Pâte de ciment
III 3.2 Paramètres mécaniques de la matrice de C-S-H
III.4 Aspects hydriques du modèle
III.4.1 Etat de leau dans la porosité
Plusieurs études ont mis en évidence linfluence de létat de leau sur les propriétés macroscopiques des matériaux cimentaires (Powers et Brownyard 1947; Wittmann 1968; Bazant 1972). La description multi-échelle retenue permet daborder le comportement hydrique des matériaux cimentaires sous langle de la théorie de la micro-poro-mécanique en partant dune échelle décrite à la fois par la mécanique et la physico-chimie. En particulier leau sous la forme de mince couche adsorbée sur les parois solides et qui coexiste avec leau capillaire dans les pores recevra un traitement particulier. Cette quantité deau adsorbée dépend de lhumidité relative et sa variation est en partie responsable du retrait de dessiccation dans les matériaux cimentaires. On définit le rayon capillaire rc , le plus petit rayon de pore dans lequel se forme le ménisque entre les phases liquide et gazeuse en équilibre sous leffet de la pression capillaire (Figure 3.9). Le rayon de ménisque est plus faible que le rayon capillaire et on va distinguer deux familles de pores : les pores de taille inférieure à rc sont saturés deau et les pores de plus grande taille partiellement saturés par la fine couche deau adsorbée assurant ainsi léquilibre thermodynamique. La forme des pores est sphérique. Ceci permet de prendre en compte facilement lépaisseur de la couche deau adsorbée. Des pores de forme ellipsoïdales ont été considérés dans (Dormieux et al. 2006) en conditions partiellement saturées, mais la configuration adoptée de leau liquide dans les pores ne permet pas de ladapter dans le cas de la couche deau adsorbée. En effet dans leur configuration, dans les pores, il existe une interface gaz/solide, ce qui nest pas le cas dans une situation réelle puisque une couche deau est toujours adsorbée sur les parois du squelette solide, et ceci quelque soit lhumidité relative. Néanmoins une étude paramétrique sur la forme des pores, en conditions saturées est faite par la suite afin de voir à quel point lhypothèse de forme sphérique peut être discutable.
Figure 3.9: Etat de leau dans le matériau partiellement saturé : pores saturés et pores partiellement saturés.
Squelette solide Phase gazeuse Phase liquide t
Pore saturé d eau
r<rc
Pore « frontière »
r =rc
Pore partiellement saturé
r<rc
114
Si on note t h
( )
r lépaisseur équivalente qui caractérise la couche deau adsorbée et r le rayon du ménisque deau formé, on a la relation :( )
c = + r
r r t h (3.34)
et r est donné par les lois de Kelvin et de Laplace, ce qui permet dobtenir lexpression du rayon capillaire en fonction de lhumidité relative :
( ) ( ) ( )
Epaisseur de la couche deau adsorbée
Daprès (Brunauer et al. 1938; Hagymassy et al. 1969; Baroghel-Bouny 2007) en se plaçant dans les conditions où lon peut considérer que la phase adsorbée est la seule phase présente dans le réseau poreux, il est possible, grâce entre autres, à la méthode B.E.T (Brunauer-Emmet-Teller) daccéder à différents paramètres relatifs au couple adsorbant/adsorbat. La méthode consiste à faire adsorber sur la surface du matériau, en général du diazote à sa température de liquéfaction à différentes humidités relatives. Par traitement analytique de lisotherme dadsorption (Brunauer et al. 1938), on peut déterminer la surface spécifique du squelette solide ainsi que le volume adsorbé.
Lépaisseur moyenne du film adsorbé en fonction de lhumidité relative est donnée par :
ads
( )
r lesquels les interactions adsorbant/adsorbat sont équivalentes, dun point de vue énergétique, aux interactions eau/pâte de ciment. En ce qui concerne ladsorption de vapeur deau, les premières courbes t ont été proposées par (Hagymassy et al. 1969). Par la suite (Badmann et al. 1981) à partir dun grand nombre de courbes expérimentales, valables pour une large gamme de matériaux proposent lexpression analytique suivante, adoptée dans (Bentz et al. 1998; Bary et al.2008) :
( ( ) )
=
-1 3 85 1 89 r
t . . ln ln h en Å (3.37)
115 Une caractéristique de cette expression est que
( )
Æ = ¥
r 1
hlim t hr . Une autre forme dexpression est rencontrée dans la littérature. Il sagit de celle adaptée de résultats expérimentaux de Harkins et Jura, sous la forme (Rigby 2000) :
( )
en évidence leffet quasi négligeable de la température sur la quantité deau adsorbée. Ces résultats vont dans le sens de (Gruszkiewicz et al. 2001) qui montrent à base dessais sur des minerais à adsorption multi-couches que seule la quantité deau résultant de la condensation capillaire dans les pores diminue significativement avec laugmentation de la température. Les deux expressionst1et t2 sont confrontées à des valeurs expérimentales obtenues par B.E.T. par (Baroghel-Bouny 2007) sur pâte de ciment (CO) et béton (BO) ordinaires sur la Figure 3.10 . Cette comparaison révèle une meilleure concordance des résultats expérimentaux avec lexpression t1 quavec t2. On remarque également la relative coïncidence des courbes t1 et expérimentales dans le domaine
« disotherme dadsorption universelle » mise en évidence par (Bouny 1994; Baroghel-Bouny 2007) et correspondant à environ hr <63 2. %. Lauteur explique que dans cette gamme dhumidité, laugmentation de lhr se traduit par une augmentation de la teneur en eau dans le matériau qui équivaut à une augmentation de lépaisseur dun film deau qui serait adsorbé sur la surface solide comme un adsorbant non poreux. Au dessus de 63.2% dhr, les valeurs expérimentales sont plus importantes que celles que lon obtiendrait sur un matériau non poreux.
Cet écart marque une apparition importante de condensation capillaire qui provoque un remplissage en volume, éventuellement partiel, du réseau poreux. Dans la suite cest lexpression t1 (léquation (3.37)) qui est utilisée dans les calculs. Lévolution du rayon « frontière » rc en fonction de lhumidité relative est illustrée sur la Figure 3.11. La tension superficielle sgl à linterface liquide/gaz et la masse volumique de leau dépendent de la température et leurs expressions sont données par (Le Neindre 1993) :
s = æçè - ö÷ø
116
Figure 3.10 : Comparaisons des expressions analytiques et des valeurs expérimentales de lépaisseur de la couche deau adsorbée
Figure 3.11 : Evolution du rayon capillaire en fonction de lhumidité relative pour différentes températures T=20°C, T=80°C et T=200°C.