse Commune : 690 livres ;
à cause des frais de visite : 843 livres 2 sols ;
à cause des offices des Trésoriers : 0 livre ;
22
Il s’agit de l’enregistrement du diplôme du nouvel apothicaire.
23BIU Santé Pharmacie. Registre 79 : op. cit.
33
à cause des frais de procès : 4 085 livres 16 sols et 3 deniers. »
25L'organisation des professions en corporations a pour but de définir avec précision les rôles
et devoirs de chacun afin de prévenir les chevauchements nuisibles. Ainsi, en ce qui concerne la
pharmacie, les actes pharmaceutiques sont ceux qui ont pour but la préparation des médicaments et
leur mise à disposition des malades. Seuls les professionnels reconnus capables, conformément aux
règlements en vigueur, peuvent exercer ce métier.
Néanmoins, dans les faits, les apothicaires doivent souvent lutter pour préserver leur
monopole et interdire l'exercice de la profession à des personnes non habilitées.
26De nombreux
frais de procédure sont ainsi engagés afin de protéger les acquis de la corporation. Pour l'année
1769, par exemple, ont été dépensées :
« 360 livres à Monsieur Babille, avocat au Parlement, contre Monsieur Darey Sonflerc,
épicier ;
1 687 livres, 1 sol et 3 deniers pour Monsieur Sohier, procureur au Parlement, pour son
mémoire concernant une affaire contre la faculté de Médecine ;
37 livres et 10 sols à l'intention de Monsieur Rousseau, huissier de police, pour la
publication de la sentence contre Monsieur Bernard, épicier ;
12 livres pour les afficheurs qui ont placardé la sentence contre Monsieur Bernard ;
Etc. ;
à cause des impositions Royales : 43 livres 16 sols et 9 deniers ;
à cause du petit bâtiment dans la cour du jardin : 61 livres et 14 sols ;
à cause des frais du présent compte : 261 livres et 10 sols ;
à cause de la reprise du présent compte : 1 314 livres 16 sols et 6 deniers.
Les dépenses excèdent la recette d’un montant de 29 277 livres 4 sols et 1 denier. Le compte
a été examiné par des gardes en charge ainsi que d'anciens gardes et Marchands Apoticaires
-Épiciers convoqués. Cette somme a été payée par Monsieur François Cozette, garde en charge
tenant les Comptes de la bourse particulière des Marchands Apoticaires-Épiciers pour l'année
1770.»
27Bataille est en charge des comptes pour l'année 1769.
2825
BIU Santé Pharmacie. Registre 79 : op. cit.
26 PREVET, François. op. cit., p. 40.
34
Pendant ses années d’exercices en tant qu’apothicaire rue de la Montagne-Sainte-Geneviève,
Joseph Bataille va connaitre un épisode important qui va transformer la profession.
Dans le document
DE LA PHARMACIE LHOPITALLIER AU MUSÉE CARNAVALET
(Page 29-34)