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I. CHAPITRE PREMIER

I. 1. Influence par le Magistère de l’Église

Dès lors, il est nécessaire, dans un premier temps, de relever où et quand le Magistère - qui « exerce son autorité au nom de Jésus-Christ » et qui seul a « la charge d’interpréter authentiquement la Parole de Dieu écrite et transmise » (Dei Verbum 10) - s’est prononcé de façon « authentique » quant au sens et à l’interprétation des Écritures « dans les matières de foi ou de mœurs qui font partie de l’édifice de la doctrine chrétienne » (Concile de Trente, Décret sur l’édition de la Vulgate et l’interprétation de l’Écriture)22. Car alors, « il n’est permis à personne d’interpréter cette sainte Écriture contrairement à ce sens ni non plus contrairement au consentement unanime des Pères » (Concile Vatican I, Constitution

dogmatique Dei Filius)23.

Il s’agit donc de relever les cas où

- les évêques ensemble avec le pape ont exercé leur Magistère ordinaire et universel, tel que défini dans la Constitution dogmatique Dei Filius du Concile Vatican I (cf. aussi la

Constitution dogmatique Lumen Gentium 25, §2 de Vatican II)24,

- les évêques ensemble avec le pape réunis en concile oecuménique ont exercé leur Magistère extraordinaire, tel que défini dans la Constitution dogmatique Lumen Gentium de Vatican II (également LG 25 § 2),

- le pape, qui à lui seul peut exercer le Magistère extraordinaire, s’est prononcé « ex cathedra » (cf. la Constitution dogmatique Pastor Aeternus du Concile Vatican I ainsi que

la Constitution dogmatique Lumen Gentium 18 de Vatican II)25.

Or, jusqu’à présent, le Magistère ordinaire et universel n’a encore jamais fixé l’interprétation d’un texte scripturaire26.

22Cf. Dumeige, Foi Catholique (154). - Cf. également L’interprétation de la Bible dans l’Église, p.

92.

23

Cf. Dumeige, Foi Catholique (157) ; cf. aussi Gilbert, Maurice (2002). « Textes bibliques dont l’Église a défini le sens ». In : Poffet, Jean-Michel (dir.). L’autorité de l’Écriture. Paris : Cerf. - (Lectio Divina, Hors-série), p. 73-75 : dans son article, le P. Gilbert s’attarde plus longuement sur le fait que ni le Concile de Trente, ni le Concile Vatican I ne définissent ce qu’il faut comprendre par « sens » des Écritures.

24« Constitution dogmatique ‘Dei Filius’ », cf. Dumeige, Foi Catholique (103).

25« 1re Constitution dogmatique ‘Pastor Aeternus’ », cf. Dumeige, Foi Catholique (466-485). 26

Le Magistère extraordinaire du Concile de Trente a défini le sens de

Rom 5, 12 aux canons 2 et 4 sur le péché originel27,

Jn 3, 5 au canon 2 sur le baptême28,

Mt 26, 26-29 ; Mc 14, 22-25 ; Lc 22, 19-20 ; 1Co 11, 24-25 au chapitre premier de

l’exposé dogmatique sur l’eucharistie29,

Jn 20, 22-23 au canon 3 sur la pénitence30,

Jn 20, 23 et Mt 18, 18 au canon 10 sur la pénitence31,

Jc 5, 14-15 au canon 1 sur l’extrême-onction32,

Lc 22, 19 et 1Co 11, 24 au canon 2 sur le sacrifice de la messe33.

Il apparaît en effet que seul le Concile de Trente a défini le sens de certains textes bibliques ; ceux-ci sont soit mentionnés dans le canon même pour appuyer l’argumentation de l’affirmation dogmatique (Jn 3, 5 ; Jn 20, 22s et Mt 18, 18; Rom 5, 12 ; Jc 5, 14s), soit repris dans l’argumentation dans leur sens littéral (Mt 26, 26-29// ; Lc 22, 19s avec 1Co 11, 24s). Seul Jn 3, 5 est repris « dans son sens obvie », pour Mt 26, 26//, il s’agit probablement du sens littéral. Les deux références à Rom 5, 12 servent, à l’instar des autres mentions de versets bibliques cités ci-dessus à l’argumentation des canons en question, et « orientent vers le sens plénier du texte »34.

Cependant, en ce qui a trait à Rom 5, 12, la polémique contre Érasme à l’arrière-plan des Décrets du Concile de Trente sur le péché originel, concerne la traduction même de ἐφ ᾧ dans ce verset. C’est en effet dans cette locution que les Pères latins - contrairement aux Grecs - voient principalement la doctrine du péché originel affirmée, cette locution qu’ils

lisent depuis toujours « in quo (omnes peccaverunt) » (« en qui (tous ont péché )) »35. Cette

27Cf. Dumeige, Foi Catholique (276) ; (278). 28 Cf. Dumeige, Foi Catholique (693). 29 Cf. Dumeige, Foi Catholique (757). 30 Cf. Dumeige, Foi Catholique (838). 31 Cf. Dumeige, Foi Catholique (828). 32Cf. Dumeige, Foi Catholique (877). 33

Cf. Dumeige, Foi Catholique (777) et Gilbert, Textes bibliques, p. 88.

34Cf. Gilbert, Textes bibliques, p. 78-92 où le P. Gilbert, dans une analyse très pointue, discute la liste

des versets retenus. - En outre, il est important de voir que le Concile de Trente s’exprime pour chacun des versets retenus uniquement sur un aspect de ce passage biblique, sans en faire une exégèse

complète.

35

Cf. Lyonnet, Stanislas (s.d.). « Le péché originel en Rom 5, 12 : l’exégèse des Pères grecs et les Décrets du Concile de Trente » [en ligne], (dernière consultation le 24/04/2015) https://www.books. google.lu/ books ?id=HJI1rlKMPilC, p. 5-6. En fait, les différences de lecture entre les Grecs et les

traduction revient en effet à déterminer le verbe « peccaverunt » par « in quo ». La finale de Rom 5, 12, traduite ainsi, signifie donc que tous les hommes, petits et grands, participent au

péché d’Adam36. - Néanmoins, La Bible : traduction officielle liturgique (2013), traduction

pourvue de la recognitio, présente pour Rom 5, 12: « Nous savons que par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et que par le péché est venue la mort; et ainsi, la mort est

passée en tous les hommes, étant donné que tous ont péché »37.

Les définitions et argumentations du Magistère et du Concile de Trente en l’occurrence n’ont donc pas d’incidence sur la traduction des versets énumérés ci-dessus.

Enfin, aucun pape ne s’est à ce jour prononcé ex cathedra sur la traduction d’un verset biblique38.

Latins concernent la traduction de ἐφ ᾧ et elles portent également sur le sens donné au verbeἥµαρτον. Sur cette discussion, cf. Lyonnet, Décrets, p. 6. - Cf. aussi Lyonnet, Stanislas (1957). « Le péché originel et l’exégèse de Rom V, 12-14 ». In : Huby, Joseph. Saint Paul Épître aux Romains. Paris : Beauchesne. - (Verbum Salutis), p. 521-557, surtout aux p. 523-540 sur Rom 5, 12.

36Cf. Lyonnet, Décrets, p. 5.

37C'est nous qui soulignons ; La Bible : traduction officielle liturgique : texte intégral (2013). Paris :

Mame - appelée désormais Bible de la Liturgie (2013).

38

Cf. Schatz, Klaus (1985). « Welche bisherigen päpstlichen Lehrentscheidungen sind ‘ex

cathedra’ ? : Historische und theologische Überlegungen ». In : Löser, Werner, Lehmann, Karl, Lutz- Bachmann, Matthias (Hrsg.) (1985). Dogmengeschichte und katholische Theologie. Würzburg : Echter, p. 404-422.