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4.5 Implémentation d’un modèle de contrôle moteur

4.5.4 Implémentation du modèle λ du point d’équilibre

La théorie de contrôle retenue est celle du modèleλ du point d’équilibre (Feldman, 1986).

Cette théorie semble très intéressante pour la production de la parole : un modèle de contrôle moteur basé sur la notion de cible permet en effet de faire le lien entre les unités phonologiques et les cibles physiques qui sous-tendent les signaux vocaux (Perrier et al., 1996a,b).

Ce modèle a déjà été implémenté sur un modèle bidimensionnel de langue (Payan, 1996;

Payan et Perrier, 1997; Perrier et al., 2003) et a permis de générer des mouvements dont les pro-priétés cinématiques étaient pertinentes avec des signaux acoustiques perceptivement corrects.

Nous nous proposons d’appliquer cette approche à notre modèle tridimensionnel.

Mise en équations du modèle λ du point d’équilibre L’implémentation choisie pour la méthode du point d’équilibre suit l’approche proposée par Laboissière et al. (1996) et reprise par Payan (1996). Soit un muscle de longueur l(t). Selon cette approche, l’activation musculaire A est donnée par la relation :

A=

avecµ un coefficient d’amortissement, d le délai du réflexe d’étirement et ˙l la dérivée première de la longueur, soit la vitesse d’élongation.

La notion d’activation musculaire peut être associée au recrutement des MNs. Tant que l’activation A est nulle, aucun signal n’est généré. Une valeur nulle correspondant au seuil de décharge permettant le recrutement des MNs. Au delà de ce seuil, la dépolarisation des MNs s’avère possible : plus A est élevé, plus la fréquence de décharge des MNs est élevée.

L’activation croît lorsque le seuil d’activation diminue, et décroît lorsqu’il augmente. De plus, la relation entre l’activation et la longueur du muscle est non-linéaire, en raison de la présence d’un terme d’amortissement fonction de la vitesse d’élongation.

Le paramètreµ caractérise la dépendance entre le réflexe d’étirement et la vitesse d’élongation musculaire. Le niveau d’amortissement serait probablement contrôlé par le SNC via les MNsγ dynamiques. Pour un muscle donné, il devrait donc pouvoir varier au cours du temps. Pour des raisons de simplicité, il est ici considéré comme étant constant.

Le paramètre d prend en compte les délais du réflexe d’étirement correspondant aux temps de propagation des signaux électriques pour parcourir l’arc réflexe auxquels s’ajoutent les délais synaptiques et les temps d’intégration de ces signaux au niveau des INs.

La force musculaire activeM est donnée par la relation suivante :e e

M=maxh

ρexpcA(t)−1,ρi (4.40)

avec c un paramètre de forme, etρ un facteur lié à la capacité de génération passive de force du muscle.

Cette fonction exponentielle assure le lien entre la force active et l’activation musculaire, et est à mettre en relation avec la notion de caractéristique invariante (CI). Elle est cohérente avec le principe de la taille de Henneman (Henneman et al., 1965), qui régit l’ordre d’activation des MNs en fonction de leur taille : au cours d’une activité motrice de plus en plus puissante, les

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MNs sont recrutés suivant l’ordre de leur taille, les petits MNs, c’est-à-dire les MNs innervant un faible nombre de fibres musculaires, étant toujours recrutés avant les grands.

Le paramètre c est une mesure du gradient de recrutement des MNs.

Implémentation et paramètres

Modélisation des fibres musculaires Dans notre maillage de langue, le calcul de la force musculaire est réalisé pour des macro-fibres. Les fibres musculaires, trop nombreuses, ne sont pas individualisées dans le modèle. A la place, nous définissons des macro-fibres, qui repré-sentent des groupes de fibres musculaires, sous forme de suites de nœuds appartenant au muscle modélisé. Elles sont au nombre de 6 à 54 selon les muscles (Table 4.4) : leur nombre dépend de la taille des éléments du maillage. La Figure 4.30 représente ces macro-fibres pour les différents muscles du maillage.

TAB. 4.4 – Nombre de macro-fibres par muscle

GGp GGm GGa Sty HG Vert Trans IL SL GH MH

18 6 9 18 20 54 51 8 22 10 28

Choix des paramètres Pour chaque fibre, le calcul de la force musculaire nécessite de définir cinq paramètres : le seuil d’activationλ(t), le coefficient d’amortissementµ, la capacité à générer des forcesρ, le facteur de forme c et le délai du réflexe d’étirement d.

Dans la version actuelle du modèle, nous définissons un seuil d’activation par muscle (trois pour le génio-glosse divisé en une partie antérieure, médium et postérieure). La meilleure solu-tion consisterait à regrouper les fibres par ensembles d’unités motrices dépendantes. Malheureu-sement, l’innervation de la langue est mal connue. Quelques travaux existent sur la localisation des unités motrices sur la langue : Sokoloff (2000) pour les travaux sur les unités motrices de muscle longitudinal chez le rat ou Mu et Sanders (2000) qui citent par exemple l’existence de fibres musculaires du génio-glosse chez le chien comportant plusieurs plaques motrices, mais ces travaux sont rares. Pour l’instant le nombre de commandes musculaires nécessaires pour contrôler la langue et les fibres qu’elles concerneraient n’est pas connu. Nous faisons la sup-position que chaque muscle est contrôlé de manière indépendante. Soitλmle seuil d’activation pour un muscle m, rm,maxla longueur de la plus longueur fibre au repos, et f une fibre de m de longueur rm,f. Alors, le seuil d’activationλm,f pour cette fibre f est égale à :

λm,f = rm,f

rm,maxλm (4.41)

Le calcul de la force musculaire nécessite de connaître la capacité de chaque muscle à géné-rer des forces. Pour un muscle fusiforme, nous pouvons considégéné-rer, en première approximation, que cette capacité est liée au nombre de fibres qui le composent, donc à sa section transversale (nous négligeons par conséquent les propriétés individuelles des fibres, comme leur type ou leur longueur). La tension maximale est supposée égale à 22 N.cm−2. Les valeurs utilisées sont ba-sées sur les travaux de Payan (1996) pour les muscles de la langue et de van Eijden et al. (1997) pour les muscles du plancher buccal. Ces valeurs ont ensuite été adaptées à notre modèle. La valeur retenue pour le transversalis a été obtenue en estimant la section transversale moyenne

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GGp GGm GGa Sty

GH MH HG

IL SL Vert Trans

FIG. 4.30 – Visualisation des macro-fibres pour les muscles de la langue (vue oblique).

du muscle dans notre modèle et en prenant en compte la présence de fibres d’autres muscles entrelacées avec celles du transversalis. Le Tableau 4.5 résume les paramètres utilisés pour les muscles de la langue et du plancher buccal.

La force musculaire étant calculée pour chaque macro-fibre, la force globale associé à chaque muscle est répartie entre les différentes macro-fibres, proportionnellement au volume qu’elles entraînent.

TAB. 4.5 – Capacité de génération de forces des principaux muscles de la langue (paramètreρ)

GGp GGm GGa Sty HG Vert Trans IL SL GH MH

Aire (mm2) 182 64 59 109 250 268 273 41 86 80 177

ρ (N) 40 14 13 24 55 59 60 9 19 17,5 39

Le paramètre de forme c utilisé par Payan et Perrier (1997) était basé sur les travaux de Feldman et Orlovsky (1972) réalisés sur le muscle gastrocnemius du chat : c =0,112 mm−1. Il est supposé identique pour l’ensemble des muscles et constant. La Figure 4.31 représente la valeur normalisée de la force musculaireM/e ρ en fonction de pl, pour différentes longueur de fibres. Une longueur de 2 cm pourrait représenter une fibre du verticalis, une longueur de 12 cm une fibre du transversalis. La vitesse d’élongation est considérée comme nulle, ce qui

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correspond par exemple au début d’un mouvement vers une cible. On s’aperçoit alors qu’une faible variation de la commande motrice peut être à l’origine d’une modification très importante de la force musculaire. Dans le cas d’une fibre de 12 cm, une commande λ équivalent à 96%

de la longueur du muscle est déjà à l’origine d’une saturation de la force musculaire. De forts niveaux de force sont donc générés, et sont à l’origine de variations de longueurs rapides, ce qui déstabilise d’autant plus le système.

Les simulations réalisées avec c=0,112 mm−1ont donné lieu à un système instable. C’est pour-quoi nous avons décidé de modifier ce paramètre : les simulations effectuées nous ont amené à diminuer cette valeur qui a été choisie égale à c=0,040 mm−1. La Figure 4.31 représente les mêmes données que la courbe précédente, mais avec ce nouveau paramètre. Dans ce cas et pour une fibre de 12 cm, la saturation n’intervient que pour une commandeλ équivalent à 85% de la longueur du muscle. longueurs de fibres, avec un facteur de forme c=112 m−1.

0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1

FIG. 4.32 – Valeur normalisée de la force musculaireM/ρe en fonction de p=λ×l, pour différentes longueurs de fibres, avec un facteur de forme c=40 m−1.

Le délai d du réflexe d’étirement est de l’ordre de 10-20 ms. Pour la modélisation de la

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