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d’accompagnement - les agirs mentaux

4.2. Identifier les activités mentales à partir d’un exercice discursif

Lors de notre premier traitement, nous ne disposions pas de grille d’analyse pour organiser notre matériau, c’est-à-dire pour produire « une mise en ordre et une qualification des

données » (Alvarez-Pereyre, 2008, p. 6) et cela dans la perspective de pouvoir rendre compte

des activités mentales de conseillers pédagogiques de l’enseignement fondamental en situation d’accompagnement individuel de direction. Nous nous sommes alors engagée dans une catégorisation conceptualisante telle que la définissent Pierre Paillé et Alex Mucchielli, à savoir, la dénomination à l’aide d’une brève expression d’un « phénomène perceptible à

travers une lecture conceptuelle d’un matériau de recherche » (Paillé & Mucchielli, 2003, p.

147).

Une approche thématique ne présentait aucun intérêt pour notre recherche. Nous avons donc essayé de nommer les activités mentales en tant qu’elles représentent les phénomènes que nous souhaitions étudier, allant « au-delà d’une désignation de contenu pour incarner

l’attribution même de la signification » (Paillé & Mucchielli, 2003, p. 148). Pour ce faire,

nous avons analysé le produit des entretiens de rétrospection dans lesquels les conseillers pédagogiques rencontrés décrivaient les souvenirs qu’ils avaient de leur activité de pensée durant les épisodes d’évocation au sens développé par Pierre Vermersch. Nous avons construit nos catégories en nous posant la question suivante : que fait mentalement le conseiller pédagogique lorsqu’il nous dit : « … ». Ce n’est pas tant la parole de l’acteur qui est consignée par la catégorie, écrivent Pierre Paillé et Alex Mucchielli, que son sens dans un ensemble en voie de compréhension, ou, plus encore, la pratique ou le phénomène que révèle cette parole. Nous reprenons la citation de Philippe Perrenoud proposée par ces deux auteurs en guise de définition de la fonction d’une catégorie :

« une catégorie permet de construire une représentation théorique de certains types de pratiques, de fonctionnement, de processus, en prenant en compte ce qui leur donne sens dans l’esprit des acteurs. » (Perrenoud, 1988, p. 102)

171 Ce premier traitement nous a conduite à produire une catégorisation, reprise très partiellement dans le tableau suivant, que nous présentons à titre d’illustration. Sont proposés dans la colonne de gauche des verbatims qui se présentent dans une succession temporelle de l’entretien de rétrospection et présentant une succession temporelle de l’activité du CP durant l’entretien d’accompagnement et dans la colonne de droite les catégories émergentes d’activité mentale. Nous prions le lecteur de ne pas s’attarder sur la nature du matériau traité (que nous présentons ultérieurement) mais d’attacher son attention aux catégories qui ont émergé. Elles sont présentées car c’est à partir de cette version de notre catégorisation que nous avons mené une démarche réflexive nous permettant de produire un outil pour approcher les activités mentales.

Notre intérêt était alors de repérer les enchainements entre ces différentes activités mentales. Le produit de notre traitement se présentait alors sous la forme d’une succession « d’activités mentales » qui prenait alors la forme suivante :

Nature des activités discursives ou mentales

1. Marqueur temporel qui précise le moment de l’activité mentale 2. Référence à l’activité mentale

3. Hypothèse sur l’objet sur lequel va porter l’accompagnement 4. Enonciation d’un objectif d’accompagnement

5. Enonciation de qualités personnelles qui définissent l’accompagnée et justifient l’hypothèse sur l’objet d’accompagnement

6. Marqueur temporel qui annonce la rupture

7. Evaluation d’une composante : hiatus entre les qualités de la personne et les données de la situation qu’elle vit

8. Marqueur temporel qui annonce la conséquence de ce qui a été évalué 9. Référence à l’activité mentale

10. Nouvelle hypothèse sur l’objet sur lequel va porter l’accompagnement 11. Marqueur temporel qui précise le moment de la précision du hiatus

12. Rappel des faits : la situation ne lui permet pas d’être en accord avec ses qualités propres 13. Marqueur temporel qui précise le moment de la précision du hiatus

14. Evaluation de l’activité d’accompagnement

15. Argumentation qui explique la nature de l’évaluation (il s’est planté)

16. Evaluation d’une composante : hiatus entre les qualités de la personne et les données de la situation qu’elle vit

17. Marqueur temporel

18. Référence à l’activité mentale

19. Démonstration : annonce d’une conséquence

20. Conséquence qui se traduit par un projet d’action lié à l’accompagnement 21. Justification de l’action envisagée

22. Marqueur temporel

23. Référence à l’activité mentale

24. Evaluation de l’activité d’accompagnement : première conclusion, relation étroite entre l’engagement de la personne accompagnée et la compréhension par l’accompagnateur de la nature de la difficulté 25. Justification de l’élément qui permet de dépasser la difficulté d’accompagnement

26. Rappel des paroles énoncées pendant TA par l’accompagnatrice ; l’accompagnée explique qu’elle ne peut pas dire certaines choses

Tableau 2 – Succession des « activités mentales » selon la première catégorisation

Comme notre traitement était produit sur un matériau majoritairement discursif (même si nous utilisions les enregistrements vidéo des entretiens de rétrospection et non la retranscription que nous en avions réalisée), nous n’étions pas encore fixée quant à la nature des phénomènes étudiés à partir du matériau dont nous disposions. C’est ainsi que nous n’avions pas encore tranché entre « nature des activités mentales » et « nature des activités discursives ».

173 Ce traitement nous a amenée à produire la grille d’analyse suivante, chaque ligne représentant une nature d’activité mentale particulière :

Tableau 3 – Premières catégories pour saisir l’activité mentale

Nous n’étions pas satisfaite par cette première catégorisation. Nous préciserons ultérieurement les raisons de notre insatisfaction. C’est alors que nous nous sommes livrée à un exercice réflexif, au sens où l’entend Pierre Bourdieu, sur les catégories produites. Les différentes catégories ne traitaient pas toutes des mêmes objets. De fait, la mise en perspective des catégories entre elles, nous obligeait à conclure qu’elles ne relevaient pas d’une seule et même nature au sens développé par Roger Mucchielli (R. Mucchielli, 1988).

4.3. Différencier les faces de l’activité mentale pour