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Sous hypothèse 1 Le voyageur est en recherche d’une cohérence entre son identité individuelle et

PARTIE I : APPROCHE CONCEPTUELLE DES NOTIONS D’IDENTITE, DE VOYAGE ET DE LIEU

CHAPITRE 3 : PERSPECTIVES POUR L’AN PROCHAIN

I. Sous hypothèse 1 Le voyageur est en recherche d’une cohérence entre son identité individuelle et

Dans notre première partie de recherche, et plus précisément lorsque nous avons abordé les différentes approches de l’identité, nous n’avons évidemment pas détaillé de manières exhaustives toutes les approches possibles. Il y a désormais une approche qui nous semble absolument nécessaire d’aborder dans le cadre de cette première sous-hypothèse qu’est celle de l’identité pour la psycho-sociologie. Ensuite nous expliciterons d’avantage l’importance d’avoir une identité sociale positive et nous appuierons tout cela argumentant avec les entretiens terrains que nous avons réalisés.

1. Approche psychosociologique de l’identité – Le Moi social

Comme nous l’avons précédemment énoncé dans notre socle théorique, la sociologie s’intéresse à l’identité dans un contexte social, elle ne renie pas l’identité individuelle telle que décrite en psychologie. Il est intéressant d’aborder cette notion d’un point de vue psychosociologique et pour cela nous allons nous appuyer sur les travaux de GEORGE HERBERT MEAD. TRIPIER nous explique comment MEAD définit l’identité : comme étant la combinaison de ce qu’il appelle le je et le moi. Pour comprendre cette théorie il faut comprendre ses termes :

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o L’auteur parle d’Autrui généralisé pour définir la société.

o Le moi, est ici est un moi social, c’est-à-dire comment je pense en fonction de ce qui m’a été transmis par l’autrui généralisé. C’est la partie de moi conditionnée par la société en quelques sortes.

o Le je est la partie de moi qui répond au moi social. C’est comme ma capacité de remise en question du moi social. Par exemple : si le moi pense qu’il faut aller à l’université juste après le lycée, le je va se demander s’il ne faudrait pas travailler avant30.

o Le soi, c’est ce qui est pour lui l’identité individuelle, il s’agit tout simplement de l’équilibre entre le je et moi.

Ce que cette approche a de différente de l’approche sociologique c’est que là, l’individu est scindé en deux : la partie conditionnée par la société et la capacité de remise en question de cette société. C’est également différent de l’approche purement psychologique dans laquelle l’individu n’est pas nécessairement replacé dans un contexte social.

2. Le processus social selon GOFFMAN

La théorie de ERVIN GOFFMAN peut être ici considérée comme similaire à celle de MEAD car pour lui aussi le moi (ou self en anglais) est le fruit d’un processus social. Il distingue trois composantes qui sont :

o Le jeu, qui est la partie selon laquelle l’individu serait un acteur dans sa propre vie et donc proposerait des actes verbaux et non verbaux auxquels on ajoute le regard que porte autrui sur le rôle interprété. La célèbre citation de GOFFMAN y fait référence : « La nature la plus profonde de l’individu est à fleur de peau : la peau des autres. E.Goffman » (NIZET et RIGAUX, 2014, p.94)

o La sacralité des faces, il s’agit de la partie selon laquelle on donne de l’importance aux individus, on les sacralise et c’est cela qui donne du sens au jeu.

30 Explication de MEAD – Vidéo intitulée : Introduction to Sociology: George Herbert Mead: The I and the Me :

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o Les fondements cérémoniels du moi, C’est la partie du processus qui permet la production d’un individu digne ou crédible par la possession de ressources matérielles (objets ou espaces personnels) et symboliques (contrôle de l’accès aux informations personnels, création d’une sphère individuelle etc.).

C’est ainsi que pour GOFFMAN l’identité est construite par ces trois composantes du processus social. Sa théorie est limitée notamment par deux types de contestations majeures : la contestation de la multiplicité des identités pour chaque individu (une identité par interaction) et la deuxième concerne la superficialité de l’identité car selon GOFFMAN, les individus ne sont que les rôles qu’ils jouent. Beaucoup peuvent se poser la question de ce qu’il y a derrière le rôle et derrière le masque. (NIZET et RIGAUX, 2014, p.96). Néanmoins ce qui va nous intéresser pour la suite de la réflexion est bien-entendu la partie de l’identité construite selon les interactions sociales.

Ce que nous tentons de mettre en évidence est l’importance de cet Autrui généralisé de MEAD et le rôle de l’autre pour GOFFMAN dans la construction identitaire individuelle. Il nous apparait clairement que l’individu ne peut se passer de médiation sociale pour se construire et le fait grâce à une balance métaphorique sur laquelle il recherche un équilibre entre son identité telle qu’elle doit être pour la société et son individualité telle une capacité de remise en question des acquis transmis par la société. Pour GOFFMAN, l’identité de l’individu n’est qu’un rôle joué et différent à chaque interaction, et ainsi l’individualité n’existe que par interaction avec autrui.

3. La pression de la société

Selon les deux autres visions de l’identité que nous avons abordés à travers MEAD ou GOFFMAN, il y aurait un enjeu identitaire important qui est faire coïncider son identité individuelle aux normes valeurs et règles de la société. Les voyageurs seraient donc dans une sorte de quête censée leur apporter des réponses à ce qu’ils souhaitent faire et qui ils sont vraiment et l’objectif serait ensuite de pouvoir faire coïncider cela avec leur société où avec un futur groupe d’appartenance. En tous cas la pression exercée par la société sur un individu peut être une cause aux problèmes des voyageurs. C’est cela que nous explique

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Karine31, notre voyageuse interrogée. A la question « Que vous évoque le mal-être identitaire ou le mal d’identité ? » voici ce qu’elle nous a répondu :

« C’est quand il y a un décalage entre son identité, ses valeurs, ce qu’on aimerait être et ce qu’on fait au quotidien, l’espèce de moule dans lequel on se met pour des raisons sociétales, ou pour des raisons familiales, ou par manque de courage personnel… euh moi j’étais dans un mal-être identitaire profond quand je travaillais en tant que consultante et que je ne voyais pas d’autre avenir que ça, je voyais pas d’autres issues. » (Karine, voyageuse, Toulouse, extrait d’entretien)

On peut clairement qualifier le mal-être identitaire de décalage et dans ce cas précis, une perte de sens quand les attentes de la société sont trop importantes à un tel point que l’individu se sent piégé dans une vie qu’il ne veut pas vivre de cette manière. Les experts interrogés, le psychologue et la sociologue, s’accordaient également pour signifier que ce décalage peut être source de mal d’identité. Pour la sociologue que nous avons interrogée, la réponse tendait davantage vers l’individu puis elle a ajouté : « Ça peut je pense provoquer

du mal être, la place dans le groupe. » (Sociologue, Toulouse, extrait d’entretien). Ainsi

l’individu partirait suite à une pression trop grande de son groupe. Tenterait-il de trouver sa société idéale ?