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reproduction est per¸cue comme une force puissante ; par cons´equent, une chose qui peut la ralentir ou la stopper doit ˆetre encore plus puissante, capable de produire un enfant avec quatre yeux ou des cornes” [Rutenberg et Watkins, 1997, p. 298].

3.3.4 Adoption

L’adoption d’une innovation, dans le domaine de diffusion d’innovation, est consid´er´ee comme un choix entre le statu quo et la nouveaut´e. Dans certains cas, le choix fait in- tervenir les autres produits ou innovations ; il est alors comparatif. Selon le risque pris en adoptant l’innovation, la prise de d´ecision est rapide ou d´etaill´ee. Tout comme la valeur, la d´ecision se base sur une image subjective de l’innovation et non sur ses hy- poth´etiques qualit´es objectives. L’incompr´ehension de l’innovation peut donc empˆecher de percevoir ses qualit´es.

L’adoption, ou le rejet, d´ependent bien sˆur des motivations individuelles. Ces mo- tivations peuvent souvent ˆetre rapport´ees aux besoins de Maslow (besoins physiolo- giques, s´ecurit´e, etc.) [Maslow, 1943, Maslow, 1954]. On y trouve notamment le besoin d’int´egration sociale, qui est directement li´e aux effets de mode et au conformisme aux normes sociales (afin de ne pas ˆetre rejet´e). On sait que les ˆetres humains se comportent de fa¸con globalement coh´erente avec ces motivations, dans la limite de leurs capacit´es cognitives [Simon, 1982]. On sait ´egalement que l’´evaluation de l’innovation, et donc son adoption, est sensible aux biais cognitifs identifi´es chez l’humain. Par exemple, on observe souvent un optimisme id´ealiste dans la perception des innovations pr´eventives [Weinstein, 1982], chacun pensant ˆetre moins expos´e que les autres aux risques et se sentant plus r´eceptif aux messages de pr´evention. La psychologie de la d´ecision consti- tue un champ de recherche `a part enti`ere [Klein et al., 1993, Zsambok et Klein, 1996], que nous n’approfondirons pas ici.

3.4

Interactions

3.4.1 D´efinitions

Nous consid´erons comme communication interpersonnelles les actes de communica- tion entre deux individus qui m`enent `a un transfert d’information entre ces deux per- sonnes. Les communications interpersonnelles portent plusieurs noms qui recouvrent des notions diff´erentes. Ces d´efinitions sont souvent impr´ecises, tant en marketing [Godes et al., 2005] que dans les mod`eles qui utilisent indiff´eremment les termes de “rumeur” ou “bouche `a oreille”.

Le bouche `a oreille (word-of-mouth) d´esigne “la communication informelle entre parties priv´ees de l’´evaluation ou des caract´eristiques de biens et services donn´es et/ou leurs vendeurs” [Westbrook, 1987]. Au d´epart, le bouche `a oreille fait uniquement r´ef´erence aux communications en face `a face ; le terme est maintenant ´elargi aux communications `a distance (notamment par courriel et messagerie instantan´ee) [WOMMA’s Research and Metrics Council, 2005].

La rumeur a ´et´e ´etudi´ee notamment par Prasad [Prasad, 1935], puis par Louis William Stern (1902) en psychologie judiciaire ; son protocole d’´etude portait essentiellement sur la d´eformation des informations lors des ´echanges interpersonnels rapides. La rumeur est d´efinie comme une discussion publique qui comporte des hypoth`eses priv´ees [Rosnow, 1991]. Elle permet notamment de g´erer nos anxi´et´es et incertitudes [Allport et Postman, 1947, Rosnow, 1988, Rosnow, 2001].

Les bavardages ou ragots (gossips) sont par contre limit´es `a un cercle restreint, parce que le sujet discut´e n’int´eresse qu’un nombre limit´e de personnes [Gluckman, 1963].

Le buzz (litt´eralement : “bourdonnement”) est un concept marketing op´erationnel qui d´esigne la cr´eation de bouche `a oreille `a propos d’un produit. On parle de teasing pour les op´erations qui permettent d’attirer l’attention avant la commercialisation du produit. Par extension, le buzz d´esigne une forte activit´e de bouche `a oreille dans la population `a propos d’un produit ou d’une marque. [Engel et al., 1995b, Lendrevie et al., 2006].

La diff´erence entre rumeur et bouche `a oreille est finalement assez faible ; ils sont d’ailleurs fr´equemment associ´es ou intervertis dans les mod`eles (chap. 4). La diff´erence essentielle semble r´esider dans la transformation des informations qui intervient dans la rumeur (l’ajout d’hypoth`eses priv´ees). Mais ces interpr´etations ou enrichissements apparaissent dans n’importe quel processus de communication interpersonnelle, qu’il s’agisse de bouche `a oreille, ou mˆeme de communication scientifique [Bangerter et Heath, 2004]. Par exemple, pendant un entretien, un sujet nous a expliqu´e que l’iPhone fonctionne sous Windows, ce qui est gage de stabilit´e. Cette erreur manifeste (Apple, cr´eateur de l’iPhone, est un concurrent de l’entreprise Microsoft qui commercialise Windows) sera n´ecessairement pr´esente lorsque ce sujet discutera du produit. N´eanmoins, cette transformation du message original sera limit´ee par l’intervention dans la chaine d’individus qui ont acc`es `a la v´eritable information. La diff´erence essentielle entre rumeur et bouche `a oreille est donc la possibilit´e de v´erifier l’information. Par exemple, des rumeurs ont r´ecemment port´e sur l’attentat du 11 septembre contre les Etats-Unis [Galam, 2003], rumeurs qui ne peuvent ˆetre v´erifi´ees par personne dans la population. Par contre, une vid´eo qui semblait prouver que les t´el´ephones portables ´emettent suffisamment d’ondes pour transformer du ma¨ıs en pop-corn a ´et´e ´et´e d´ementie en quelques jours, puisque chacun pouvait reproduire l’exp´erience.

Par simplicit´e, nous utiliserons indiff´eremment les termes “communication interper- sonnelle” et “bouche `a oreille”.

3.4.2 Interactions informationnelles informelles

L’ˆetre humain consacre beaucoup de temps `a discuter de fa¸con informelle, en bu- vant un caf´e, pendant les repas ou les trajets. Ces discussions peuvent ˆetre en face

3.4. INTERACTIONS 53 `

a face (repas, trajets, caf´e, r´eunions...) ou `a distance (t´el´ephone, messagerie instan- tan´ee par Internet, courrier papier ou ´electronique). En France, les enquˆetes sur les temps sociaux quantifient un temps moyen de sociabilit´e d’une heure par jour en- viron3 [Pronovost, 2005, p. 79]. De mˆeme que les singes passent plus de temps `a

s’´epouiller mutuellement que n´ecessaire, le langage ne sert pas uniquement `a trans- mettre de l’information ; il joue un rˆole social et permet de maintenir une coh´erence de groupe [Dunbar, 1996]. Les gens abordent des sujets vari´es qui peuvent par exemple toucher `a l’actualit´e, `a leurs r´ecentes exp´eriences ou `a leurs projets. La plupart du temps, il semble que ces discussions informelles visent davantage `a parler pour l’acte social lui-mˆeme plutˆot que pour transmettre une information ou satisfaire une autre motivation. N’importe quel sujet r´ecent pr´esent `a l’esprit du sujet est pertinent pour remplir ce but.

Pendant ces discussions vari´ees, on parle parfois de produits ou d’innovations. Une ´etude men´ee par Carl quantifie qu’environ un tiers des dialogues portent sur un produit [Carl, 2006b] ; cette proportion varie selon le canal (face `a face, t´el´ephone, internet) utilis´e pour la communication [Carl, 2006b, Baym et al., 2004] : on parle plus facilement d’un produit en face `a face ou par t´el´ephone que par messagerie instantan´ee ou courrier. La fr´equence des discussions portant sur des innovations d´epend ´egalement de la relation qui lie les interlocuteurs [Carl, 2006b] : on discute plus souvent de produits avec des camarades qu’avec des amis proches. Les discussions informelles portent souvent sur les innovations quand celles-ci constituent un probl`eme de soci´et´e ; c’est par exemple le cas dans les ´etudes de terrain sur le VIH au Malawi [Kaler, 2004], ou sur la contraception au Kenya [Rutenberg et Watkins, 1997]. Enfin, mˆeme si ces discussions sont informelles et portent sur de nombreux sujets, les th`emes abord´es doivent ˆetre corr´el´es aux int´erˆets des interlocuteurs. Par exemple, pendant une s´erie d’entretiens portant sur des fournisseurs d’acc`es internet fran¸cais, il est apparu que le grand public parle rarement de ces sujets sauf s’il rencontre un probl`eme (´emission proactive) ou recherche un fournisseur internet (recherche d’information).

Notons qu’une innovation observable devient plus naturellement un sujet de conversa- tion. Lorsqu’une personne utilise un t´el´ephone r´ecent pendant un repas, il est probable qu’un des membres de l’assistance lui parle de ce mod`ele r´ecent. L’un des objectifs d’une institution est de parvenir `a investir ce temps de discussion en faisant de son in- novation un sujet de discussion. C’est d’ailleurs un objectif du marketing ´ev`enementiel [Lendrevie et al., 2006] : cr´eer un ´ev`enement rattach´e `a un produit, pour motiver les gens `a parler de l’´ev`enement, et potentiellement du produit.

Pendant une recherche active d’information, il est possible qu’un adoptant potentiel contacte un interlocuteur hors de ses contacts habituels pour obtenir de l’information. C’est le cas quand une femme Kenyane se rend dans un dispensaire pour recevoir de l’information. Une forte curiosit´e suffit `a contacter des personnes inconnues ; un sujet 3. Ce temps de sociabilit´e inclut les conversations (une vingtaine de minutes en moyenne) et de visites et r´eceptions (environ une demi-heure)

nous a expliqu´e avoir ´et´e questionn´e sur sa nouvelle voiture `a motorisation hybride par plusieurs inconnus rencontr´es sur des parkings de supermarch´e.

3.4.3 Emission d’information proactive

Observations secondaires sur les motivations `a parler d’un objet

En marketing, on consid`ere g´en´eralement qu’un consommateur parle spontan´ement d’un produit s’il est fortement satisfait ou dissatisfait [Anderson, 1998]. Cela suppose que le consommateur forme d’abord une attente pour le produit, re¸coit de l’informa- tion par l’exp´erience, compare son ´evaluation actuelle avec l’information pr´ec´edente, et parle du produit s’il en est tr`es satisfait (attentes totalement satisfaites ou d´epass´ees) ou s’il est d´e¸cu (les caract´eristiques attendues ne sont pas remplies). Au del`a de cette satisfaction, plusieurs cat´egorisations des causes de bouche `a oreille n´egatif ont ´et´e pro- pos´ees, discrimin´ees en fonction de l’intention du sujet [Huefner et Hunt, 2000] ou des fonctions de cette communication [Sundaram et al., 1998]. Le bouche `a oreille n´egatif peut ˆetre vu comme une forme de vengeance indirecte (faire baisser les revenus du vendeur), ou une forme d’altruisme ; dans ce dernier cas, le but de la communication est de pr´evenir l’interlocuteur des d´efauts d’un produit, afin de lui ´eviter de souffrir des mˆemes inconv´enients que le sujet [Dichter, 1966]. Notons que ces constats portent sur l’´emission d’information quand le sujet a adopt´e un produit, `a l’exclusion de l’´emission d’information avant adoption.

Par ailleurs, on sait qu’un produit qui cr´ee de la surprise provoque du bouche `a oreille positif [Derbaix et Vanhamme, 2003]. On sait aussi que l’on parle d’un objet pour augmenter son prestige social, ce qui est particuli`erement le cas si l’innovation est `

a la mode ou peut r´ev´eler un signe de prestige social. On peut ´egalement inciter un consommateur `a parler spontan´ement d’un produit, ce qui a pour effet d’augmenter de fa¸con notable sa propension `a en discuter [Carl, 2006a].

La probabilit´e de parler d’un produit varie selon le canal (face `a face, t´el´ephone, internet) utilis´e pour la communication [Carl, 2006b, Baym et al., 2004] : on parle plus facilement d’un produit en face `a face ou par t´el´ephone que par messagerie instantan´ee ou courrier. La fr´equence des discussions portant sur des innovations d´epend ´egalement de la relation qui lie les interlocuteurs [Carl, 2006b] : on discute plus souvent de produits avec des camarades qu’avec des amis proches. La probabilit´e de parler d’un produit varie ´egalement en fonction des jours de la semaine [Steve Duck et al., 1991]. Il est ´egalement ´evident qu’on ne discute pas des mˆemes sujets dans tous les contextes ; les innovations tabous seront rarement discut´ees sur le lieu de travail, mais le seront avec des proches. Enfin, il semble que certains sujets aient une propension plus importante `a transmettre des informations sur des innovations que d’autres ; Rogers postule que les innovateurs et early adopters parlent plus facilement des innovations que d’autres.

3.4. INTERACTIONS 55 Observations primaires sur les motivations `a parler d’un objet

Les informations disponibles dans la litt´erature sur les motivations qui poussent `a parler d’un objet en g´en´eral (et non `a ´emettre une recommandation apr`es adoption) sont encore peu nombreuses [Cheng et al., 2006, p. 96]. Nous avons donc associ´e `a des s´eances d’entretien avec des consommateurs (5.6) un questionnaire, dans lequel nous demandions aux sujets pourquoi ils avaient parl´e spontan´ement du produit sur lequel portait l’entretien. 30 sujets ont ´et´e interrog´es sur 4 produits chacun. Ce groupe est trop r´eduit pour avoir une repr´esentativit´e quantitative, mais permet de donner quelques pistes sur les motivations qui provoquent l’´emission spontan´ee d’information. Nous retenons ici les motivations qui ont ´et´e ´enonc´ees au moins trois fois :

– l’objet int´eresse l’individu en g´en´eral, parce qu’il correspond `a sa passion, `a un int´erˆet, `a un besoin

– pour transmettre ce qui l’a marqu´e dans le v´ecu r´ecent. Ce type de communication s’assimile `a un acte social dans lequel un individu chercher `a se faire connaˆıtre, r´epondant `a la question explicite ou implicite “Comment vas-tu ?” ou “Quoi de neuf ?”. Ainsi, une m`ere avait discut´e avec des amies d’une console de jeu grˆace `

a laquelle elle avait partag´e un bon moment avec ses enfants. Un cadeau ´etant g´en´eralement source de contentement, plusieurs sujets nous ont expliqu´e avoir parl´e d’un objet qu’on leur avait offert.

– parce que le produit fera l’objet d’un achat en commun (cadeau en commun), d’une prise de risque partag´ee, ou sera utilis´e par plusieurs personnes.

– pour se le faire offrir. Plusieurs sujets nous ont dit avoir parl´e d’un produit qui les int´eresse dans l’espoir de le recevoir plus tard en cadeau par l’un des interlo- cuteurs.

– l’objet est susceptible d’int´eresser l’interlocuteur. On parle de musique `a un ami musicien, d’un nouveau produit technologique `a un ami qui s’int´eresse `a ce type de produit, etc.

– parce que l’innovation est observable. Lorsque le regard se pose sur l’objet, le sujet pense plus naturellement `a en parler. Un jeune cadre a expliqu´e qu’il vantait les qualit´es de son t´el´ephone portable `a chaque fois qu’il l’utilisait.

Nous avons ´egalement not´e les raisons pour lesquelles certains sujets n’ont pas parl´e d’un produit. Il apparaˆıt que leur certitude dans l’information qu’ils poss`edent sur un objet influence leur tendance `a parler ou non de cet objet. Par exemple, un jeune cadre nous a expliqu´e ne pas avoir recommand´e son fournisseur d’acc`es Internet `a ses coll`egues, car il a peu de recul avec cette offre, et ne souhaite pas d´egrader son image dans son cercle professionnel par une recommandation hasardeuse. Certains sujets sont d’un naturel expansif, et sont enthousiastes sur les objets de nouvelles technologies. D’autres sont au contraire r´eticents `a transmettre une information qu’ils n’ont pas v´erifi´ee eux-mˆemes. Sur le terrain, par exemple, dans le cas de la diffusion des produits contraceptifs au Kenya, cela correspondrait `a la d´emarche des femmes qui transmettent toute rumeur sur les dangers de la pilule contraceptive, tandis que d’autres se r´ev`elent plus temp´er´ees et ´evitent de propager une rumeur. Les sujets ont parfois des difficult´es `

“parce que tout le monde en parle”, ou “juste pour discuter”. Cela replace la discussion interpersonnelle sur des innovations dans le cadre g´en´eral de la sociabilisation.

3.4.4 Recherche active d’information

Observations secondaires sur les motivations `a rechercher de l’information Comme l’a ´ecrit Rogers, un agent recherche de l’information sur une innovation pour r´eduire l’incertitude sur cette innovation. Une information re¸cue par l’institution n’est pas consid´er´ee comme cr´edible, puisqu’elle provient d’une source int´eress´ee. De mˆeme, une information re¸cue par ou¨ı-dire n´ecessite une confirmation plus cr´edible pour ˆetre prise en compte. Rogers diff´erencie le besoin d’information en fonction des segments d’adoptants : un innovateur est apte `a ´evaluer soi-mˆeme l’innovation et la vraisemblance de ses caract´eristiques, tandis que les segments qui adoptent le plus tard attendent le retour d’exp´erience d’autres adoptants pour r´eduire le risque li´e `a l’adoption.

La recherche d’information par des canaux interpersonnels permet de r´ecup´erer de l’information que l’on ne peut pas ou ne veut pas v´erifier soi-mˆeme [Deutsch et Gerard, 1955]. La recherche d’information permet en quelque sorte un “apprentissage par procuration” [Bandura, 2001]. Les raisons pour ne pas collecter l’information soi-mˆeme sont nombreuses, dont :

– Rechercher l’information par soi-mˆeme serait trop coˆuteux, que ce soit en terme de temps, de risque ou d’argent, par rapport `a l’incertitude ou au risque sur le produit. On prend un risque moindre en achetant des yaourts en supermarch´es, il est donc rare que ce type de produit conduise `a une recherche d’information. Par contre, les femmes pr´ef`erent se reposer sur l’avis d’amies ayant d´ej`a pris la pilule plutˆot que de prendre le risque d’alt´erer leur sant´e en la prenant elles-mˆemes. De mˆeme, avant de s’engager pour plusieurs ann´ees avec un op´erateur de t´el´ephonie mobile, les consommateurs cherchent `a connaˆıtre les avantages et inconv´enients de chaque op´erateur.

– On ne peut pas faire cette recherche d’information soi-mˆeme : dans le cas des nouvelles technologies, de nombreuses personnes estiment n’avoir pas les connais- sances n´ecessaires pour rechercher cette information.

– On ne peut pas r´ecup´erer l’information sans exp´erience prolong´ee : r´esistance d’un produit, qualit´e d’un service apr`es-vente, possibilit´e d’avoir `a nouveau des enfants en arrˆetant la pilule. Ces informations n´ecessitent une exp´erience longue avec le produit ; seules les personnes qui ont adopt´e une innovation sont susceptibles de la connaˆıtre et de la transmettre.

– Si l’information ne peut pas ˆetre confirm´ee, notamment parce qu’il s’agit d’une ´evaluation ou d’un jugement subjectif [Festinger, 1950]. Par exemple, il est dif- ficile pour les Luo de savoir si une petite famille est pr´ef´erable `a une grande, ce qui m`enent `a de nombreuses discussions passionn´ees.

– Si l’information attendue a une caract´eristique al´eatoire, un adoptant potentiel cherche intuitivement `a ´echantillonner la population pour ´evaluer sa probabilit´e. Par exemple, un tiers des sujets interrog´es sur le choix d’un fournisseur d’acc`es

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a Internet r´ev`elent ce comportement : “ils ont tous des probl`emes, mais certains en ont plus que d’autres, il faut juste ´eviter ceux-l`a”

Observations primaires sur les motivations `a rechercher de l’information Pendant les entretiens, nous avons ´egalement demand´e aux sujets pourquoi ils avaient recherch´e de l’information. Les r´esultats principaux sont :

– par simple curiosit´e : un amateur de musique peut rechercher de l’information sur le mat´eriel r´ecent, simplement parce qu’il aime connaˆıtre et comprendre les nouveaut´es. De mˆeme, les technophiles (grand public amateur de technologie) se renseignent sur les nombreuses nouveaut´es, sans pour autant envisager de les acheter. La recherche d’information peut donc se faire par curiosit´e pure, sans intention d’achat ou d’adoption.

– afin de v´erifier si les attributs qui lui apportent de la valeur sont vraiment pr´esents dans l’innovation. En r´ealit´e, le sujet prˆete peu d’attention aux attributs qui sont secondaires pour lui ; ainsi, un sujet qui envisageait l’achat d’un iPhone d´esirait simplement v´erifier la qualit´e de la sortie vid´eo, car il envisageait son achat pour projeter ses cours par vid´eo-projecteur. Il ne pr´evoyait pas d’utiliser cet appareil pour aller sur Internet, et ne s’´etait donc pas renseign´e sur cet attribut.

3.4.5 Influence normative

Le conformisme ou la volont´e de se conformer `a la norme groupale

Le conformisme se manifeste par le fait qu’un individu modifie ses comportements, attitudes, opinions, pour les mettre en harmonie avec ce qu’il per¸coit ˆetre les compor- tements, les attitudes ou opinions du groupe dans lequel il est ins´er´e ou il souhaite ˆetre accept´e (Jean-Paul Codol4). On peut voir le conformisme comme la recherche d’ˆetre

le prototype, chacun des membres d’un groupe d´esirant incarner au mieux la norme groupale [Codol, 1975]. Le conformisme permet ´egalement d’´eviter les sanctions qui ap-