CHAPITRE 3 - PROPOSITION D’UNE DEMARCHE DE GENERATION DES ÉCO-MODELES
3.2. Génération des éco-modèles
3.2.1. Identification des éco-modèles
Les éco-modèles par définition sont déduits des pratiques architecturales. Ce travail
d’identification se fait selon un protocole au travers d’un corpus d’étude. Le processus
d’identification, à son tour, comprend la consultation des projets environnementaux récents,
l’extraction de bonnes pratiques environnementales et la filtration multicritères.
3.2.1.1. Consultation des projets environnementaux récents
Dans un travail de la recherche scientifique, le chercheur entreprend son travail par un état de
l’art sur les recherches scientifiques menées afin de connaître les savoirs existants autour de
son idée et de positionner sa proposition scientifique. De façon similaire, dans un travail de
conception architecturale, l’architecte fait, la plupart du temps, une revue des pratiques
existantes dans le domaine du bâtiment avant de développer sa propre proposition.
En général, nous définissons trois types de réalisations pouvant être inclus dans un corpus
d’étude dans l’objectif de génération des éco-modèles (Figure 37) :
Les architectures vernaculaires
Les architectures conventionnelles
Les architectures en projet
Figure 37 - Les exemples de l’architecture, de gauche à droite, vernaculaire, conventionnelle et en projet [notre
recherche]
Les architectures vernaculaires sont une source importante pour retrouver des bonnes
pratiques environnementales. Les bonnes pratiques extraites de ce type d’architecture ont
confirmé leurs pertinences par leurs réutilisations millénaires. Ce type d’architecture est
souvent emprunté par les architectes pour la recherche des solutions autonomes. En ce qui
concerne les architectures vernaculaires, elles n’ont pas été traitées dans notre travail et elles
feront l’objet d’autres travaux de recherche au CRAI
28.
Les architectures conventionnelles sont un champ de recherche afin de connaître les bonnes
pratiques existantes et faisables. D'un coté, l’analyse de ces architectures peut nous aider à
connaître les possibilités d’aujourd’hui. D'un autre coté, elles nous amènent à retrouver les
bonnes pratiques qui suivent la tendance architecturale de la société. Concernant les
architectures conventionnelles, les visites des sites des bâtiments, majoritairement organisées
par l’association LQE (2008-2010) et Classe 4
29(2008), nous ont permis d’analyser plusieurs
réalisations menées par différents architectes dans la région Lorraine. Mais, pour avoir une
vue plus globale et afin d’augmenter la possibilité de rencontrer un plus grand nombre de
bonnes pratiques, nous avons aussi analysé des bâtiments conçus et réalisés dans les autres
zones climatiques et culturelles du monde. Pour accéder aux informations les concernant,
nous avons consulté les sources bibliographiques et les sources en ligne (e.g. les pages web
des architectes connus).
Les architectures en projet sont quant à elles clairement inscrites dans une perspective de
recherche du progrès et de créativité. C’est pourquoi elles font souvent l’objet des concours
architecturaux, aidant ainsi les architectes à connaître les tendances architecturales dans un
futur proche. Souvent basées sur des scénarios du futur, les pratiques ressortant de ce type de
projets sont à un horizon technologique plus avancé et ont des formes plus créatives que ce
qui existe déjà dans l’architecture conventionnelle. En ce qui concerne les architectures en
projet, nous avons réuni le corpus de connaisances aussi bien par des sources bibliographiques
et les sources en ligne que par des expositions sur le sujet (e.g. [Architecture = durable,
2008]).
Pour conclure cette partie sur le corpus d’étude, les bâtiments que nous avons consultés dans
le cadre de cette recherche sont reconnus comme ayant une valeur environnementale par des
experts, journalistes, etc. Ce jugement est exprimé de différentes manières : par les
associations spécialisées (e.g. HQE
30, LQE
31, LEED
32), par les revues spécialisées (e.g.
Energy and Buildings, Building and Environment, Écologik), par les lauréats de concours et
de prix (e.g. concours maisons solaires, concours REVIVAL, Global Award for Sustainable
Architecture), par les études des cas abordées dans les conférences et les expositions (e.g.
eCAADe
33, SCAN09
34et [Architecture=Durable, 2008]).
En nous appuyant sur les avis des experts, nous avons effectué une analyse de plus de 200
bâtiments récents ou en projet provenant du monde entier. Cette étape de consultation nous a
29 Formation continue à l'École d'Architecture de Nancy 30 Association Haute Qualité Environnementale en France 31 Lorraine Qualité Environnement pour la construction en France 32 Leadership in Energy and Environmental Design aux États-Unis
33 Education and research in Computer Aided Architectural Design in Europe 34 Séminaire de Conception Architecturale Numérique
permis de rassembler un corpus d’étude qui nous permettra de poursuivre notre démarche de
génération des éco-modèles.
3.2.1.2. Extraction de bonnes pratiques environnementales
Nous pensons que l’architecte, en tant qu’acteur principal de la phase amont de la conception,
peut réduire les impacts environnementaux du bâtiment par l’utilisation de bonnes pratiques.
La consultation des projets récents nous a donné un aperçu d’une gamme de ces dernières
avec des avantages environnementaux très variés (e.g. confort visuel, santé, gestion de l’eau).
Parmi les différents regards, une attention spécifique se porte sur les aspects énergétiques.
Cela est très probablement dû à l’émergence de problématique liée à la gestion énergétique
(cf. 1.2).
Selon les estimations de l’association MINERGIE [Fraefel, 2000], les stratégies et les mesures
d’efficacité énergétique prises sur le plan architectural sur un bâtiment neuf peuvent conduire
potentiellement jusqu’à une économie d’énergie de 50% et avec un surcoût négatif. Ces
stratégies et mesures d’efficacité énergétique sont le centre d’intérêt des bonnes pratiques
dont nous sommes à la recherche (Figure 38).
En effet, nous recherchons les bonnes pratiques environnementales - avec tout type de
préoccupation environnementale - à partir de l’analyse du corpus d’étude, pour les rendre
candidates à devenir des éco-modèles. Afin de ne pas négliger un regard environnemental,
nous nous sommes appuyés sur les 15 cibles HQE
® 35(cf. 2.3.2.2). En ce sens, nous essayons
de trouver plusieurs bonnes pratiques relatives à chaque cible.
Ces bonnes pratiques sont souvent exprimées par les concepteurs dans les textes et les
schémas contenus dans le communiqué du projet, dans les entretiens ou les livres (e.g. Figure
38).
35 Une 15ème cible (biodiversité) est susceptible d'être ajoutée aux cibles proposées auparavant par l’association HQE®. Dans notre travail de recherche des bonnes pratiques, nous le prenons en compte.
Figure 38 - Exemples d’étude d’une bonne pratique environnementale : forme circulaire [Émery, 2002]
Nous parlons de candidate car pour devenir éco-modèle, selon notre protocole
d’identification, cela nécessite de remplir les critères d’un concept de l’éco-modèle Les
bonnes pratiques extraites du corpus d’étude sont filtrées selon ces critères.
3.2.1.3. Filtration multi-critères
Pour qu’une bonne pratique environnementale soit choisie comme un éco-modèle, selon la
démarche de génération d’éco-modèles que nous avons proposée (cf. Figure 36), elle doit
posséder plusieurs critères (Tableau 8).
Tableau 8 - Critères des éco-modèles liés aux conditions de sélection [notre recherche]
Critère Condition
Opérationnel Faire preuve de sa pertinence en étant utilisé dans au moins trois réalisations d’auteurs différents
Générique Avoir un certain degré de généralité : être ni une solution simple, ni une stratégie globale
Holistique Répondre en même temps à plusieurs problèmes fréquemment rencontrés sans dépasser un certain degré de particularité : répondre au minimum à trois exigences environnementales abordées parmi les cibles HQE®
Formalisable Pouvoir être représenté par une illustration, un dessin
Adaptée au niveau de l’esquisse Répondre aux questions posées en phase d’esquisse comme le positionnement, la volumétrie, l’organisation spatiale ou encore le système constructif général de bâtiments