Pâte de ciment
III 3.2 Paramètres mécaniques de la matrice de C-S-H
III.6 Applications et validations du modèle : conditions saturées
III.6.3. Influence de la forme des inclusions sur la pâte CO
On se propose ici détudier linfluence de la forme des inclusions sur la réponse du modèle. On souhaite évaluer à quel point lhypothèse initiale qui consiste à modéliser les inclusions (hydrates + porosité) par des sphères affecte les résultats du modèle. Une étude similaire a été conduite par (Stora 2007) sur les paramètres mécaniques dune pâte de ciment. Il sagit dune microstructure de type matrice/inclusions, le C-S-H jouant le rôle de matrice et les grains de ciment anhydre, les autres hydrates et la porosité jouent eux le rôle dinclusions. Sur la base des résultats obtenus nous proposons dinvestiguer linfluence de la forme des inclusions supposées ellipsoîdales non seulement sur les paramètres mécaniques mais aussi sur les paramètres hydromécaniques (coefficient et module de Biot aussi bien à léchelle des couches interne et externe quà celle de la pâte de ciment).
III.6.3.1 Paramètre morphologique
Afin de quantifier de façon appropriée linfluence de la forme des inclusions, indépendamment de leur taille, (Stora et al. 2006; Stora 2007) proposent danalyser une inclusion j ellipsoîdale en considérant son volume Vj et sa surface Sj tel que :
142
= ç ÷æ öè ø
j j
V b
f a
S a (3.115)
b / a=a étant le rapport daspect de linclusion. On définit ensuite le paramètre morphologique V en posant (Stora et al. 2006) :
1
j
j eq
V
V = S R (3.116)
avec Req le rayon de la sphère équivalente ayant le même volume que linclusion considérée.
Dans les cas particuliers dune inclusion sphérique par exemple, il vient V =1, dans le cas dun disque (aÆ0) ou encore dune aiguille (aÆ ¥), on a V =0. Ce paramètre morphologique présente lavantage de varier entre 0 et 1. Moins la forme de linclusion est proche dune sphère, plus le paramètre morphologique tend vers 0. Pour ce cas détudes, le paramètre le plus utilisé dans la littérature reste le rapport daspect a (Deudé et al. 2002; Dormieux et al. 2006). Mais pour des raisons pratiques nous avons préféré utiliser comme dans (Stora et al. 2006) le paramètre morphologique V car cela nous permet danalyser simultanément sur une même courbe, linfluence des formes prolates et oblates sur un paramètre donné. La relation qui existe entre le classique rapport daspect a et le paramètre morphologique V dans les deux cas (formes prolate et oblate) est illustrée sur les Figure 3.21 et Figure 3.22.
Figure 3.21 : Evolution du paramètre morphologique en fonction du rapport daspect a dans le cas dune forme oblate.
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
0,00 0,20 0,40 0,60 0,80 1,00
Formes oblates143
Figure 3.22 : Evolution du paramètre morphologique en fonction du rapport daspect a dans le cas dune forme prolate.
III.6.3.2 Calibration de la forme des hydrates
On procède ici à une étude paramétrique des effets de la forme de toutes les inclusions sur les paramètres mécaniques et hydromécaniques. Il sagit dans un premier temps de la portlandite, de lettringite et de lAFm à léchelle des couches interne et externe puis à léchelle supérieure de la pâte de ciment. Les formes de la portlandite et de lAFm qui sont décrites dans la littérature sous formes de plaquettes hexagonales ou prismatiques vont être assimilées à des formes oblates tandis que celle de lettringite décrite sous forme daiguille va être assimilée à une forme prolate. Il faut souligner que cest une hypothèse forte puisquil ya très peu de chance que toutes les inclusions (de portlandite par exemple) aient la même forme.
On commence par faire varier dans les couches interne et externe le paramètre morphologique de la portlandite, et ceci en gardant constants et égaux à 1 (les autres inclusions sont considérées sphériques) ceux des autres hydrates en suivant les évolutions du module dYoung, du coefficient de Biot et du Module de Biot de la couche en question. On remonte par la suite naturellement à léchelle de la pâte de ciment. On poursuit lopération pour lettringite et lAFm. On montre sur la Figure 3.23 lévolution du rapport entre le module dYoung E et le module dYoung correspondant à des inclusions considérées toutes sphériques que lon note Esph. On peut aisément remarquer que la forme des hydrates ne modifie pratiquement pas le résultat obtenu lorsque toutes les inclusions sont considérées sphériques puisque le rapport varie entre 0.997 et 1.004, et ceci aussi bien pour les couches interne et externe que pour la pâte de ciment. On peut noter que globalement les formes oblates aussi bien que les formes prolates tendent à augmenter les effets des inclusions.
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
1 101 201 301 401
Formes prolates
144
Figure 3.23 : Evolution du rapport E / E en fonction du paramètre morphologique des hydrates pris sph séparément.
On constate une diminution du module dYoung du matériau lorsque les inclusions ont un module dYoung inférieur à celui de la matrice. Par contre on observe une augmentation du module dYoung du matériau lorsque le module dYoung des inclusions est supérieur à celui de la matrice.
III.6.3.3 Forme des pores
On procède ici à la même analyse, mais cette fois-ci sur la forme des pores en considérant toutes les autres inclusions sphériques. Sur la Figure 3.24 on présente la variation du rapport
( )
sphE z / E en fonction du paramètre morphologique z , lorsque les pores sont considérés comme des formes oblates (courbes en bleu) et lorsquils considérés comme des formes prolates (courbes en rouge). A première vue, on constate une influence plus marquée lorsque les pores sont considérés de forme oblate que lorsquils sont considérés de forme prolate. De plus si on ne sintéresse par exemple quaux courbes en bleu, on constate que linfluence est dautant plus importante pour une microstructure que lorsque la porosité totale est plus élevée. Ainsi on peut voir que pour un même rapport daspect le rapport E
( )
z / Esph est systématiquement plus proche de 1 dans le cas de la couche interne (fint =0 14. ) que dans le cas de la couche externe(
fext =0 56 . L « erreur » faite sur lestimation des paramètres macroscopiques en considérant .)
les pores sphériques sur le module dYoung par exemple est croissante avec la porosité totale. Un autre aspect quil est intéressant de souligner sur cette figure est le fait que dans le cas des formes
0,990 0,993 0,995 0,998 1,000 1,003 1,005 1,008 1,010
0,00 0,20 0,40 0,60 0,80 1,00
E/Esph
z
CH (pâte de ciment) CH (couche externe) CH (couche interne) Aft (pâte de ciment) Aft (couche externe) Aft (couche interne) Afm (pâte de ciment) Aft (couche externe) Afm (couche interne)
145
oblates, lorsque le paramètre morphologique z tend vers 0, le rapport E
( )
z / Esph lui aussi tend vers 0, c'est-à-dire que le module dYoung devient nul (Stora 2006). Cela est dû au fait quen dessous dune certaine valeur du paramètre morphologique les formes oblates se rapprochent plus de la forme de disques infinis, alors que les prolates sont sous forme daiguilles. Certains auteurs assimilent dailleurs les fissures à des formes oblates avec un rapport daspect a=0 001 . (Shao et al. 2005) ce qui correspond à z =0 21. . Le module dYoung que lon a estimé en considérant les pores sphériques est de 20.49GPa. La valeur expérimentale est Eexp =17GPa. Le rapport E / Eexp sph est donc égal à 0.829 et correspond si lon considère exclusivement des pores de formes oblates, à un paramètre morphologique z =0 74. (a =0 90. ) ou si lon considère exclusivement des pores de formes prolates à z =0 6. (a =4 62. ). Il faut noter quon peut aussi envisager de représenter une moitié de la porosité par des formes oblates et lautre moitié par des formes prolates (Stora et al. 2006), mais cette option na pas été choisie dans cette étude.Figure 3.24 : Evolution des modules dYoung de la couche interne, de la couche externe et de la pâte de ciment en fonction du paramètre morphologique des pores.
Les Figure 3.25 et Figure 3.26 qui montrent respectivement lévolution des coefficient et module de Biot normalisés b
( )
z /bsph et M( )
z / Msph en fonction du paramètre morphologique confirment à leur tour linfluence beaucoup plus marquée des formes oblates sur les paramètres macroscopiques que les formes prolates. Contrairement au module dYoung, lasphéricité des pores a systématiquement tendance à augmenter le coefficient de Biot, jusquà environ 3.7 foisbsph.
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
0,00 0,20 0,40 0,60 0,80 1,00
E/Esph
z
Oblates (Couche interne) Oblates (couche externe) Oblates (pâte de ciment) Prolates (couche interne) Prolates (couche externe) Prolates (pâte de ciment)
146
Figure 3.25 : Evolution du coefficient de Biot normalisé des couches interne, externe et de la pâte de ciment en fonction du paramètre morphologique pour les valeurs de porosité suivantes : 0.148 pour la couche interne, 0.56
pour la couche externe et 0.30 pour la pâte de ciment CO.
Figure 3.26 : Evolution du module de Biot normalisé des couches interne, externe et de la pâte de ciment en fonction du paramètre morphologique pour les valeurs de porosité suivantes : 0.148 pour la couche interne, 0.56
pour la couche externe et 0.30 pour la pâte de ciment.
1,0 2,0 3,0 4,0
0,00 0,20 0,40 0,60 0,80 1,00
b/bsph
z
Oblates (couche externe) Oblates (couche interne) Oblates (pâte de ciment) Prolates (couche externe) Prolates (couche interne) Prolates (pâte de ciment)
0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
0,00 0,20 0,40 0,60 0,80 1,00
M/Msph
z
Oblates (couche externe) Oblates (couche interne) Oblates (pâte de ciment) Prolates (couche externe) Prolates (couche interne) Prolates (pâte de ciment)
147
Evidemment leffet est beaucoup plus prononcé lorsque la porosité est élevée. Les paramètres morphologiques identifiés plus haut permettant de retrouver le module dYoung expérimental auraient un effet non bénéfique puisquil éloignerait encore un peu plus le coefficient de Biot estimé du coefficient de Biot expérimental. Mais cette augmentation reste faible aussi bien pour les formes oblates que pour les formes prolates. En ce qui concerne le module de Biot lévolution est semblable à celle du module dYoung. Evidemment lorsque le module dYoung tend vers 0 (
z =0), le module de Biot correspond à celui dun milieu sans aucune rigidité, la moindre variation de pression entrainerait une variation importante de porosité (1/ MÆ ¥). Dans la pratique ceci peut être le cas dun matériau totalement fissuré, ce qui fera en partie lobjet des sections suivantes.
III.6.3.4 Conclusion sur la forme des inclusions
Nous retrouvons dans notre cas de représentation de la microstructure utilisée certains résultats (voir par exemple (Stora 2006, Bary 2011)) selon lesquels la forme des hydrates na quune faible influence sur les paramètres macroscopiques. Ceci a été mis en évidence aussi bien sur le module dYoung que sur le coefficient et le module de Biot. Lhypothèse de forme sphérique peut être donc faite sans précautions particulières. En revanche, en ce qui concerne la forme des pores, les conclusions sont plus contrastées. La forme des pores influence significativement les paramètres macroscopiques surtout lorsque ceux-ci sont approximés par des formes oblates. A partir de létude sur la pâte de ciment CO en conditions saturées, les résultats relatifs au module dYoung indiquent quil conviendrait de choisir pour les pores soit un paramètre morphologique V =0 74 . sils sont approximés par des formes oblates, ou V =0 6 lorsquils le sont par des formes . prolates. Cependant en conditions partiellement saturées, la prise en compte de lasphéricité de la porosité devient complexe. En effet la prise en compte de lépaisseur de transition de leau adsorbée entre les deux rayons de courbure est assez délicate (Rusanov 2005). Des études concernant des ellipsoïdes non saturés existent (Chateau et Dormieux 1998), mais les configurations adoptées en ce qui concernent les couches deau adsorbée ne correspondent pas à notre cas détude. Dans la suite pour des raisons de simplification, toutes les inclusions sont considérées sphériques.