• Aucun résultat trouvé

Chapitre III – Fabrication de membranes à partir de fibres

3.4 Réalisation de membranes hybrides à partir de fibres de LATP

3.4.3 Synthèse de nanofibres de LATP en atmosphère « sèche »

3.4.3.3 Imprégnation et caractérisation de la membrane hybride

Le réseau de fibres obtenu après dépôt est imprégné par différentes quantités de polymère directement sur le wafer de silicium, afin d’obtenir une membrane hybride. La solution utilisée est une solution à 3 % massique de PVDF-HFP dans le DMF. Deux imprégnations successives sont réalisées, avec des masses de solution allant de 190 mg à 1100 mg. Après chaque imprégnation, le solvant est évaporé à l’étuve à 70 °C pendant 24 h. Les membranes réalisées dans ces conditions font typiquement 50 µm d’épaisseur.

Lors de l’imprégnation, la masse de solution ajoutée est pesée. Connaissant sa concentration, il est possible de déterminer la masse de PVDF-HFP ajoutée à une membrane. Connaissant la masse de PVDF-HFP et la masse totale de la membrane, il est possible d’estimer la fraction volumique de PVDF-HFP dans une membrane par rapport au LATP. La masse de fibres de LATP déduite de ce calcul est en bon accord avec la masse du réseau de fibres

inorganiques de référence calciné, qui est de l’ordre de 30 mg. Les caractérisations suivantes seront présentées en fonction de la fraction volumique de PVDF-HFP ajouté dans la membrane hybride.

La morphologie des membranes aux différentes étapes de la fabrication est rappelée sur la figure III.38.

Figure III.38 : Aspect des membranes aux différentes étapes de la fabrication. a) Après electrospinning. b) Après calcination à 850 °C pendant 2 h. c) Après imprégnation. Membrane contenant 66 % de fraction volumique de PVDF-HFP.

Deux propriétés sont importantes pour l’application visée : l’étanchéité et la conduction ionique des ions Li+. Rappelons que le rôle de ces membranes est de protéger le lithium métallique de l’électrolyte aqueux. Elles sont placées à l’interface LIPON/électrolyte aqueux.

Le dispositif de test d’étanchéité est basé sur la différence de conductivité entre une solution d’eau osmosée et une solution saturée de LiCl (Figure III.39).

Figure III.39 : Schéma du dispositif de test de l’étanchéité des membranes.

Les membranes testées positivement n’ont pas vu d’évolution de la conductivité de l’eau osmosée sur une période de 24 h. Cela signifie qu’il n’y a pas eu de passage d’ions à travers la membrane. C’est le comportement attendu en l’absence de différence de potentiel appliquée.

Afin d’évaluer les propriétés électriques des membranes, des électrodes d’or circulaires de 7 mm² et de 100 nm d’épaisseur ont été déposées au centre des membranes, sur les deux faces. La figure III.40 montre une vue en coupe réalisée par microscopie optique, sur une membrane prise en résine.

Figure III.40 : Vue en coupe d’une membrane hybride après dépôt de l’électrode d’or. Microscopie optique. Membrane contenant 40 % de fraction volumique de PVDF-HFP.

Les propriétés électriques ont été évaluées par des mesures d’impédance à température ambiante. La tension stationnaire a été fixée à 0 V, l’amplitude de la tension alternative a été

fixée à 100 mVrms et les mesures ont été effectuées pour des fréquences variant entre 1 MHz et 1 Hz. Le diagramme de Nyquist obtenu sur une membrane hybride contenant 40 % de fraction volumique de PVDF-HFP est rapporté sur la figure III.41.

Figure III.41 : Diagramme d'impédance d’une membrane hybride comprenant 40 % de fraction volumique de PVDF-HFP. Le logarithme des fréquences de mesure a été reporté sur le diagramme. Le modèle équivalent correspond à la courbe bleue. La membrane caractérisée mesure 50 µm d’épaisseur. La mesure a été effectuée sur la plage de fréquence 106 – 1 Hz avec une amplitude de 100 mVrms.

Une conductivité totale de 10-6 S.cm-1 est déterminée. Des membranes de différentes fractions volumiques de PVDF-HFP ont été caractérisées de la même manière. Leur étanchéité a également été caractérisée par le procédé décrit précédemment (Figure III.39). Les résultats obtenus sont rapportés sur la figure III.42.

0 2000 4000 6000 8000 0 -2000 -4000 0 1 2 3 4 5 Z i ( .c m 2 ) Z r (Ω.cm2) 6

Figure III.42 : Évolution de la conductivité et de l'étanchéité des membranes en fonction de la fraction volumique de PVDF-HFP ajoutée.

Ces résultats montrent à l’ambiante :

pour des fractions volumiques en PVDF-HFP > 65 %, des membranes hybrides étanches avec des conductivités ioniques inférieures ou égales à 1 x 10-7 S.cm-1. La plus faible chute ohmique mesurée sur une membrane étanche est de 35 kΩ.cm2.

pour des fractions volumiques en PVDF-HFP < 65 %, des membranes hybrides non étanches avec des conductivités ioniques allant jusqu’à 1 x 10-6 S.cm-1 pour les plus faibles fractions volumiques en PVDF-HFP (40 %). Une chute ohmique de 5 kΩ.cm2 est mesurée.

Des membranes contenant des fractions de PVDF-HFP plus faibles que 60 % présentent une tenue mécanique trop faible, et n’ont pu être séparées sans dommage du support en silicium.

Les valeurs de conductivité sont plus faibles (2 à 3 ordres de grandeur) que celles observées sur les céramiques denses. Ce résultat s’explique par le fait qu’une partie de la membrane, le PVDF-HFP, ne conduit pas les ions Li+. Ces résultats mettent aussi en évidence le compromis à trouver entre une conductivité suffisante et une étanchéité.

La fraction volumique de polymère ajouté a été reliée à la microstructure des membranes par microscopie électronique à balayage (Figure III.43).

Figure III.43 : Effet de l'imprégnation sur la microstructure des membranes, à différentes fractions volumiques de LATP. a, b, c, d) face S de la membrane. e, f, g, h) face A de la membrane.

En augmentant la proportion de polymère ajouté, on peut voir que la face A est progressivement recouverte. À une fraction volumique de 80 % de PVDF-HFP, les fibres ne sont plus accessibles en surface et la membrane ne conduit plus. La face S, qui est située en bas au moment de l’imprégnation, est rapidement imprégnée de polymère. En revanche, des fibres restent accessibles. Lors de la calcination, une partie des fibres réagit avec le substrat en silicium et y adhère. Elles sont arrachées lors du décollement de la membrane, laissant leur extrémité exposée.

Les propriétés mécaniques des membranes ont été évaluées par DMA (Dynamical Mechanical Analysis). Le principe de la mesure est décrit en annexe 5.9. Une membrane contenant 66 % de fraction volumique de PVDF-HFP présente un module de conservation de 6 GPa. En comparaison, une membrane de référence comprenant uniquement le PVDF-HFP et réalisée dans les mêmes conditions présente un module de conservation de 1 GPa. Il y a donc un effet de renforcement des propriétés mécaniques dû à la présence des fibres de LATP dans la membrane.

Une question importante est de savoir comment le réseau de nanofibres dans l’épaisseur de la membrane est affecté lors de l’étape d’imprégnation. Des vues en coupe sont donc réalisées sur une membrane hybride contenant 66 % volumiques de PVDF-HFP. Pour cela, les membranes ont été prises en résine et polies, puis observées au microscope à balayage.

Cependant, le polissage a entraîné un phénomène de beurrage du polymère qui a empêché l’observation directe des fibres au sein du matériau (Figure III.44).

Figure III.44 : Microscopie à effet de champ sur vue en coupe polie de membrane contenant 66 % volumique de PVDF-HFP. a) électrons secondaires. b) électrons rétrodiffusés.

Afin d’effectuer une coupe nette et d’observer le cœur de l’échantillon, une sonde ionique focalisée (FIB) est utilisée. Cette méthode utilise un faisceau d’ions gallium accélérés pour détruire sélectivement des zones de l’échantillon. Grâce à cette technique, une série d’images successives espacées de 50 nm a été réalisée afin de reconstruire le réseau de nanofibres en trois dimensions. Cependant, sur cette série de membranes, la taille des fibres est trop faible et le contraste n’est pas assez bon pour permettre une bonne segmentation des images. La reconstruction n’a donc pas pu être effectuée. Cependant, les images réalisées (Figure III.45) nous renseignent sur la microstructure au cœur de l’échantillon. On peut voir notamment que la membrane présente une porosité fermée (Figure III.45.b), ce qui est cohérent avec son caractère étanche.

Figure III.45 : Vues en coupe d’une membrane contenant 66 % volumiques de PVDF-HFP, réalisées par sonde ionique focalisée. a) vue d’ensemble de l’échantillon, face S. b) vue en coupe de la membrane.

3.4.3.4 Conclusions

L’extrusion du précurseur de « référence » en atmosphère sèche a permis d’obtenir une membrane hybride formée de nanofibres amorphes à température ambiante. La calcination de cette membrane a permis l’obtention d’un réseau de nanofibres cristallisées de LATP. Ce réseau formé de nanofibres de LATP entremêlées a été imprégné par un polymère hydrophobe le PVDF-HFP pour réaliser des membranes hybrides conductrices du Li+.

Plusieurs membranes ont été synthétisées avec des fractions volumiques de PVDF-HFP allant de 40 à 80 %. L’étanchéité et la conductivité ionique de ces membranes ont été évaluées. Nous remarquons que les valeurs de conductivité les plus élevées (1 x 10-6 S.cm-1) sont obtenues pour une fraction volumique faible de 40 %. Cependant, ces membranes ne sont pas étanches à l’eau. L’étanchéité des membranes est assurée seulement pour des fractions volumiques en PVDF-HFP supérieures à 66 %. Mais ces membranes présentent des conductivités plus faibles, de l’ordre 1 x 10-7 S.cm-1.

Ce dépôt présente cependant plusieurs inconvénients. Les conditions opératoires sont très restreintes en termes de vitesse d’injection et de champ électrique. La température de calcination est limitée à 850 °C par un phénomène de frittage des fibres et entraîne la présence de la phase parasite AlPO4 en faible quantité. De plus, la taille nanométrique des fibres entraîne une imprégnation imparfaite, et la présence de pores dans la membrane est observée.