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Intégration des fractions rationnelles

8.3 Techniques de calcul

8.3.3 Intégration des fractions rationnelles

Le but de ce paragraphe est de décrire une méthode permettant de calculer l’intégrale d’une fraction rationnelle ou une primitive d’une telle fonction sur un intervalle contenu dans son en-semble de définition.

Cette technique est basée sur deux faits :

1. on peut décomposer toute fraction rationnelle en « éléments simples »

12. d’après le TVI, puisqueuest de classeC1 doncu0est continue et, ne s’annulant pas, ne change pas de signe 13. u([a, b]) = [u(a),u(b)]siuest strictement croissante et[u(b),u(a)]sinon

14. On dit queuétablit unC1-difféomorphisme du segment [a, b]sur le segment u([a, b]), de difféomor-phisme réciproqueu−1. Notons au passage que l’on déduit alors deu−1(u(x)) =xque(u−1)0(u(x)).u0(x) = 1et donc queu0(x)6= 0pour toutx, d’où la validité du raisonnement précédant le théorème.

2. on dispose de techniques permettant d’intégrer ces éléments simples.

A titre d’exemple préparatoire, nous présentons cette méthode pour le calcul d’une primitive sur l’intervalleI= ]−1,+∞[de

f(x) = x

(x+ 1)(x2+ 1).

La fonctionf est clairement continue sur l’intervalleIet l’on est donc assuré de l’existence d’une telle primitive. Nous cherchons ici à en obtenir une formule explicite.

Pour x∈I, on a

On peut trouver facilement une primitive pour chacun des termes de cette somme et on en déduit qu’une primitive def surI est

1

4ln(x2+ 1) +1

2arctanx−1

2ln(x+ 1). Décomposition en éléments simples

Le lecteur perplexe doit ici se demander d’où sort la décomposition (8.4) qui fait le travail demandé d’une façon aussi miraculeuse et s’il est possible de trouver de telles décompositions pour n’importe quelle fraction rationnelle. La réponse tient en le résultat suivant que nous admettons15. Définition 8.19 Les éléments simples pour les fractions rationnelles à coefficients réels sont les fonctions de l’un des trois types suivants :

1. Les monômes, de la forme S(x) =λ.xn oùλest un réel non nul, n un entier naturel. On prend la convention usuelle quex0 est la fonction constante égale à1.

2. Les éléments de première espèce de la formeS(x) =(x+a)α n oùαest un réel non nul, aun réel quelconque,nun entier naturel >0.

3. Les éléments de deuxième espèce de la forme S(x) = (x2+b.x+c)β.x+γ n où (β, γ) est un couple de réels non tous deux nuls,b, c deux réels quelconques vérifiantb2−4c < 0,n un entier naturel>0.

SiS1 etS2 sont deux éléments simples et si, pour toutxdans l’intersection de leurs domaines de définition,S1(x) =S2(x), alorsS1etS2 sont du même type et leurs nombres caractéristiques (λ, n pour les monômes, α, a, npour les éléments de première espèce, β, γ, b, c, n pour ceux de seconde espèce) sont égaux.

Théorème 8.20 (Décomposition en éléments simples) Soitf = ND une fraction rationnelle avec N et D deux fonctions polynomiales, D n’étant pas identiquement nulle. Il existe alors un unique ensemble d’éléments simples{Sk(x), k= 1, . . . , K} tel que

1. Dans l’exemple introductif, la famille des éléments simples associés à f comporte deux termes :

15. Il sera démontré dans le cours sur les polynômes et fractions rationnelles.

S1 est de première espèce avec n = 1, α =−12, a = 1 et S2 est de seconde espèce avec n= 1,β =γ= 12, b= 0et c= 1. La partie unicité du théorème signifie que si l’on dispose d’un ensemble{S˜k(x), k= 1, . . . ,K}˜ d’éléments simples tels que

f(x) =

K˜

X

k=1

k(x)

pour tous xtels que l’expression précédente à un sens alors le nombreK˜ de ces éléments simples vaut2, et,quitte à renuméroter,

S1(x) = ˜S1(x)et S2(x) = ˜S2(x).

2. Pour mener à bien une décomposition d’une fraction f = ND, nous pouvons ajouter les précisions suivantes

(a) Si le degré deN est inférieur au degré deD, il n’y aura aucun monôme dans la décom-position en éléments simples def. On peut toujours se ramener à ce cas en effectuant une division euclidienne deN parD. Par exemple, si

N(x) =x4−x3−x2−2et D(x) = 1 +x+x2+x3= (x+ 1)(x2+ 1), en effectuant la dite division Euclidienne, on obtient

N(x) = (x−2)D(x) +x et donc

f(x) =x−2 + x (x+ 1)(x2+ 1)

Comme nous avons déjà effectué la décomposition en éléments simples de cette dernière fraction, on obtient alors la décomposition def

f(x) =x−2 + −12 x+ 1 +

1 2x+12 x2+ 1

(b) Si le degré deN est inférieur au degré deD et siD est sous forme factorisée D(x) =P1n1. . . PKnK.Qm11. . . QmLL

avec la convention usuelle que si l’entierK (resp.L) vaut 0, il n’y a aucun polynôme de typeP (resp.Q) où

i. lesK polynômesPk (tous distincts) sont de la forme Pk(x) =x+ak

pour un certain réelak

ii. lesLpolynômesQ` (tous distincts) sont de la forme Q`(x) =x2+b`.x+c`

pour certains réelsb`,c`vérifiantb2`−4c`<0 iii. les entiers naturelsnk,m` sont tous>0.

Alors :

i. les éléments simples de première espèce de la décomposition def sont de la forme S1,k,n(x) = αk,n

Pk(x)n

pour des réelsαk,n6= 0et certains exposantsn >0, inférieurs ànk. Il y a donc au plusn1+n2+· · ·+nK tels éléments simples.

ii. les éléments simples de seconde espèce de la décomposition def sont de la forme décomposition de f relève du point précédent. Nous savons donc a priori qu’il existe des réelsα1, β1 etγ1 tels que

f(x) = α1

P1(x)+β1.x+γ1

Q1(x) .

Il ne reste plus qu’à faire un travail d’identification16de ces coefficients pour nous permettre de retrouver la décomposition de l’introduction.

4. Exercice résolu en cours.Donner la forme de la décomposition en éléments simples de f(x) = x2+ 3

Il reste maintenant à identifier ces 8 coefficients. Si nous mettons au même dénominateur le membre de droite et identifions le numérateur (de degré≤ 7) ainsi obtenu avec le nu-mérateur du membre de gauche, nous obtenons un système de 8 équations linéaires à 8 inconnues.

5. Toute fraction rationnelle peut, au moins théoriquement, se mettre sous la forme traitée précédemment : il suffit pour cela de factoriser le dénominateur en utilisant la connaissance des racines réelles et complexes conjuguées de ce polynôme. Par exemple, nous avons

1

La décomposition en éléments simples de cette fraction est donc de la forme 1

16. Dans ce cas précis, en réduisant le membre de droite au même dénominateur et en identifiant les coefficients du numérateur, on obtient queα1+γ1= 0,β1+γ1= 1etα1+β1= 0

Il y a donc quatre coefficients à trouver. Nous pouvons réduire le nombre de ces coefficients par la remarque que la fonction à gauche est paire et l’on a donc

1

et l’on a donc une « autre » décomposition de 1+x14 en éléments simples. Comme nous savons que cette décomposition est unique, on en déduit que

β =−β+ etγ+

Nous n’avons donc plus que deux inconnues 1

Monômes et éléments de première espèce Ces éléments ne posent guère de problèmes : nous savons comment

1. calculer une primitive d’un monômef(x) =λ.xn par la formuleF(x) = n+1λ xn+1

2. calculer une primitive d’un élément de première espèceS1(x) = (x+a)α n par l’une des for-mules

αln|x+a|sin= 1 ou α 1−n

1

(x+a)n−1 sin >1

et donc nous savons, dans tous les cas, calculer une primitive d’un élément simple ou d’un monôme.

Éléments de deuxième espèce On peut aussi donner des formules pour les primitives des éléments de deuxième espèce mais il y a plus de calculs que dans le cas précédent.

1. D’abord, on peut démontrer17que pour calculer une primitive d’un élément simple du type β.x+γ

(x2+b.x+c)n

17. Voici la justification de cette assertion : une primitive de β.x+γ

(x2+b.x+c)n (cette fonction est continue surR, le dénominateur ne s’annulant jamais) est

avec∆ =b2−4c <0, il suffit de savoir calculer des primitives de

3. Maintenant, montrons que l’on peut toujours donner une formule élémentaire pour une primitive deS2,0,n= (1+x12)n. Notons la primitive deS2,0,n s’annulant en0.

(a) Le casn= 1 est bien connu, on aΣ1(x) = arctan(x).

4. Nous venons donc de montrer que l’on peut toujours donner une formule pour une primitive d’un élément simple de seconde espèce, quitte à faire des calculs d’une certaine complexité.

Faire un de ces calculs à la main peut s’avérer difficile mais les mécanismes présentés peuvent s’implémenter en machine.

5. Exercice résolu en cours.Donner une primitive sur Rde 1 pour certaines constantesβ0etγ0dont l’expression fait intervenirβ, γ, bet

−∆. La continuation du calcul dépend alors de la connaissance de primitives de (1+t12)n et (1+tt2)n.

On a 6. Exercice résolu en cours.Donner une primitive sur Rde

1

Grâce à la décomposition en éléments simple que nous avons donnée de 1+x14, on voit qu’il suffit de calculer une primitiveS(x)de

x+√ 2 x2+√

2x+ 1 La dérivée du dénominateur est2.x+√

2, ce qui conduit à écrire x+√

On a donc Lorsquex→ ∞, leln de l’expression précédente tend vers0, la premièrearctantend vers

π