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Identification des acteurs commerciaux du secteur et leur niveau d’organisation

Les résultats ci-après proviennent du dépouillement des fiches d’enquête et des interviews.

Tableau 6 : Classification des enquêtés

Commerce des PFNL Effectifs %

Principal 13 10

Occasionnel 117 90

Total 130 100

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Il ressort du tableau 6 que dix pour cent des commerçants en font du commerce des PFNL une activité principale. Toute tentative d’organisation de ce commerce en République du Congo, nécessite l’implication de ces acteurs.

Sur la base des données fournies par les acteurs organisés, en ce qui concerne la nature/type de produits et certaines informations recueillies au cours des interviews, la liste de quelques PFNL phares a été établie.

Il faut toutefois noter que, compte tenu de la diversité culturelle et des habitudes culinaires à l’échelle nationale, il n’est pas rare de constater qu’un PFNL alimentaire ou considéré comme plante médicinale dans un département donné ne soit même pas connue comme tel ailleurs.

Ce fait est le résultat du manque d’une politique de valorisation et de l’ignorance au sujet des PFNL. C’est notamment le cas de Ricinodedron heudelotii ; dans les régions du Sud du pays il est connu comme plante médicinale, à chenilles et où son tronc sert à la fabrication de tam-tam, par contre au Nord, il est plutôt connu comme plante alimentaire : ces graines sont utilisées comme épices dans l’alimentation.

Tableau 7 : Profit tiré de l’activité

Avis Effectif %

Oui 104 80

Non 15 12

Plus ou moins 11 8

Total 130 100

Le tableau 7 renseigne que 80 pour cent des personnes interrogées tire profit du commerce des PFNL ; 12 pour cent expriment un avis contraire et huit pour cent sont indécis.

2. Zones d’approvisionnement et marchés cibles Tableau 8 : Source d’approvisionnement

Régions Effectif %

Plateaux 80 62

Pool 11 8

Kouilou 39 30

Total 130 100

Le tableau 8 montre que la Région des Plateaux intervient à raison de 62 pour cent dans l’approvisionnement des PFNL (feuilles de Gnetum principalement) sur les marchés de Brazzaville.

La forêt reste la source principale d’approvisionnement en PFNL en République du Congo où elle couvre environ 60 pour cent du territoire national. Elle renferme ainsi une grande diversité biologique comprenant d’importantes quantités des PFNL utiles à l’homme, car servant de nourriture, de médicaments ou intervenant dans les services et dont l’importance n’est plus à démontrer, d’autant plus que la majorité de la population, estimée entre 60 à 70 pour cent et vivant en milieu rural, en demeure tributaire. Cette dépendance est plus remarquable encore du fait que les PFNL sont susceptibles d’usages multiples et répondent à la satisfaction de la plupart des besoins de l’existence de l’homme.

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Ils constituent ainsi une source pécuniaire pour les ménages ruraux qui les récoltent et ceux de la ville les achètent et/ou les vendent toute l’année de façon régulière. Certains sont parfois très prisés par les populations riveraines et la diaspora africaine dans des pays extérieurs où ils sont exportés.

Les PFNL sont principalement collectés à pied durant un seul jour et en utilisant des outils simples. Des techniques rentables pour une extraction et une conservation plus efficiente des PFNL sont nécessaires pour améliorer les systèmes de gestion des ressources.

Selon la moitié des personnes interviewées (46%) dans les régions visitées, la collecte des PFNL se passe à la fin de la saison agricole, moment à partir duquel l’activité devient leur occupation principale. Il y a de ce fait quelque évidence de compétition pour la main d’oeuvre entre les PFNL et l’agriculture. Noter cependant que pour une majorité de produits, la maturation et la collecte surviennent durant la saison de pluies, entre octobre et juin (le Gnetumconstitue une exception).

Les coûts de collecte des PFNL semblent être déterminés par la quantité qui peut être confortablement collectée et transportée sur la tête à la maison par un seul individu au cours d’un unique voyage retour. 72% de ceux interviewés se rendent aux zones de collecte à pied, indiquant que les PFNL sont relativement accessibles (en gardant pourtant à l’esprit que peu de ménages ruraux au Congo possèdent un véhicule motorisé). En moyenne, les collecteurs déclarent passer deux heures par voyage pour collecter les PFNL et pas plus qu’une demi-journée pour 65% d’entre eux.

Noter cependant que les voyages peuvent avoir des objectifs différents et cibler des produits multiples. Par exemple, plusieurs variétés de PFNL peuvent être collectées sur le chemin lorsque l’on se rend aux champs ou lorsque l’on en revient.

Cela rend difficile l’estimation exacte du temps requis pour la collecte des PFNL et de ce fait, celle du coût réel de la main d’oeuvre également. Néanmoins, comme approximation sommaire, nous estimons le coût d’opportunité de la main d’oeuvre à environ 1000 F CFA pour une journée de travail de huit heures en zone rurale, et une moyenne de chargement sur la tête de 25kg. Sur cette base, nous estimons le coût moyen de la main d’oeuvre à 10F CFA/kg pour les PFNL. Si en fait le voyage en moyenne dure toute une journée (et en faisant l’hypothèse de la collecte d’un produit unique), et si les collecteurs sont présumés gagner au moins le coût d’opportunité de leur temps à partir de la vente des produits sauvages, nous devrions obtenir un coût de la main d’oeuvre d’environ 40 FCFA/kg (en utilisant le même chargement moyen sur la tête que précédemment). Il faudrait insister ici sur le fait que ces estimations sont très approximatives. De plus, elles excluent les coûts de tout outil requis de même que les coûts de transformation et de marketing.

Les techniques de production varient selon le produit mais restent généralement rudimentaires. La plupart des outils de collecte de PFNL sont fabriqués par les collecteurs eux-mêmes cependant que coûteaux, machettes, haches et bâtons en bambou sont achetés sur les marchés locaux. 25% de toute la matière collectée est destiné à transformation et le reste est soit consommé à la maison ou vendu à l’état sauvage. Aucune information n’a été recueillie sur les coûts de transformation ou sur les inputs travail de main d’oeuvre, mais il est notoire qu’aucune technique moderne de conservation n’a été utilisée.

Les producteurs et commerçants locaux font état de la rareté croissante de quelques espèces mais des données additionnelles sont nécessaires pour estimer la durabilité de la cueillette de plantes. Le manque de données biologiques sur les stocks et les productions empêche toute évaluation directe de la durabilité de la cueillette de plantes sauvages.

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Les interviews avec les commerçants de PFNL ont révélé d’autres signes de la raréfection croissante des ressources. Par exemple un vendeur de plantes médicinales a indiqué, lors d’une interview (marché Total à Brazzaville), que le temps requis pour ses pourvoyeurs pour répondre à chaque commande est passé de 2–3 jours à plusieurs semaines en raison de la nécessité de se déplacer toujours plus loin pour se procurer les produits sauvages. De la même manière, une commerçante en gros (à Abala au nord du Congo) de feuilles de Gnetum s’est plaint qu’à présent il lui faut parcourir 5 à 10 km au moins pour assembler une cargaison, comparé à 500 mètres autour de la maison d’habitation il y a 10 ans.

Aucun facteur unique n’a été cité comme cause dominante de la raréfaction des ressources dans toutes les régions. Cependant, 73% des répondants à Sibiti (localité visitée au sud du pays) ont senti que l’amélioration des voies de transport a augmenté la pression sur les ressources sauvages, suite à un accès plus aisé. Les feux de brousse et la faible régénération résultante des PFNL ont été aussi fréquemment mentionnés comme causes de la rareté des ressources sauvages. En général, la surexploitation ne figurait pas sur la liste des facteurs mentionnés alors que les villageois sont divisés sur leur appréciation de l’impact de la croissance de la population sur les ressources.

Il est évident que cette exploitation à outrance, sans souvent aucun souci de durabilité et centrée sur quelques PFNL phares, a vite entraîné la raréfaction, voire la disparition de ces produits dans certaines zones cibles. Actuellement, les sources d’approvisionnement sont nettement éloignées de la capitale, occasionnant ainsi des coûts exorbitants de transport qui se répercutent sur le prix de vente.

La Ville-capitale de Brazzaville est la principale consommatrice des PFNL. Ce sont les régions voisines dont principalement le Nord du pays, et à un certain degré, la périphérie de la ville de Brazzaville (Pool) et la région du Kouilou pour la ville de Pointe Noire, qui fournissent l’essentiel de la production consommée.

Ces deux villes présentent en outre certaines particularités par rapport à celles de l’intérieur du pays du fait d’une mosaïque ethnique et tribale qu’elle recèle, dont les habitudes de consommation peuvent être nettement différentes.

Ceci serait même à l’origine de la spécialisation de certains marchés qui se répercute sur la disponibilité des produits qui doivent répondre en principe aux préférences des consommateurs qui y sont inféodés.

Tout ceci a une incidence sur l’approvisionnement et la consommation des PFNL à travers les marchés de Brazzaville. On note particulièrement que les commerçants ressortissants de différentes régions du pays, vivant dans la capitale, jouent indifféremment un rôle important dans l’approvisionnement de la ville en PFNL alimentaires.

D’une manière générale les congolais, à la recherche de mieux-être, excellent par des déplacements temporaires ou définitifs ou fréquents vers les grands centres urbains. Bien que la majorité de la population soit rurale, la tendance actuelle est caractérisée par une expansion rapide de cette population urbaine à travers les quelques centres urbains qui existent.

Il est évident que cette augmentation du taux d’urbanisation constitue une menace sérieuse vis-à-vis des ressources naturelles et particulièrement, des PFNL en terme principalement des pressions anthropiques exercées sur le potentiel sur pied, dont les volumes exploités sont prioritairement orientés vers les marchés urbains qui prennent de plus en plus de l’expansion.

Pour l’écoulement de ces PFNL vers Brazzaville notamment, trois voies de transport sont utilisées. Il s’agit de :

i) la voie routière pour les produits provenant des régions proches que sont les Plateaux et le Pool ;

ii) la voie ferroviaire pour ceux exploités dans le Sud du Congo (Kouilou) ;

iii) la voie fluviale en ce qui concerne principalement les PFNL non périssables provenant essentiellement des régions du nord ;

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En ce qui concerne le transport des PFNL phares tel que le Gnetum africnum qui ne se retrouvent généralement plus en quantité commerciale à proximité de la ville de Brazzaville, les statistiques communiquées par ces transporteurs soit 25 tonnes au cours de cette année nous paraît peu crédible. En effet, pour éviter de payer les frais de transport élevés et les taxes liées à l’exploitation des PFNL par les agents de l’Etat, il semble que les transporteurs et ceux qui sont chargés de contrôler agissent en complicité avec les commerçants. Et dès lors, ils n’ont aucun intérêt de renseigner le vrai tonnage transporté.

En ce qui concerne les marchés qui, dans tous les cas, évoluent dans l’informel, la part de l’exportation n’est pas connue. En effet, le service de douanes basé à l’aéroport international, seul service public chargé de contrôler toutes les importations et exportations du pays, et habilité à détenir les statistiques officielles y afférentes n’a pas pu jusqu’à ce jour nous fournir les informations demandées dans le cadre de cette étude. C’est encore une preuve que l’informel marche à merveille.

Les marchés intérieurs, hormis la ville de Brazzaville et certains principaux centres urbains du pays ne sont pas rémunérateurs aux producteurs. Au niveau même des communautés locales, la production sert plutôt à l’autoconsommation étant donné que les marchés sont si peu développés et que l’accès à la ressource, qui représente la principale source alimentaire, est libre.

C’est ainsi que certains individus bien avisés et informés de la valeur des PFNL à l’étranger, généralement allochtones, organisent des véritables tournées de récupération des produits auprès des paysans qu’ils ne rémunèrent pas équitablement. Ils créent en fait des véritables marchés pirates qu’ils organisent suivant des arrangements tacites avec les paysans récolteurs et producteurs des PFNL. En fait, le paysan apparaît souvent dans le circuit comme un intermédiaire qui vend les produits à un exportateur tenu de solliciter un permis d’exportation délivré par l’administration centrale du Ministère en charge des « Forêts ».

Pour tous ces PFNL les circuits de l’exploitation et de commercialisation sont pratiquement identiques. Le paysan, à qui l’Etat reconnaît légalement le droit d’usage, procède au ramassage ou à la récolte de ces produits non pas seulement pour sa consommation domestique, mais aussi pour un but commercial et ne sollicite dans ce cas, généralement aucune autorisation et ne paye tout naturellement aucune taxe.

En attendant la publication et l’application des mesures d’exécution du nouveau code forestier en ce qui concerne l’exploitation et le commerce international, l’acheteur des PFNL auprès des paysans est contraint de disposer d’une autorisation de récolte d’achat et d’exportation, attestation délivrée par des services provinciaux du Ministère en charge des « Forêts ».

Le prix sur le marché national est réglé par la loi de l’offre et de la demande. Sa fixation est souvent l’objet de marchandage. Le vendeur accepte parfois le troc avec certains produits de première nécessité (savon, du sel, des vêtements, etc.).

Les marchés transfrontaliers, évoluant également dans l’informel, restent concentrés sur certains PFNL utilisés, comme l’aliment « Gnetum », l’épice « Piper guineensis » ou encore comme médicaments dans la pharmacopée traditionnelle ou tradi-moderne « Ricinodendron heudelotii ».

Ils sont souvent l’œuvre de ces acheteurs ambulants bien avisés et informés du développement, au niveau international, des marchés de ces produits. Ils agissent ainsi comme des exportateurs des PFNL qu’ils achètent auprès des exploitants locaux. Il est établi que les PFNL tels que le Gnetum, les chenilles, etc., en provenance de la République du Congo sont exportés en Europe et même aux Etats-Unis. Mais les enquêtes n’ont pas pu avoir des données fiables sur ces exportations.

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3. Les contraintes majeures des acteurs du développement de la filière Parmi les contraintes majeures rencontrées par les acteurs, on peut signaler :

• le niveau élevé de pauvreté de la population qui fait que les produits sont vendus en de très petites quantités par des micros détaillants ;

• le manque d’infrastructures de transport approprié ;

• la sous information des acteurs, à tous les niveaux, sur le rôle et l’importance des PFNL en termes des bénéfices qu’ils peuvent procurer ;

• l’absence d’un cadre juridique et des mesures d’application du code forestier pour le développement de la filière en matière d’exploitation et d’utilisation de ces ressources

;

• l’éloignement de la ressource par rapport aux principaux centres de consommation et le caractère périssable de certains d’entre eux dans un contexte de conditionnement et de conservation souvent précaire ;

• les difficultés d’accéder au crédit ;

• les tracasseries diverses et l’intermédiation dans le circuit de vente ;

• le manque manifeste de volonté politique à promouvoir ce secteur pourtant utile pour l’économie familiale en milieu rural ;

• la contribution relativement insignifiante des PFNL, une fois pris individuellement, à l’économie nationale en plus d’un effort disproportionné observée pour la mise en valeur et la commercialisation de ces produits par les décideurs ;

• l’insuffisance de renseignements fondamentaux détaillés sur le potentiel disponible et les différentes utilisations, alliée à une insuffisance d’échange de connaissance entre pays et à l’intérieur même du pays. En effet, il a été dénombré, en recoupant des informations des chercheurs, que la seule espèce « Baobab » aurait dans son aire de distribution, une cinquantaine d’utilisation différente ;

• l’existence des tabous et des interdits alimentaires.