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A la BIU Santé – pôle pharmacie

9. Sauvegarde d’un patrimoine pharmaceutique

9.7 Un patrimoine préservé

9.7.2 Lieux de sauvegarde

9.7.2.2. A la BIU Santé – pôle pharmacie

L’université de Paris Descartes compte trois bibliothèques :

- Le service commun de la documentation (SCD), qui coordonne les services, sur place et à

distance, de onze bibliothèques situées sur les lieux d’enseignement. Elle fournit aux

étudiants de tous niveaux des ouvrages sur les différentes matières ;

- Deux bibliothèques interuniversitaires (BIU) de médecine et de pharmacie, qui ont fusionné

le 1 janvier 2011 pour donner naissance à une nouvelle institution : la BIU Santé.

Ces bibliothèques dépendent de Paris Descartes mais la dernière, ayant un statut

« interuniversitaire », fonctionne en coopération avec d’autres universités (Paris Diderot et Paris

Sud). Autre différence notable entre ces bibliothèques, le SCD acquiert, pour l’essentiel, des

documents récents, alors que la BIU Santé a une vocation patrimoniale de conservation des

ouvrages.

On peut dater l’origine de la BIU Santé - pôle pharmacie en 1570, quand quatre gardes

apothicaires firent don, à l’ensemble de la Corporation, de sept volumes, qui contenaient neuf

textes. A cette époque, la corporation des épiciers – apothicaires de la ville de Paris se réunissaient

dans leur bâtiment commun de la rue de l’Arbalète. Lors de la création du Collège de pharmacie, en

1777, la corporation réalise un inventaire de ses biens mobiliers et immobiliers. Le premier

catalogue est alors dressé. Il contient environ cinq cents volumes. En 1922, après trente-huit années

de service, Paul Dorveaux prend sa retraite de bibliothécaire. Les collections s’élèvent alors à

35 000 ouvrages. Aujourd’hui, ce chiffre est multiplié par dix et la BIU Santé – pôle pharmacie

présente environ 350 000 documents. Parmi ces ouvrages sont conservés tous les registres de

l’ancienne corporation : des droguistes, épiciers, apothicaires de Paris, ainsi que de nombreux

incunables.

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237 Un incunable est un livre imprimé dans la période comprise entre le début de l’imprimerie occidentale vers 1450 et

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Ces précieuses collections s’enrichissent de deux façons :

- Par acquisition ;

- Par donation ou legs.

Les acquisitions concernent surtout les monographies et les périodiques traitant de l’actualité des

sciences pharmaceutiques. Les acquisitions dans le domaine patrimonial sont rares et décidées de

manière commune entre les pôles de pharmacie et de médecine.

Depuis environ un an, un service de réception des dons a été mis en place. Les dons, réalisés

par un laboratoire ou un particulier lors d’une cessation d’activité ou d’un décès, doivent avoir un

intérêt pharmaceutique ou être en rapport avec l’histoire de la pharmacie pour prétendre rejoindre

les collections de la BIU Santé - pôle pharmacie. Après avoir traité de la pertinence du don, le

conservateur évalue l’intérêt de celui-ci. Dans un premier temps, il faut distinguer la nature du

document : entre imprimé et archive ou iconographie et objet. Par la suite, les caractéristiques

propres du document sont analysées et comparées au fonds déjà existant. Possède-t-on déjà un

ouvrage identique dans les collections ? Est-il en bon état ? Ce nouvel ouvrage peut-il compléter un

fonds précédemment acquis ? A-t-il des particularités d’exemplaire (notes, signatures) ? etc.

De façon générale, l’ensemble des documents est récupéré afin de préserver la cohérence du fonds.

Le don des ordonnanciers et livres de compte Lhopitallier est un cas à part. Il s’agit de livres

manuscrits, uniques par définition, qui présentent un intérêt évident en tant que source

documentaire. Ainsi, la procédure de don a été rapide. Le 17 juillet 2012, Roger Lhopitallier fait

don à la BIU Santé – pôle pharmacie de :

- 19 ordonnanciers couvrant les années 1918 à 1956 ;

- 20 livres de caisses datant de 1914 à 1935 ;

- Registres divers allant de son ancien guide d’étude au registre des résultats d’analyses tenu

par son grand-père, Octave Lhopitallier.

Un procès verbal de don est établi entre la famille Lhopitallier et la bibliothèque. Le

conservateur responsable des collections procède par la suite à un inventaire plus précis de chacune

des pièces.

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Les documents reçus entrent dans les collections de la bibliothèque avec un numéro

d’inventaire et une cote. Ils sont ensuite signalés dans le catalogue numérique dédié aux manuscrits

et fonds d’archives (Calames).

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Illustration 97 :Ordonnanciers Lhopitallier à la BIU Santé – pôle Pharmacie.

Crédit photographie : BIU Santé - pôle pharmacie.

Illustration 98 :Buvard retrouvé dans un des ordonnanciers de la pharmacie Lhopitallier.

Crédit photographie : BIU Santé - pôle pharmacie.

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Ce don est important sur bien des aspects. D’un point de vue historique dans un premier

temps. Ces documents apportent un témoignage précieux de l’activité d’une des plus anciennes

pharmacies de Paris. Les livres de caisses révèlent des informations sur l’exercice d’une pharmacie,

située au cœur du quartier latin, notamment en temps de guerre.

Ces pièces sont d’un grand intérêt documentaire. Malheureusement, peu de bibliothèques

recensent de tels documents. Ainsi, le catalogue Calames, répertoriant les archives et les manuscrits

des bibliothèques relevant du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, n’en signale

qu’un seul autre exemple. Il appartient aux collections de la BIU Santé – pôle pharmacie. Il s’agit

des ordonnanciers de la Grande Pharmacie Centrale, située 136, rue du Chemin-Vert à Paris,

couvrant les années 1922 à 1929.

Toutefois, le conservateur de la BIU Santé – pharmacie précise que la bibliothèque conserve

près d’une dizaine d’autres ordonnanciers qui ne sont pas encore signalés dans ce catalogue

collectif. Cet ensemble forme une collection unique. C’est pourquoi le don des ordonnanciers

Lhopitallier complète et enrichit un ensemble déjà conséquent. Ceci permet différents types

d’études sur le comportement des pratiques médicales et pharmaceutiques, ou encore l’évolution

des épidémies, l’étude des prix des médicaments et des statistiques sur les préparations réalisées au

XX

e

siècle à Paris et en province. Ces documents sont rares à la vente

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, sans doute parce que leurs

propriétaires ne perçoivent pas leur valeur historique. Pour eux, il ne s’agit là que de simples outils

de leur exercice.

Ce don a aussi une valeur symbolique. Dans son interview donnée au Figaro, Roger

Lhopitallier insiste sur l’aspect sentimental de ce que le journaliste appelle de « vieux grimoires » :

« ce sont des ordonnanciers, explique le pharmacien. A l’époque de mon grand-père, on notait,

pour chaque achat, le nom du médecin qui avait prescrit un traitement, la formule exacte de la

préparation pour le cas où il faudrait la refaire, et le nom du patient ».

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Autant dire des écrits

riches d’enseignements.

Certes les ordonnanciers quittent leur lieu d’origine mais pour rejoindre les collections

d’une bibliothèque où ont étudié de nombreux titulaires de la pharmacie. Ils ne s’éloignent pas de

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Depuis quelques temps, on trouve des ordonnanciers récents en vente sur EBay, ce qui pose le problème du secret médical. Cette information récente est signalée par le Conseil central A de l’Ordre.

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leur lieu d’origine : la faculté n’est qu’à quelques rues de la pharmacie Lhopitallier. Ce geste de

Roger Lhopitallier n’est pas sans rappeler celui de son prédécesseur : Jules Monnier qui lui aussi

avait su préserver le patrimoine qu’il avait reçu en le confiant à l’École supérieure de Pharmacie.

Ainsi avec le pot à thériaque de Trusson, les portraits de Bataille et Trusson dans la salle des Actes,

les ordonnanciers viennent compléter un précieux témoignage de l’histoire de la pharmacie

Lhopitallier.