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Ce travail a été fait au début de ma thèse, en fin d’année 2014, début 2015. C’était une collaboration avec l’équipe de Marie-France Carlier (au LEBS, laboratoire d’enzymologie et de biologie structurale), à Gif-sur-Yvette. L’article correspondant est inséré dans la thèse, à la fin du chapitre.

5.1.1

État de l’art

Le bout barbé du filament d’actine, en plus d’être intrinsèquement dynamique, est un lieu d’interactions pour de nombreuses protéines. Ces dernières peuvent également interagir entre elles lorsqu’elles sont liées au filament. Étudier les compétitions et coopé- rations résultant de ces interactions nous aide à comprendre les mécanismes régulant l’allongement du bout barbé, primordiaux pour de nombreux processus biologiques, tels que ceux impliqués dans la migration cellulaire. Nous nous concentrerons ici sur l’interaction entre le bout barbé, et deux protéines : la formine mDia1 et la protéine de coiffe CapZ.

D’un côté la formine assemble et allonge les filaments de manière processive. De l’autre, la protéine de coiffe empêche la polymérisation autant que la dépolymérisation du bout barbé.

Premières observations : La formine protège le bout barbé de l’effet de

la protéine de coiffe

Les premières expériences cherchant à identifier l’interaction possible entre ces deux protéines antagonistes amènent à penser à une compétition exclusive entre ces deux protéines.

Zigmond et collaborateurs ont observé directement, en filaments uniques, l’action de la formine de levure Bni1p sur le bout barbé. Elle ralentit le taux d’élongation ou de dépolymérisation du bout barbé d’environ 50%. Après l’addition de protéines de coiffe dans la solution contenant les filaments dont les bouts barbés sont liés aux formines, les taux d’élongation sont toujours positifs. Ce résultat les amène à conclure que la formine empêche la protéine de coiffe de se lier au bout barbé [252].

D’autres études, étudiant l’actine en solution marquée au pyrène, ont également conclu à une exclusion mutuelle entre la formine et la protéine de coiffe, la formine protégeant le bout barbé d’une liaison avec la protéine de coiffe, où la première protéine liée au bout barbé empêche l’arrivée de l’autre [253, 254].

Autres observations : La protéine de coiffe semble pouvoir stopper le

bout barbé en présence de formine

En 2004, Roméro et collaborateurs, observent le mouvement de billes fonctionnalisées par des formines. Ces billes sont propulsées grâce à la croissance d’un réseau d’actine généré par les formines, dit "queue de comète", depuis la surface de la bille. Ils montrent que la présence de gelsoline ou de CapG (deux autres protéines de coiffe) dans le milieu stoppe le mouvement [255]. Les filaments sont donc assemblés par les formines ancrées à la surface. La présence de la gelsoline provoque d’abord un arrêt de l’élongation de cette queue, puis son détachement. Cela suggère une action de la gelsoline sur le bout barbé, pourtant occupé par la formine. De plus, étudiant la croissance de filaments uniques, ils estiment que l’affinité de CapG pour le bout barbé est réduite d’un facteur 100, en présence de la formine. Ils estiment donc possible la formation d’un complexe à courte durée de vie entre CapG ou la gelsoline, la formine et le bout barbé.

Récemment la présence de protéines de coiffe au sein de filopodes de cellules de mélanomes a été mise en évidence [256]. Cette observation suggère un rôle de la protéine

131

de coiffe dans la régulation ou la formation du filopode. Elle pourrait y interagir ou cohabiter avec la formine, également présente et connue pour générer les filopodes depuis leurs extrémités [149].

5.1.2

Expérience préliminaire et motivations

Au laboratoire du LEBS, Shashank Shekhar travaillait sur des expériences de motilité sur des billes, combinant les protéines de coiffe, les formines, et des complexes Arp2/3. Cela amena à une expérience de contrôle pour étudier l’effet de la protéine de coiffe sur des formines, décrite comme suit. Les filaments d’actine initiés à partir de formines liées à la surface de billes, dans un milieu contenant de l’actine-profiline, forment une sorte de halo disperse grandissant en périphérie de la bille. La présence d’une protéine de coiffe, CapZ, en solution (100 nM) provoque un détachement d’une majorité de filaments (Shashank Shekhar, résultat non publié). Seul un petit nombre de filaments restent accrochés mais leur élongation est nulle. Cela suggère une action de CapZ au bout barbé déjà occupé par la formine, autrement dit la formation d’un complexe entre le bout barbé et ces deux protéines régulatrices. Ces observations renforcent les résultats obtenus par Roméro et collaborateurs [255].

Cette observation fut le point de départ d’une étude plus approfondie sur les propriétés de ce complexe ternaire. Grâce à notre méthode basée sur l’utilisation de la microfluidique, nous pouvons contrôler et étudier en détails la formation de ce complexe.

5.1.3

Résumé des résultats de l’article

Nous avons observé des filaments uniques au sein d’une chambre microfluidique, et en les exposants à des solutions contenant de l’actine-profiline, de la protéine de coiffe ou de la formine. Nous avons étudié les cas où le bout barbé est libre et le cas où le bout barbé est ancré à la surface par l’intermédiaire de la formine. Nous avons également utilisé l’imagerie à fluorescence en molécule unique pour observer directement l’action de la formine. Nous montrons que la formine mDia1, la protéine de coiffe CapZ et le bout barbé du filament forment un complexe ternaire, la présence d’une protéine réduisant l’affinité de l’autre pour le bout barbé. Cela se traduit par des taux d’association plus faibles et des taux de dissociation plus élevés pour chacune d’entre elles en présence de l’autre. La technique d’imagerie de fluorescence en molécule unique a permis de confirmer la formation de ce complexe. De plus, des expériences complémentaires ont également montré que l’isoforme de formine FMNL2 (FH1-FH2-WH2-DAD) permet la formation de

ce complexe. Cela suggère que la formation de ce complexe pourrait être générique. Notre étude a fait l’objet d’une publication en 2015 [92], accolée en fin de chapitre.