pour le client est clair, il nous semble intéressant à l’instar de notre analyse sur la performance, de montrer comment les recherches sur la création de valeur sont passé d’un premier stade d’analyse uniquement financière (création de valeur pour l’actionnaire) à de nouvelles recherches incluant les autres parties prenantes de l’entreprise dont le client. Cette analyse de l’évolution des recherches, nous permettra de justifier notre choix de nous intéresser à la création de valeur pour le client.
II] La création de valeur pour les différentes parties prenantes de
l’entreprise
Un « des grands défis actuels des entreprises concerne l'obligation de créer de la valeur dans un contexte qui se complexifie (Savall et Zardet, 1992) et les outils renvoient trop souvent une image d'un environnement stable et peu perturbé (Teller, 1999). Cette obligation doit permettre "d'assurer leur survie dans une économie caractérisée par une offre potentielle bien supérieure à la demande" (Fassio, 1998), c'est-à-dire assurer leur pérennité et faire des bénéfices. Relever ce genre de défi dépend de la capacité des entreprises à l'interprétation à la notion de valeur et des pratiques professionnelles pouvant en découler.
La création de valeur financière est érigée en exigence de performance tant dans la littérature que dans les discours des dirigeants des entreprises, en particulier dans la communication financière des grands groupes. Comme le dit Lordon (2000)50, la création
50
Lordon Frederic, (2000) « la création de valeur comme réthorique et comme pratique. Généalogie et sociologie de la valeur actionnariale », L’Année de la régulation, vol. 4, pp117-165
de valeur s’impose comme l’impératif catégorique de toute gestion d’entreprise. Aujourd’hui on licencie pour la valeur, on fusionne pour la valeur, on innove pour la valeur, et toute action contraire à cela se serait au nom de la valeur. Ainsi la valeur s’est imposée comme une sorte de mot fétiche, légitimateur universel et définitif de toutes les pratiques managériales. C’est dans cette perspective que l’objectif de création de valeur apparaît comme un objectif ultime que l’équipe dirigeante se doit d’atteindre sur le long terme. Comme le souligne Albouy (1999), il s’agit là d’une approche pragmatique considérant la firme comme un nœud de contrats dont chaque partie cherche à tirer le maximum d’avantages.
Pour Atamer et Calori (2011)51, la création de valeur occupe une place essentielle dans la construction de la stratégie de l’entreprise, celle-ci reposant elle-même sur l’intention stratégique c’est-à-dire l’intégration formelle des buts, de la cohérence et des cibles identifiées auprès desquelles l’entreprise entend créer de la valeur.
Ainsi pour Savall et Zardet (1998)52 « La création de valeur économique est au cœur de l’activité des organisations et au centre de leur vocation, de leur raison d’être et de leur stratégie ». Aujourd’hui dans les recherches, la notion de création de valeur a acquis une importance extrême. Elle procure à l’entreprise des avantages compétitifs et un moyen de financer son développement et fournit entre autre des bénéfices pour toutes les personnes directement ou indirectement impliquées dans les activités de l’entreprise.
1) Entreprise et parties prenantes
Nous allons présenter dans cette partie les différentes parties prenantes pour qui est
créée la valeur ce qui nous amène à nous questionner sur les destinataires de la valeur que Trischler (1996)53 appelle les ayants droit à la création de valeur dans l’entreprise. En effet pour qui crée-t-on de la valeur ?
Si dans un premier temps les recherches se sont surtout intéressées au concept de création de valeur pour les actionnaires (stockholders), on s’est rendu compte qu’on ne doit pas se
51Atamer Tugrul et Roland Calori (2011), Diagnostic et décisions stratégiques, Collection: Management
Sup, Dunod
52
Savall Henri. et Véronique Zardet. (1998), « Un indicateur de veille stratégique de la création de valeur : la contribution horaire à la valeur ajoutée sur coût variable », Actes des XIVe Journées Nationales des IAE, Nantes.
53
Trischler, W.E. (1996), « Understanding and Applying Value-added Assessment », ASQC Quality Press, 127p., 1996.
focaliser uniquement sur les actionnaires mais également sur les autres parties prenantes ou les (stakeholders).
La théorie des parties prenantes offre un cadre de référence approprié pour étudier la performance organisationnelle. Cette théorie a été utilisée en management (Donaldson et Preston, 1995), en marketing (Polonsky, 1995) ainsi qu'en comptabilité (Roberts, 1992). Le terme partie prenante est une traduction du terme anglais stakeholder né selon Gond et Mercier (2006)54 des travaux Bearl et Means (1932) qui constatent le développement d’une pression sociale s’exerçant sur les dirigeants pour qu’ils reconnaissent leur responsabilité auprès de tous ceux dont le bien être peut être affecté par les décisions de l’entreprise.
Les parties prenantes de l’entreprise englobe tous les acteurs internes et externes qui sont touchés directement ou indirectement par les différentes activités menées au sein de l’entreprise. Leur nombre s’est multiplié de façon exponentielle ces dernières années et la performance de l’entreprise n’est plus appréhendée sur sa capacité à générer des profits et des bénéfices financiers pour les actionnaires, mais sur sa capacité à assumer ses responsabilités sociétales. Dans un contexte d’optimisation de la responsabilité sociétale de l’entreprise, la gouvernance de l’entreprise n’est plus faite par les seuls dirigeants mais par l’ensemble de partenaires. Dans ce cadre, l’entreprise constitue une entité dans laquelle divergent les intérêts coopératifs et compétitifs. Désormais, les interactions sont optimisées et accélérées pour ne laisser entrevoir les frontières entre l’entreprise et ses acteurs environnants (Cappelletti et Khouatra, 2002).
Donaldson et Preston, (1995)55 définissent les parties prenantes comme « persons or groups with legitimate interests in procedural and/or substantive aspects of corporate activity ». Dans les recherches sur les parties prenantes de l’entreprise, leur typologie est celle qui est le plus souvent reprise. Nous reprenons dans la figure 4 le modèle de Donaldson et Preston, (1995) des différentes parties prenantes de l’entreprise
54
Gond J-P et Mercier S. (2006), « La théorie des parties prenantes », avec Jean-Pascal Gond in Allouche J., Encyclopédie des Ressources Humaines, 2ème édition, Vuibert, p.917-925
55
Donaldson T. et Preston L.E. (1995), « The stakeholders theory of corporation : Concepts, Evidence and Implications », Academy of Management Review, vol. 20, n°1, pp. 65-91
Figure 4: Parties prenantes de la firme (Donaldson et Preston, 1995)
Pour Donaldson et Preston (1995), les parties prenantes peuvent être divisées en deux groupes: les parties prenantes principales (primary stakeholders) et les parties prenantes secondaires (secondary stakeholders). Pour les parties prenantes principales on fait référence aux investisseurs, aux clients et aux employés. Les parties prenantes principales sont celles dont l'entreprise a besoin de support sans quoi, elle ne peut exister.
Quant aux parties prenantes secondaires on fait référence aux médias ou à certains groupes de pression. On peut les définir comme celles qui peuvent influencer ou affecter l'entreprise, mais dont le support n'est pas jugé essentiel pour que l'entreprise puisse prospérer
La notion de valeur que nous avons vue va nous permettre d’introduire le concept de création de valeur qui est un objectif majeur de l’entreprise parce qu’elle permet son développement et sa survie. La valeur est liée à la rentabilité des capitaux investis, impliquant un résultat supérieur aux coûts mobilisés.
C’est ce surplus que l’on a qualifié initialement de valeur créée et c’est en fonction de la façon dont cette valeur créée est redistribuée que l’on nomme les différentes valeurs créées par les entreprises.