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LE CAS DES MANTEAUX MĀORI (KĀKAHU)

HAU ET POSSESSIONS INALIÉNABLES —

Hau : souffle de vie et circulation de l’énergie vitale

Sur le terrain, mes interlocuteurs m’ont généralement poussé à envisager le hau comme souffle (breath). Ils ont aussi souligné le fait que le terme « hau » est très peu utilisé de nos jours. Dans les faits, il m’a toujours fallu aborder la thématique du hau pour que ce mot apparaîsse. À la différence d'autres concepts clés tels que mana, tapu, wairua et même mauri, hau n’est pas utilisé dans la vie quotidienne. Il peut en revanche être mobilisé dans la vie rituelle et j’émets l’hypothèse qu’il lui est désormais réservé. Ainsi, lors d’un échange avec Waana Davis250 à propos du hau, elle

me dit :

« Hau c’est le souffle de vie, il porte tout. Quand le hau quitte le corps, ce n’est plus qu’une coquille vide. Ko te hau tira, ce qui part revient.251 » (Entretien avec

Waana Davis, juillet 2016, ma traduction.)

On retrouve ici, le hau à la fois en tant que dynamique relationnelle « what goes around

comes around » et en tant que source de vie, de force créatrice dont l’absence est synonyme de mort,

comme le montre ici Elsdon Best :

« Another peculiar word is hau. The hau of a person, of land, of a forest, &c., is its 250 Waana Davis était une aînée māori experte dans les arts māori. Elle siégea pendant de très nombreuses années dans les plus grandes associations culturelles du pays en qualité de conseillère. Elle faisait référence en matière de connaissances sur le monde de l’art māori et des coutumes (tikanga) s’y rattachant. Elle fut impliquée de longues années dans la promotion de l’art textile māori et nous échangeâmes longuement sur le sujet. Elle s’est éteinte au mois de juin 2019 avant que j’eus la chance de lui présenter l’exceptionnelle collection de manteaux māori du musée du quai Branly - Jacques Chirac qu’elle espérait tant découvrir. Le prochain chapitre lui est dédié.

251 « Hau it’s the breath of life, it carries everything. When the hau leaves the body it’s just the shell. Ko te hau tira, what goes around comes around. » (Waana Davis, 18/07/2016.)

vital essence or power. » (Best, 1974 [1924] : 80.)

Nous avons d’ores et déjà relevé l'importance du souffle dans l'ontologie māori au fil du récit de la création de la première femme Hine ahu one, sous l'action de Tāne Mahuta qui lui insuffla littéralement le souffle de vie (hau)252. Aussi, s’intéressant plus particulièrement aux

rapports entre le hau et la vie qui circule dans les différentes entités du monde Manuka Henare écrit :

« Hau, furthermore is a cosmic power and vital essence embodied in all persons

and things and often described as the very essence of vitality. It has an extraordinary range of applications and when considered in termes of its relationships, it can be seen as ‘part of life’, which influences the whole. When applied to all aspects and dimensions of the natural world, it is a life force, which is closely linked to the mauri [force de vie]. Its purpose is toward goodness. All rivers, lakes, oceans, forests, mountains have this life principle that must be protected by good acts and nurtured because of the association with food and other supplies. The hau of the tribal land and forests is their vitality and fertility, which are also signs of their mana, their honor, prestige, and power. However, if they are not cared for, or are neglected or abused, the land can be rendered infertile and the forest unproductive. » (Henare, 2001 : 211.)

Il poursuit ensuite son exposé en insistant sur la responsabilité des humains dans la préservation des forces vitales que sont le hau et le mauri aujourd’hui :

« Denial of the responsibilities of guardianship over creation, and being unable to nurture and feed both the life forces (mauri and hau) of the diverses substances and forms of creation, has profound implications both for humans and nature. The obligatory reciprocity between humanity and the natural world has not occurred and the spirit, wairua, of the region is sick — an illness which manifests itself in poor production, high unemployment and other social ills of the century just past.

[ … ] According to the tribunal [of Waitangi] a set of criteria underlie Māori

thinking on the resources of the environment and constitute the rules that ought to govern the human behavior in the environment. They are: a reverence for the total creation as one whole; a sense of responsibility for these gifts (taonga) as the appointed stewards and guardians; a distinctive economic ethic of reciprocity; and a sense of commitment to safeguard natural ressources for future generations. These criteria were reiterated in a further development when claimants articulated a set of core values, which the tribunal recognized as conceptual regulators with land rights and communal obligations when applied to the environment and land. »

(Henare, 2001 : 212-213.)

Anne Salmond précise cette définition du hau comme « source de vie », dans son texte de soutien à la revue Hau253, en écrivant :

« In Maori ontology, hau is the source of life. When the world began, a burst of

energy generated thought, memory and desire. Desire made knowledge fruitful, and from knowledge came the Pō, the realm of ancestors, and the Kore, the ‘seedbed of the cosmos’. It was not until hau, the wind of life, blew that the phenomena of the everyday life could emerge, impelled by exchange in spiraling n e t w o r k s o f relations. » (Salmond,

http://www.haujournal.org/index.php/

/pages/view/endorsementshau , page crée le 9

avril 2012.)

Au regard de ces informations, j’émets l’hypothèse que le hau, en tant que source de vie, peut être envisagé comme un vent qui se fait souffle, une énergie vitale qui circule et fait lien. Le

hau est le souffle de vie, c’est-à-dire la circulation de l’énergie vitale. En tant que tel, c’est un

élément qui rythme les relations qu’entretiennent les humains entre eux et avec le monde qui les entoure, en particulier leurs ancêtres proches ou éloignés. Dès lors, du point de vue māori, l'énergie vitale qui circule (hau) est créatrice et dynamique, mais pour le souffle perdure elle doit être alimentée et protégée de diverses manières.

Qu’est-ce que le « souffle » ?

Dans Au commencement était le rythme, Arthur Maurice Hocart écrit à propos du souffle : « On suppose que certaines substances sous-tendraient le phénomène de la vie. Le vocabulaire des langues aryennes montre que ceux qui les parlaient jadis identifiaient cette substance avec le souffle. Les Indiens l'appelaient atman, respiration ; en latin, c'est anima, qui est identique au grec anemos, le vent. Aristote appelait ce principe le « souffle », et les auteurs du Nouveau Testament utilisèrent le même mot pour désigner l'Esprit Saint, conçu comme un vent. La plupart d'entre nous ont renoncé à ces notions, mais nous continuons à utiliser le mot « esprit » qui, étymologiquement, veut dire « souffle ». » (Hocart, 2005 [1954] : 150.)

Ces données peuvent expliquer certaines confusions entre le souffle de vie (hau) et l’esprit (wairua), ce qui semble avoir conduit Mauss vers « l’esprit de la chose donnée » plutôt que vers la circulation de l’énergie vitale sous forme de souffle.

Dans l’univers relationnel māori, le souffle est essentiel et son importante est frappante lors 253 Cette citation apparaît dans l’article de 2012 de Serge Tcherkézoff sur le don polynésien, que nous étudierons plus

des cérémonies d'accueil (pōwhiri) et d'adieu (poroporoaki) sur l'espace de réunion clanique ou tribal (marae), en particulier lors du salut māori (hongi). Nous l'avons vu dans le premier chapitre, le salut māori consiste à prendre le temps de partager une respiration avec un autre humain pour faire connaissance, nez contre nez en se serrant la main et, généralement, en fermant les yeux pour se concentrer sur l’échange qui est en train de se produire. En prenant le temps de partager un rythme commun basé sur le souffle, les humains créent du lien, entretiennent des relations, se (re) connaissent. La géographe Anne-Marie Fixot, qui a beaucoup contribué à la revue du MAUSS, utilise la notion d’eurythmie pour faire référence à ces instances où :

« En clé de « rythmes », la sollicitude devient de l’eurythmie qui exprime à la fois « un mouvement bien fait » et « un mouvement qui fait du bien » [Michon, 2008]. Cela nécessite de prendre le temps de se mettre au rythme de l’autre, chacun vivant dans des temporalités multiples, mais pas toutes harmoniques en même temps. Le rythme, comme scansion et articulation, est aussi organisateur de la force des hommes. » (Fixot, 2010 : 275.)

On retrouve ici un principe du salut māori qui consiste à partager un rythme de manière « eurythmique ». Dans ce même ordre d’idée, lors de grandes cérémonies sur le marae au moment des points culminants du rituel, lorsqu’il faut parler, chanter, danser ou pleurer, les participants invoquent et incarnent le souffle de vie, la présence ancestrale, non seulement par leur présence, leur respiration, leur parole, mais aussi par des mouvements de mains latéraux très rapides, qui génèrent un tremblement plus ou moins fort en fonction des circonstances et de la charge émotionnelle de la personne. Tremblement nommé wiri en māori et que l’on retrouve lié au souffle de vie, notamment lors des rituels funéraires.

Lors des funérailles (tangihanga) et dans d'autres contextes cérémoniels

Tout au long du cycle funéraire (tangihanga)254 — dont je reparlerai à plusieurs reprises

puisque les manteaux māori y sont fréquemment mobilisés —, des femmes et parfois des hommes arborent une couronne de feuilles vertes255 (rau kawakawa) qu’ils placent sur leur tête en signe de

deuil au début de la cérémonie. D’après mes interlocuteurs māori, les feuilles que l’on tient à la main ou que l’on porte sur la tête lors des moments rituels, accompagnées de mouvements de mains et du souffle du vent représentent le souffle de vie, la circulation de l'énergie vitale : le hau.

En général, ce sont les pleureuses (kiri mate, pae mate ou encore tangihuna) qui sont 254 Annexes : II.5.4 Funérailles de la reine māori Te Arikinui Dame Te Atairangikaahu en 2006 ; IX.12.1 Funérailles

de la reine māori Te Arikinui Dame Te Atairangikaahu.

255 Feuilles de couleur vert clair en forme de cœur issues d’un arbuste rattaché à la famille des macropiper, pepper tree, Macropiper excelsum en latin, dont les Māori mangent les baies, mais dont l’utilisation des racines ne produit pas les effets narcotiques que l’on connaît à son cousin le Piper methysticum ou Kava. En signe de deuil, peuvent se substituer aux feuilles de kawakawa, des branches de fougères, ou tout autre feuillage vert.

coiffées de ces couronnes de feuilles. Situées aux côtés des proches du défunt, elles sont les premières à exprimer leurs émotions ostensiblement (Metge, 1974 : 264). Par leurs pleurs et leurs lamentations, elles contribuent (koha) au bon déroulement de la cérémonie. Elles invitent ainsi accueillants et invités à partager le deuil et à accompagner le défunt dans son ultime voyage256

(Henare, 2001 ; Salmond, 1975). Dans ce contexte, pleurer relève d’un acte hautement ritualisé (Allard, 2014 ; Beaglehole & Beaglehole, 1945 ; Patton & Hawley, 2005 ; Salmond, 1975 ; Witi, 1989).

D'après mes observations, le rôle joué par les femmes, lors des rites funéraires — notamment dans l’expression des émotions —, est multiple257. Les pleureuses ne représentent pas la

tristesse, ou la peine ; elles la deviennent. Elles sont la peine, parce qu’elles en ont l’obligation sociale. Se faisant catalyseur des émotions, elles encouragent leur partage et leur mise en scène. Les pleureuses deviennent des intermédiaires entre les différents participants, vivants et morts, accueillis et accueillants. Elles tissent ainsi des liens sociocosmiques en témoignant de la présence des ancêtres venus eux aussi apporter leur soutien au défunt et aux vivants et elles permettent, tout en l’incarnant physiquement, à la vie de circuler (hau) et de reprendre le dessus sur la mort.

Dans un article sur les rituels funéraires, l’anthropologue Gilles Pornin propose une analyse de la disparition du souffle qui offre des pistes de réflexion intéressantes :

« Avec le verbe disparaît bientôt le souffle. De ce cordon oral au monde, tressé des trois torons du souffle, de la parole et de la nutrition ne subsiste que cette dernière. Or, les offrandes au défunt s’accompagnent de soupirs, de lamentations et de paroles : le rite d’oblation déplore, loue le défunt, questionne sur la cause et le destin post-mortem. Le recours à la nourriture cherche peut-être ainsi à réactiver le souffle et la parole du défunt afin de reconstituer la plénitude de l’oralité. […] Or, nous regardons la respiration et la parole comme des indices primordiaux de la vie ; que la parole s’éteigne, que la respiration devienne plus difficile et plus tenue, et nous pressentons l’imminence de la fin. […] Songeons que, symboliquement aussi, la parole qui sort du corps est expression de soi, que la respiration alterne entrée et sortie — donc échange — tandis que la nutrition est incorporation du monde, amplification et bénéfice. » (Pornin, 2015 : 159-160, 163.)

Cette relation entre parole, respiration et force vitale où souffle, soupir et lamentation crée du lien s’exprime ostensiblement par l’action des pleureuses dans les rituels funéraires māori et se 256 Les Māori considèrent en effet que le défunt parcourt un chemin prédéterminé pour rejoindre l’au-delà de la vie, passage qui le mène jusqu’à la pointe nord de l’île du nord de la Nouvelle-Zélande, le cap Reinga où son wairua s’enfonce dans les profondeurs abyssales pour rejoindre le domaine d'Hine nui te po, l’ancêtre tutélaire de la nuit qui vieille sur ses enfants, les défunts.

257 Annexes : II.5.4 Funérailles de la reine māori Te Arikinui Dame Te Atairangikaahu en 2006 + II.12.Restitution de restes humains māori.

retrouve dans d’autres instances. La narration dansée (haka)258, la récitation des généalogies

(whakapapa) qui ont lieu sur le marae, ou encore le tissage (whātu) qui s’opère à l’extérieur du

marae, sont autant de moments où les rythmes contribuent à l’organisation du monde. Ainsi, en

donnant de son souffle, une part de soi à travers ses gestes, et parfois sa voix, son intonation et son émotion, le danseur, l’orateur et la tisseuse génèrent un rythme, une dynamique qui se détache de la vie de tous les jours, concourant à engager des relations avec les ancêtres. En d'autres termes, les rythmes permettent de faire de certains instants des moments d'exception, de tension aussi. Des moments où vivants, morts, ancêtres proches et éloignés peuvent interagir.

Dans la littérature scientifique, les écrits de Mauss sur le rythme (1904, 1921, 1936, 1947, 2012 [1924]) font écho à certains rituels que j’ai observés sur le terrain et dont il sera question ensuite. Notamment lorsqu’il écrit :

« L’émission de voix, le souffle lui-même y sont conçus rigoureusement comme un geste : le magicien enchante par son inspiration et son expiration ; son souffle, le son de ses mots, leur rythme, sont sa force et son âme, et sont aussi quelque chose de matériel. » (Mauss, 1921 : 121.)

Le philosophe français Pascal Michon insiste lui aussi sur le souffle dans l’efficacité rituelle :

« L’incantation magique ou rituelle, la prière, ne doivent pas être réduites aux paroles, ni même aux sons inarticulés qu’elles contiennent. Il existe en fait, en deçà et au-delà du niveau linguistique proprement dit, toute une gradation continue d’autres niveaux signifiants qui participent à son effet pragmatique. Aux paroles, il faut aussi ajouter d’un côté, les souffles, inspirations et expirations, et de l’autre, les gestes collectifs qui les accompagnent et qui sont en continuité avec elles grâce au rythme auquel ils participent. […] Ainsi le rythme, parce qu’il prolonge la profondeur des corps sur le plan social, participe à la reproduction de la cohésion du groupe que forment ces corps. […] Un système social constitue en effet, non seulement un tissage complexe d’appartenances et de divisions entrecroisées, mais aussi un tissage toujours en train de se faire suivant un rythme temporel au cours duquel ces appartenances et ces divisions se relâchent et se resserrent alterna- tivement. […] Entre ces périodes faibles du rythme social se produisent des périodes extrêmement intenses, où le tissage de la cohésion sociale se régénère lors de concentrations sociales, de fêtes, de potlatch, de cérémonies diverses. C’est le moment où de nouvelles alliances entre groupes sont convenues, où les échanges se multiplient. […] Ainsi Mauss n’observe-t-il pas tant une totalité, présupposée existante, portée par un principe dynamique tout-puissant et indéfini, que des 258 Annexe V.5. Kapa haka.

phénomènes qui mettent en mouvement l’ensemble de la société et lui donnent une réalité. La société constitue moins une totalité en mouvement qu’elle ne devient totalité grâce à ce mouvement et à l’intégration de la liberté et de la contrainte que celui-ci permet. […] « Socialement et individuellement, l’homme est un animal rythmique. » (Mauss, 1947 : 85). » (Michon, 2005 : 419, 420, 422, 426-428, 430, 433.)

Enfin, Fixot met en valeur l'importance des rythmes et des dynamiques dans les relations sociales, voire dans les relations sociocosmiques qui, à la suite de Mauss, sont souvent englobées sous la notion « d’esprit du don » en ces termes :

« Penser le paradigme de « l’esprit du don » sur le mode d’une pulsation qui propulse toute relation dans des cycles de fréquences et d’intensités variables d’accélération et de décélération. […] Ainsi, c’est sans doute parce que le don est rythme qu’il a parmi d’autres composantes, celle de l’obligation. […] L’idée de rythme comme art de marquer et de structurer en commun le temps induit et implique celle de mouvement et de séquence, animés par le rôle moteur de l’énergie. La réciprocité, qui suppose à la fois l’alliance et la distance, résulte de ces échanges coexistants d’énergie. Dans cette perspective, le don comme convertisseur d’énergies, ayant un rôle d’alternateur et de commutateur, fait jouer et battre ensemble les rythmes du monde. » (Fixot 2010 : 273-274, 278.)

Cette importance du souffle, du rythme, de la dynamique et de l’énergie vitale résonne particulièrement sur le terrain en Nouvelle-Zélande Aotearoa. Là, chaque instant qui participe de la circulation des manteaux de prestige semble propice à faire circuler l’énergie vitale (hau). Ceci qu’il s’agisse de leur fabrication ou de leurs circulations entre clans et générations qui sont rythmées, tout comme peut l’être l’obligation de rendre (utu) . L e souffle et les rythmes agissent aussi directement dans la circulation des manteaux māori à la fois dans le contexte māori et dans l'univers muséal. Source et signe de vie, chez les Māori, le souffle se fait danger pour le personnel des musées parce qu’il est susceptible d’aggraver la détérioration des fibres si fragiles des manteaux māori présents dans les collections muséales259.

Les chapitres 8 à 12 seront l’occasion de revenir sur ces différentes notions en questionnant plus précisément celle de mauri qui est si souvent associée au hau ainsi que l’importance du rythme dans le processus créatif des manteaux. Auparavant, je souhaite prolonger ma présentation du système d'échange māori par la question de l'inaliénabilité des trésors ancestraux que l'anthro- pologue américaine Annette Weiner avait proposée dans les années 1990.

259 Ce décalage entre deux domaines de circulation distincts des manteaux māori en qualité de taonga sera brièvement évoqué dans cette thèse. Toutefois, je prévois d’en proposer une analyse plus précise a posteriori.

Les taonga qui circulent, des possessions inaliénables ?

Weiner écrit des taonga qu’ils peuvent être considérés comme des « possessions inaliénables » (Weiner, 1992 : 49). En d’autres termes, qu’il leur est possible de circuler tout en restant attachés à leur premier destinataire. Incontestablement, les taonga acquièrent des valeurs (sociales, historiques, ancestrales, artistiques, etc.) au fil du temps et au contact des humains et