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a / Un accélérateur au service de la physique :

Dans le document GANIL, Matière à Histoire (Page 130-134)

L’année 1986 est marquée par une certaine stabilité de la disponibilité du faisceau pour les physiciens. Sur 4830 heures de fonctionnement, 3612 ont été réservée à la physique. Le nombre de faisceaux différents accélérés s’élèvent à 23, dont 11 nouveaux

grâce aux premiers tests sur la source ECR 1. Sur les 44 expériences réalisées durant cette période, les 2 dispositifs expérimentaux les plus utilisés sont LISE et le SPEG, qui représentent à eux seuls 53 % du taux d’occupation des salles de physique35.

En 1987, l’accélérateur a fonctionné 4527 heures, dont 3300 pour la physique, soit 73 %36. Cette différence avec l’année précédente s’explique par la panne rencontrée sur le résonateur sud. Le mercredi 1er avril à 13 heures, une remontée brutale de pression dans l’enceinte du CSS2 a entraîné la disjonction, par fonctionnement des dispositifs de sécurité, des équipements d’injection et d’éjection ainsi que des deux résonateurs haute fréquence. La recherche du défaut d’étanchéité entreprise aussitôt a permis d’établir qu’il s’agissait d’une fuite d’eau localisée dans le résonateur sud. Le 2 avril, en fin de journée, le test d’étanchéité systématique de toutes les épingles de refroidissement de ce résonateur s’achevait avec la détection de 2 fuites : la première, très grosse, sur un des circuits de refroidissement de dee, et la seconde, légère, sur un des circuits refroidissant la coque extérieure du résonateur. La chambre à vide de CSS2 a ensuite été mise à la pression atmosphérique et les opérations de recul du résonateur ont commencé. L’examen oculaire, effectué à travers les ouvertures de la coque extérieure du résonateur, a permis de constater des coulées importantes de brasure à l’étain par l’une des ouïes situées à l’arrière du dee, ainsi qu’une zone de déformation de la tôle du dee sur le repli de la lèvre de bord. Le tube du circuit de refroidissement est quant à lui percé à l’intérieur. Le 3 avril se déroulent les premiers essais d’accélération dans CSS1 avec un seul résonateur en service. Grâce à l’étude de compensation magnétique de l’oscillation d’orbite réalisée par le groupe théorie du secteur développement, les premiers essais concluants ont lieu fin avril, et l’accélérateur reprend son fonctionnement au mois de mai avec des caractéristiques quasi identiques. Le résonateur endommagé et pour sa part envoyé au constructeur le 17 avril pour réparation et son remontage s’effectue pendant l’arrêt d’été du 27 juillet au 27 août. Le challenge forcé de faire fonctionner CSS2 avec un résonateur a été relevé par les ingénieurs du GANIL, et la réussite de l’entreprise montre une nouvelle fois la qualité et les compétences remarquables des ingénieurs et techniciens du laboratoire. Malgré ce problème important, la perte du faisceau n’a duré qu’un mois. Cette année 1987 a également été une réussite du côté de la productivité. En effet, on est passé de 40 heures en 1986 à 28 heures en 1987 pour la durée moyenne d’un réglage complet de la machine, ce qui a permis de tester grâce au gain de temps 10 réglages machine supplémentaires. Quant au nombre d’expériences réalisées, il s’élève à 36, une légère baisse due à l’arrêt u mois d’avril. Au cours de cette année, LISE et SPEG tiennent toujours la dragée haute aux autres salles avec 50 % du temps global d’utilisation des salles de physique. Il faut

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PV du Conseil scientifique du GANIL du 3 juin 1993, Documentation GANIL

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Fonctionnement et études machine pour l’année 1986, Documentation GANIL

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également signaler que les études sur les sources ECR se poursuivent avec en point de mire l’O.A.E.

En ce qui concerne l’année 198837, l’accélérateur fonctionne 4765 heures, dont 3250 réservées à la physique, soit 68,2 %. Cette légère baisse est la conséquence des études machine qui précèdent l’O.A.E. Ce sont 23 faisceaux différents qui ont été accélérés, ce qui a permis la réalisation de 44 expériences différentes, SPEG et LISE représentant toujours les salles les plus convoitées, avec cependant une légère baisse de 10 %. Comme nous l’avons déjà vu, la moitié de l’année 1989 est consacrée à la réalisation de l’O.A.E., ce qui fait bien évidemment chuter le temps de fonctionnement accélérateur à 2335 heures, dont 1557 consacrées à la physique, soit 66,7 %.

L’année 1990 est l’année des résultats de l’O.A.E. qui se concrétisent38. Après un arrêt technique en janvier, pendant lequel des équipements ont été implantés et des essais d’ions nouveaux effectués, une répartition du temps machine inédite a été mise en place. La durée de fonctionnement a été de 36 semaines réparties en 7 périodes variables de 4 à 7 semaines consécutives. La souplesse d’utilisation du faisceau a ainsi été augmentée par la réduction du nombre de démarrages et l’introduction de courtes périodes non programmées dites « tampons d’expériences ». Sur 5682 heures programmées, 3643 heures de faisceau ont été fournies sur cible. L’opération augmentation d’énergie s’est concrétisée par la réussite de l’accélération du plomb et de l’uranium 238. Tous les ions du carbone à l’uranium peuvent à partir de 1990 être accélérés39. De plus l’intensité fournie a été fortement augmentée du fait de l’installation de la source ECR 3. Parallèlement, la SME étant devenue opérationnelle à la sortie de CSS1, de nombreuses expériences ont pu être réalisées En parlant d’expériences, 46 différentes ont été réalisées en 1990, pour un temps partagé pour moitié entre LISE et SPEG. L’accélération de l’uranium est vraiment le fait marquant de cette année 1990, car 8 ans après le démarrage, la machine est capable d’accélérer cet élément qui théoriquement devait être accéléré dès la mise en service du GANIL, comme cela été prévu par la norme GANIL et le second livre bleu.

L’année 1991 n’a malheureusement pas donné lieu à un rapport de fonctionnement, mais on peut tout de même préciser que l’accélérateur a fonctionné cette année là 5531 heures, dont 3426 pour la physique, soit 62 %. Les résultats de 1992 sont sensiblement proches. Sur 5333 heures de fonctionnement, 3594 ont été consacrées à la physique, ce qui représente 68 %, soit une légère augmentation40. De plus, 1860 heures ont été fournies à la SME permettant de réaliser une cinquantaine d’expériences. L’année 1992 est également marquée par le fait que les ions métalliques ont été accélérés pendant 36 % du temps ; certains étaient produits pour la première fois au GANIL grâce à ECR 3 pour le tellure 125 et le chrome 52, et à ECR 4 pour le tantale 181, un élément qui

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Fonctionnement et études machine pour l’année 1988, Documentation GANIL

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Fonctionnement et études machine pour l’année 1990, Documentation GANIL

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Annexe 56, les ions accélérés au GANIL après l’O.A.E.

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causait beaucoup de difficultés au groupe des sources du GANIL. Des études machine pour transporter des grandes intensités ont été entreprises avec un faisceau de néon et ont permis d’obtenir 7,5 x 1012 pps à la sortie de CSS1. Si ce faisceau avait été accéléré ensuite dans CSS2, sa puissance aurait été 5 fois plus grande que ce qui est toléré à cette date pour la sécurité des équipements. Le nouvel ensemble injecteur dont nous avons déjà parlé pour l’O.A.I., constitué de la source ECR 4 fonctionnant sur une plate-forme de 100 kV, d’une nouvelle injection axiale et du cyclotron Co1, a permis de délivrer après accélération des CSS1 et CSS2 du tantale à l’énergie de 40 MeV pour plusieurs expériences de physique. Des études ont d’ailleurs commencé avec l’opération THI, Transport Haute Intensité, pour améliorer les performances de l’ensemble, en particulier pour les ions métalliques difficiles à produire comme l’uranium. Il faut également noter que 47 expériences ont eu lieu en 1992, avec une utilisation record du SPEG de 38 %, qui reste avec LISE en tête des dispositifs utilisés, avec une part avoisinant les 55 %. Si l’on fait la somme des heures de fonctionnement de l’accélérateur, on arrive au total de 47161 heures, dont 27878 réservée à la physique, soit un taux brut de faisceau sur cible de 60 %. Au premier abord, on pourrait penser que ce chiffre est un peu faible. Mais si nous regardons dans le détail, nous nous apercevons, et c’est une force essentielle du GANIL, que le faisceau accéléré par le GANIL possède des qualités en optique, en intensité et en énergie excellentes et surtout très fiable, c’est-à-dire que le nombre de pannes durant une expérience est très faible, ce qui est un gage essentiel de qualité et de sécurité pour les expérimentateurs.

La question de la production scientifique vient bien évidemment à notre esprit. De 1983 à 1992, c’est au total 693 articles, conférences, rapports, mémoires et thèses qui ont fait l’objet de publications. La majorité des articles ont été édités dans des revues européennes. Cependant, on peut signaler qu’une quarantaine d’articles sur 205 sont parus dans les revues américaines. Le rôle d’acceuil du laboratoire est aussi clairement mis en lumière par l’importance des publications n’ayant pas un premier signataire GANIL. Revenons un instant sur ce fonctionnement des signataires. Lorsqu’une expérience et réalisé, elle possède un porte-parole qui est chargé de résumer l’expérience et ses résultats. Ensuite, parmi les membres de l’équipe de physiciens, l’un d’entre eux, souvent le porte-parole présente un article expliquant cette même expérience à des revues spécialisées. On peut ainsi savoir quelle est la proportion de physiciens visiteurs ayant publié un article. Elle est au GANIL de 78 %, ce qui montre que l’objectif initial de faire de l’accélérateur un laboratoire d’accueil a été tenu, mais aussi que le principe des physiciens résidents est une réussite puisque pour attirer autant de physiciens, il a fallu mettre en place au GANIL une vie scientifique et technique riche, nous venons de le voir. De plus, le laboratoire a une double envergure, puisqu’il attire chaque année environ 300 physiciens des laboratoires de physique nucléaire en France, mais également plus d’une centaine de physiciens venus de toute l’Europe et des autres continents. Ainsi, de 1985 à 1988, 530 physiciens étrangers ont bénéficié des

structures d’accueil du GANIL. Dernier fait marquant qui montre la vitalité du laboratoire : tous les ans depuis 1984 se tient un colloque à Giens, dans le Var, sur un sujet précis étudié au GANIL soit en physique nucléaire soit en physique des interactions matière-ions lourds. Mais l’action du GANIL ne s’arrête pas là. Laboratoire d’accueil, il est aussi laboratoire de formation. Il accueille tous les ans plusieurs dizaines de stagiaires et de thésards dans les domaines aussi vastes que la physique nucléaire, la physique atomique et de la matière condensée, la physique théorique, la physique des accélérateurs, l’informatique. Il existe enfin une profonde volonté de communiquer le savoir grâce aux expositions et aux journées portes ouvertes GANIL qui accueillent à chaque visite plus d’un millier de visiteurs. Le GANIL possède également une intéressante vidéothèque dont les cassettes sont gracieusement prêtées sur demande aux établissements scolaires. Il édite également chaque année un calendrier illustrant les thèmes de la physique développée au GANIL, et propose aussi des fiches scientifiques, adressées aux organes de presse régionaux et nationaux, permettant d’informer les journalistes des avancées marquantes. Le GANIL est véritablement un laboratoire à la volonté d’ouverture, tant par son accueil de physiciens de tous les horizons que par sa capacité à communiquer les savoirs. Ce trait caractéristique, présent dans l’article premier du texte fondateur du laboratoire, se retrouve toujours dans l’organisation générale de la recherche au GANIL. Cette volonté d’ouverture apparaît ainsi comme une nouveauté et un grand progrès par rapport aux anciennes formes de laboratoires qui restaient bien souvent totalement fermés au public. GANIL a su renouveler le genre, et cela avec brio.

Dans le document GANIL, Matière à Histoire (Page 130-134)