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A. Histoire des deux quartiers, fabrication de l'espace 32

II. L'espace conçu – Hautepierre 33

6. Hautepierre Sud – Parc des Poteries, 1984-2010 73

Favoriser la cohérence des formes urbaines existantes

Christian DEHAYNIN

Histoire du projet

L’arrêté ministériel du 14 septembre 1977 modifie le périmètre de la Z.U.P. créée par les arrêtés du 28 décembre 1964 et du 16 mars 1967. Le périmètre de la Z.U.P. est réduit à celui de "Hautepierre Nord". Le périmètre de la tranche "Hautepierre Sud" au-delà de la pénétrante autoroutière qui devait achever la composition de la première tranche conserve sa vocation mais change de cadre juridique, d’intentions et de composition. La ZAC créée le 18 décembre 1984 fait l’objet d’un arrêté de réalisation préfectoral le 16 août 1985. Le nouveau quartier devra accorder et réussir l’intégration des différentes formes urbaines qui composent le secteur Ouest de la Commune. "Ce rôle s’exprimera, aussi bien à travers l’importance et la diversité des types d’habitat, que par la nécessité d’harmoniser la création d’emplois et d’équipements en rapport avec ce qui existe actuellement (…) en assurant la continuité verte."106

Un des objectifs auquel doit répondre le nouveau projet est celui d’une composition capable d’exister pour elle-même, une composition "écologique" qui permet de réduire la consommation d’espace et d’énergie et suffisamment attractive pour être capable de freiner la péri-urbanisation. L’autre objectif auquel doit répondre le nouveau projet est celui d’une composition capable de s’accorder avec les différentes formes urbaines existantes à proximité. Hautepierre Nord était un quartier satellite, périphérique à la commune de Strasbourg. Vingt ans plus tard le quartier de Hautepierre Sud achève de l’intégrer dans un espace bâti continu et dans un temps de circulation continu.

"Une première préoccupation sera de favoriser l’intégration de la Z.A.C. au tissu existant. Cette intégration concernera les relations fonctionnelles entre les différents éléments urbains, la nécessité de voies de liaisons, ainsi que la cohérence des implantations bâties. La liaison Nord-Sud du quartier du Hohberg au Centre Commercial sera probablement l’épine dorsale du nouveau quartier, elle permettra de consolider la centralité qui s’amorce dans la maille Irène de Hautepierre Nord : cette liaison est également exigée par la nécessité d’assurer le maximum de possibilités d’échanges entre zone d’emploi et zone d’habitat, entre hébergement et animation et loisirs".107

En 1996, le comité de pilotage rebaptise le quartier "Koenigshoffen Poteries" afin de se démarquer de la mauvaise réputation du quartier de Hautepierre.

106 Rapport de présentation de la zone d’aménagement concerté (ZAC) de Hautepierre

Sud, POS approuvé de Strasbourg, décembre 1992.

Conception du projet

Les intentions des architectes et urbanistes Ulla Hellner et Hans Tyge Pedersen du groupe Europlan sont de promouvoir une alternative à la fois aux cités- dortoirs ainsi qu’au mitage de la péri-urbanisation. Pour cela ils définissent trois principes, d’une part "concevoir des quartiers nouveaux qui réuniraient l’ensemble des fonctions urbaines". D’autre part "créer des villes et des quartiers lisibles, avec une structure claire, des lignes, des endroits, des surfaces pour tout le monde (…) enfants, jeunes, adultes, personnes âgées", enfin "favoriser la continuité de la ville existante"108.

La nouveauté du quartier est fondée sur la mixité, la lisibilité, la continuité de la ville :

"Un des principaux enjeux (…) est de faire du parc des poteries un quartier pouvant accueillir une population variée et d’offrir différents types d’habitats."109

Lisibilité des formes urbaines :

"La nouvelle ZAC a ainsi été dotée d’une épine dorsale (une avenue), assurant une fonction de transit et de distribution, reliant la route des Romains au sud à la pénétrante A351 au nord. Cet axe majeur constituera à terme un des barreaux de liaison interquartiers entre Koenighoffen et Hautepierre. Il devra donner à voir ce qu’est le nouveau quartier et permettre une perception clair de l’espace (épaisseur, profondeur). Cette avenue, constituant le centre linéaire du quartier, sera en connexion avec tous les équipements structurants (lycée, parc). Sa conception privilégiera piétons, cyclistes et usagers des transports en commun."110

Continuité de la ville existante :

"La ZAC de 1985 n’avait pas prévu la constitution d’une véritable continuité urbaine entre Koenighoffen et Hautepierre. Il s’avérait primordial de créer de nouvelles liaisons afin de restructurer ce secteur d’habitat. Pallier à cette carence permettait la constitution d’une cohérence urbaine entre différents quartiers qui ne peuvent s’ignorer, et entre lesquels les échanges doivent être facilités."111

"Au nord du quartier, trois pont franchissant la coupure de l’autoroute permettront d’assurer au maximum d’échanges entre les zones d’habitat et d’activité (emploi, achats et loisirs) et plus loin avec le centre de Strasbourg, grâce aux stations Brigitte112 et Cervantès113 de la première ligne de tramway.

Le passage sur ces trois ponts permet à l’usager de s’orienter et d’affirmer son appartenance à la ville : dans l’axe de la pénétrante apparaît la cathédrale,

108 Ulla Hellner, Hans Tyge Pedersen, Dossier Parc des Poteries, mai 1996. 109 Ibid.

110 Ibid. 111 Ibid.

112 Station Dante.

signal du centre. Il s’agit là de la plus belle entrée sur Strasbourg qui mérite une protection particulière : toute construction est interdite à 40 m de part et d’autre de l’axe de la voie."114

Préfiguration

Les travaux de Kevin Lynch comme ceux d’Edward Hall nous semblent aux fondements des principes de lisibilité des formes urbaines et de continuité de la ville existante développés par les concepteurs.

Kevin Lynch en conclusion de L’image de la cité a dégagé la valeur d’une composition urbaine. Il a souligné le lien entre la qualité de la forme et la qualité de la perception urbaine, définissant ainsi la qualité principale d’une composition, la lisibilité, la facilité avec laquelle les formes de la ville peuvent être visuellement appréhendées par les usagers.115

Edward Hall a distingué les espaces à contexte riche des espaces à contexte pauvre. Alors que la perception d’un espace à contexte riche agit comme une force d’unification et de cohésion, la perception d’un espace à contexte pauvre, génère des tensions entre l’usager et ses propres projections.116

Plan du parc des Poteries, 1991 (Europlan, Hellner & Pedersen).

114 Hellner, Pederson, 1996.

115 Kevin Lynch, L’image de la cité (trad. fr.), Paris, Dunod, 1971.

Configuration

C’est en 1995, que la ZAC du Parc des Poteries commence à prendre forme, avec le début des travaux du Parc et du lycée Marcel Rudloff, qui sont les principaux équipements et espace publics qui construisent l’image du quartier. Depuis une salle omnisports, des terrains de sports, une école primaire ainsi qu’une maison de l’enfance ont été édifiés, ainsi que de nombreuses opérations de logements.

Hormis les grands équipements, les concepteurs ont été confrontés aux libertés des maîtres d’ouvrages que chacun exigeait pour son propre projet, liberté d’implantation, liberté de volumétrie, liberté de modénature. Les espaces réalisés se sont éloignés de l’homogénéité, de la cohérence que la préfiguration s’évertuait à cerner.