• Aucun résultat trouvé

f / INDRA et les noyaux chauds :

Dans le document GANIL, Matière à Histoire (Page 127-129)

Lors de la réunion du Conseil scientifique du 19 avril 1989, un projet de détecteur 4

π, baptisé INDRA, pour les fragments de masses intermédiaires avec de bonnes conditions d’identification, un seuil en énergie faible et une granularité suffisante pour les multiplicités prévues, conditions nécessaires à remplir pour progresser dans l’étude des mécanismes de réaction, fait l’unanimité au sein des membres. Ce besoin d’un détecteur de seconde génération déjà évoqué début 1987 est accentué par la mise en place de l’O.A.E. qui permet l’étude de système plus lourds et plus chauds impliquant une production plus importante de fragments. Les caractéristiques de ce détecteur sont ensuite présentés29. Sa mécanique principale aura la forme d’une structure en couronne30, et la modularité de cet ensemble permet une adaptation à différentes situations expérimentales. Pour ce qui est de l’électronique, il est prévu qu’elle soit entièrement à commande informatisée avec une visualisation de signaux à distance. Pour ce qui est des détecteurs, ils seront choisis selon les modules disponibles dans les sociétés industrielles ou les laboratoires. Enfin, le planning de base situe la mise en service d’INRA pour la fin 1991, pour une somme de 6 millions de francs. C’est un nom fameux pour ce détecteur qui doit être lors de sa mise en service le plus performant dans son domaine d’utilisation. Dans la religion védique, la plus ancienne de l’Inde, c’est le dieu-roi, combattant infatigable dont le rôle est de maintenir l’ordre cosmique en éliminant par la violence portée à son extrême les ennemis de l’Ordre. Hymnes et brâhmanas content la mise à mort du dragon Vrta qui retenait les eaux du ciel et de ce fait empêchait l’univers de naître. Indra, élu champion des dieux, le tue en le perçant de

29

Annexe 52, principe de fonctionnement d’INDRA

30

son arme et libère ainsi les forces de vie : le feu, Agni, la vie, Soma ; c’est alors seulement que tout est mis en place : le Ciel, la Terre, et que prolifèrent les être vivants. C’est un nom bien choisi pour un dispositif qui permet l’étude des forces libérées par les noyaux…

Au cours de l’année 1989, différents essais ont permis de confirmer les choix des détecteurs. Ce travail s’est fait en collaboration avec le LPC de Caen pour les détecteurs Phoswich, l’IPN d’Orsay pour les CsI et le DAPNIA de Saclay pour les chambres d’ionisation et l’électronique associée. Une convention est d’ailleurs passée en 1989 pour que INDRA soit fabriquée en collaboration avec ces trois laboratoires associés au GANIL. L’implantation d’INDRA est également prévue dans la salle D531. Les années 1990 et 1991 sont dédiées à la fabrication des détecteurs et au montage des couronnes. Fin 1991, le premier exemplaire des chambres d’ionisation réalisé par le DAPNIA de Saclay est disponible. L’ensemble des 324 cristaux CsI et leur photomultiplicateur associé est livré et testé à l’IPN d’Orsay. Les détecteurs Si au silicium sont livrés à 75 % au GANIL où ils sont en cours de test. L’assemblage de la couronne 4-5, à savoir 12 cellules chambre d’ionisation, 48 voies Si et 48 cristaux CsI, est en cours dans la salle D5. Tout cet ensemble, ainsi que quelques scintillateurs Phoswich, est d’ailleurs testé sous faisceau en novembre. L’installation des « couronnes avant » qui représentent près de la moitié des détecteurs d’INDRA, se poursuit jusqu’en mars 1992, et l’assemblage des « couronnes arrières » s’effectue durant l’été de la même année. C’est en novembre 1992 que la dernière expérience test met en œuvre la quasi-totalité de détecteur, et la première expérience a lieu le 9 février 1993, le lendemain de l’inauguration d’INDRA. C’est une nouvelle fois la réussite d’un projet initié 4 ans plus tôt, et qui a nécessité la collaboration étroite de 4 laboratoires. Ainsi, le GANIL se dote d’un détecteur de dernière génération qui va permettre de mieux comprendre le processus de multifragmentation grâce à la capacité d'INDRA à détecter toutes les particules dans un espace donné.

INDRA n’est pas le seul détecteur dédié à l’étude des noyaux chauds. Il existe également au GANIL un détecteur du nom d’ORION, désignation empruntée à la célèbre constellation, mais qui signifie Organic Interceptor of Neutrons. Ce détecteur, construit conjointement par les physiciens du Centre d’Etudes de Bruyères-le-Châtel et du GANIL à la suite d’expériences réalisées au HMI de Berlin en 1984 et 1985, entre en service au GANIL au cours de l’été 1988. Joël Galin, physicien du GANIL, peut être considéré comme le père de ce détecteur. ORION permet de dénombrer les neutrons et d’en déduire la température d’un noyau après collision. D’autres détecteurs de particules chargées, situés au cœur d’ORION, aident à caractériser les modes de formation et de refroidissement de ce noyau. L’intérêt des études menées sur ce détecteur comme sur INDRA réside dans l’amélioration de nos connaissances des propriétés de la matière nucléaire dans ses différents états extrêmes et dans l’affinement de notre compréhension

31

de phénomènes stellaires tels que les explosions d’étoiles donnant naissance aux supernovae. Le détecteur Orion est donc constitué de 4200 litres de scintillateur liquide dopé au gadolinium. Le liquide est un mélange de 4 constituants : un solvant, un scintillateur, un changeur de longueur d’onde et un capteur de neutrons. Ainsi, les neutrons, ralentis par chocs successifs sur les noyaux d’hydrogène et de carbone du liquide sont capturés par les noyaux de gadolinium, avec une grande probabilité, en émettant un rayonnement gamma. Les photomultiplicateurs entourant le scintillateur détectent la lumière issue de la diffusion de ce dernier dans le scintillateur liquide. Le détecteur permet ainsi à la fois de mesurer l’énergie cinétique totale des neutrons et d’évaluer leur abondance. Ainsi, ORION restera au GANIL un instrument privilégié de l’étude sur les noyaux chauds.

Dans le document GANIL, Matière à Histoire (Page 127-129)