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La presse écrite et l’environnement linguistique en Algérie

1.2.1.1. Histoire de la presse écrite en Algérie

Selon Souriau-Hoebrechts (1969), la presse écrite algérienne existait déjà à l’ère coloniale mais d’une manière clandestine car, tout simplement, les auteurs de cette presse étaient des indigènes. Ce n’est qu’au lendemain de l’indépendance qu’on assiste à l’apparition de quelques titres. C’est pourquoi nous considérons l’année 1962 comme le commencement de l’histoire de la presse écrite algérienne.

Pour des raisons historiques, nous jugeons préférable de subdiviser les périodes de l’histoire de la presse algérienne en deux grande parties ; la première, qui commence au lendemain de l’indépendance jusqu’au 1988 et qui comporte trois sous-périodes, puis la deuxième s’étalant de 1988 jusqu’à l’année 2003.

On peut distinguer trois étapes représentant les grandes lignes dans le changement établi sur la presse écrite algérienne avant 1988.

1.2.1.1.1. La période 1962-1965

D’abord celle s’étalant entre 1962 et 1965 ou la presse a connu, à l’instar de toutes les institutions dans le pays, une sorte de rupture, une phase transitoire passant d’une presse coloniale à une presse nationale marquée par le remplacement des titres coloniaux par des titres nationaux après avoir contrôlé progressivement le pouvoir de presse en y instaurant un régime dirigiste, comme le soulignent les articles 19-21 de la constitution de 1963. Vient, ensuite, la charte d’Alger qui, en 1964, accentue cette mainmise totale sur toute la presse nationale ; celle-ci sera donc dépendante directement du parti unique et prépondérant, le FLN.

A ce propos, Benzelikha souligne :

Celle-ci sera marquée par deux aspects, soit le passage d’une presse coloniale à une presse nationale, avec notamment la création de nouveaux titres et la nationalisation ou la disparition des titres coloniaux, et le contrôle progressif par le pouvoir de toute la presse. (Benzelikha, 2005, p. 17)

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À son tour, Ihaddaden (1989, p. 23) précise : « c’est la pratique gouvernementale

qui (parvient) peu à peu à instaurer un régime dirigiste dans le domaine de la presse. »

1.2.1.1.2. La période 1965-1976

La deuxième période allant de 1965 à 1976 s’inscrit comme une continuité de la première. À cette époque, la presse relève soit de l’Etat soit du parti unique en fonction des conditions politiques. Elle est, de ce fait, contrôlée par le ministère de l’information et de la culture, elle produit tantôt des discours du pouvoir, des communiqués officiels et des articles sous forme de discours élogieux aux hommes du pouvoir, tantôt des articles informant sur la tenue d’une réunion des hommes au pouvoir, des débats animés et des suggestions formulées par ces derniers.

Benzelikha (2005, p. 19) reprend : « La presse de cette période produit le discours

du pouvoir en place, se contentant de reprendre les communiqués officiels ou de produire des articles laudatifs de travestissement du réel, à la gloire des hommes au pouvoir et de leurs opinions déclarées. ». Il cite également, à cet égard, Mostefaoui qui écrit dans son

ouvrage l’usage des médias en question :

D’entrée de jeu, le rédacteur de l’article [….] s’ingénie à convaincre froidement le lecteur que telle ou telle instance a tenu une « réunion importante », et que celle-ci a donné lieu à des débats ouverts et francs et qu’à la suite de cette réunion, des suggestions importantes ont été formulées. (Mostefaoui, 1982, p. 38)

1.2.1.1.3. La période 1976-1988

La troisième période, s’étalant de 1976 à 1988, peut être subdivisée en deux petites ères. Une première allant de 1976 à 1979, qui coïncide avec l’adoption de la charte 1976 ; une période durant laquelle, bien que l’organisation de la presse relève toujours de l’Etat, on assiste à l’ouverture des débats relativement démocratiques favorisant le droit à une information totale et objective et surtout, on assiste, durant cette période, à un grand intérêt prêté à la presse comme instrument de communication politique.

Le début de la deuxième subdivision de cette troisième période fut marqué par la mort de défunt président « BOUMEDIEN » qui sera remplacé par une équipe nouvelle pour diriger le pays.

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La presse, durant cette période s’étalant sur six ans, constituait un moyen à travers lequel le parti unique s’exprimait et faisait répandre son idéologie en usant de textes officiels de l‘Etat ; cela s’explique par le fait de voir confier les postes politiques clés et les moyens d’information aux cadres du parti unique, l’information est devenue donc un outil entièrement au service du pouvoir parce que les frontières entre l’Etat et ce parti n’étaient que formelles.

Le 05 octobre 1988 fut le point de rupture dans l’histoire de la presse algérienne, les évènements de cette époque ont fait naître une nouvelle ère de communication en mettant fin au monopartisme, l’autoritaire et le dirigisme étatique de l’économie. Le multipartisme fut alors instauré et a enclenché le processus démocratique qui encourage le développement de la presse qualitativement en créant de nouveaux titres et qualitativement avec l’usage d’un discours libre et pluriel.

Les trois périodes les plus récentes sont : celle s’étalant de 1988 jusqu’au 1991 et celle entre 1992 et 1997 et enfin la période allant jusqu’à 2003.

1.2.1.1.4. La période de 1988-1991

C’est une période qui incarne la rupture avec l’ancienne presse puisqu’elle commence par les évènements tragiques d’octobre 1988. A titre de citation, Brahimi précise :

Le soulèvement populaire du 5 octobre 1988 a entraîné de profonds bouleversements dans la vie politique et culturelle du pays. Ces bouleversements ont eu des répercussions sur le champ médiatique non seulement sur le plan quantitatif (création de nombreux journaux et de 20 stations de radio étatiques régionales) mais aussi sur le plan de la liberté de l'information (création de journaux privés changements importants au niveau des programmes de la radiotélévision et au niveau des journaux parlés et télévisés. (Brahimi, 1990, p. 9)

L’auteur explique, en quelque sorte, la relation de cause à effet entre la situation politique et la presse dans le pays. Parce que démocratie rime avec liberté d’expression, le bouleversement politique induit un changement dans la presse.

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1.2.1.1.5. La période 1992-1997

Une grande métamorphose s’établit sur la presse algérienne à cette époque marquée par la notion « d’état d’urgence ». Il s’agit d’une période exceptionnelle aux yeux des spécialistes de la politique algérienne où on assiste à la disparition d’une dizaine de journaux partisans et privés et, au même temps, la parution d’autres journaux d’expression française ; à l’image de « Liberté » et « La tribune » ou encore « Le jeune indépendant », ce qui peut traduire la prédominance de la presse francophone sur la presse arabophone dans ces années 90.

1.2.1.1.6. La période 1997-2003

La plus récente période a vécu l’industrialisation et la modernisation de la presse, on assiste finalement à un véritable professionnalisme dans le domaine journalistique accentué par l’augmentation considérable du tirage en termes d’exemplaires et la parution de nouveaux quotidiens. Le secteur privé a préservé sa prédominance sur le secteur public. Une prédominance arrachée grâce au quotidien « El Khabar » et « le Quotidien d’Oran » qui totalisent 580.000 exemplaires environ.

Ce succès est pleinement dû à l’amélioration de la qualité informative et du contenu. Aussi, est-il plausible de penser que la liberté d’expression et le reflet, à travers les articles, de la réalité socioculturelle des lecteurs sont les deux raisons les plus fortes expliquant cet engouement pour cette presse.