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Histoire abrégée du verre en Occident

3.2 Évolution de la composition du verre

3.2.1 Histoire abrégée du verre en Occident

Le verre existe à l’état naturel, il est alors principalement d’origine volcanique (la matrice du basalte, l’obsidienne) ou résulte d’un impact de météorite, ayant fait fondre du sable (comme

3.2. ÉVOLUTION DE LA COMPOSITION DU VERRE 63 les verres libyques).

Le verre de création humaine apparaît au cours du iiiemillénaire avant notre ère et il devient

un matériau produit à grande échelle au cours du second millénaire avant notre ère, en Égypte et en Mésopotamie [46]. Il est alors employé principalement pour faire des perles et des verres creux (pour former des contenants : dans un premier temps surtout des gobelets, des bols...). Le sable apporte de la silice au travers du quartz et les fondants proviennent probablement

de cendres d’halophytes5 du genre Salicorna, Salsola ou bien des plantes marines, dont les

cendres sont riches en oxyde de sodium et calcium, apportant également du potassium et du magnésium.

Plus tard, à partir de 800 avant notre ère, la composition des verres change : ils s’appau-vrissent en potassium et magnésium, ce qui a été attribué à un changement dans la nature des fondants, avec l’utilisation d’évaporites comme celles du Wadi el-Natrun, essentiellement constituées de carbonate et d’hydrogénocarbonate de sodium. Cette roche, appelée natron, a été utilisée tout au long des époques hellénistique puis romaine, le verre fabriqué en Égypte et en Palestine fournissant alors tout l’Empire Romain, transporté à l’état de bloc puis soufflé dans des ateliers locaux. À cette époque, le verre contient également 6 à 9 wt% de CaO, qui joue un rôle important en stabilisant le verre vis-à-vis de l’altération par l’eau. La source de calcium dans le verre au natron est encore mal identifiée : on suppose qu’il s’agissait de fragments de coquillages contenus dans le sable, peut-être isolés du sable dans un premier temps, puis ajou-tés au mélange dans une proportion contrôlée [46, 47]. À l’époque romaine, avec l’apparition de la technique de soufflage du verre, son usage pour les fioles et les bouteilles se répand et les

verres plats, utilisés pour le vitrage, apparaîssent (ces derniers sont attestés dès le ive siècle à

Ravenne [37]).

Avec la chute de l’Empire d’Occident au ve siècle, la production de verre reprend de

ma-nière plus localisée, et utilisant des matières premières locales ou en recyclant le verre romain. Autour de la Méditerranée, le fondant reste du natron ou bien des cendres d’algues, et les verres neufs restent sodo-calciques. En revanche en Europe du Nord (du Nord de la France à la Norvège) d’autres fondants sont utilisés, particulièrement des cendres de bois, riches en

5. Il s’agit de plantes vivant dans des milieux riches en sel et dont les cendres sont riches en sodium. On parle également de plantes halophiles

potassium, conduisant à des verres potassiques et potasso-calciques [46]. À la fin du Moyen Âge, une nouvelle composition se généralise en Europe du Nord, avec un verre riche en calcium et appauvri en alcalins, appelé dans la littérature anglophone High-Lime-Low-Alkali (abrégé en

HLLA), qui devient la norme à partir du xvie siècle. Ces deux types de verres (potassiques et

HLLA) résistent moins à l’altération que les verres sodo-calciques.

Dès le xviie siècle, grâce à l’influence des verriers vénitiens, on retrouve des verres

sodo-calciques en Europe du Nord, fabriqués en important le verre brut de Venise ou comme eux, les fondants du Proche-Orient [48]. Cette contrainte disparaît grâce au procédé Leblanc à la fin

du xviiie siècle, permettant la production de carbonate de sodium à partir de sel : les fondants

à base de sodium redeviennent disponibles à grande échelle dans le Nord de l’Europe et les compositions de verre s’homogénéisent à nouveau autour du verre sodo-calcique, proche de la composition du verre à vitre actuel.

On peut donc classer les verres à base de silice en plusieurs types, selon les compositions en fondants :

— Les verres au plomb, où l’oxyde de plomb PbO est le fondant principal. Ce type de verre a été utilisé dès les débuts et en continu dans toute l’Europe, principalement pour les glaçures de céramique et les émaux. Ils sont également utilisés en vaissellerie depuis le

xviie siècle, le cristal étant un verre au plomb. Leur usage dans le vitrail est très rare.

— Les verres à alcalins mixtes, riches en oxydes de sodium et de potassium. Ces verres sont courants en Europe de l’Ouest à l’Âge du Bronze et durant le premier millénaire de notre ère [49].

— Les verres dits sodiques, riches en sodium et appauvris en potassium. Ces verres sont souvent sodo-calciques. On peut y distinguer des verres riches en magnésium (>1 wt%), avec un fondant à base de cendres de végétaux halophiles, ou pauvres en magnésium (<1 wt%), avec un fondant à base de natron [46,50].

— Les verres dits potassiques, en réalité potasso-calciques, riches en potassium et calcium, contenant également beaucoup de magnésium.

— Les verres dits calciques, en réalité calco-potassiques, riches en calcium et contenant aussi du potassium et du magnésium. Ces verres sont appelés HLLA (high-lime low-alkali) dans

3.2. ÉVOLUTION DE LA COMPOSITION DU VERRE 65 la littérature en anglais.

Cette classification est résumée dans la figure 3.4.

K2O/Na2O < 0.6 K2O/CaO > 0.5 Verre riches en magnésium Verre pauvre en magnésium PbO > 15 wt% Na2O > 6 wt% MgO > 1 wt% Verre au plomb Verre sodique Verre potassique Verre calcique (HLLA) Verre à alcalins mixtes Oui Non Oui Non

Oui Non Oui Non

Oui Non

Figure 3.4 – Classification des principales compositions de verres historiques.