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Insertion et identification de dislocations à l’échelle atomique

2.2 Outils de simulation et de modélisation

2.2.3 Insertion et identification de dislocations à l’échelle atomique

Des méthodes particulières doivent être utilisées pour insérer des dislocations dans un cris- tal parfait. Premièrement, il est impossible d’introduire une seule dislocation dans un cristal en condition aux limites tripériodiques. La dislocation introduirait un défaut d’empilement aux li- mites de la boîte. Par exemple, pour une dislocation coin, les nombres de plans atomiques dans la direction perpendiculaire au vecteur de Burgers de part et d’autre de la limite de boîte sont dif- férents. Ensuite, une dislocation crée un champ de déformation dans la cellule. Il est nécessaire de prendre en compte ces déformations pour que la contrainte dans la cellule de simulation soit nulle. Plusieurs solutions peuvent être alors envisagées :

— La première consiste simplement à ne pas prendre de conditions aux limites périodiques et à modéliser une dislocation dans un cylindre ou un parallélépipède dans le vide. Il est alors possible de relaxer totalement les positions des atomes en accord avec le champ de défor- mation induit par la présence de la dislocation. Nous n’avons pas considéré cette solution dans notre étude.

— Il est possible d’introduire une unique dislocation droite dans une cellule de simulation avec deux surfaces libres et des conditions aux limites périodiques dans deux des trois directions principales. Il sera nécessaire de prendre en compte l’interaction de la dislocation avec ses images périodiques pour annuler les contraintes résiduelles. Nous avons utilisé cette solu- tion pour l’étude du glissement de dislocations droites dans le chapitre 5.

— Enfin, on peut introduire un dipôle de dislocations (deux dislocations de vecteurs de Burgers opposés) dans une cellule en conditions aux limites tripériodiques. Si l’on s’affranchit des surfaces libres, les interactions entre dislocations sont multipliées par la présence de deux dislocations et de leurs images périodiques dans les trois directions cristallines. Nous avons utilisé cette solution pour étudier les structures de cœur des dislocations dans le chapitre 4 et pour modéliser des paires de décrochements dans le chapitre 6.

Revenons d’abord sur l’introduction d’un dipôle de dislocations en conditions aux limites tri- périodiques. Nous avons utilisé le logiciel Babel [154] pour cette introduction. Un dipôle de dislo- cations est créé par un processus de Volterra. Les dislocations coin sont introduites en supprimant une couche de cristal (d’épaisseur égale à la norme du vecteur de Burgers des dislocations). Il n’est

CHAPITRE 2. POTENTIELS EMPIRIQUES ET MÉTHODES

FIGURE 2.2 – Réseau quadripolaire de dislocations représenté dans un plan perpendiculaire au vecteur ligne. La cellule de simulation est représentée en trait pleins et ses images périodiques en pointillés. Les vecteurs de Burgers b des dislocations sont en rouge. Le vecteur A perpendiculaire au plan de coupe est représenté en bleu.

pas nécessaire de supprimer des atomes pour créer un dipôle de dislocations vis. Babel déplace les atomes de façon à annuler les contraintes en prenant en compte les déformations élastiques créées par la dislocation. Ce processus est décrit par Bulatov et al. et Clouet et al. [155; 156]. Les atomes sont d’abord déplacés pour prendre en compte le champ de déformation²d dkl induit par le dipôle de dislocations et ses images périodiques dans le cadre de l’élasticité linéaire anisotrope. Une contrainte résiduelleσ0i j due aux déformations plastiques induites par la présence de dislo- cations subsiste dans la cellule. Une déformation homogène²klest appliquée pour annuler cette

contrainte, de sorte que :

ci j kl ³ ²d d kl − ² 0 kl ´ = 0 (2.29)

où ci j klest le tenseur des constantes élastiques. La forme de la boîte de simulation est alors légè-

rement modifiée par la déformation homogène appliquée. L’expression de cette déformation est donnée par la formule suivante [156] :

²0

i j= −

biAj+ bjAi

2S (2.30)

Dans cette expression, b est le vecteur de Burgers des dislocations. A est le vecteur perpendicu- laire au plan de la coupe réalisée pour introduire les dislocations. b et A sont représentés sur la figure 2.2. S est la surface des plans perpendiculaires au vecteur ligne des deux dislocations. On peut ajouter que les dislocations sont introduites de façon à former un réseau quadripolaire. Un tel réseau de dislocation permet de minimiser les interactions élastiques [157]. Un réseau quadripo- laire est représenté sur la figure 2.2. On peut aussi noter que Babel est à l’origine destiné à l’étude de cristaux contenant un seul élément chimique. Ainsi pour les dipôles de dislocations coin, il faut faire attention à la position des dislocations que l’on définit, de telle sorte que la tranche d’atomes supprimée par Babel préserve la stœchiométrie du cristal d’UO2et que les cœurs des dislocations

aient la stœchiométrie souhaitée. Le cas échéant, il est possible d’ajouter ou de supprimer ma- nuellement des atomes au cœur des dislocations.

Dans le chapitre 5, nous considérerons des boîtes de simulation contenant une seule disloca- tion et deux surfaces libres. Ces configurations ne sont pas créées à l’aide de Babel mais manuel- lement. Des déplacements atomiques simples sont réalisés pour produire les dislocations et les contraintes résultantes sont alors relaxées par minimisation d’énergie sous LAMMPS.

Nous aurons également besoin dans nos simulations de caractériser précisément la position des dislocations dans les cellules. La méthode la plus simple pour réaliser cette identification consiste à calculer la fonction de désaccord entre deux plans atomiques A et B parallèles au plan de glissement de part et d’autre de la dislocation [56]. La fonction de désaccord est définie comme

CHAPITRE 2. POTENTIELS EMPIRIQUES ET MÉTHODES

FIGURE2.3 – Fonction de désaccord d’une dislocation de vecteur de Burgers b colinéaire à l’axe x glissant dans le plan perpendiculaire à l’axe y. La sous-figure (a) schématise le calcul de cette fonction et la sous- figure (b) la représente. D’après Hull et Bacon [54].

la différence∆u entre les fonctions de déplacements atomiques u(A) et u(B) dans la direction du vecteur de Burgers en fonction de la position le long de la direction du glissement. Le principe du calcul du désaccord est représenté pour une dislocation coin sur la figure 2.3. La fonction de désaccord peut alors être ajustée par une fonction arc-tangente. La position et la largeur de cette fonction donneront la position de la dislocation et l’extension de son cœur dans la direction du glissement. Dans le dioxyde d’uranium, nous calculons ces fonctions de désaccord uniquement sur le sous-réseau cubique à faces centrées des atomes d’uranium, car l’amplitude de déplace- ment des atomes d’oxygène au cœur peut être plus importante et ainsi la fonction de désaccord peut être plus difficile à calculer sur ce sous-réseau.

D’autres méthodes permettent de déterminer la position des dislocations et de caractériser leur cœur. Les cartes de Vitek [158] permettent de représenter l’amplitude des déplacements rela- tifs dans la direction du vecteur de Burgers de colonnes atomiques voisines pour les dislocations vis. Le tenseur de Nye donne une représentation continue des dislocations et permet de calculer une densité de vecteur de Burgers [159] pour localiser et caractériser le cœur de la dislocation. Ces méthodes sont souvent utilisées lorsque les cœurs de dislocations sont étendus ou dissociés. La méthode DXA (Dislocation eXtraction Analysis) [160], basée sur une tesselation de Delaunay du réseau cristallin, permet d’identifier rapidement les dislocations quelle que soit leur nature (coin, vis, mixtes, boucles). Cette méthode ne permet cependant pas de caractériser précisément les po- sitions des dislocations. Elle est plus adaptée à la visualisation du mouvement des dislocations en dynamique moléculaire [10] ou la caractérisation d’un réseau de dislocations [68]. Dans nos simulations, nous nous contenterons de calculer des fonctions de désaccord pour leur simplicité.

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